CA Paris, 13e ch. B, 28 mai 1999, n° 98-07074
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Sauret
Avocat général :
Mme Auclair.
Conseillers :
Mme Marie, M. Seltensperger
Le jugement:
Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré F Louis coupable de:
- tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 14 décembre 1996, à Guerard, terr. nat., infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation
- exploitation non autorisée d'une installation classée pour la protection de l'environnement, le 14 décembre 1996, à Guerard, terr. nat., infraction prévue par les articles 18 al. 1, 1 al. 2, 3 al. 1, 4 al. 2 de la loi 76-663 du 19-07-1976, les articles 20 al. 3, al. 4, 24 du décret 77-1133 du 21-09-1977 et réprimée par les articles 18 al. 1, al. 3, al. 4, al. 5 B), 22-1 de la loi 76-663 du 19-07-1976
- exploitation d'une installation classée sans déclaration préalable, le 14 décembre 1996, à Guerard, terr. nat, infraction prévue par l'article 43 1° du Décret 77-1133 du 21-09-1977, l'article 3 al. 4, al. 5 de la loi 76-663 du 19-07-1976 et réprimée par l'article 43 du décret 77- 1133 du 21-09-1977
- abattage d'animaux hors d'un abattoir en dehors des cas autorisés, le 14 décembre 1996, à Guerard, terr. nat, infraction prévue par les articles 26 al. 1, 2, 11 al. 1, 1 du décret 71-636 du 21-07-1971, l'article 2 A) du décret 97-903 du 01-10-1997 et réprimée par l'article 26 al. 1 du décret 71-636 du 21-07-1971
- exposition, circulation ou mise en vente de pièces d'animal abattu, non marquées ou estampillées, le 14 décembre 1996, à Guerard, terr, nat., infraction prévue par les articles 4 al. 3, 11 al. 1, 26 al. 1, I du décret 71-636 du 21-07-1971 et réprimée par l'article 26 al. 1 du décret 71-636 du 21-07-1971
et, en application de ces articles, après avoir rejeté l'exception de nullité,
l'a condamné à 3 mois d'emprisonnement délictuel avec sursis. 20 000 F d'amende délictuelle.
Les appels:
Appel a été interjeté par:
Monsieur F Louis, le 25 juin 1998,
M. le Procureur de la République, le 25 juin 1998 contre Monsieur F Louis,
Décision:
Rendue contradictoirement à signifier après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur les appels relevés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement déféré auquel il est fait référence pour l'exposé de la prévention;
Louis F, bien que cité à sa personne le 4 décembre 1998, ne comparaît pas à l'audience du 9 avril 1999; ne justifiant d'aucune excuse, il sera statué contradictoirement à son égard en application des dispositions de l'article 410 du Code de procédure pénale;
Rappel des faits:
Le 14 décembre 1996, la direction des services vétérinaires de Seine-et-Marne, assistée par la brigade de gendarmerie de Morcerf, effectuait un contrôle dans la ferme de Saint-Blandin, dont Louis F, exploitant agricole, est le responsable, à Crécy-la-Chapelle;
Elle y constatait que des particuliers y étaient présents, non seulement pour y acheter de la viande, mais encore, pour y pratiquer directement l'abattage d'animaux; elle découvrait notamment un mouton et deux porcs fraîchement abattus, une plumeuse à volailles maculée de sang et de plumes sur un sol recouvert de sang frais, des peaux de moutons fraîches salées, des carcasses d'animaux non estampillées, et des cadavres d'animaux de boucherie et de charcuterie;
Procès-verbal était dressé le jour même;
Le 16 décembre 1996, Louis F, entendu par la brigade de gendarmerie de Mortcerf, reconnaissait certaines infractions qui avaient été relevées, notamment l'activité d'abattage sans autorisation;
Sur ce
Sur le délit de tromperie
Considérant qu'il résulte des constatations de la direction des services vétérinaires que, dans la ferme dont Louis F est le responsable, étaient en vente des animaux, dont un malade, sans estampille, abattus dans des locaux non-agréés ne satisfaisant pas aux règles d'hygiène;
Considérant que la carte qu'a fait éditer Louis F à titre publicitaire porte notamment les mentions: "Halai Mosquée de Paris - sous le contrôle de la Mosquée de Paris" et "Contrôle services vétérinaires - Abattoirs de Meaux";
Considérant que Louis F a contesté I 'infraction de tromperie tout en reconnaissant qu'il utilise cette carte publicitaire pour "attirer le client" afin qu'il lui achète le produit qu'il fait abattre à l'abattoir de Meaux sous le contrôle des services vétérinaires ou égorger par un sacrificateur agréé par la Mosquée de Paris dont l'un de ses contrôleurs appose l'estampille sur les carcasses;
