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Décisions

CA Rennes, ch. corr., 18 juin 1992, n° 911-92

RENNES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Casorla

Avocat général :

M. Couilleau

Conseillers :

Mme Algier, M. Le Corre

Avocats :

Mes Daugan, Masson.

TGI Brest, ch. corr., du 28 mai 1991

28 mai 1991

Statuant sur les appels interjetés le 6 juin 1991, par le Ministère public et par la partie civile le 11 juin 1991, d'un jugement contradictoirement rendu le 28 mai 1991, par le Tribunal correctionnel de Brest qui a relaxé Marie-Claire D et François L des fins de la poursuite engagée à leur encontre du chef de tromperie sur les qualités substantielles d'un véhicule automobile,

Et, sur l'action civile, a débouté Mme Gillmann de ses demandes;

Considérant que les appels sont réguliers et recevables en la forme;

Considérant qu'il est fait grief aux prévenus d'avoir:

- à Brest, le 13 octobre 1989, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription, trompé ou tenté de tromper Mme Gillmann sur les qualités substantielles du véhicule Innocenti 990 SL en le prétendant de l'année modèle 1990 alors qu'il s'agissait d'un véhicule de l'année modèle 1989;

fait prévu et réprimé par l'article 1er de la loi du 1er août 1905.

Considérant qu'il ressort du dossier et des débats les éléments suivants:

Le 13 octobre 1989, Mme Gillmann a acheté un véhicule automobile Innocenti 990 SL auprès de la société X dont le gérant était Mme D;

Ce véhicule a été soumis à un contrôle technique qui révèlera qu'il s'agissait d'un véhicule modèle 89 alors qu'il avait été vendu selon le tarif applicable au modèle 90. De plus, la puissance du moteur "modèle 90" était supérieure à celle du "modèle 89";

Ce véhicule avait été acheté le 22 août 1988 auprès du constructeur, par la SARL Y dont le gérant est François L, puis revendu le 13 octobre 1989 à la société X dont Mme D est gérante et acquis le même jour par Mme Gillmann;

Le millésime 89 ne figure que sur la facture établie entre le constructeur et Y. aucune mention ne sera portée sur les documents établis d'une part, entre Y (concessionnaire de la marque) et X (agent de la marque) et d'autre part, entre X et Mme Gillmann;

Sur l'action pénale

Considérant que Mme Gillmann a eu pour seul co-contractant la société X; qu'elle n'a eu de contacts avec Y que postérieurement à un dépôt de plainte dans le cadre d'un règlement amiable du litige; qu'aucun document émanant de Y n'a été remis à Mme Gillmann lors de l'achat du véhicule; que M. L n'a donc pas participé aux faits de tromperie au préjudice de Mme Gillmann;

Considérant par contre que Mme D, en sa qualité de vendeur professionnel, ne peut se prévaloir de l'ignorance des caractéristiques techniques du véhicule qu'elle vendait et des règles d'attribution des millésimes; qu'en s'abstenant d'informer exactement Mme Gillmann sur les éléments essentiels du véhicule, Mme D s'est rendu coupable d'une tromperie à l'égard de la victime qui, s'agissant d'un modèle de l'année précédente, pouvait prétendre à une réduction de prix ou renoncer à l'achat;

Considérant qu'il y a donc lieu de confirmer par substitution de motifs le jugement attaqué dans ses dispositions concernant M. L et de l'infirmer à l'égard de Mme D;

Considérant que Mme D doit être déclaré coupable de l'infraction visée à la prévention; qu'une peine d'amende paraît une mesure adéquate, la prévenue n'ayant jamais été condamnée auparavant; qu'il convient par ailleurs d'ordonner l'affichage et la publication du présent arrêt.

Sur l'action civile

Considérant que Mme Gillmann a été remboursée du prix d'achat du véhicule; que cependant toutes les démarches qu'elle a dû entreprendre pour le règlement d'une somme de 5 000 F à titre de dommages et intérêts, ainsi qu'une somme de 2 000 F au titre des frais irrépétibles engagés tant en première instance qu'en appel;

Considérant que ces sommes doivent être mises à la charge de Mme D seule, M. L ayant été relaxé des fins de la poursuite;

Par ces motifs: statuant publiquement contradictoirement à l'égard de M. L, prévenu, et Mme Gillmann, partie civile, par application de l'article 410 à l'égard de Mme D, prévenue; En la forme: Reçoit les appels; Au fond: Confirme le jugement en ce qui concerne M. L;

Le réformant en ce qui concerne Mme D, la déclare coupable des faits visés à la prévention;

En conséquence, la condamne à une amende de dix mille francs (10 000 F);

Ordonne l'affichage du présent arrêt pendant 8 jours à la porte de l'établissement géré par la prévenue et la publication par extraits dans Ouest-France (édition de Brest) et le Télégramme de Brest aux frais de la prévenue, le coût maximum de chaque insertion étant fixé à deux mille cinq cents francs (2 500 F);

Condamne Mme D à verser à Mme Gillmann la somme de cinq mille francs (5 000 F) à titre de dommages et intérêts et de deux mille francs (2 000 F) sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Déboute Mme Gillmann de ses demandes à l'égard de M. L;

Condamne Mme D aux dépens de première instance et d'appel liquidés à la somme de dix mille neuf cent vingt deux francs douze centimes (10 922,12 F);

En ce compris le droit fixe du présent arrêt, le droit de poste, le montant de l'amende prononcée et non compris les frais postérieurs éventuels;

Prononce la contrainte par corps;

Le tout par application des articles sus-visés, 473, 479 et 750 du Code de procédure pénale.