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Décisions

CA Toulouse, 3e ch. corr., 29 juin 2000, n° 00-00165

TOULOUSE

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Selmes

Conseillers :

M. Lamant, Mme Baby

Avocats :

Mes Marty, Dupuy Lingeri, Pressecq

TGI Albi, du 9 sept. 1999

9 septembre 1999

Rappel de la procédure :

Le jugement :

Le tribunal, par jugement en date du 9 septembre 1999, a déclaré :

* A Aune Marie Gilberte épouse L :

- coupable d'exécution d'un travail dissimule, du 12 juin 1997 au 6 novembre 1997, à Najac, Cordes sur Ciel, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L .324-11, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable d'emploi de salarie sans respect de la durée minimale de repos hebdomadaire, courant juillet et août 1997 au 20 septembre 1997, à Najac, infraction prévue par les articles R. 262-1 Al. 1, L. 221-2, L. 221-4, L. 221-14 du Code du travail et réprimée par l'article R. 262-1 Al.1, Al.2 du Code du travail

- coupable de publicité mensongère ou de nature a induire en erreur, le 13 juillet 1998, à Cordes sur Ciel, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 Al.1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

- coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 13 juillet 1998, à Cordes sur Ciel, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation

- coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation

- coupable de publicité mensongère ou de nature a induire en erreur, le 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 Al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

- coupable de détention pour vente, vente ou offre de denrée alimentaire a l'étiquetage trompeur, (9 contraventions) 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 112-6, R. 112-7, R.112-1, L. 214-1 2°, L. 214-2 Al. 1 du Code de la consommation et réprimée par l'article L. 214-2 Al. 1 du Code de la consommation

- coupable de vente au détail de livres a un prix illicite, (154 contraventions) 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par l'article 1 2° du Décret 85-556 du 29/05/1985, les articles 1 Al.4, Al. 1, Al.3, 5 de la loi 81-766 du 10/08/1981 et réprimée par l'article 1 du Décret 85-556 du 29/05/1985

- coupable de non rémunération de l'artiste-interprête ou du producteur de phonogramme ou vidéogramme, le 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par les articles L. 335-4 Al. 3, L. 311-1 du Code propriété intellectuelle et réprimée par les articles L. 335-4 Al. 3, Al. 1, L. 335-5 Al. 1, L. 335-6 du Code propriété intellectuelle

- coupable d'exécution d'un travail dissimule, courant 1998, à Conques, territoire national, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-1 1, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable de logement provisoire de travailleur dans un local non conforme, courant 1998, à Conques, infraction prévue par les articles L. 263-2, R. 232-11, R. 232-11-1, R. 232-11-2, R. 232-11-4, R. 232-11-5, R.232-11-6 du Code du travail, l'article 193 Al. 1 du Décret 65-48 du 08/01/1965 et réprimée par les articles L. 263-2, L .263-6 Al. 1 du Code du travail

- coupable d'emploi de salarie sans respect de la durée minimale de repos hebdomadaire, (3 contraventions) 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 262-1 Al. 1, L. 221-2, L. 221-4, L. 221-14 du Code du travail et réprimée par l'article R. 262-1 Al. 1, Al. 2 du Code du travail

- coupable d'embauche sans remise au salarie de document obligatoire, (2 contraventions) 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 362-1 Al. 2, R. 320-4 Al. 3, R. 320-5 Al. 2 du Code du travail et réprimée par l'article R. 362-1 Al. 2 du Code du travail

* L Félix Claude :

- coupable d'exécution d'un travail dissimule, de mars 1998 à août 1998, à Cordes sur Ciel, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 320, L.143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable d'exécution d'un travail dissimule, du 12 juin 1997 au 6 novembre 1997. A Najac, Cordes sur Ciel, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable d'emploi de salarie sans respect de la durée minimale de repos hebdomadaire, courant juillet et août 1997 au 20 septembre 1997, à Najac, infraction prévue par les articles R. 262-1 Al. 1, L. 221-2, L. 221-4, L. 221-14 du Code du travail et réprimée par l'article R. 262-1 Al. 1, Al.2 du Code du travail

- coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation

- coupable de publicité mensongère ou de nature a induire en erreur, le 24 juin 1998 à Conques, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 Al.1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

