Cass. com., 4 février 2004, n° 01-10.293
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
PHP (SARL)
Défendeur :
Solybo (SNC)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
M. Métivet
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, SCP Célice, Blancpain, Soltner.
LA COUR: - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 3e ch., 15 février 2001), que la société PHP, qui exploite un fonds de commerce de café bar, a souscrit le 21 janvier 1994 auprès de la société Solybo un contrat d'achat exclusif de boissons pour une durée de cinq ans; qu'en contrepartie, la société Solybo a constitué un versement de garantie entre les mains de la société France Boissons; que cette dernière société s'est constituée caution solidaire auprès de la société Brasseries Heineken au titre de l'emprunt souscrit par la société PHP auprès d'un établissement bancaire et pour lequel les Brasseries Heineken se sont portées cautions en contrepartie d'un engagement exclusif d'achat de bière souscrit le 27 avril 1994 par la société PHP pour une durée de sept ans; que, la société PHP ayant cessé de respecter ses engagements, la société Solybo a judiciairement demandé la résiliation du contrat du 21 janvier 1994 aux torts exclusifs de la société PHP pour rupture du contrat d'achat exclusif de boissons et la condamnation de celle-ci à lui payer une somme à titre de dommages-intérêts;
Sur le premier moyen pris en ses deux branches: - Attendu que la société PHP fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résiliation du contrat à ses torts exclusifs, alors, selon le moyen: 1°) que, lorsque l'objet d'un contrat dépend de l'existence et de l'efficacité d'un autre contrat, ou qu'un contrat n'a été conclu qu'en considération de l'existence d'un autre contrat, la résiliation du second entraîne la disparition par caducité du premier, auquel il est uni par un lien d'indivisibilité; que l'indivisibilité conventionnelle peut être tacite et résulter de ce que les contrats en présence ne pouvaient faire chacun l'objet d'une exécution distincte, c'est-à- dire partielle au regard de l'ensemble, point n'étant alors besoin qu'un accord exprès des parties soit intervenu sur ce lien; qu'en l'espèce, la référence du contrat PHP/Solybo à un contrat PHP/Heineken était acquise, et avait été expressément constatée par les juges du second degré; qu'elle imposait, alors, à la cour d'appel, par une analyse détaillée de leurs stipulations respectives, de s'interroger sur leur interdépendance ou la nature du lien qui pouvait les unir; qu'en se bornant à énoncer, péremptoirement, pour réformer le jugement entrepris qui avait constaté le caractère non causé du contrat du 21 janvier 1994, d'une part, que les contrats n'étaient pas de même durée et qu'à aucun moment il n'était fait allusion à un éventuel lien entre eux, d'autre part, que la cause de la convention passée par les sociétés PHP et Solybo consistait dans la fourniture par la société Solybo du dépôt de garantie convenu entre les parties, aucune possibilité de résiliation anticipée en cas de remboursement du prêt souscrit par le revendeur auprès d'un organisme bancaire n'ayant été convenu, la cour d'appel, statuant par des motifs dépourvus de pertinence, n'a pas procédé aux recherches qu'il lui incombait d'effectuer et de ce chef privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1184 du Code civil; 2°) que lorsque l'objet d'un contrat dépend de l'existence et de l'efficacité d'un autre contrat, ou qu'un contrat n'a été conclu qu'en considération de l'existence d'un autre contrat, la résiliation du second entraîne la disparition par caducité du premier, auquel il se trouve soudé par un lien d'indivisibilité; qu'après avoir énoncé, en l'espèce, que le contrat d'achat exclusif de boissons souscrit le 21 janvier 1994 entre la société Solybo (le fournisseur) et la société PHP (le revendeur) engageait le fournisseur à constituer, en faveur du revendeur, un dépôt de garantie remis à la société France boissons, société mère du fournisseur, laquelle se constituait caution solidaire au bénéfice de la société PHP auprès des brasseries Heineken, qui s'était elle-même portée caution, par un contrat du 27 avril 1994, de l'emprunt contracté par la société PHP auprès de la Banque Scalbert Dupont, la cour d'appel ne pouvait considérer que la cessation de la convention passée par la société PHP avec les Brasseries Heineken, consécutivement au remboursement anticipé de la dette garantie et à l'extinction du cautionnement qui en était l'accessoire, ne privait pas de cause le contrat du 21 janvier 1994, passé avec la société Solybo, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ces deux conventions n'étaient pas unies par un lien d'indivisibilité, de sorte que la résiliation de la première entraînait nécessairement la disparition par caducité de la seconde; qu'ainsi, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles 1131 et 1184 du Code civil;
Mais attendu que l'arrêt retient que les deux contrats d'achat exclusif n'étaient pas de même durée, qu'à aucun moment, il n'était fait allusion à un éventuel lien entre ceux-ci, que la cause du contrat résultait de la fourniture par la société Solybo du dépôt de garantie expressément convenu par les parties, qu'aucune possibilité de résiliation anticipée en cas de remboursement du prêt souscrit par le revendeur auprès d'un organisme bancaire n'était contenue dans le contrat litigieux et qu'en fournissant le versement de garantie, la société Solybo a apporté un avantage économique et financier réel au revendeur qui l'a expressément reconnu; qu'au vu de ces constatations, la cour d'appel qui en a déduit que la cessation de la convention du 27 avril 1994 souscrite par le revendeur auprès de la société Heineken ne privait pas de cause la convention du 21 janvier 1994 a légalement justifié sa décision;que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches;
Sur le second moyen: - Attendu que la société PHP fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer des dommages-intérêts à la société Solybo, alors, selon le moyen, que la cassation qui interviendra nécessairement sur le premier moyen entraînera la cassation du chef du dispositif visé dans le second moyen en application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile;
Mais attendu que le premier moyen ayant été rejeté, le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence est inopérant;
Par ces motifs: Rejette le pourvoi.