CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 15 janvier 2004, n° 02-01923
VERSAILLES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
SEGF (SARL)
Défendeur :
EDF (Sté), Compagnie Corporate Gestion Déléguée (SA)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Laporte
Conseillers :
MM. Fedou, Coupin
Avoués :
Mes Ricard, Binoche, SCP Gas
Avocats :
SCP du Manoir de Juaye & Associés, SCP Toison, Villey, Broud, Me Bertani Baroukh Ebstein
Faits, procédure et moyens des parties
Pour mettre en place un " Fonds commun de communication ", l'établissement public à caractère industriel et commercial Electricité de France, ci-après désignée EDF, a, après une première phase de test, signé le 21 mars 1994 avec la société Compagnie Corporate un contrat confiant à cette dernière, agence de communication, la prestation des services de communication dans cette opération.
Le même jour, la Compagnie Corporate concluait avec la société SEGF un contrat de sous-traitance partielle intitulé "contrat d'exploitation et de maintenance de système informatique", qui a pris fin à son terme contractuel du 31 décembre 1998.
Insatisfaite des conditions dans lesquelles s'étaient terminées ces relations contractuelles, la société SEGF a assigné la société Compagnie Corporate Gestion Déléguée qui était aux droits de la Compagnie Corporate et la société EDF pour leur réclamer la somme de 2 615 131,14 F (398 674,17 euros) de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du non-respect des accords contractuels et 1 562 593 F (238 215,77 euros) à titre d'indemnité de cessation d'activité outre 20 000 F (3 048,98 euros) pour ses frais irrépétibles.
La société EDF, déniant toute inexécution fautive de ses obligations a conclu au débouté de la demande en réclamant 20 000 F (3 048,98 euros) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société Corporate Gestion a soulevé une exception d'incompétence au profit du Tribunal de grande instance de Nanterre, une exception de prescription de la demande indemnitaire au titre du manque à gagner et a sollicité que la société SEGF soit déboutée de ses demandes.
Par jugement rendu le 9 janvier 2002, cette juridiction, après s'être déclarée compétente, a dit prescrite la demande de la société SEGF relative au manque à gagner pour la période antérieure au 1er juillet 1996 résultant d'une inexécution du contrat du 21 mars 1994, a débouté celle-ci de toutes ses autres demandes et l'a condamnée à payer 1 500 euros à chacune des deux sociétés défenderesses.
La société SEGF, qui a interjeté appel de cette décision, explique qu'elle a été exclusivement constituée pour l'exploitation et la maintenance du système du fonds commun de communication d'EDF. Invoquant les articles L. 420-2 et L. 442-6 du Code de commerce et les articles 1111 et 1112 du Code civil, elle soutient que, lors de la signature et de l'exécution du contrat, comme à son achèvement, elle se trouvait dans une situation de dépendance et de violence économiques vis-à-vis d'EDF et de la société Corporate Gestion filiale majoritaire de celle-ci.
Pour en démontrer la réalité, elle fait état de ce que la totalité de son chiffre d'affaires était réalisé par le contrat, invoque le caractère exclusif vis-à-vis d'EDF de son intervention, et affirme l'impossibilité dans laquelle elle se trouvait d'avoir d'autres clients pendant la période d'exploitation.
Elle ajoute que les contrats signés entre elle et la société Corporate Gestion et celui conclu entre cette dernière et la société EDF sont des contrats à durée déterminée avec une fin prévue au 31 décembre 1998 et explique que la dépendance économique dans laquelle elle se trouvait ne lui a pas permis d'obtenir un équilibre contractuel en raison de l'absence d'une clause d'indemnité. Elle en déduit qu'il y a eu violence ce qui, selon elle, exige réparation.
Elle fait grief aux premiers juges de l'avoir déboutée à l'encontre de la société EDF au motif que sa demande était fondée sur la responsabilité contractuelle au visa de l'article 1134 du Code civil et qu'elle n'avait pas de relation de cette nature avec la société EDF. Elle soutient que la simple lecture et la compréhension des contrats rend incontestable l'existence de relations contractuelles entre elle-même et la société EDF.
Elle fait valoir que, si la responsabilité contractuelle de cette dernière n'était pas reconnue, la responsabilité délictuelle d'un abus de position dominante découle des faits eux-mêmes.
