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Décisions

Cass. crim., 11 février 1987, n° 86-93.000

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Douai, 4e ch. , du 24 avr. 1986.

24 avril 1986

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : - L. B. - contre un arrêt de la Cour d'appel de Douai, 4ème Chambre, en date du 24 avril 1986 qui pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, l'a condamné à une amende de 5 000 francs et à des réparations civiles ; Vu le mémoire produit ; Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1er de la loi du 1er août 1905 , 4 et 7 du décret du 4 octobre 1978, 2, 3, 485, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ; "en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré L. coupable du délit de tromperie qui lui est reproché et l'a condamné à une amende et à diverses réparations civiles ; aux motifs que F. a acheté le 14 décembre 1981 à la société C. dont L. était le président-directeur général une voiture BMW présentée comme étant en bon état et ayant parcouru 52 000 kms ; qu'une expertise privée lui apprenait que le véhicule avait parcouru un kilométrage beaucoup plus long, l'enquête ultérieurement menée révélant que le compteur avait été remplacé sans que l'indication du kilométrage alors affiché par cet appareil soit reporté sur le nouveau compteur ; que le prévenu a déclaré à l'audience du tribunal correctionnel qu'il ne s'était pas occupé de cette vente et avait demandé à un de ses subordonnés T. d'y procéder ; qu'il n'est pas contesté que ce dernier étant entré au service de la société C. après le changement du compteur il avait ignoré celui-ci ; que de l'examen du contrat de travail conclu le 6 avril 1981 entre la société et T. embauché comme technicien, il résulte que ce dernier n'avait pas à prendre notamment en dehors de ses fonctions essentielles des initiatives personnelles notables ; qu'il apparaît que la vente du véhicule et ses modalités n'ont pu être décidées que par le prévenu ; que ce dernier ne saurait d'autre part trouver une immunité dans les nombreuses fonctions qu'il allègue mais qu'il a à tout le moins librement acceptées ; attendu qu'ainsi le délit reproché à L. apparaît pleinement constitué et imputable au prévenu ; alors d'une part que la loi du 1er août 1905 n'institue aucune présomption de mauvaise foi ; que l'arrêt doit être censuré en ce qu'il ne constate pas expressément et ne caractérise nullement la mauvaise foi du président-directeur général de la société C., ses propres constatations tendant au contraire à l'exclure ; alors d'autre part que l'arrêt ne pouvait imputer au prévenu les conséquences d'un changement de compteur irrégulièrement effectué, les obligations définies par le décret du 4 octobre 1978 incombant en ce domaine "à la personne effectuant le changement" c'est-à-dire au garagiste ce qu'avait expressément constaté le tribunal pour prononcer une relaxe ; alors enfin que l'arrêt ne pouvait s'abstenir de répondre aux motifs du jugement réformé excluant toute fraude du fait que malgré l'erreur commise le véhicule litigieux, une BMW de haut de gamme avait été vendu 40 000 francs, valeur inférieure de 14 900 francs à sa valeur Argus en tenant compte du kilométrage réel" ; Vu lesdits articles ; Attendu que la tromperie , pour être punissable au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1905 , doit résulter d'une intention frauduleuse ; qu'il appartient aux juges du fond de constater les circonstances d'où se déduit la mauvaise foi du prévenu ; Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que F. a acheté à la société C. dont L. était le président-directeur général, une voiture automobile présentée comme étant en bon état et ayant parcouru 52 000 kilomètres ; que, par la suite, une expertise et une enquête ont révélé que ce véhicule, sur lequel ont été effectuées diverses réparations, avait un kilométrage trois fois supérieur à celui indiqué lors de la vente et que le compteur avait été remplacé sans que le chiffre des kilomètres déjà parcourus ait été reporté sur le nouvel appareil ;

Attendu que pour infirmer le jugement de relaxe prononcé par les premiers juges et condamner L. du chef de tromperie , la Cour d'appel, se bornant à répondre à l'argument du prévenu selon lequel celui-ci ne s'était pas occupé de la vente du véhicule litigieux et avait chargé l'un de ses employés d'y procéder, énonce que cet employé ignorait le changement de compteur et "n'avait pas à prendre, notamment en dehors de ses fonctions essentielles, des initiatives personnelles notables" ; qu'elle ajoute que "la vente du véhicule et ses modalités n'ont pu être décidées que par le prévenu" et qu'ainsi "le délit reproché à L. apparaît pleinement constitué et exclusivement imputable" à celui-ci" ; Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la Cour d'appel qui n'a pas caractérisé l'élément intentionnel du délit de tromperie dont le prévenu a été déclaré coupable, n'a pas justifié sa décision ; D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs : Casse et annule l'arrêt susvisé de la Cour d'appel de Douai en date du 24 avril 1986 et pour être à nouveau statué conformément à la loi, Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel d'Amiens, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;