CA Grenoble, président, 31 mars 2004, n° 04-00017
GRENOBLE
Ordonnance
PARTIES
Demandeur :
Autostyl (SA)
Défendeur :
Nissan France (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Catteau
Avoués :
SCP Hervé Jean Pougnand, Me Ramillon
Avocats :
Mes Bertin, Homman, SCP Vogel & Vogel.
Par acte du 11 février 2004 la SA Autostyl a assigné en référé la SA Nissan France pour être autorisée à faire appel du jugement du 12 janvier 2004 du Tribunal de commerce de Grenoble qui a sursis à statuer sur sa demande de dommages et intérêts pour refus d'agrément dans l'attente d'une décision définitive sur le caractère légitime ou non de la résiliation du contrat de concession. Elle rappelle qu'elle était concessionnaire depuis 1972, que Nissan a résilié la concession le 9 septembre 2002 avec effet au 9 septembre 2004, l'a résiliée à nouveau le 24 juillet 2003 avec effet au 30 septembre après parution du règlement CE 1400-2002, qu'elle a d'autre part refusé son agrément le 6 août 2003 à cause de la résiliation pour faute antérieure; elle précise que le contentieux de la résiliation est soumis aux juridictions versaillaises en application des attributions de compétence contractuelles mais que le contentieux du refus d'agrément a été soumis à la juridiction du lieu de réalisation du dommage, que par premier jugement du 24 octobre 2003 le Tribunal de commerce de Grenoble a sursis jusqu'au jugement du Tribunal de commerce de Versailles, lequel a dit la résiliation de la concession abusive le 14 novembre et condamné avec exécution provisoire à payer 208 912 euros de dommages et intérêts, que par second jugement du 12 janvier il a sursis jusqu'à décision définitive, en raison de l'appel du jugement versaillais. Elle soutient que l'urgence subsiste parce que si elle a vendu son fonds elle a dû le brader et n'a pu choisir son acquéreur, que le prix ne couvre que son passif, qu'elle a besoin de se reconvertir, que le jugement est irrégulier en ce qu'il porte atteinte à la chose jugée par jugement du 24 octobre 2003 non frappé d'appel de surseoir jusqu'au jugement alors qu'il n'y a pas de circonstance nouvelle, qu'il n'y a aucun lien de connexité entre résiliation et refus d'agrément postérieur à celle-ci, qu'elle ne peut attendre une solution définitive de la première procédure dans quelques années. Elle répond à son adversaire que l'erreur de l'assignation corrigée par conclusions ne crée pas grief, qu'elle donne la nouvelle adresse du siège selon décision publiée.
La société Nissan France conclut à la nullité de l'assignation et à l'irrecevabilité, au débouté, au paiement de 1 000 euros en vertu de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle soutient que l'assignation est nulle faute de mention du siège social réel qui lui fait grief pour l'exécution ou l'exercice éventuel de voies de recours et l'adversaire ne régularise pas le vice en indiquant à la place de l'ancien siège de la société l'adresse du dirigeant sans justifier que le siège y a été transféré; la décision de surseoir est conforme à l'article 379 du nouveau Code de procédure civile qui permet un nouveau sursis à l'expiration du premier, étant précisé que le tribunal n'a pas modifié sa décision et ne s'est nullement dédit, que le sursis a été ordonné en raison de la connexité évidente de deux procédures, qu'il n'y a pas d'urgence, Autostyl ayant vendu son fonds pour un prix très intéressant, n'ayant pas dû licencier (contrairement à ce qu'elle a faussement prétendu devant le premier Président à Versailles), la possibilité d'agrément étant de ce fait exclue, le préjudice actuel n'étant pas justifié, étant elle-même à l'origine du retard de paiement des dommages et intérêts pour avoir fourni une caution non valable, que le délai de jugement en appel ne peut être un motif grave, que l'audience est d'ailleurs fixée le 1er avril; en tout état de cause elle affirme que la décision prise était parfaitement justifiée, le refus d'agrément ayant été motivé par la résiliation extraordinaire du 24 juillet 2003, à laquelle l'adversaire se réfère expressément, que le risque de contrariété est évident, qu'il n'y a eu aucune discrimination, que les mêmes critères ont été appliqués à tous, que le tribunal de commerce ne peut apprécier si la résiliation était fondée et de nature à justifier le refus d'agrément, que son adversaire doit assumer son choix de saisir en premier la juridiction versaillaise.
Sur ce:
Attendu que même si la décision de transfert du siège social, du 18 février, est postérieure à l'assignation, elle a été publiée, que le vice de forme a été régularisé et qu'il n'y a plus de grief.
Attendu que l'urgence n'est pas une condition de l'octroi de l'autorisation d'appel.
Attendu que l'article 379 du nouveau Code de procédure civile réserve la possibilité pour la juridiction d'un nouveau sursis à statuer à l'expiration du premier; que la décision prise rentrait donc dans les pouvoirs du tribunal et n'est pas irrégulière.
Attendu qu'aucun des actes de résiliation avec préavis, de résiliation pour faute, de refus d'agrément n'est produit; que selon le Tribunal de commerce de Versailles la résiliation pour faute a été notifiée au motif de résultats insuffisants,que selon le Tribunal de commerce de Grenoble en ses deux jugements le refus d'agrément a été essentiellement motivé par le caractère fautif de l'exécution du précédent contrat qui a amené à la résiliation;que la réponse à la question du refus d'agrément dépend donc bien essentiellement de la réponse à la question pour faute;qu'en toute hypothèse comme l'a dit le tribunal de commerce les questions se résoudront en dommages et intérêts;que le juge du fond a normalement apprécié l'intérêt d'une bonne administration de la justice d'attendre une décision sur la résiliation pour faute qui ne soit pas exécutoire au seul bénéfice de l'exécution provisoire et qu'il n'est pas justifié d'un motif grave et légitime.
Attendu que l'équité ne commande pas en l'état l'application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par ces motifs, Statuant en la forme des référés, rejetons les demandes.Laissons les dépens à la charge de la demanderesse.