Elle explique qu'elle a cessé toutes ses activités à compter du 1er janvier 1999 et soutient que les sociétés EDF et Corporate Gestion doivent être condamnées à lui payer l'ensemble des frais conséquents à cette cessation, à savoir les indemnités de licenciement pour 161 907,27 euros (1 062 042,07 F), l'indemnité de résiliation du bail commercial de 290 686 F (44 314,80 euros), les diverses charges supportées en 1999, 2000 et 2001 qui s'élèvent à un total de 208 938 F (31 852,39 euros), le coût des poursuites judiciaires dont elle fait l'objet.
Elle demande ainsi à la cour de condamner les sociétés EDF et Corporate Gestion à lui payer la somme de 243 848,39 euros, montant total de son préjudice, ainsi que celles de 3 000 euros chacune, en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société Corporate Gestion rappelle les circonstances dans lesquelles la société EDF a été amenée à lui confier l'opération de généralisation du fonds commun de communication et où elle-même a fait appel à la société SEGF pour la fourniture et la maintenance des matériels et logiciels informatiques.
Relevant les modifications dans l'argumentation de la société SEGF et constatant que cette dernière invoque les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce, elle en tire une exception d'irrecevabilité de cette action car la cour est, selon elle, incompétente pour statuer en cette matière, sur ce fondement, au profit de la compétence exclusive du Conseil de la concurrence.
Subsidiairement, elle affirme que la société SEGF n'ignorait pas le caractère déterminé et non renouvelable de la convention en raison du remplacement du fonds commun de communication par un système " intranet ". Elle fait valoir que la preuve n'est pas rapportée qu'elle-même et la société EDF auraient refusé de prévoir une indemnité de fin de contrat en raison d'une position dominante. Elle expose les raisons pour lesquelles, selon elle, la société SEGF n'avait aucune dépendance économique à son égard ou à celui de la société EDF.
Elle dénie tout abus de puissance contractuelle en expliquant qu'aucune exclusivité de son activité n'a été imposée à la société SEGF qui pouvait étendre et diversifier sa clientèle.
Elle rappelle que le contrat a été exécuté jusqu'à son terme, connu à l'avance par la société SEGF, et dénie toute faute contractuelle d'un défaut de prorogation. Elle ajoute que celle-ci avait la possibilité de poursuivre son activité de prestataire informatique auprès d'autres clients et notamment ceux du groupe dont elle fait partie.
Elle discute enfin les éléments de préjudice allégués par la société SEGF tant en ce qui concerne les licenciements que la résiliation du bail commercial et des charges des années 1999 à 2001.
Elle conclut ainsi à l'irrecevabilité des demandes de la société SEGF, subsidiairement à leur mal fondé et à la confirmation du jugement et réclame à cette dernière 6 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La société EDF explique les conditions dans lesquelles son projet de fonds commun de documentation a été réalisé et souligne que, dès 1997, les intervenants savaient qu'elle abandonnerait le système retenu au profit d'un "intranet" dénommé Netcom.
Elle fait valoir son absence de lien contractuel avec la société SEGF, sous-traitant de la société Corporate Gestion, et invoque les dispositions de l'article 1165 du Code civil.
Subsidiairement, observant que la société SEGF renonce à sa demande d'indemnisation de 2 615 131,14 F (398 674,17 euros) à raison du prétendu non-respect des accords contractuels formée en première instance, elle dénie toute dépendance ou violence économiques comme tout abus de position dominante. Elle explique que la société SEGF avait parfaitement la possibilité de développer son activité avec d'autres clients notamment ceux du groupe Laserphoto auquel elle appartient. Elle relève que la société SEGF ne démontre pas en quoi il existerait un abus de position dominante, sans en préciser les éléments constitutifs.
Se prévalant des dispositions de l'article 1134 du Code civil, elle affirme l'impossibilité de la cour de modifier les dispositions contractuelles qui n'envisagent aucunement une indemnisation de fin de contrat.
A titre subsidiaire, elle affirme le caractère totalement fantaisiste des demandes financières de la société SEGF et des éléments de preuves versés à l'appui de celles-ci.
Aussi conclut-elle à la confirmation du jugement et au débouté de la société SEGF en toutes ses demandes, en lui réclamant 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
La procédure a été clôturée par une ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 9 octobre 2003 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 18 novembre 2003.