- coupable de détention pour vente, vente ou offre de denrée alimentaire à l'étiquetage trompeur, (9 contraventions) 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 112-6, R.112-7, R. 112-1, L. 214-1 2°, L. 214-2 Al. 1 du Code de la consommation et réprimée par l'article L. 214-2 Al.1 du Code de la consommation

- coupable de vente au détail de livre a un prix illicite, (154 contraventions) 24 juin 1998, à Conques, infraction prévue par l'article 1 2° du Décret 85-556 du 29/05/1985, les articles 1 Al.4, Al.1,Al. 3, 5 de la loi 81-766 du 10/08/1981 et réprimée par l'article 1 du Décret 85-556 du 29/05/1985

- coupable de non rémunération de l'artiste-interprête ou du producteur de phonogramme ou vidéogramme, le 24 juin 1998. à Conques, infraction prévue par les articles L. 335-4 Al. 3, L. 311-1 du Code propriété intellectuelle et réprimée par les articles L. 335-4 Al. 3, Al. 1, L. 335-5 Al. 1, L. 335-6 du Code propriété intellectuelle

- coupable d'exécution d'un travail dissimule, courant 1998, à Conques, territoire national, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 320, L. 143-3 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable de publicité tendant a favoriser volontairement le travail dissimule, courant mai 1998, à Conques, infraction prévue par les articles L. 362-3, L. 324-9, L. 324-10, L. 324-11, L. 143-3, L. 320 du Code du travail et réprimée par les articles L. 362-3, L. 362-4, L. 362-5 du Code du travail

- coupable de logement provisoire de travailleur dans un local non conforme, courant 1998, à Conques, infraction prévue par les articles L. 263-2, R. 232- 11, R. 232-11-1, R. 232-11-2, R. 232-11-4, R. 232-11-5, R. 232-11-6 du Code du travail, l'article 193 Al.1 du Décret 6548 du 08/01/1965 et réprimée par les articles L. 263-2, L. 263-6 Al. 1 du Code du travail

- coupable d'emploi de salarié sans respect de la durée minimale de repos hebdomadaire, (3 contraventions) 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 262-1 Al. 1, L. 221-2, L. 221-4, L. 221-14 du Code du travail et réprimée par l'article R. 262-1 Al. 1, Al. 2 du Code du travail

- coupable d'embauche sans remise au salarie de document obligatoire, (2 contraventions) 1998, à Conques, infraction prévue par les articles R. 362-1 Al. 2, R. 320-4 Al. 3, R. 320-5 Al. 2 du Code du travail et réprimée par l'article R. 362-1 Al. 2 du Code du travail

Et par application de ces articles

* a déclaré A Anne Marie Gilberte épouse L :

- coupable de travail clandestin pour non délivrance de bulletin de paie (Amaury De Saint Martin, et Anne Gibergues),

- coupable de tromperie sûr l'origine (croquants) et les qualités substantielles (charcuterie) de marchandises,

- coupable de non respect du repos hebdomadaire à l'égard de Amaury De Saint Martin, Fabrice Guibal et Pascal Pugibet, (3 contraventions),

- coupable de défaut de remise de documents dans déclaration d'embauche à l'égard de Amaury De Saint Martin, Fabrice Guibal, (2 contraventions),

Et l'a condamnée à :

- 24 000 F d'amende pour les contraventions (8 000 F x 3),

- 4 000 F d'amende pour les contraventions (2 000 F x 2)

- 40 000 F d'amende pour les délits.

Et l'a relaxée pour le surplus.

* a déclaré L Félix Claude :

- coupable du délit de travail clandestin (non délivrance de bulletin de paie pour une partie des salaires versés à Amaury De Saint Martin, Aime Gibergues, Gilles, Martinez, Bousquet, Pugibet),

- coupable de tromperie sur l'origine de la marchandise (croquants)

- coupable de 3 contraventions de non respect du repos hebdomadaire à l'égard de Amaury De Saint Martin et Fabrice Guibal,

- coupable de 2 contraventions de défaut de remise de documents dans la déclaration préalable d'embauche de Amaury De Saint Martin, et Fabrice Guibal,

Et l'a condamné à :

- la peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis,

- 60 000 F d'amende,

- 24 000 F (3 x 8 000 F),

- 4 000 F (2 x 2 000 F),

- publication dans la Dépêche du Midi édition Tarn et Aveyron, sans que le coût de chaque publication n'excède 3 000 F.

