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Décisions

CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 25 janvier 1995, n° 73-95

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

UFC Que Choisir, URCOPACA

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ellul

Conseillers :

Mme Mc Coux, M. Bergez

Avocat :

Me de Sermet.

CA Aix-en-Provence n° 73-95

25 janvier 1995

S Aorel est prévenu de:

- non-respect de certaines normes de commercialisation applicables aux oeufs

- tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé de l'homme ou de l'animal

- non-retrait de denrée animale ou d'origine animale altérable impropre à la consommation, périmée

- non-respect des normes microbiologiques imposées à certaine denrée animale ou d'origine animale

Les appels:

Appel a été interjeté par:

Monsieur S Aorel, le 6 mai 1993

M. le Procureur de la République, le 10 mai 1993 contre Monsieur S Aorel

Décision:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Selon jugement contradictoire à signifier en date du 19 février 1993 le Tribunal correctionnel de Grasse a déclaré S Aorel coupable d'avoir:

1°) à Saint-Laurent-du-Var, le 4 novembre 1989, trompé ou tenté de tromper le contractant sur la nature, l'espèce ou l'origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principes utiles de la marchandise vendue, soit sur l'aptitude à l'emploi, les risque inhérents à l'utilisation du produit, les contrôle effectués, les modes d'emploi ou les précautions à prendre en l'espèce sur les qualités substantielles, risques inhérents à l'utilisation de 32 cuisses de dinde, un pâté, un morceau de galantine, un rôti de porc, avec cette circonstance que le délit a eu pour conséquence de rendre l'utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l'homme ou de l'animal;

infraction prévue et réprimée par l'article 1er de la loi du 1er août 1905;

2°) à Saint-Laurent du Var, le 4 novembre 1989

commis les contraventions connexes

- détenu des denrées animales ou d'origine animale telles que visées à l'article 1er du Décret 71-636 du 27 juillet 1971 et à l'article 1 de l'arrêté du 1 juillet 1974 portant sur l'étiquetage ou le conditionnement une date limite de consommation dépassée à la date du contrôle effectué par l'inspection sanitaire (68 infractions) (articles 1, 2 et 3 de l'arrêté ministériel du 9 août 1979)

- détenu et utilisé du matériel sale et mal entretenu dans un atelier de découpe des viandes (articles 19 et 20 arrêté ministériel du 18 juillet 1977);

- commercialisé des oeufs sans emballage et sans identification du centre d'emballage (article 20 du règlement CEE 2772-75);

- commercialisé des oeufs fêlés, cassés et souillés (articles 7, 8 et 9 du règlement 2772-75 du conseil des CEE);

et l'a en conséquence condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et 76 amendes de 1 000 F chacune. Par ailleurs le tribunal recevant l'Union fédérale des consommateurs (UFC 06) et l'Union Régionale des Consommateurs de la Région PACA (URCOPACA) et leur constitution de parties civiles, l'a encore condamné à chacune une somme de 3 000 F à titre de dommages et intérêts outre 1 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. La publication de cette décision ayant par ailleurs été ordonnée dans le Journal Nice Matin (coût maximum 6 000 F);

Par déclaration au greffe du Tribunal de grande instance de Grasse en date du 6 mai 1993 appel de ce jugement a été relevé par le conseil du prévenu;

le 10 mai 1993 le Ministère public a formé appel incident;

Régulièrement cité à sa personne le 29 septembre 1994 pour voir être statué sur ces recours à l'audience du 23 novembre 1994 S a comparu assisté de son conseil lequel a déposé des conclusions aux termes desquelles il est demandé à titre principal;

- de constater "la non-application de la loi du 1er août 1905 aux faits reprochés et lui substituer le Décret du 7 décembre 1984,

- de constater la prescription de l'action publique;

- de relaxer S des fins de la prévention;

A titre subsidiaire il a été plaidé l'indulgence de la cour;

Le Ministère public a requis confirmation du jugement déféré;

l'URCOPACA et l'UFC 06 régulièrement citées n'ont pas comparu et n'ont pas été représentées;

Sur ce LA COUR,

Attendu que le jugement querellé ayant été signifié à S le 3 mai 1993 l'appel relevé au nom de celui-ci le 6 mai 1993 et par le Ministère Public le 10 mai 1993 doivent être déclarés recevables;

Attendu que l'URCOPACA et l'UFC 06 n'ayant pas été représentées aux débats l'arrêt sera rendu par défaut à leur égard;