Motifs de la décision
Sur l'exception d'incompétence
Considérant que l'action engagée par la société SEGF en cause d'appel, repose, notamment, sur le fondement de l'article L. 420-2 du Code de commerce qui vise l'abus de dépendance économique, aussi bien dans la rédaction de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 aujourd'hui codifiée que dans celle de l'actuelle article L. 420-2 du Code de commerce tel qu'il a été modifié par la loi 2001-420 du 15 mai 2001 dite loi Murcef;
Considérant que la mise en œuvre de ce texte ne conduit aucunement à exclure la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire;
Considérant en effet que l'article L. 462-5 du Code de commerce édicte que la saisine du Conseil de la concurrence par les entreprises reste une faculté qui leur est offerte; qu'il ne résulte pas des dispositions de l'article L. 462-6 du Code de commerce définissant le rôle du Conseil de la concurrence au regard, notamment, de l'application des dispositions de l'article L. 420-2 que les litiges fondés sur ce texte échappent aux juridictions de droit commun;
Qu'il suit de là que l'exception d'incompétence soulevée par la société Corporate Gestion doit être rejetée;
Sur l'étendue des relations contractuelles
Considérant que les relations économiques entre la société EDF et la société Corporate Gestion d'une part et entre cette dernière et SEGF d'autre part se sont articulées selon deux phases chronologiques consécutives;
Considérant que le 10 janvier 1994, la société Corporate Gestion et la société EDF ont conclu un contrat constitutif d'un test pour la mise en route du système de mise à la disposition des agences et collaborateurs d'un fonds commun de communication; que ce contrat a été convenu pour une durée de sept mois, du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1994;
Considérant que ce premier contrat a été suivi d'un second, conclu entre les mêmes cocontractants, pour une durée du 1er février 1994 au 31 décembre 1998 et fixant les obligations respectives des parties pour la mise en place du système de fonds de documentation, en vraie grandeur et dans sa configuration complète;
Considérant que, parallèlement à ces conventions, la société Corporate Gestion a sous-traité une partie de ses obligations contractuelles; qu'elle a, à cet effet, signé le 3 janvier 1994 un contrat, pour la durée du 1er juillet 1993 au 31 janvier 1994, avec la société Laserphoto dite LSP;
Considérant qu'à une date non précisée du mois de mars 1994, elle a conclu avec la société en cours d'immatriculation SEGF, un contrat pour l'exploitation et la maintenance du système informatique, pour la durée du 1er février 1994 au 31 décembre 1998;
Considérant que le sous-contrat conclu entre la société Corporate Gestion et la société SEGF vise à confier à cette dernière une partie seulement des tâches de la société Corporate Gestion dans la réalisation et l'exploitation du fonds de documentation souhaité par la société EDF.
Considérant qu'une telle articulation des relations juridiques répond précisément à la sous-traitance telle que la définit l'article 1er de la loi 75-1334 du 31 décembre 1975 "opération par laquelle un entrepreneur confie par un sous-traité, et sous sa responsabilité, à une autre personne appelée sous-traitant l'exécution de tout ou partie du contrat d'entreprise (...) conclu avec le maître d'ouvrage";
Considérant que le sous-traitant n'a pas de lien contractuel direct avec le maître de l'ouvrage et ne dispose d'aucune action contractuelle à l'encontre de ce dernier en dehors de celles prévues par la loi pour le paiement direct de ses prestations;
Considérant que la société SEGF se borne à affirmer que l'existence de relations contractuelles entre elle-même et la société EDF est incontestable en se référant à la simple lecture et compréhension des contrats;
Mais considérant qu'en application des dispositions de l'article 1165 du Code civil les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes;
Considérant que la circonstance que la société EDF ait accepté le sous-traitant SEGF dans le contrat qu'elle a passé avec Corporate Gestion et la référence faite explicitement, dans le sous-traité, au contrat principal, sont inopérantes à établir l'existence de liens contractuels directs entre EDF et SEGF qui ne produit aux débats aucun élément écrit faisant état de contacts établis directement avec le maître d'ouvrage;