Et l'a relaxé pour le surplus.

Sur l'action civile :

* a alloué à Dalgues de Subra de Saint-Martin Amaury 10 000 F à titre de dommages-intérêts toutes causes de préjudices confondus

* a alloué à l'UDAF 1 000 F à titre de dommages-intérêts, 500 F au titre de l'article 475-1 du CPP

Les appels :

Appel a été interjeté par Madame A Anne Marie, le 15 septembre 1999 Monsieur L Félix, le 15 septembre 1999 M. le Procureur de la République, le 15 septembre 1999 contre Madame A Aime Marie M. le Procureur de la République, le 15 septembre 1999 contre Monsieur L Félix

Décision :

M. et Mme L exploitent, au travers des SARL X et Y, divers commerces d'articles de souvenirs sur des sites touristiques (Cordes sur Ciel, Najac, Conques, Rocamadour,...) ainsi qu'un restaurant à Cordes sur Ciel. Mme L est par ailleurs associée et gérante d'une SCI "Z", entre autre propriétaire d'une maison dans le village de Cordes sur Ciel. Au cours de la saison estivale 1998 et dans les mois qui ont suivi, ils ont fait l'objet de plusieurs contrôles de la part des brigades de gendarmeries compétentes, et cinq procès-verbaux ont été dressés à leur encontre pour des faits de travail dissimulé, de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, publicité mensongère, non respect de la durée minimale de repos hebdomadaire et des règles d'hygiène de l'hébergement pour des salariés, embauche de salariés sans remise de document obligatoire, non remise de bulletin de paye, vente au détail de livres à des prix illicites, non rémunération d'artiste interprète ou de producteur de phonogramme.

Le Tribunal correctionnel d'Albi, par jugement contradictoire en date du 15 septembre 1999, les a renvoyés des fins de la poursuite pour les deux derniers faits cités ainsi que pour l'infraction aux règles d'hygiène en matière d'hébergement de salarié, et condamnés pour les autres, Mme L à 40 000 F d'amende pour les délits, 3 fois 8 000 F et 2 fois 2 000 F d'amende pour les contraventions, et M. L à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 60 000 F d'amende pour les délits, 3 fois 8 000 F et 2 fois 2 000 F d'amende pour les contraventions. L'un des salariés, partie civile, a obtenu 10 000 F de dommages-intérêts, l'UDAF du Tarn se voyant allouer 1 000 F de dommages-intérêts et 500 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Les deux prévenus ont relevé appel des dispositions civiles et pénales de cette décision le jour-même, suivis du Procureur de la République.

M. et Mme L se présentent devant la cour assistés de leur avocat, qui s'insurge contre la méthode employée à l'encontre de ses clients, qui a consisté à les harceler de contrôles sans les tenir informés des charges retenues contre eux, au point que certaines infractions ont été relevées de façon tout à fait fantaisiste, ce qui a conduit à une relaxe partielle. Il soutient que les droits de la défense n'ont pas été respectés en ce qui concerne les infractions économiques, au demeurant non établies. Les faits qualifiés d'infraction au Code du travail seraient prescrits ou non établis. En outre, M. L, qui n'est ni gérant de droit des sociétés en cause ni employeur, ne saurait être condamné, d'autant que les droits de la défense n'ont pas été respectés en ce qui le concerne. L'Avocat général admet que le dossier manque de clarté, et s'en rapporte à la sagesse de la cour.

Le conseil de M. Amaury de Saint-Martin sollicite la confirmation du jugement, ainsi que l'UDAF 81, qui demande en outre 4 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Décision

Les appels ont été régularisés dans les forme et délai légaux, ils sont donc recevables en la forme. Sur les délits économiques

Il sera tout d'abord précisé que les procès-verbaux établis par les fonctionnaires de la Direction Départementale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes dans le cadre des enquêtes relevant de la loi du 1er août 1905 sur la Répression des Fraudes ne sont pas soumis aux exigences de respect du contradictoire et de rédaction à bref délai qui caractérisent ceux que les mêmes fonctionnaires dressent au titre de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence. Aucune nullité n'est donc encourue en l'espèce.

