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Décisions

CA Versailles, 1re ch. sect. 2, 4 mars 2003, n° 01-07270

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Layouni

Défendeur :

Loca Din (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Chaix

Conseillers :

Mme Faivre, M. Clouet

Avoués :

Me Ricard, SCP Lissarague-Dupuis & Associés

Avocats :

Mes Guillemot, Gisserot.

TI Versailles, du 20 sept. 2001

20 septembre 2001

Faits et procédure:

Suivant acte en date du 8 décembre 2000, la société Loca Din a fait assigner Monsieur Layouni afin de le voir condamner au paiement de l'arriéré locatif d'un véhicule.

Par jugement contradictoire en date du 20 septembre 2001, le Tribunal d'instance de Versailles a rendu la décision suivante:

Condamne Monsieur Mohamed Layouni à payer la société Loca Din:

- la somme de 2 235,81 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 août 2000,

- la somme de 2 849,94 euros avec intérêts au taux légal à compter de la signification,

Autorise Monsieur Layouni à s'acquitter de sa dette par 23 versements de 228,67 euros et un 24e versement soldant la dette en principal frais et intérêts, les versements s'imputeront par priorité sur le principal,

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule mensualité à son échéance le solde sera aussitôt exigible,

Ordonne l'exécution provisoire du jugement, Dit n'y avoir lieu à l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, Condamne Monsieur Layouni aux dépens,

Par déclaration en date du 7 novembre 2001, Monsieur Layouni a interjeté appel de cette décision.

Monsieur Layouni estime que l'indemnité de résiliation constitue une clause pénale car elle aurait pour but d'obliger le preneur à assurer l'exécution de son obligation.

Il affirme à cet égard que cette clause est abusive car créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du non-professionnel.

Il considère également que la société Loca Din ne justifie d'aucun préjudice du fait de la résiliation du contrat ni du prix de revente du véhicule.

Monsieur Layouni demande donc en dernier à la cour de:

Dire que l'indemnité de résiliation prévue au contrat de location conclu entre la société Loca Din et Monsieur Layouni s'analyse en une clause pénale, en vertu de l'article 1152 du Code civil,

Dire que cette clause pénale est abusive au regard d l'article L. 132-1 du Code de la consommation et de la recommandation de la Commission des clauses abusives n° 96-02 du 14 juin 1996,

Par conséquent, dire que ladite clause est réputée non écrite,

Donner acte à Monsieur Layouni de ce qu'il reconnaît être redevable de la somme de 2 235,81 euros à l'égard de la société Loca Din,

A titre subsidiaire, Vu l'article 1152 du Code civil,

- dire que la clause pénale est manifestement excessive,

- dire et juger qu'au vu de l'absence de préjudice subi par la société Loca Din, la clause pénale sera purement et simplement supprimée,

en tout état de cause,

- condamner la société Loca Din à verser à Monsieur Layouni une somme de 762,25 euros au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

La société Loca Din estime que l'indemnité de résiliation ne constitue pas une clause pénale et, en conséquence, estime que le tribunal, qui a reconnu la même qualité à cette indemnité, n'aurait pas dû réduire le montant de cette indemnité de manière injustifiée.

Elle affirme que le juge aurait dû relever un excès manifeste entre cette indemnité et le préjudice subi par le bailleur et non une simple disproportion.

La société Loca Din prie donc en dernier la cour de:

Déclarer recevable mais mal fondé l'appel principal interjeté par Monsieur Mohamed Layouni,

Déclarer recevable et fondé l'appel incident formé par la société Loca Din

- Y faisant droit,

Réformant la décision entreprise,

Si la cour devait la qualifier de clause pénale, dire n'y avoir lieu à réduction de son montant dans la mesure où elle n'est pas manifestement excessive,

En tout état de cause,

Condamner Monsieur Mohamed Layouni à porter et payer à la concluante la somme de 5 695,55 euros avec intérêts au taux contractuel à compter du 17 août 2000.

La clôture a été prononcée le 12 décembre 2002 et l'affaire appelée à l'audience du 24 janvier 2003.

Sur ce, LA COUR

Considérant que par contrat en date du 24 février 1998, la société Loca Din a donné en location à Monsieur Mohamed Layouni, un véhicule de marque Peugeot Partner pour une durée de 36 mois moyennant un loyer mensuel de 418,39 euros.

Considérant que Monsieur Layouni qui a interrompu le paiement des loyers reconnaît être débiteur d'une somme de 2 235,91 euros; que le jugement qui l'a condamné au paiement de cette somme sera confirmé.

Sur l'indemnité de résiliation

Considérant que la clause du contrat qui fixe forfaitairement et à l'avance la sanction en cas d'inexécution du contrat par l'une des parties constitue une clause pénale au sens de l'article 1152 du Code civil et de l'article 1229 dudit Code.