Attendu qu'en ce qui concerne les faits reprochés à S (déjà condamné le 18 janvier 1991 par le Tribunal correctionnel de Grasse) tels qu'ils résultent de la procédure et des débats, il échet de rappeler ce qui n'est nullement contesté par celui-ci que lors d'un contrôle effectué le 4 novembre 1989 en sa présence par des agents des services vétérinaires des Alpes Maritimes au magasin X de Saint-Laurent-du-Var placé sous sa direction (ainsi qu'il l'indiquait alors) il a été découvert notamment dans la vitrine du rayon boucherie en exposition à la vente 32 cuisses de dinde "en promotion" d'un poids total de 22 kg déconditionnées, sans étiquetage (alors que selon les déclarations du chef boucher présent sur les lieux la date limite de vente réglementaire était le 3 novembre 1989) ainsi qu'un pâté sans étiquetage, un morceau de galantine et un rôti cuit (dont la date de consommation limite était fixée au 29 octobre 1989);

Attendu qu'il ne saurait être sérieusement contesté que l'ingestion par l'homme de denrées dont la date limite de consommation est dépassé peut entraîner des risques pour la santé ; que dès lors de tels agissements tombent contrairement à ce que soutient le prévenu sous le coup de l'article 1er de la loi du 1er août 1905 qui réprime quiconque aura trompé le contractant sur les risques inhérents à l'utilisation du produit; que c'est donc à juste titre que le Tribunal correctionnel de Grasse a déclaré S, se disant au moment de l'interpellation Directeur du magasin (ce qui a été confirmé par Guillaume Patrice PDG du Groupe) et qui n'allègue aucune délégation de ses pouvoirs à un tiers, coupable de ce chef de délit et l'a condamné à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis peine justifiée en l'état de ses antécédents judiciaires;

Attendu que d'autre part S ne conteste pas plus que lors du contrôle les agents ont découvert de très nombreux autres produits divers (68) dont la date limite de consommation était dépassée, qu'il utilisait du matériel sale et mal entretenu (6 infractions relevées) dans l'atelier de découpe de la viande et qu'il commercialisait aussi des oeufs souillés d'excréments cassés ou fêlés (pouvant être à l'origine de graves toxi-infections alimentaires) sans conditionnement et sans identification (deux autres contraventions) autant de contraventions prévues et réprimées par les arrêtés ministériels du 3 août 1979, 18 juillet 1977 Décret 71-636 du 21 juillet 1971, article 258, 259, 262 du Code rural, 7, 8, 9, 20 du règlement CEE n° 2772-75 du 29 octobre 1975 ; que les investigations s'étant déroulées jusqu'au 24 mai 1991 (date du soit transmis du Procureur de Grasse en vue de faire rechercher et entendre S) et la citation ayant été délivrée le 15 novembre 1991 c'est encore en vain qu'il est soutenu que lesdites contraventions seraient prescrites;

Attendu qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré S coupable d'avoir commis 76 contraventions aux règlements applicables et visés à la prévention ; que toutefois en l'état des renseignements de personnalité, portés à la connaissance de la cour il convient d'infirmer le jugement déféré sur le taux des amendes infligées et de condamner S à 76 amendes de 500 F chacune;

Attendu que s'il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a alloué à l'URCOPACA et l'UFC 06 la somme de 1 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale en revanche la décision sera infirmée sur le montant des dommages-intérêts que serait ramené à la somme symbolique de 1 F, celles-ci ne prouvant pas le préjudice particulier qu'elles auraient subi du fait des infractions commises par le prévenu;

Attendu que S ayant été licencié il n'apparaît pas opportun de prononcer à son égard la publication de l'arrêt ; que la décision déférée sera infirmée sur ce point;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et par arrêt contradictoire à l'égard de S et par défaut à l'égard de l'UFC 06 et l'URCOPACA, en matière correctionnelle; Déclare les appels recevables en la forme; Au fond, 1°) sur l'action publique: Confirme sur la culpabilité; Confirme sur la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis pour le délit de fraude dont S a été déclaré coupable; Infirme sur les peines prononcées pour les contraventions et statuant à nouveau; Condamne S à 76 amendes de 500 F chacune; Dit n'y avoir lieu à publication de la décision de condamnation; 2°) Sur l'action civile: Infirme la décision sur les dommages-intérêts alloués à l'UFC 06 et l'URCOPACA et statuant à nouveau condamne S à leur payer à chacune la somme de 1 F; Confirme la décision déférée en ce qui concerne les sommes allouées au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Dit qu'en application des dispositions de l'article 473 du Code de procédure pénale modifié par la loi 93-2 du 4 janvier 1993, la contrainte par corps s'exercera conformément aux dispositions des articles 749 et suivants du Code de procédure pénale; Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.