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Décisions

CA Toulouse, 3e ch., 19 mai 1999, n° 98-01209

TOULOUSE

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Union fédérale des consommateurs de Toulouse - Que choisir?

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schiex

Avocat général :

M. Baxerre

Conseillers :

Mmes Fourniel, Perrin

Avocat :

Me Bensard.

TGI Toulouse, 3e ch., du 2 nov. 1998.

2 novembre 1998

Rappel de la procédure:

Le jugement:

Le tribunal, par jugement en date du 2 novembre 1998 a déclaré B Didier coupable de:

* Publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, courant juin 1993, à Toulouse, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 121-4, L. 213-1 du Code de la consommation

* Tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, le 27 juillet 1994 à Toulouse, infraction prévue par l'article L. 213-1 du Code de la consommation et réprimée par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation

Et, en application de ces articles l'a condamné à 15 000 F d'amende, publication dans la "Dépêche du Midi", édition de Toulouse (coût maximum 2 500 F).

Sur l'action civile

* Union fédérale des consommateurs de Toulouse - Que choisir?, 800 F à titre de dommages- intérêts, 200 F au titre de l'article 475-1 du CPP

Les appels:

Appel a été interjeté par:

M. B Didier, le 10 novembre 1998

M. le Procureur de la République, le 13 novembre 1998 contre M. B Didier

Décision:

Les appels successifs de B Didier interjeté le 10 novembre 1998 et du Ministère public interjeté le 13 novembre 1998 d'un jugement rendu par le Tribunal correctionnel de Toulouse, le 2 novembre 1998 réguliers en la forme et interjetés dans le délai légal sont recevables en la forme.

B Didier est président directeur général de la société X. En juin 1994, il a fait éditer le nouveau catalogue de sa société spécialisée dans la vente aux professionnels de matériel d'alarme de robotique et de motorisation.

Pour établir ce catalogue, il a acquis auprès de la société Muratron de Valence, s'agissant des dispositifs parafoudre, un exemplaire de chaque article et les a photographiés.

Les produits effectivement mis en vente n'étaient pas ceux de la société Muratron, mais étaient achetés auprès de la société JAN Internationale à Taiwan et à la société Eurema à Tournon sur Rhône.

La société Reva concurrente de la société X qui commercialise entre autre des parafoudres de marque Muratron, a constaté que ces produits étaient photographiés sur le catalogue diffusé par sa concurrente.

Elle a procédé elle-même à une commande et a constaté que les produits livrés ne correspondaient pas aux produits annoncés.

Une enquête diligentée par la Direction régionale de la concurrence et de la répression des fraudes a mis en évidence que les griefs formulés par la société Reva étaient fondés.

En effet, la société X n'avait commandé qu'un exemplaire d'un ensemble de matériel pour confectionner son catalogue et s'était ensuite approvisionnée auprès d'une entreprise de Taiwan et d'un distributeur de Tournon sur Rhône.

L'analyse effectuée par le Laboratoire interrégional de la répression des fraudes de Paris- Massy portant sur trois produits différents, qui avaient été prélevés, a permis d'établir que ces produits n'étaient pas conformes aux normes applicables.

Leur aspect extérieur était comparable aux produits de marque Muratron photographiés dans le catalogue. Ils portaient toutefois, une autre marque.

Un procès-verbal a dès lors été établi pour infraction à l'article L. 121-1 du Code de la consommation visant la publicité trompeuse ou de nature à induire en erreur dans la mesure où les produits effectivement vendus ne correspondait pas aux produits annoncés et pour infraction à l'article L. 313-1 du même code prohibant la tromperie sur les qualités substantielles des marchandises vendues, dans la mesure où B Didier en tant qu'importateur et responsable de la première mise sur le marché ne s'était pas assuré de la qualité des marchandises qu'il diffusait, avait mis sur le marché des marchandises non-conformes.

M. B a été entendu au cours de la procédure et a indiqué qu'il n'avait pas commercialisé les produits de marque Muratron tels qu'ils figuraient dans son catalogue parce que cette société n'avait jamais honoré ses commandes.

Afin de vérifier ses dires les enquêteurs lui ont demandé de produire les bons de commandes non honorés. Il a effectivement produit un bon de commande qui concernait des marchandises autres que celles sur lesquelles les infractions avaient été constatées.

Pour justifier qu'il avait satisfait à ses obligations de contrôle des produits mis sur le marché, il a produit des fiches techniques reprenant les caractéristiques des produits tels qu'elles ont été rédigées par le fournisseur de Taiwan des fiches de contrôle rédigées en allemand et portant sur des produits autres que ceux qui ont été incriminés dans le procès-verbal. Les contrôles exigés n'ont donc pas été effectués.

Les services d'enquête ont établi que le matériel en provenance de Taiwan était acquis à un prix sensiblement inférieur celui de la société Muratron.

De fait, le 17 octobre 1994 un prélèvement en trois échantillons a été effectué sur les références catalogues PS 7 4PSIF et PSIFPT (D21 - D19 - D 17).

Le Laboratoire central des industries électriques qui a examiné ces appareils a constaté la destruction du dispositif de protection pour des valeurs d'ondes, ondes de courant inférieures à la valeur annoncée sur l'emballage, soit 4 500 ampères. (D 13 - D 14 - D 15).

