Ministre de l’Économie, 2 décembre 2002, n° ECOC0400019Y
MINISTRE DE L’ÉCONOMIE
Lettre
PARTIES
Demandeur :
MINISTRE DE L'ECONOMIE
Défendeur :
Directeur juridique de la société Covea Fleet
MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE
Monsieur le directeur,
Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 29 octobre 2002, vous avez notifié, pour le compte de la société Covea Fleet, l'acquisition par cette dernière de portefeuilles d'assurances de flottes d'automobiles d'au moins cinq véhicules auprès des sociétés MMA IARD SA et La Mutuelle du Mans Assurances IARD. Cette opération a été formalisée par une convention de cession signée le 31 juillet 2002.
I. - Les parties et l'opération
MMA IARD SA et La Mutuelle du Mans Assurances IARD font partie du groupe MMA (ci-après " MMA ").
Covea Fleet est une société d'assurances, spécialisée dans l'assurance de flottes automobiles. Depuis le début de l'année 2002, elle développe son activité également dans le domaine de services associés comme la maintenance et l'entretien de véhicules, la gestion de flottes (" fleet management "), l'assistance et la prévention. Elle est également présente dans le domaine de l'assurance IARD des professionnels du transport.
A la suite d'un apport récent de contrats d'assurances de flottes d'automobiles auprès de Covea Fleet, le groupe SMABTP (ci-après " SMABTP ") est entré dans le capital de cette dernière. Cette opération de concentration, notifiée au ministre chargé de l'économie, a été autorisée par ce dernier en date du 14 novembre 2002 (1). Depuis l'entrée de SMABTP dans le capital de Covea Fleet, MMA et le groupe MAAF (ci-après " MAAF ") détiennent respectivement environ 68,5 % et 22,7 % du capital de Covea Fleet (2). Selon un pacte d'actionnaires signé le 12 juin 2002, SMABTP relève du groupe d'actionnaires A, et MMA et MAAF relèvent du groupe B. Le groupe B nomme trois des quatre membres du directoire, ainsi que huit des douze membres du conseil de surveillance.
Bien que MMA détienne la majorité du capital de Covea Fleet, les parties estiment que MAAF exerce, avec MMA, un contrôle conjoint sur Covea Fleet.
Dans la décision précitée, le ministre avait relevé l'existence d'intérêts communs unissant MMA et MAAF, sans toutefois trancher la question de l'existence d'un contrôle conjoint de ces deux groupes sur Covea Fleet.
Il ressort des éléments complémentaires fournis par les parties que la volonté des dirigeants de MMA et MAAF est de favoriser de nombreux rapprochements entre les deux groupes sur le plan opérationnel, et que, lorsque ces rapprochements existent, les décisions importantes sont prises d'un commun accord.
Cette volonté de ne prendre les décisions importantes que d'un commun accord se retrouve au sein de Covea Fleet. En effet, selon le pacte d'actionnaires précité le conseil de surveillance doit approuver à la majorité simple (i) le budget, (ii) les grandes orientations stratégiques et (iii) la stratégie générale de tarification commerciale de Covea Fleet. Sur les huit sièges réservés au groupe B, il est prévu d'en attribuer six à MMA et deux à MAAF. Cette répartition de sièges envisagée au sein du conseil de surveillance montre que l'accord de MMA et de MAAF sera nécessaire pour que le groupe B, qui est majoritaire, soit en mesure de définir la politique et la stratégie de Covea Fleet.
Ces éléments permettent de conclure que MMA et MAAF exercent un contrôle conjoint sur Covea Fleet.
Par ailleurs, il ressort de l'instruction du dossier que Covea Fleet est une entreprise de plein exercice puisqu'elle accomplit de manière durable toutes les fonctions d'une entité économique autonome.
Les entreprises ou activités concernées par l'opération notifiée sont donc, d'une part, Covea Fleet et, d'autre part, les contrats d'assurances acquis par cette dernière.
L'opération notifiée a pour effet d'entraîner le contrôle sur plusieurs contrats d'assurance au profit de Covea Fleet. Cette opération constitue donc une concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce.
Pour apprécier si les seuils de chiffre d'affaires mentionnés par l'article L. 430-3 du Code commerce sont franchis par les entreprises ou activités concernées, il convient, conformément à l'article 2 du décret n° 2002-689 du 30 avril 2002, de calculer le chiffre d'affaires desdites entreprises ou activités selon les modalités de l'article 5 du règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil.
Sur ce fondement, le chiffre d'affaires de Covea Fleet résulte de la somme des chiffres d'affaires (i) de Covea Fleet, (ii) de MMA et (iii) de MAAF (3).
Au cours de l'année 2001, Covea Fleet a réalisé un chiffre d'affaires total d'environ 244 millions d'euros, exclusivement en France. MMA a réalisé en 2001 un chiffre d'affaires total consolidé de près de 3,6 milliards d'euros, dont 2,8 milliards en France. MAAF a réalisé en 2001 un chiffre d'affaires total consolidé de près de 2,2 milliards d'euros, exclusivement en France.
MMA apporte à Covea Fleet des contrats d'assurance de flottes automobiles ayant généré en 2001 un chiffre d'affaires de 50,59 millions d'euros, exclusivement en France.
Compte tenu des chiffres d'affaires des entreprises ou activités concernées, cette opération n'est pas de dimension communautaire et est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce, relatives à la concentration économique.
II. - Définition des marchés et analyse concurrentielle
Dans la décision précitée, le ministre a défini un marché des contrats d'assurance de flottes d'automobiles de dimension nationale. Pour les besoins de la présente décision le même marché sera retenu. Par ailleurs, bien que les parties identifient plusieurs marchés relatifs aux prestations associées à l'assurance de flottes d'automobiles, il n'est pas nécessaire de les définir précisément dans la mesure où la plupart des activités correspondantes sont à l'état embryonnaire et où Covea Fleet y détient des positions relativement faibles.
A la suite de l'opération, la part de marché de Covea Fleet seule passera d'environ 20 % à 24 %, ce qui fera de Covea Fleet le premier opérateur sur ce marché. Dans la décision précitée, le ministre a fait état, en matière d'assurance de flottes d'automobiles, de l'existence d'une concurrence significative émanant de groupes d'assurances importants. De même, le ministre a relevé l'existence de clients importants disposant d'un pouvoir de négociation significatif.
Par ailleurs, MAAF n'offre pas de produits d'assurance de flottes de véhicules en dehors des produits de Covea Fleet qu'il distribue.
Il apparaît donc que, à l'issue de l'opération de concentration visée, Covea Fleet, MMA et MAAF ne seront pas en position dominante sur le marché des contrats d'assurance de flottes d'automobiles.
Eu égard à ces éléments, Covea Fleet, MMA ou MAAF ne disposeront pas, via l'assurance de flottes d'automobiles, d'un levier qui pourrait leur conférer un effet de gamme en matière de prestations associées ou d'offre globale incluant ces dernières.
Il ressort de ces éléments que l'opération de concentration notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence sur les marchés concernés. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le directeur, l'expression de mes sentiments les meilleurs.
(1) Décision du 14 novembre 2002 relative à l'acquisition par Covea Fleet de Contrats d'assurance de flottes auprès de SMABTP et Sagena, en cours de publication au BOCCRF.
(2) Auparavant, MMA et MAAF détenaient respectivement 75 % et 25 % du capital de Covea Fleet.
(3) Voir également le point 38 de la communication de la Commission européenne sur le chiffre d'affaires (JOCE C 66 du 2 mars 1998, p. 25).