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Décisions

CA Paris, 13e ch. corr., 2 mai 2000, n° 99-01096

PARIS

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guilbaud

Avocat général :

M. Blanc

Conseillers :

MM. Ancel, Nivose

Avocat :

Me Dumonceau.

CA Paris n° 99-01096

2 mai 2000

Rappel de la procédure

La prévention :

S Christian est poursuivi pour avoir à Montreuil-sous-Bois (93), le 21 novembre 1995, trompé M. Simeziane Madjid, contractant, sur les qualités substantielles, les contrôles effectués, les modes d'emploi ou précautions à prendre, en l'espèce en vendant un véhicule automobile Ford Fiesta à M. Madjid Simeziane en ayant frauduleusement modifié le numéro de série apposé sur le châssis

Le jugement :

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré S Christian

Coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, faits commis le 21 novembre 1995, à Montreuil-sous-Bois (93), infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L,216-3 du Code de la consommation

Et, en application de ces articles,

l'a condamné à 10 000 F d'amende avec sursis a dit que cette décision est assujettie au droit fixe de procédure de 600 F dont est redevable le condamné

l'a condamné à payer à M. Simeziane Madjid, partie civile, la somme de 15 000 F à titre de dommages intérêts, tous préjudices confondus et en outre la somme de 5 000 F au titre de l'article 475-1 du CPP

A rejeté la demande aboutissant à la résolution de la vente.

Les appels :

Appel a été interjeté par

- Monsieur S Christian, le 12 juin 1998 contre Monsieur Simeziane Madjid

- M. le Procureur de la République, le 12 juin 1998 contre Monsieur S Christian

- Monsieur Simeziane Madjid, le 18 juin 1998 contre Monsieur S Christian

Décision :

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels interjetés par le prévenu (sur les seules dispositions civiles, la partie civile et le Ministère public à l'encontre du jugement entrepris auquel il est fait référence pour l'exposé des faits et de la prévention

Par voie de conclusions, Christian S demande de le déclarer bien fondé en son appel limité aux intérêts civils et de le décharger de toute condamnation à l'égard de Madjid Simeziane;

Madjid Simeziane reprend ses demandes initiales devant le tribunal et sollicite la condamnation de Christian S à lui payer les sommes suivantes :

- 29 000 F correspondant au prix de cession du véhicule litigieux et ce avec intérêt au taux légal à compter du 21 novembre 1995 date de la cession,

- 4 600 F correspondant à la prime d'assurance,

- 15 000 F de dommages-intérêts correspondant au préjudice de jouissance du véhicule acquis,

- 8 000 F sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Rappel des faits

Le 1er juillet 1996, Madjid Simeziane déposait plainte contre le gérant du garage X, Christian S.

Il exposait qu'ayant acheté le 21 novembre 1995 un véhicule Ford Fiesta dans cet établissement il s'était vu remettre une carte grise provisoire, le vendeur se chargeant d'obtenir l'immatriculation définitive. Cependant, après lui avoir remis plusieurs cartes grises provisoires, Christian S invitait Madjid Simeziane à lui laisser le véhicule pendant deux jours afin, disait-il de faire effectuer le contrôle technique et d'apposer les plaques d'immatriculation correspondant à la carte grise définitive qu'il lui remettait le 22 mars 1996.

Le plaignant constatait alors que le numéro de série du véhicule frappé sur le châssis et conforme à celui figurant sur les certificats d'immatriculation provisoires remis précédemment était différent du numéro apparaissant sur la carte grise définitive, lequel avait été riveté sur le moteur et correspondait manifestement à un autre véhicule

Christian S affirmait avoir signalé à Madjid Simeziane lors de l'achat du véhicule le 21 novembre 1995, que la carte grise d'origine avait été détruite par erreur par la Préfecture de Melun et qu'une présentation du véhicule au service des Mines serait nécessaire pour la réimmatriculation, la livraison étant initialement prévue pour la fin du mois de décembre. Devant l'insistance de son client, il lui avait livré la voiture à la mi-décembre avec une carte grise provisoire;

Christian S expliquait que tes démarches auprès du service des Mines s'étaient trouvées ralenties du fait d'un dossier incomplet. Devant l'insistance de Madjid Simeziane pour obtenir la carte grise définitive, Christian S avait alors décidé en mars 1996, après avoir consulté un expert, d'acheter un véhicule accidenté identique et d'utiliser la carte grise de celui-ci pour réimmatriculer le véhicule de Madjid Simeziane ;

Selon le prévenu, cette opération était assimilable à un changement de caisse et il suffisait ensuite de faire refrapper le nouveau numéro de série à côté de l'ancien, sous contrôle d'expert, ce que Madjid Simeziane aurait refusé ;

Christian S contestait avoir voulu tromper Madjid Simeziane;

Sur ce, LA COUR,

Sur l'action publique

Considérant que si Christian S n'a relevé appel que des dispositions civiles, il n'en demeure pas moins qu'il convient, au vu de l'appel du Ministère public, de reprendre l'examen des faits visés à la prévention sous l'angle de l'action publique;

Considérant que la prévention, qu'il convient de rappeler, vise précisément le fait pour Christian S "d'avoir à Montreuil-sous-Bois, le 21 novembre 1995, trompé Madjid Simeziane, contractant, sur les qualités substantielles, les contrôles effectués, les modes d'emploi ou précautions à prendre en l'espèce en vendant un véhicule automobile Ford Fiesta à Madjid Simeziane en ayant frauduleusement modifié le numéro de série apposé sur le châssis";

Considérant qu'il est donc fait grief à Christian S d'avoir trompé son acheteur Madjid Simeziane, en lui vendant le 21 novembre 1995, un véhicule dont il aurait frauduleusement modifié le numéro de série apposé sur le châssis ;

Mais considérant qu'à la date de cette vente, soit le 21 novembre 1995, Christian S s'est contenté, ce qui n'est pas contesté par Madjid Simeziane, d'indiquer à ce dernier qu'il ne pouvait lui remettre de carte grise définitive pour le véhicule litigieux, prétextant que la carte grise d'origine avait été détruite par erreur et qu'une présentation du véhicule au service des Mines serait nécessaire ;

Considérant que ce n'est qu'ultérieurement à cette vente, Soit au mois de mars 1996 (aux dires du prévenu) qu'est intervenue la modification du numéro de série apposé sur le châssis du véhicule de Madjid Simeziane ;

Considérant dans ces conditions qu'aucune tromperie n'est établie à l'encontre de Christian S au moment de la vente ;que les manœuvres qui lui sont reprochées sont postérieures à la transaction et n'ont pas déterminé Madjid Simeziane à contracter cet achat ;

Considérant en conséquence, qu'au vu de la prévention très précise qui est reprochée à Christian S, il convient de le relaxer des fins de la poursuite ;

Sur l'action civile

Considérant que le délit de tromperie visé à la prévention n'étant pas constitué à l'encontre de Christian S pour les motifs ci-dessus indiqués, il convient de débouter Madjid Simeziane de ses demandes;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement à l'encontre de Christian S et à l'égard de Madjid Simeziane; Infirme le jugement déféré Relaxe Christian S des fins de la poursuite Déboute Madjid Simeziane de ses demandes civiles formées à l'encontre de Christian S.