Considérant que le contrat de location prévoit dans son article 8 c) que le loueur réclamera au locataire, outre les loyers impayés, ... une indemnité hors taxes correspondant à la somme de la valeur actualisée à la date de la résiliation du contrat des loyers non échus TVA incluse.

Considérant que l'article 8 c) du contrat de location qui met à la charge du locataire, du seul fait du manquement à ses obligations, une indemnisation du loueur égale à la valeur des loyers non échus, dont le mode de calcul est déterminé d'avance, constitue une clause pénale au sens de l'article 1152 du Code civil, ainsi que le soutient à juste titre Monsieur Layouni; que le jugement qui en a décidé autrement sera infirmé de ce chef.

Considérant que, selon la recommandation de la Commission des clauses abusives relative aux locations de véhicules, du 14 juin 1996, la clause qui impose au locataire de continuer à payer les loyers, même si le véhicule est immobilisé (alors que cette faute peut résulter d'une faute ou d'une négligence du loueur) est abusive dès lors qu'elle permet d'exiger un paiement sans contrepartie et l'exonère de l'exception d'inexécution.

Mais, considérant que l'article 5 c) du contrat prévoit qu'en "cas d'immobilisation, le loueur n'est pas tenu de fournir au locataire un véhicule de remplacement, même si le véhicule loué est immobilisé par suite d'un cas fortuit ou de force majeure. Le locataire ne pourra prétendre à aucune diminution du loyer de fait de cette immobilisation"; qu'en restreignant l'absence de fourniture de véhicule de remplacement par suite de cas fortuit ou de force majeure, le loueur a implicitement mais nécessairement accepté la fourniture d'un véhicule de remplacement en cas d'immobilisation en raison d'une faute ou d'une négligence commise par lui ou à défaut une diminution de loyer; que la clause figurant dans le contrat litigieux ne présente donc pas un caractère abusif.

Considérant que la Commission des clauses abusives reconnaît la légitimité des clauses pénales en cas de retard dans le paiement des loyers; que si elle précise que le contrat de location ne contient pas de clause pénale en faveur du locataire pour en déduire qu'il existe un déséquilibre contractuel en raison de la nature même de ce contrat, le déséquilibre existant ici n'est pas pour autant significatif;qu'en conséquence, la clause pénale qui impose au locataire de continuer à payer les loyers non échus ne présente pas un caractère abusif au sens de l'article L. 132-1 du Code de la consommation; que la contestation par Monsieur Layouni de sa validité sera, donc rejetée.

Sur la réduction de la clause pénale

Considérant que pour être réduite, la peine résultant de la clause pénale doit être manifestement excessive; qu'au cas d'espèce, elle s'élève à 3 459,69 euros qu'elle n'est pas excessive dès lors que s'ajoutant au produit de la vente dont Monsieur Layouni indique lui-même qu'il a été faible (5 945,51 euros), il a existé un manque à gagner certain et important pour la société Loca Din; que le montant de la clause pénale a pour objet de le compenser; que l'immobilisation du véhicule en raison d'un accident a eu lieu pendant trois mois de juillet à octobre 1998; que Monsieur Layouni a ensuite repris régulièrement le paiement des loyers jusqu'à la fin de l'année 1999, sans solder les impayés de loyer de l'année 1998.

Considérant que l'article 107 du décret du 31 juillet 1992 autorise la vente amiable du bien ayant fait l'objet d'une requête aux fins d'appréhension; que cette disposition ouvre au locataire une alternative à la vente forcée du véhicule; que le produit de la vente aurait pu alors être supérieur; que la somme due au titre de la clause pénale n'est pas excessive au regard des conditions d'exécution du contrat et de la vente; que la réduction de la somme due au titre de la clause pénale ne se justifie, donc pas et que la demande de ce chef est rejetée;

Considérant que l'équité commande d'allouer à la société Loca Din une somme de 500 euros par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

Considérant que l'appelant qui succombe supportera la charge des dépens.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant, publiquement, contradictoirement, en dernier ressort, Infirme le jugement entrepris, Dit que l'indemnité de résiliation prévue au contrat de location conclu entre la société Loca Din et Monsieur Layouni s'analyse en une clause pénale. Dit que cette clause pénale ne présente pas un caractère abusif. Condamne Monsieur Layouni à payer à la société Loca Din la somme de 2 235,91 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 août 2000, la somme de 3 459,69 euros avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision. Condamne Monsieur Layouni à payer à la société Loca Din la somme de 500 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Le Condamne aux dépens qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP Lissarague, Duputs & Associés, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.