Le prévenu a demandé une contre-expertise et celle-ci a indiqué que ces matériels pour remplir leur finalité, ne devaient pas être détruits pour des valeurs d'ondes de courant inférieur à la valeur annoncée sur l'emballage, soit 4 500 ampères. Or, les essais montraient que ces modules devenaient non fonctionnels pour des courants de l'ordre de 1 700 ampères (D 50).

B Didier comparait et expose que c'est parce que la société Muratron n'a pu le fournir qu'il s'est rabattu sur le produit originaire de Taiwan. Il indique qu'il n'a jamais eu l'intention de tromper sa clientèle sur la capacité de produits vendus à remplir leur fonction. Son conseil dépose des conclusions qu'il développe oralement aux termes desquelles les parafoudres fournis par la société Eurema étaient en réalité totalement identiques à ceux commercialisés par la société Muratron, dans la mesure ou celle-ci se fournissait également à Taiwan et se contentait d'apposer sa marge sur ces produits.

Il apparaît que les parafoudres qu'elle a livrés étaient de même nature, de même origine que ceux de la société Muratron et donc correspondaient à la publicité proposée, il en déduit que l'infraction de publicité mensongère n'est pas constituée.

Il précise qu'aucun client ne s'est plaint d'avoir reçu des parafoudres d'une autre marque.

Il conclut que la tromperie ne peut en aucun cas résulter de la différence entre la mention apparaissant sur l'emballage et les possibilités de l'appareil, dès lors que l'intensité maximum des appareils n'était pas mentionnée sur les publicités et le catalogue de la société X.

Il indique qu'il ne résulte pas du rapport d'expertise que le parafoudre commercialisé ait été impropre à leur destination.

Il conclut finalement au renvoi de la poursuite de B Didier.

Le Ministère public requiert confirmation du jugement dont appel.

L'Union fédérale des consommateurs de Toulouse conclut par confirmation du jugement dont appel et demande la condamnation de B Didier à lui payer une somme de 1 500 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Sur quoi,

Attendu que l'infraction aux dispositions des articles L. 121-1 et suivants du Code de la consommation, est parfaitement établie dès lors que B Didier a fait figurer sur un catalogue destiné à sa clientèle de professionnels et de spécialistes des appareils facilement identifiables comme étant fabriqués par la société Muratron tandis que, le matériel qui était livré après commande était du matériel d'une autre marque ou ne comportait plus exactement aucune marque et ceci même si ses caractéristiques étaient voisines.

Attendu que B Didier n'a jamais prétendu qu'il n'avait jamais proposé à ses clients un matériel équivalent en l'état de l'absence dans ses stocks du matériel commandé.

Attendu qu'il n'est pas pertinent de prétendre que personne ne s'est plaint de ces agissements dès lors qu'au contraire une plainte parfaitement motivée a été adressée à la DDCCRF, par l'un de ses concurrents.

Attendu qu'il a ainsi effectué une publicité comportant des allégations et indications ou présentation fausses quant à la nature et à l'origine des marchandises.

Que la déclaration de culpabilité doit dès lors, être confirmée.

Attendu sur l'infraction aux dispositions de l'article L. 213-1 et suivants du Code de la consommation que contrairement à ce qu'indique B Didier les conclusions des deux rapports d'expertise aboutissent à la constatation que ces matériels ne remplissent pas leur finalité indiquée sur les emballages et étaient détruits pour des valeurs d'ondes de courant inférieures à la valeur annoncée, soit 4 500 ampères.

Attendu qu'il est indifférent que cette mention ait ou non figuré sur le catalogue dès lors qu'elle figurait sur les emballages des matériels concernés.

Attendu qu'il résulte des effets que les modules dont il s'agit, devenaient non fonctionnels pour des courants de l'ordre de 1 700 ampères.

Attendu qu'il en résulte que l'appareil que l'utilisateur pouvait penser protégé, avait cessé de l'être.

Attendu que dès lors le délit reproché à B Didier est parfaitement constitué et qu'il convient sur ce point aussi de confirmer la décision dont appel.

Attendu que la cour peut adopter les motifs du jugement déféré tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine,

Sur l'action civile,

Attendu que l'Union fédérale des consommateurs de Toulouse s'est constituée partie civile, que sa demande de confirmation qui a condamné B Didier à lui payer une somme de 800 F à titre de dommages et intérêts peut être confirmée,

Attendu que l'appel de B Didier a occasionné des frais irrépétibles à cette association, et qu'il serait inéquitable de les laisser à sa charge, qu'il convient ajoutant à la décision dont appel de condamner B Didier à payer à l'UFC de Toulouse une somme de 1 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale,

Par ces motifs, la COUR, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort. Reçoit les appels de B Didier et du Ministère public d'un jugement rendu le 2 novembre 1998 par le Tribunal correctionnel de Toulouse. Confirme cette décision tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine (15 000 F d'amende, publication d'un extrait contenant l'exposé complet de la qualification dans le journal la Dépêche du Midi, édition de Toulouse - limitant le coût de cette publication à la somme de 2 500 F). Sur l'action civile, Confirme le jugement dont appel, Y ajoutant,

Condamne B Didier à payer une somme de 1 000 F à l'Union fédérale des consommateurs de Toulouse, sur le fondement de l'article 475-l du Code de procédure pénale.

La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont chaque condamné est redevable,

Fixe la contrainte par corps, s'il y a lieu, conformément aux dispositions de l'article 750 du Code de procédure pénale

Le tout en vertu des textes sus-visés;