1 - infraction en matière de prix du livre

Les gendarmes de Conques ont relevé (PV n° 98002950 du 25 juin 1998) que certains livres étaient vendus dans la boutique de Conques à un prix supérieur au prix fixé par l'éditeur en application de l'article 1er de la loi du 10 août 1981 relative au prix du livre. Or, ce texte impose au détaillant de pratiquer "un prix effectif de vente au public compris entre 95 % et 100 % du prix fixé par l'éditeur ou l'importateur", ce qui, dans l'absolu, interdit non seulement les prix inférieurs à 95 %, mais également les prix supérieurs à 100 % du prix de vente au public, interdiction qui s'explique aisément par le souci du législateur de faciliter l'accès du plus grand nombre à la culture. La cour, réformant sur ce point la décision de relaxe du tribunal, entrera en voie de condamnation. Eu égard aux prix constatés, il sera appliqué une amende de 20 F, par ouvrage mis en vente à un prix excessif.

2 - infraction en matière de droits d'auteur

Il a été justifié qu'un tiers acquittait les droits d'auteur dus à raison de la diffusion de musiques dans les points de vente la relaxe de ce chef; prononcée par les premiers juges, sera purement et simplement confirmée.

3 - infractions relatives aux "croquants de Cordes"

Il n'est pas contesté que les biscuits vendus sous la dénomination "croquants de Cordes" l'étaient également sous celle de "croquants de Conques" lorsqu'ils étaient vendus à Conques, "Croquants de Carcassonne" pour les veines dans cette ville, etc... Le fait que les étiquettes mentionnent que ces produits sont fabriqués "pour Anne-Marie Boutiques", dont l'adresse est à Toulouse, n'est pas de nature à supprimer le délit de tromperie retenu par le tribunal en présentant ailleurs qu'à Cordes ces produits comme une "spécialité" du lieu où ils étaient vendus, Mme L a volontairement trompé le consommateur, qui a cru faire acquisition d'un produit typique de la gastronomie locale et a donc été nécessairement sensible à l'indication de provenance.

Sont également indifférents à cet égard le caractère obligatoire ou non de la mention de la provenance sur l'étiquette, de même que les pratiques des fabricants concurrents.

S'il est exact que la présentation formelle de la date de péremption ne correspond pas aux stipulations du texte applicable en la matière, il apparaît que c'est à juste titre que le tribunal n'a pas retenu d'infraction, l'information étant fournie de façon claire et compréhensible pour tout consommateur.

4 - infraction relative aux charcuteries

Les infractions sont reconnues par M. et Mme L, qui ne sauraient sérieusement prétendre que ses salariés auraient pris des initiatives malencontreuses, le rôle du responsable consistant précisément à leur donner les instructions nécessaires et à s'assurer de leur exécution. La déclaration de culpabilité sera donc confirmée.

Sur les infractions en matière de droit du travail

Sur les prétendues nullités procédurales, il sera rappelé que la règle fixée à l'article L. 611-10 du Code du travail, qui impose la communication au contrevenant d'un exemplaire du procès-verbal dressé par l'inspection du travail ne vise que les infractions à la durée du travail (et non celles relatives au repos hebdomadaire ou à toute autre infraction) et, surtout, ne vise pas les procès- verbaux dressés par un officier de police judiciaire. Les dispositions de l'article L. 611-13, dont le texte précise qu'elles ne dérogent pas aux règles de droit commun, ne concernent que la constatation des infractions de travail dissimulé et d'emploi illégal de travailleurs étranger. Elles ne visent par ailleurs que les visites domiciliaires, perquisitions et saisies, qui n'ont pas été pratiquées en l'espèce. Enfin, il résulte clairement des explications très complètes fournies par les prévenus qu'ils ont été parfaitement informés de l'objet précis des poursuites dirigées à leur encontre.

1- travail dissimulé des vendeurs des boutiques

1.1. - Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin

Embauché dans le cadre d'un contrat de qualification, Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin devait travailler sur la base d'un horaire de 39 heures, sous réserve des périodes de formation théorique pendant lesquelles il rejoignait son école. Il ressort de ses déclarations, qui ne sont pas contredites par M. et Mme L, que, tenant seul la boutique, ouverte tous les jours en saison, de 9 h à 19 h, il accomplissait un horaire de travail très supérieur à la durée légale, sans qu'il soit tenu compte des heures supplémentaires autrement que sous la forme d'une "prime" remise en espèces et ne figurant pas sur tes bulletins de paie. Compte tenu de ce qui sera dit ultérieurement au sujet du repos hebdomadaire, le délit de travail dissimulé par dissimulation partielle de salarié apparaît donc constitué.

