Ministre de l’Économie, 10 décembre 2003, n° ECOC0400048Y
MINISTRE DE L’ÉCONOMIE
Lettre
PARTIES
Demandeur :
MINISTRE DE L'ECONOMIE
Défendeur :
Conseil de la société coopérative CAP 50
MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE
Maître,
Par dépôt d'un dossier déclaré complet le 7 novembre 2003, vous avez notifié le projet d'acquisition par la société coopérative CAP 50 (ci-après " CAP 50 "), par l'intermédiaire de la société HAIM sa filiale en cours de constitution, du groupe AIM (ci-après " AIM "). Cette opération a été formalisée par trois protocoles d'accord signés le 10 octobre 2003.
I. - Les entreprises concernées et l'opération
La société CAP 50, société coopérative dont les adhérents sont des producteurs de porcs, a pour activité la collecte de porcs auprès de ces producteurs et la commercialisation des porcs vivants auprès des abattoirs. En 2002, CAP 50, qui n'a de participations dans aucune société, a réalisé, en France exclusivement, un chiffre d'affaires de 41 millions d'euros.
Le groupe AIM, entité cible, constitué de la société AIM et de ses trois filiales (1), a pour activité l'approvisionnement de porcs, veaux, boeufs, volailles et moutons, l'abattage de ces derniers et leur commercialisation en carcasse, découpe et sous-vide. Il dispose pour cela de deux principaux sites (2) d'abattage, à Sainte-Cécile (département de la Manche), et à Antrain (département d'Ille-et-Vilaine), dont seul le premier abat des porcs. Le groupe AIM a réalisé en 2002 un chiffre d'affaires total, calculé conformément à l'article 5 du règlement communautaire n° 4064-89 du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, de 228 millions d'euros intégralement dans l'Union européenne, dont 206 millions en France.
L'opération notifiée, en ce qu'elle emporte l'acquisition de la totalité du capital d'AIM par CAP 50, constitue une opération de concentration au sens de l'article L. 430-1 du Code de commerce. Compte tenu des chiffres d'affaires précités, elle ne revêt pas une dimension communautaire au sens du règlement (CE) n° 4064-89 du 21 décembre 1989 et est soumise à l'application des articles L. 430-3 et suivants du Code de commerce relatifs à la concentration économique.
II. - Définition des marchés et analyse concurrentielle
Les marchés pertinents, selon les parties, sont ceux de la production de porcs vivants et de l'abattage de porcs. Cette délimitation correspond à la pratique communautaire (3) qui distingue le marché de la production et de la vente de porcs vivants destinés à l'abattage et le marché de la vente de viande de porc fraîche.
En ce qui concerne la dimension géographique des marchés, la Commission, aux termes de la décision précitée, définit le marché de la production et de la vente de porcs vivants destinés à l'abattage comme étant tout au plus de dimension nationale et le marché de la vente de viande de porc fraîche comme étant de dimension nationale. En tout état de cause, cette question peut en l'espèce rester ouverte, les conclusions de l'analyse demeurant inchangées.
L'opération notifiée au ministre ne conduit à aucun chevauchement entre les activités des entreprises concernées. Elle constitue cependant une intégration verticale et pose donc la question de l'accès des producteurs de porcs vivants à des abattoirs, qu'il s'agisse de ceux de l'entité cible ou d'abattoirs différents.
A l'instar des conclusions, transposables au cas français, auxquelles avait abouti la Commission dans le cadre de l'affaire précitée, les parties relèvent que les abattoirs achètent 90 % de leurs porcs vivants dans un rayon de 120 kilomètres autour de leurs installations. Or, il convient de remarquer que, dans les départements inclus dans ce rayon de 120 kilomètres (Manche, Calvados, Orne, Mayenne, Ille-et-Vilaine, Côtes-d'Armor), six abattoirs de capacité supérieure (4) concurrencent l'abattoir de Sainte-Cécile. Les producteurs de porcs peuvent ainsi avoir recours à six autres abattoirs : trois en Ille-et-Vilaine (5) et trois dans les Côtes-d'Armor(6).
En conclusion, il ressort de l'instruction du dossier que l'opération notifiée n'est pas de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par création ou renforcement de position dominante. Je vous informe donc que j'autorise cette opération.
Veuillez agréer, Maître, l'expression de ma considération distinguée.
(1) Ces trois filiales, que la société AIM détient à 100 %, sont : la SA SEAA qui exploite l'abattoir d'Antrain, la SA COVINAB qui a pour objet l'achat d'animaux et leur vente en carcasse, découpe et sous-vide et la SA La Courtonnaise qui exerce une activité d'abattage de bovins et d'ovins.
(2) L'abattoir de Nogent-le-Rotrou (département d'Eure-et-Loir) n'abat que 5 000 tonnes (ovins et bovins) par an.
(3) Cf. décision de la Commission IV-M.1313-Danish Crown/Vestjyske Slagterier du 9 mars 1999.
(4) Les six abattoirs concernés disposent chacun d'une capacité d'abattage comprise entre 87 000 à 176 000 tonnes, contre 66 000 pour l'abattoir de Sainte-Cécile. Les deux abattoirs les plus importants appartiennent à la coopérative agricole COOPERL, premier groupe porcin français. Les autres sont exploités par un groupe de producteurs de porcs et deux sociétés anonymes.
(5) Les trois abattoirs d'Ille-et-Vilaine sont ceux de Montfort-sur-Meu, de Saint-Brice-en-Coglès et de La Guerche-de-Bretagne.
(6) Les trois abattoirs des Côtes-d'Armor sont ceux de Lamballe, de Loudéac et de Collinée.