CA Paris, 8e ch. B, 14 décembre 1995, n° 94-7982
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Saint Louis Union Académie (SA)
Défendeur :
Bonjour
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
e: Mme Antoine
Conseillers :
M. Piquard, Mme Parenty
Avoués :
SCP Bommart & Forster, Me Lecharny
Avocat :
Me Couillaud-Montier.
Suivant acte sous seing privé du 11 septembre 1992, Madame Souhila Bonjour a passé un contrat de formation à temps pleins avec l'école de coiffure Saint Louis SA aux fins de préparer un CAP option coiffure pendant deux années 1992/1993 et 1993/1944. Le montant de la scolarité sur deux ans s'élève à 32 000 F.
Par courrier recommandé en date du 24 novembre 1992, Madame Bonjour a prévenu l'école que pour des raisons de santé il ne lui était pas possible de suivre la formation prévue. Elle a cessé de régler les frais de scolarité.
Par acte d'huissier du 27 octobre 1993 la société école Saint Louis a assigné Madame Souhila Bonjour en paiement de la somme de 28 000 F avec intérêts légaux, 5 000 F à titre de dommages et intérêts et 5 000 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
Par jugement en date du 8 février 1994, le Tribunal d'instance de Paris 20e arrondissement, a débouté l'école Saint Louis de l'ensemble de ses demandes, débouté Madame Souhila Bonjour de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts, ordonné l'exécution provisoire, condamné l'école Saint Louis au paiement des dépens, ainsi que d'une somme de 3 500 F au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, motif pris de ce que la maladie de Madame Bonjour irrésistible et imprévisible au moment du contrat, constituait un événement de force majeure, qui rend l'exécution du contrat de formation impossible pour elle.
La société Saint Louis a relevé appel de cette décision et conclut à voir, par infirmation:
- condamner Madame Bonjour à régler la somme de 28 000 F avec intérêts légaux à compter de la date de mise en demeure ainsi qu'à payer la somme de 10 000 F à titre de dommages et intérêts à raison du préjudice subi dû au retard du paiement et de 15 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. L'appelante se prévaut d'une clause contractuelle prévoyant un prix forfaitaire pour toute la durée du contrat, excluant toute éventuelle annulation, clause qui ne serait pas selon elle abusive et devrait recevoir application.
En réplique Madame Souhila Bonjour conclut à la confirmation du jugement et à l'allocation d'une somme de 10 000 F pour procédure abusive et 6 000 F en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile. Elle soutient être exonérée de tout dommages et intérêts en raison de la maladie qui l'a empêchée de poursuivre sa scolarité.
Sur ce, LA COUR,
Qui se réfère expressément pour la relation des faits au jugement attaqué, pour l'énoncé des moyens et prétentions des parties aux écritures d'appel de celles-ci.
Considérant qu'il est acquis aux débats que l'état de santé de Madame Souhila Bonjour ne lui a pas permis de suivre l'enseignement donné par l'école Saint Louis en 1992 et 1993 qu'il résulte en effet des certificats médicaux du docteur Omana que pendant toute cette période Madame Souhila Bonjour a dû subir des soins constants lui interdisant toute activité professionnelle;
Considérant que cette maladie imprévisible et irrésistible au moment du contrat, constitue un événement de force majeure qui rend l'exécution du contrat impossible pour Souhila Bonjour bien que n'étant pas extérieure à celle-ci;
Considérant que nonobstant les dispositions des articles 1147 et 1148 du Code civil l'appelante sollicite paiement du prix convenu au contrat en arguant de la stipulation contractuelle aux termes de laquelle:
- Le contrat devient définitif après la signature,
- Le montant du contrat sera dû en totalité,
- Aucun motif ne sera retenu pour une éventuelle annulation.
Mais considérant que cette clause qui impose à l'élève le paiement même en cas d'inexécution du contrat imputable à l'école ou causé par un cas fortuit ou de force majeure (par exemple maladie ou décès) revêt un caractère abusif en ce qu'elle procure un avantage excessif au contractant professionnel;
Considérant que celui-ci du fait de sa situation économique se trouvait en mesure d'imposer à sa clientèle cette clause; qui doit être réputée non écrite malgré l'absence d'un décret en ayant prononcé l'interdiction, que les demandes en paiement de frais de scolarité et en dommages et intérêts en raison du préjudice causé par le retard de paiement sont mal fondées;
Considérant que la société école Saint Louis n'a pas agi dans l'intention de nuire, ou avec une légèreté blâmable; que la demande en dommages et intérêts, formée par l'intimée, a été à bon droit rejetée; que le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions;
Considérant que l'équité commande d'allouer à Madame Souhila Bonjour la somme de 5 000 F au titre des frais irrépétibles engagés en appel;
Par ces motifs, Se substituant en tant que de besoin à ceux du premier juge, Confirme le jugement du 8 février 1994 en toutes ses dispositions, Y ajoutant, Condamne la société école Saint Louis à payer à Madame Souhila Bonjour une somme de cinq mille francs (5 000 F) au titre des frais irrépétibles d'appel, Condamne l'appelante aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.