Mais considérant que les constatations faites notamment sur tes carcasses non estampillées établissent que le prévenu a mis en vente de nombreux animaux abattus dans des locaux qui ne sont pas agréés, ce qui constitue le délit de tromperie au sens de l'article L. 213-1 du Code de la consommation;
Sur le délit d'exploitation non autorisée d'une installation classée pour la protection de l'environnement
Considérant qu'il résulte des mêmes constatations que le dépôt de chairs, débris ou issues d'origine animale découvert dans la ferme de Louis F, constitué d'ovins, de caprins, de porcins, représente un poids d'au moins trois cents kilos, en dépit de l'évaluation minorée que le prévenu avait demandé aux premiers juges de retenir;
Qu'ainsi, est justifiée la prévention du délit d'exploitation non autorisée d'une installation pour la protection de l'environnement, prévu et réprimé par la loi du 19 juillet 1976;
Sur la contravention d'exploitation non autorisée d'installation classée sans déclaration, préalable
Considérant que la direction des services vétérinaires a constaté la présence, dans la ferme de Louis F, de peaux de moutons salées non séchées;
Que Louis F a déclaré que ces peaux découvertes à proximité de la cuisine à eaux grasses provenaient d'agneaux égorgés les jours précédents et devaient être enlevées par l'équarrisseur;
Que, cela étant, il a reconnu ne posséder aucune autorisation ou récépissé de déclaration l'autorisant à détenir ces peaux;
Sur la contravention d'abattage d'animaux hors d'un abattoir en dehors des cas autorisés
Considérant que, lors du contrôle de la direction des services vétérinaires, une dizaine de véhicules se trouvaient dans la cour de la ferme, appartenant à des particuliers qui reconnaissaient s'y être rendus pour acheter de la viande ou pratiquer directement l'abattage d'animaux; qu'un mouton, venant d'être égorgé, se vidait de son sang, qu'une plumeuse à volailles était maculée de sang et de plumes sur un sol recouvert de sang frais et que la poursuite des investigations permettait la découverte de deux porcs fraîchement abattus sur le sol souillé à côté d'une masse et d'un couteau maculés de sang;
Que Louis F a reconnu ne posséder aucune autorisation pour procéder. dans sa ferme, à l'abattage de porcs et d'ovins;
Qu'il a expliqué qu'il faisait abattre ses animaux par l'abattoir de Meaux mais qu' il acceptait cependant, pour satisfaire sa clientèle que, à la demande des maghrébins, des ovins soient abattus sous leurs yeux et qu'il en était de même des porcins, abattus à la masse à la demande des asiatiques, le tout, dans le respect d'un rituel, étant précisé que, selon les déclarations du prévenu, le procédé d'abattage par électrocution ne convient pas à la clientèle asiatique au motif qu'il arrive que cette méthode entraîne le bris des omoplates de l'animal;
Sur la contravention d'exposition. circulation ou mise en vente de pièces d'animal abattu, non marqué ou estampillé
Considérant que, compte tenu des constatations faites par les services vétérinaires et des observations ci dessus, l'infraction relevée à l'encontre de Louis F est parfaitement caractérisée;
Considérant, en définitive, qu'il résulte de l'ensemble des éléments soumis à l'appréciation de la cour que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu Louis F dans les liens de la prévention sur les deux délits et les trois contraventions qui lui sont reprochés;
Qu'il y a lieu, en conséquence, de confirmer le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité du prévenu;
Considérant que, en répression, la cour fera à Louis F une application plus sévère de la loi pénale, qu'elle modulera en fonction, d'une part, des deux délits, d'autre part, des trois contraventions visées à la prévention;
Par ces motifs: LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de Louis F en application de l'article 410 du Code de procédure pénale, Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité, L'infirme en répression, Condamne Louis F à la peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 50 000 F au titre des délits, Ordonne, en application de l'article L. 216-3 du Code de la consommation, la publication du présent arrêt, par extrait, dans le quotidien "Le Parisien", Condamne Louis F à trois amendes de 5 000 F au titre des contraventions, La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 800 F dont est redevable le condamné.