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Décisions

CA Paris, 13e ch. corr., 5 mai 1999, n° 98-03220

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sauret

Avocat général :

Mme Auclair

Conseillers :

M. Seltensperger, Mme Marie

Avocat :

Me Giraud.

CA Paris n° 98-03220

5 mai 1999

Rappel de la procédure:

La prévention:

G Patricia épouse V est poursuivie pour avoir :

- à Corbeil Essonne (91), courant 1995 trompé la DGCCRF, contractant, sur les qualités substantielles du Stretro, objet en plastique souple, servant le guide d'écriture aux enfants de moins de 14 ans

- dans l'Essonne, courant 1995, importé et vendu des Stretro, guide d'écriture non conforme et dangereux.

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire à signifier, a déclaré G Patricia

Coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, faits commis courant 1995, à Corbeil Essonne et dans l'Essonne, infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 Code de la consommation

Coupable d'infraction aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes, faits commis courant 1995, à Corbeil Essonne et dans l'Essonne, infraction prévue par les articles L. 214-2 Al. 1, L. 214-1 Code de la consommation et réprimée par l'article L. 214-2 Al. 1 Code de la consommation

et, en application de ces articles,

l'a condamnée à 3 mois d'emprisonnement avec sursis et à 5 000 F d'amende a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de 600 F dont est redevable la condamnée

Les appels:

Appel a été interjeté par

- Madame G Patricia épouse V, le 27 janvier 1998

- M. le Procureur de la République, le 30 janvier 1998 contre Madame G Patricia

Décision:

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels régulièrement interjetés par la prévenue et le Ministère public à l'encontre du jugement entrepris auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la prévention ;

Patricia G épouse V, présente et assistée de son conseil, sollicite à titre principal sa relaxe, à titre subsidiaire, d'être dispensée de peine et que la décision ne soit pas mentionnée au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, faisant valoir en premier lieu que la société X dont elle est la gérante, importait d'Espagne un objet appelé Stretro qui avait été créé, fabriqué et distribué dans les années 1980, tout d'abord aux Etats-Unis où il a obtenu dans les milieux pédagogiques américains un succès croissant (30 millions d'articles vendus en 1986) ;

Qu'il s'agit d'un objet en plastique souple servant de guide d'écriture pour des enfants de 3 à 7 ans, qui peuvent présenter quelques difficultés ou quelque retard dans l'écriture ;

Que ce produit a toujours été très demandé par les enseignants, à tel point qu'il figure dans le catalogue des ventes de la société Nathan spécialisée dans le soutien scolaire ;

Que la société X importait ce produit fabriqué en Espagne et le distribuait en France de façon exclusive ;

Que préalablement à la mise sur le marché, elle s'était inquiétée de la toxicité éventuelle du produit et avait obtenu du fabricant, dès le 17 octobre 1990, un certificat attestant de la conformité du produit avec la norme européenne sur la sécurité des jouets ;

Que cependant la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes a constaté l'absence de sécurité concernant le produit incriminé invoquant un risque d'étouffement par confusion avec des confiseries ;

Qu'il convient de souligner que le produit incriminé est un outil pédagogique exclusivement utilisé à cette fin et qu'il ne peut, a priori, être confondu avec un produit alimentaire ;

En deuxième lieu, dès qu'elle a eu connaissance des conclusions émises par la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes concernant le risque d'étouffement, elle a immédiatement adressé à chacun de ses clients une lettre afin de leur demander qu'il soit fait retour des marchandises vendues compte-tenu de la dangerosité du produit tel que relevé par la Direction de la Consommation ;

Qu'ainsi, le délit de tromperie n'est pas caractérisé ;

En troisième lieu, en ce qui concerne l'infraction aux règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes, l'article L. 214-2 du Code de la consommation dispose "qu'il sera statué par des décrets on Conseil d'Etat sur les mesures à prendre pour assurer l'exécution des chapitres 2 à 6 du présent titre, notamment on ce qui concerne les modalités de présentation, de fabrication ou de composition des produits incriminés ;

Que la citation qui lui a été délivrée ne vise pas les dispositions réglementaires dont il est reproché à la prévenue de n'avoir tenu aucun compte ;

Qu'elle ne peut être reconnue coupable d'une infraction qui de fait n'est pas visée dans la citation ;

Rappel des faits

Un contrôle était exercé par la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes au sein de la société X dont Patricia G épouse V est la gérante ;

Les contrôleurs faisaient examiner par le laboratoire inter régional de la Répression des Fraudes de Paris-Massy un guide d'écriture nommé Stretro que la société vendait ;

Cet objet avait été estimé conforme à la norme 712-3 sur les propriétés chimiques par le laboratoire espagnol auquel il avait été soumis pour examen ;

Le 10 février 1995, le laboratoire, à l'issue de son analyse, concluait à un risque d'étouffement par confusion avec des confiseries et estimait que les dispositions de l'article 1er du décret n° 92-985 du 9 septembre 1992 relatif à la prévention des risques résultant de l'usage de certains produits imitant les denrées alimentaires n'avaient pas été respectées ;

A la demande de la Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, Patricia G épouse V, qui avait accepté de ne pas commercialiser ses stocks, adressait à ses cinq clients fournisseurs de Stretro pour les écoles, un courrier leur demandant de retourner les objets, elle ne faisait pas la même demande pour les écoles, faute, disait-elle, de temps et d'argent ;

Sur ce

Considérant que l'examen de toxicité auquel il avait procédé n'empêchait pas que le produit fut dangereux on raison du risque d'étouffement par ingestion ;

Que les dispositions de l'article L. 213-1 du Code de la consommation s'appliquent indépendamment de la bonne ou mauvaise foi du prévenu ;

Que le délit de tromperie est donc caractérisé et que les premiers juges ont à juste titre retenu Patricia G épouse V dans les liens de la prévention de ce chef ;

Considérant que la citation qui lui a été délivrée faisait expressément mention de la violation des règlements pris pour l'exécution de la loi sur les fraudes ;

Que l'omission des dispositions réglementaires dans la citation ne lui a pas nui, dès lors que la citation était explicite on ce qui concerne l'infraction qui lui était reprochée et qu'elle a pu se défendre sur ce point ;

Considérant que les faits sont constants et l'infraction caractérisée dans tous ses éléments et qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité de ce second chef d'infraction ;

Que toutefois, il doit être fait à la prévenue une application moins sévère de la loi pénale ou égard aux mesures qu'elle a prises pour mettre fin à la vente de l'objet litigieux ;

Que les conditions prévues à l'article 132-59 du Code pénal étant réunies, elle sera dispensée de peine et qu'il ne sera pas fait mention de la présente condamnation au bulletin n° 2 de son casier judiciaire ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement reçoit les appels de la prévenue et du Ministère public confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité l'infirme en répression dispense de peine Patricia G épouse V et dit qu'il ne sera pas fait mention de la présente condamnation au bulletin n° 2 de son casier judiciaire dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable la condamnée.