1.2. - Anne Gibergues

Il est établi que Mlle Gibergues avait un statut de stagiaire, et non de salariée, à la différence de Fabrice Guibal et Amauxy Dalgues de Subra de Saint-Martin. Si l'on peut considérer que le cadre du contrat de stage a été respecté pendant sa première semaine de présence, pendant laquelle M. Guibal était également présent, il apparaît que Mlle Gibergues a ensuite tenu seule le magasin, pendant toute la durée quotidienne d'ouverture de celui-ci, pendant la période du 25 mai au 12 juin 1998. Elle a alors accompli les tâches normales d'un salarié de l'entreprise, sans bénéficier du statut, et surtout de la rémunération correspondants. En effet, si l'indemnisation sous la forme de la remise de 1 000 F en espèces est juridiquement admissible s'agissant de la période de stage, dès lors que cette gratification se situe en dessous du seuil d'assujettissement des indemnités de stage aux cotisations sociales, il en va différemment pour la période pendant laquelle Mlle Gibergues a tenu seule l'emploi de vendeuse responsable du magasin. Elle aurait du être rémunérée au moins au SMIC et recevoir un bulletin de paye pour les 15 derniers jours de sa présence. Le délit de travail dissimulé est donc constitué en ce qui la concerne.

A l'inverse, la cour suivra le tribunal en ce qu'il a considéré que l'infraction de publicité tendant à favoriser le travail dissimulé n'était pas constituée.

1.3- Pascale Pugibet

Mlle Pugibet a été employée en qualité de vendeuse par la SARL Y dans le cadre de deux contrats de travail successifs à durée déterminée, pour les périodes de juin à septembre et d'octobre à novembre 1997. Il s'agissait de contrats de travail soumis aux règles générales en la matière, notamment en ce qui concerne l'horaire légal de 39 heures hebdomadaires et le paiement des heures supplémentaires éventuelles selon les règles en vigueur. Mlle Pugibet a déclaré que ses horaires de travail correspondaient aux heures d'ouverture du magasin, soit de 9 h à 19 h, ses repas étant pris sur place. Ces horaires, au moins pendant les mois d'été correspondant à la période touristique, sont ceux que l'on retrouve dans les autres déclarations et dans les procès-verbaux figurant au dossier, et ne sont pas contestés par M. et Mme L. Dès lors, la délivrance de bulletins de paie ne reprenant que la durée légale du travail constituent incontestablement une dissimulation partielle de salarié, et le délit de travail dissimulé est ici constitué.

2 - travail dissimulé des ouvriers du bâtiment

Les attestations produites aux débats, qui minimisent des faits pourtant parfaitement décrits de façon précise et concordante tant par le personnel que par M.L lors de l'enquête, ne sont pas de nature à écarter la qualification pénale de travail dissimulé. Il aurait suffit d'ailleurs de rappeler que la société bénéficiaire des travaux est la SCI Z, alors que l'employeur des trois personnes concernées est la SARL Y, dont l'activité est l'exploitation d'un restaurant il n'est justifié d'aucun contrat de prestation de travaux de bâtiment entre les deux sociétés, Les devis produits, datés de 1997 et de décembre 1998, ne sont pas de nature à justifier l'intervention effective de l'entreprise TCE sur un chantier qui s'est déroulé de juin à août 1998. Aucun bulletin de paie correspondant aux prestations des trois personnes présentes sur le chantier n'a été produit, et bien entendu le fait que les "salariés" aient pu ne pas souhaiter disposer d'un tel document, ou l'aient détruit, ne saurait exonérer l'employeur, qui doit les établir et en conserver un exemplaire. L'infraction est donc caractérisée, mais il apparaît que Mme L, gérante tant de la SARL Y, employeur de MM. Gilles, Bousquet et Martinez, que de la SCI Z, maître d'ouvrage, n'est pas poursuivie pour ces faits.

