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Décisions

Cass. com., 31 mars 2004, n° 02-16.059

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

CMF Fitness (SARL)

Défendeur :

NJ Forme (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Champalaune

Avocat général :

M. Lafortune

Avocat :

SCP Le Griel.

Amiens, ch. com., du 22 mars 2002

22 mars 2002

LA COUR : - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 22 mars 2002), que la société CMF Fitness et la société NJ forme exploitent une salle de sport dans la même zone de chalandise; qu'invoquant le fait que la société NJ forme ne respectait pas les dispositions légales régissant cette activité et qu'elle avait obtenu indûment des fonds publics faussant ainsi la concurrence, la société CMF Fitness l'a assignée en paiement de dommages-intérêts; que le tribunal a rejeté la demande de la société CMF Fitness ; que l'arrêt déféré a infirmé le jugement, condamné la société NJ forme à payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts au titre de faits constitutifs de publicité trompeuse dont elle a ordonné la cessation sous astreinte, et a rejeté le surplus des demandes de la société CMF Fitness;

Sur le moyen unique, pris en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches : Attendu que la société CMF Fitness fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen : 1°) que la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, lesquelles n'invoquaient pas l'illégalité de l'association " Halte garderie les petits musclés " ni ne prétendaient que la seule existence de la halte garderie constituait un acte de concurrence déloyale mais entendaient faire sanctionner l'abus de droit et la fraude à la loi commis par la société NJ forme, laquelle avait fait en sorte que soit financé sur des fonds publics réservés aux associations un équipement destiné à procurer un avantage concurrentiel à une société commerciale et qu'elle a par là-même violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; 2°) qu'en omettant de rechercher si la société NJ forme n'avait pas commis un abus de droit et une fraude à la loi constitutifs de concurrence déloyale en créant l'association " Halte garderie les petits musclés " à seule fin de faire financer par des fonds publics le service de halte-garderie qu'elle voulait offrir à sa clientèle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ; 3°) qu'en se fondant sur un certificat de visite de la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports en date du 13 octobre 1999 versé aux débats par la société NJ forme pour décider que le grief fait à cette société d'employer des professeurs de sport non qualifiés à la date du 8 octobre 2001 n'était pas établi, la cour d'appel a dénaturé ledit certificat qui non seulement avait été établi deux ans avant la date des faits reprochés mais encore ne faisait pas spécifiquement état de la qualification des professeurs de sport employés dans l'établissement et qu'elle a par là-même violé l'article 1134 du Code civil ; 4°) que les juges du fond sont tenus de se prononcer sur les documents régulièrement versés aux débats et soumis à leur examen et qu' en omettant en l'occurrence de se prononcer sur le constat d'huissier en date du 8 octobre 2001 produit par la société CMF Fitness et visé dans ses conclusions dont il résultait que la société NJ forme employait des professeurs de sport non qualifiés, la cour d'appel a entaché sa décision d'un grave défaut de motifs et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en l'état des conclusions de la société CMF Fitness soutenant seulement que la création par NJ forme dans le but non caché de son développement commercial, d'une association à but non lucratif, bénéficiant de subventions publiques et d'avantages fiscaux dont ne pouvait bénéficier directement la société commerciale NJ forme et dont ne peut bénéficier sa concurrente CMF Fitness était constitutive de concurrence déloyale, la cour d'appel qui retient que la société CMF Fitness ne rapporte pas la preuve que la création de l'association "halte-garderie les petits musclés" serait illégale d'autant que cette association n'accueille pas uniquement les enfants de la clientèle de la société NJ forme même si elle est implantée dans ses locaux et qu'elle ne démontre donc pas en quoi l'existence de cette halte-garderie constituerait un acte de concurrence déloyale, n'a pas dénaturé les conclusions et a légalement justifié sa décision;

Et attendu, en second lieu, que l'attestation arguée de dénaturation énonce "qu'il a été constaté que l'établissement était conforme aux dispositions légales et réglementaires concernant les établissements où se déroulent les activités physiques et sportives" ;qu'en retenant qu'un contrôle effectué par la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports démontrait que l'établissement exploité par la société NJ forme était conforme aux dispositions légales et réglementaires applicables, la cour d'appel n'a pas dénaturé l'attestation litigieuse et a souverainement apprécié les éléments de preuve versés aux débats;Qu'il suit de là que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen, pris en sa dernière branche : Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; Attendu que pour rejeter la demande fondée sur le non respect de la réglementation attachée à l'activité exercée par la société NJ forme en matière d'affichage, l'arrêt retient que la société CMF Fitness soutient que la société NJ forme aurait embauché des professeurs de sport non qualifiés, ce qui constituerait un agissement déloyal mais qu'un contrôle effectué par la Direction Départementale de la Jeunesse et des Sports démontre que l'établissement exploité par la société NJ forme est conforme sur ce point aux dispositions légales et réglementaires applicables;

Attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, sans s'expliquer sur le grief fait à la société NJ forme de ne pas avoir respecté la réglementation en matière d'affichage applicable à l'activité en cause, la cour d'appel a violé le texte susvisé;

Par ces motifs : Casse et annule, l'arrêt rendu le 22 mars 2002, entre les parties, par la Cour d'appel d'Amiens et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Douai.