Cass. crim., 13 janvier 2004, n° 03-80.563
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Le Corroller
Avocat général :
M. Chemithe
Avocats :
SCP Waquet, Farge, Hazan.
LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par la société "X", contre l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 11 décembre 2002, qui, dans la procédure suivie contre elle pour soldes en dehors des périodes autorisées, a confirmé le jugement l'ayant condamnée à 250 000 francs d'amende, et ayant ordonné une mesure de publication; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 310-3 et L. 410-2 du Code de commerce, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société X coupable d'organisation d'une opération de soldes en dehors des périodes autorisées, et l'a condamnée de ce chef, en prononçant également une mesure de publication;
"aux motifs qu'il est incontestable que l'opération se situait dans les deux semaines précédant immédiatement la période des soldes d'hiver, et que cette opération proposait des réductions s'appliquant à plus de 90 % de la marchandise exposée à la vente, la plus grande partie des articles présentés étant revêtus d'un double étiquetage portant mention du prix initial et du prix réduit; que la possibilité de réapprovisionnement à partir du dépôt central de la société, qui approvisionne l'ensemble des points de vente X, n'est pas exclusive de la qualification de soldes; que des publicités présentées sur des vitrines des deux magasins n'avaient pour unique effet que de persuader le chaland de ce que les annonces de réduction de prix portaient sur la plupart des vêtements exposés à la vente et comportaient, de ce fait, l'idée nécessairement suggérée par le dispositif publicitaire, pris dans son ensemble et dans sa cohérence, d'un objectif d'écoulement accéléré de ces marchandises en stock; qu'en outre, la mention "sur produits signalés", figurant sur les affiches publicitaires, tendait à prouver que seuls les articles exposés en magasin étaient concernés en dehors de toute possibilité ou volonté de commande, et que l'opération annoncée était limitée aux stocks disponibles dans le magasin; que la réunion de ces éléments permet de qualifier cette opération de vente en soldes avant la date légale;
"alors, d'une part, que ne peuvent être qualifiées de soldes que les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock; qu'en l'espèce les publicités comportant la mention "- 20 %, - 40 % et - 30 %, - 50 %, prix net, du 2 au 16 janvier 1999, sur produits signalés", si elles annonçaient une réduction de prix, ne faisaient nullement apparaître que le stock de marchandises mis en vente était prédéterminé et non renouvelable, et que les ventes tendaient à l'écoulement accéléré des marchandises en stock; qu'en retenant néanmoins la qualification de soldes, au motif inopérant que l'idée d'un déstockage était "nécessairement suggérée", la cour d'appel a violé les textes susvisés;
"alors, d'autre part, que la qualification de soldes ne pouvait pas davantage être déduite de la mention "sur produits signalés", cette mention se bornant à annoncer que tous les produits exposés ne sont pas concernés par l'opération de promotion, sans annoncer des ventes tendant à l'écoulement accéléré de marchandises en stock, non renouvelables; qu'en affirmant néanmoins, pour retenir la qualification de soldes, que la mention "sur produits signalés" tendait à prouver que l'opération était limitée aux stocks disponibles dans le magasin, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision;
"alors, enfin, qu'en se bornant à énoncer, par des motifs d'ordre général, que, pour un réseau intégré avec des points de vente multiples organisés pour une gestion centralisée des stocks avec approvisionnement des magasins à partir d'un dépôt central, la possibilité de réapprovisionnement des articles concernés par la réduction de prix n'était pas exclusive de la qualification de soldes, sans caractériser, à l'encontre de la société X, une opération de soldes constituée par des ventes annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock, la cour d'appel a violé les textes susvisés";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société X a organisé, dans les quinze jours précédant l'ouverture des soldes, une campagne publicitaire portant sur de nombreux articles de sa collection Automne-Hiver; que cette opération, annoncée par des panneaux apposés sur les vitrines de ses points de vente, mentionnant "- 20 % - 40 %" et "- 30 % - 50 %", ainsi que l'indication manuscrite "prix net, du 2 au 16 janvier 1999, sur produits signalés", visait plus de 90 % des articles exposés à la vente; que, poursuivie pour avoir réalisé des soldes en dehors des périodes autorisées, la société X a été déclarée coupable de délit prévu et réprimé par les articles 28 et 31 de la loi du 5 juillet 1996, devenus les articles L. 310-3, L. 310-5 et L. 310-6 du Code du commerce;
Attendu que l'arrêt retient que les publicités apposées sur les vitrines des deux magasins concernés avaient pour unique effet de persuader le consommateur de ce que les réductions de prix annoncées s'appliquaient à la plupart des vêtements exposés et qu'elles suggéraient nécessairement l'idée d'un objectif d'écoulement accéléré de ces marchandises en stock;que les juges ajoutent que la mention "sur produits signalés" tendait à montrer que seuls étaient concernés les articles exposés et que l'opération était limitée au stock disponible dans le magasin;qu'enfin, ils estiment indifférent que les publicités ne mentionnent pas le terme "soldes", dès lors que la société, informée de la législation en vigueur, s'est abstenue d'employer le mot, tout en suggérant aux consommateurs une opération d'écoulement accéléré du stock par l'effet d'importantes réductions de prix;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel a fait l'exacte application de la loi; d'où il suit que le moyen doit être écarté;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;
Rejette le pourvoi.