3 - infractions aux règles du repos hebdomadaire

La règle posée par l'article L. 221-2 du Code du travail, selon laquelle il est interdit d'occuper plus de six jours par semaine un même salarié, est générale et absolue. Même si les commerces exploités par les SARL Y et X pouvaient demeurer ouverts le dimanche, en application d'autres législations, il appartenait aux employeurs concernés de prendre toutes dispositions pour mettre en place un roulement entre les salariés, de façon à ce que chacun d'eux dispose d'une journée de repos par semaine. Il sera par ailleurs rappelé aux prévenus qu'un titulaire d'un contrat de qualification est un salarié comme un autre, qui, aux termes de l'article L. 981-10 du Code du travail, bénéficie de l'ensemble des disposions applicables aux autres salariés, en particulier en ce qui concerne la durée du travail et le repos hebdomadaire. La Direction départementale du Travail n'avait d'ailleurs pas manqué d'attirer l'attention de la société X sur cette règle, par son courrier du 4 juin 1998.

S'agissant d'Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin, figure un dossier un récapitulatif des horaires de travail, signé par M. L, qui mentionne pour le mois de mars 1998 un jour de repos, pour avril 2 jours de repos, et pour mai 1 jour : au moins sur cette période, il est donc reconnu que le repos hebdomadaire n'a pas été respecté.

Fabrice Guibal a déclaré le 27 juin 1998 qu'il n'avait pas eu de jour de repos depuis le 1er mai, et cette déclaration n'a pas été contestée par les prévenus. Elle correspond par ailleurs aux conditions d'emploi des autres salariés interrogés.

Les prévenus ont reconnu avoir versé des sommes en espèces à Mlle Pugibet, " en compensation des repos hebdomadaires " non pris le délit en ce qui la concerne est donc reconnu, ce repos ne pouvant faire l'objet d'une compensation financière.

L'infraction relative au repos hebdomadaire est donc constituée en ce qui concerne les trois salariés visés.

4 - infractions aux règles d'embauche

Ainsi que l'a indiqué le tribunal, le défaut de déclaration préalable à l'embauche était soit prescrit en ce qui concerne Mlle Pugibet embauchée en avril 1997, soit inexistant en ce qui concerne les autres vendeurs, la justification de leur déclaration préalable à l'embauche ayant été rapportée. Seule demeure, à l'égard de MM. Guibal et Dalgues de Subra de Saint-Martin la contravention de défaut de remise du document reproduisant ces déclarations.

5 - infraction en matière de logement des salariés

Dès lors qu'il met un logement à la disposition de l'un de ses salariés, il appartient à l'employeur de s'assurer que celui-ci est conforme aux exigences du Code du travail. Peu importe que le principe de cette mise à disposition soit ou non inscrit dans le contrat, et qu'elle soit motivée par l'intérêt du salarié ou celui de l'employeur. Il ressort clairement du dossier que le local affecté au logement du salarié responsable du magasin de Conques, bien qu'il soit cyniquement qualifié de "luxueux" par M. L, ne répond pas aux normes en vigueur en ce qui concerne l'aération, l'éclairage et l'accès. L'infraction à l'article R. 232-11 du Code du travail apparaît donc constituée, et la cour entrera en voie de condamnation, étant rappelé que deux salariés, MM. Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin et Fabrice Guibal ont utilisé ce local, de même que Mlle Anne Gibergues.

Sur l'imputabilité des infractions

1- à Mme L

Mme L est la gérante de droit des SARL Y et X, ainsi que de la SCL Z, et, en cette qualité et dès lors qu'il n'est allégué aucune délégation, elle est responsable pénalement tant des infractions commises en matière économique que de celles relevant de la réglementation du travail, il n'est pas contesté d'ailleurs qu'elle assume de façon effective les taches correspondant à ses fonctions.

2 - à M. L

Quelle que soit l'étendue de son activité réelle et son implication dans les faits objet des poursuites, M. L ne saurait être condamné pour des infractions qui sont toutes imputables, es qualités, à son épouse. Il devra donc être renvoyé des fins de la poursuite, sans peine ni dépens.