Considérant que la société SEGF n'est dès lors pas fondée à soutenir que l'absence d'indemnité de fin de contrat constitue une faute contractuelle de la part de la société EDF en raison de l'état de dépendance économique dans laquelle elle se serait trouvée à l'égard de celle-ci lors de la conclusion du contrat; qu'elle ne peut davantage invoquer le caractère brutal du non renouvellement du prétendu contrat;
Considérant que la société SEGF affirme que tant EDF que Corporate Gestion avaient pris l'engagement de discuter de la fin des relations avec elle; qu'elle se prévaut en ce sens d'une lettre de la société Laserphoto LSP à EDF du 21 octobre 1993;
Mais considérant qu'il doit être relevé que cette correspondance est adressée à la Compagnie Corporate et non pas à la société EDF; qu'elle ne concerne au surplus, à l'évidence, que les conditions de mise au point du contrat relatif à la phase initiale de test, ce que corrobore l'identité de son auteur, la société LSP, laquelle n'est pas signataire du contrat de sous-traitance pour la deuxième phase;
Considérant que la société SEGF qui n'a pas contracté, ni directement, ni indirectement avec la société EDF, n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions des articles L. 420-2 et L. 442-6 du Code de commerce en invoquant une situation de dépendance économique à l'égard de la société EDF, dont elle n'est ni le fournisseur, ni le partenaire économique;
Que doit en conséquence être confirmé le jugement qui, constatant que la demande de la société SEGF à l'encontre de la société EDF était fondée sur la responsabilité contractuelle au visa de l'article 1134 du Code civil, l'a déboutée de ses demandes à l'endroit de celle-ci, relatives à une indemnité de fin de contrat;
Considérant que la société SEGF affirme que, si la responsabilité contractuelle de la société EDF n'était pas reconnue, sa responsabilité délictuelle d'un abus de position dominante à son endroit découle des faits eux-mêmes;
Considérant qu'elle ne précise pas toutefois les faits délictueux qu'aurait commis à son endroit la société EDF; qu'elle ne fait état d'aucune pièce établissant la réalité non seulement de relations, mais même de contacts directs avec cette dernière; que ne précisant pas la nature de la faute ni le lien de causalité avec le préjudice qu'elle invoque d'absence d'indemnité finale dans le contrat qu'elle a conclu avec la société Corporate Gestion, la société SEGF ne peut qu'être déclarée mal fondée en ce moyen;
Considérant que c'est sans produire le moindre élément probant de la nature et de la réalité de violences qu'aurait commises à son endroit la société EDF, que la société SEGF invoque les dispositions de l'article 1111 du Code civil et qui l'aurait conduite à souscrire, contre son gré, des obligations ou de renoncer à réclamer à la société Corporate Gestion une indemnité de fin de contrat;
Qu'elle doit être déboutée de ses demandes à l'encontre de EDF;
Sur les dispositions de l'article L. 420-2 du Code de commerce - sur la dépendance économique
Considérant que, pour se prévaloir des dispositions des articles L. 420-2 et L. 420-6 du Code de commerce comme des articles 1111 du Code civil à l'encontre de la société Corporate Gestion, la société SEGF, qui ne peut faire l'amalgame entre son cocontractant et le maître de l'ouvrage, doit apporter la démonstration de son état de dépendance économique à l'égard de la seule société Corporate Gestion et de la réalité de violences économiques commises par cette dernière avant la signature du contrat;
Considérant que la société SEGF elle-même expose qu'elle est une filiale du groupe Laserphoto et qu'elle a été spécifiquement constituée pour exécuter le contrat de sous-traitance qu'elle a au demeurant signé alors qu'elle n'était qu'en cours d'immatriculation;
Considérant qu'elle ne fournit aucune précision d'ordre économique ou comptable sur l'importance de la société Corporate Gestion et du groupe Laserphoto de nature à établir une disproportion notoire entre la taille de ces deux entreprises;
Considérant que s'étant constituée spécifiquement pour l'exécution du contrat Corporate, elle ne saurait sérieusement soutenir que la dépendance économique résulte de la circonstance qu'elle n'avait comme seul client ce partenaire qui lui assurait la totalité de son chiffre d'affaires;
Considérant qu'immatriculée au registre du commerce de Nanterre le 6 janvier 1995, la société SEGF dispose d'un objet social statutaire qui porte sur la création, le développement, l'achat ou la vente, la licence, la location de tous produits informatiques, matériels ou logiciels, la maintenance, le conseil, la formation des tiers sur ces mêmes produits, tant en France qu'à l'étranger, et toutes opérations juridiques économiques et financières se rattachant à cet objet;