Sur la peine

I - Infractions délictuelles

Les multiples infractions relevées par les gendarmes illustrent le souci de Mme L de rentabiliser au mieux l'activité commerciale saisonnière des sociétés Y et X, notamment en recourant, sans hésiter à détourner de leur objet des dispositifs légaux destinés à favoriser l'accès à l'emploi des jeunes, à du personnel peu rémunéré, et qui, du fait de sa jeunesse ou de sa relative faiblesse, était prêt à accepter des conditions de travail non conformés à l'état du droit du travail. Une sanction apparaît dès lors justifiée, et une sanction financière est particulièrement adaptée.

En l'absence de condamnation antérieure, cette sanction devra cependant, tout en tenant compte du caractère formel de certaines des infractions relevées, être de nature à dissuader le renouvellement des errements sanctionnés.

La sanction prononcée par les premiers juges pour les délits sera donc confirmée.

2 - Contraventions

Les amendes prononcées apparaissent justifiées en ce qui concerne les contraventions de défaut de remise de document relatif à la déclaration préalable à l'embauche, ainsi que celles relatives au non respect du repos hebdomadaire. Elles seront donc confirmées.

La cour y ajoutera 154 amendes de 20 F, en répression des infractions en matière de prix du livre.

3 - Diffusion

Enfin, le principe de la diffusion ordonnée par le tribunal conformément à l'article L. 216-3 du Code de la consommation en ce qui concerne la condamnation pour tromperie sera maintenu, la diffusion portant sur la partie du dispositif du présent arrêt correspondant à ces infractions.

La diffusion sera étendue aux éléments du dispositif relatifs au travail dissimulé, et ce conformément à l'article L. 362-4-4° du Code du travail.

Sur l'action civile

1 - Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin

Les délits et contraventions dont il a été victime étant établis, les dispositions civiles du jugement le concernant seront purement et simplement confirmées.

2 - l'UDAF 81

Les délits de tromperie étant établis, la cour confirmera les dispositions civiles du jugement, étant précisé que l'équité commande d'allouer à cette association une somme complémentaire de 1 000 F au titre des frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel.

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à signifier et en dernier ressort, En la forme, Reçoit les appels, Au fond, Sur l'action publique, En ce qui concerne Mme Anne-Marie L, Sur la déclaration de culpabilité Confirme le jugement rendu le 9 septembre 1999 par le Tribunal correctionnel d'Albi sur la déclaration de culpabilité du chef des délits de tromperie sur L'origine (croquants) et les qualités substantielles (charcuterie) des marchandises, de travail dissimulé par dissimulation partielle de salariés et non remise de bulletins de paye (M. Dalgues de Subra de Saint-Martin, Mlles Gibergues et Pugibet), Et des contraventions de non respect du repos hebdomadaire (MM. Guibal et Dalgues de Subra de Saint-Martin, Mlle Pugibet) Le confirme également en ce qu'il l'a renvoyée des fins de la poursuite pour défaut de versement de la rémunération due à un artiste ou un interprète Le réformant pour te surplus, Déclare Mme Anne-Marie L coupable de 154 infractions en matière du prix du livre, La déclare coupable de fourniture à un salarié d'un logement non conforme aux règles d'hygiène (MM. Dalgues de Subra de Saint-Martin et Guibal, Mlle Gibergues) Sur la peine Confirme les condamnations prononcées à son encontre tant pour les délits que pour les contraventions, Y ajoutant, Condamne Mme Anne-Marie L à 154 amendes de 20 F. en répression des contraventions en matière de prix du livre, Dit que la diffusion ordonnée par le tribunal aura lieu dans les journaux indiqués par lui, mais portera également sur les éléments du présent dispositif relatifs au travail dissimulé, le coût maximal de chaque publication étant de ce fait porté à 4 000 F. Condamne Mme Anne-Marie L au paiement du droit fixe de procédure, liquidé envers l'Etat à la somme de 800 F. En ce qui concerne M. Félix L, Le renvoie des fins de la poursuite, sans peine ni dépens, Sur l'action civile, Confirme les dispositions du jugement relatives à M. Amaury Dalgues de Subra de Saint-Martin, Confirme le jugement en ses dispositions relatives à l'UDAF 81, Y ajoutant, condamne Mme L à payer à cette association une somme complémentaire de 1 000 F en indemnisation des frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel, Prononce la contrainte par corps, s'il y a lieu de l'exercer, conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale. Le tout en vertu des textes susvisés.