Considérant que, nouvellement constituée, elle avait donc l'objectif de créer une activité économique nouvelle dans un domaine large; qu'il ne s'induit aucune dépendance économique de la circonstance qu'elle a saisi, dès avant sa constitution, l'opportunité du contrat avec la société Corporate Gestion pour démarrer cette activité;
Considérant que la société SEGF soutient qu'elle était liée par une exclusivité qui la privait de la possibilité de rechercher d'autres clients et de mettre en place des solutions alternatives;
Considérant que pour démontrer la réalité de cette prétendue exclusivité, elle ne peut utilement se prévaloir de courriers qui ne la concernent aucunement et notamment de la lettre adressée par la société Corporate Gestion à LSP le 24 juin 1993, dix huit mois avant son immatriculation et des deux courriers échangés les 30 juin et 1er juillet 1993 entre la société Corporate Gestion et la société EDF;
Considérant que cette prétendue exclusivité ne saurait davantage résulter des termes du contrat qu'elle a conclu avec la société Corporate Gestion comme de celui passé par cette dernière avec la société EDF lesquels visent seulement à réserver à EDF l'usage du serveur de données exploité par la société SEGF; que cette exigence se justifie par la simple considération que les données ainsi informatisées, détenues et exploitées par la société SEGF appartenaient à la société EDF et non pas à la société SEGF;
Considérant au surplus que, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, la rédaction du contrat entre la société EDF et la société Corporate Gestion s'analyse en une obligation pour cette dernière d'utiliser exclusivement la société SEGF comme sous-traitant et non comme une interdiction pour celle-ci, non signataire de ce contrat, d'exercer d'autres activités;
Considérant que la société SEGF fait à la société Corporate Gestion le grief de violence économique qui l'aurait contrainte de signer un contrat déséquilibré;
Mais considérant qu'elle ne produit aucun élément écrit qu'elle-même ou ses associés fondateurs auraient adressés à la société Corporate Gestion pendant la négociation du sous-traité; qu'elle n'a jamais émis la moindre protestation à cet égard; qu'elle n'a fait état, pour la première fois, d'un déséquilibre du contrat que dans une lettre adressée à EDF le 23 novembre 1998, alors qu'elle réalisait que le recours à ses services ne serait pas prolongé au-delà du terme contractuel librement accepté du 31 décembre 1996;
Considérant au surplus qu'en première instance, la société SEGF n'a fondé son action que sur les dispositions de l'article 1134 du Code civil pour réclamer la réparation d'un manque à gagner et une indemnité de cessation d'activité; que ce n'est qu'en cause d'appel qu'elle invoque des faits de violence économique dont elle n'apporte aucunement la preuve de la réalité;
Qu'il suit de là que le jugement doit recevoir confirmation en ses chefs déférés et que la société SEGF doit être déboutée de son appel et de toutes ses demandes;
Sur les autres demandes
Considérant que la société EDF ne démontre pas le caractère abusif du comportement de la société SEGF qui a usé une voie de recours que lui réserve la loi, ni ne justifie du préjudice qu'elle allègue; que sa demande en paiement de dommages et intérêts doit être rejetée;
Considérant qu'il serait inéquitable de laisser à la charge, tant de la société EDF que de la société Corporate Gestion, des frais qu'elles ont été, l'une et l'autre, contraintes d'engager en cause d'appel; que la société SEGF sera condamnée à payer à chacune d'elle une indemnité complémentaire de 3 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Considérant que l'appelante qui succombe dans l'exercice de son recours doit être condamnée aux dépens;
Par ces motifs, Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Rejette l'exception d'incompétence soulevée par la société Compagnie Corporate Gestion Déléguée, Confirme le jugement entrepris, en ses chefs déférés, Y ajoutant, Condamne la société SEGF à payer à chacune des sociétés Electricité de France et Compagnie Corporate Gestion Déléguée la somme complémentaire de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, La condamne aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP Daniel et Benoît Cas et par Maître Binoche, avoués, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.