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Décisions

CA Montpellier, 1re ch. B, 16 mars 1994, n° 90-130

MONTPELLIER

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

UAP Incendie-Accidents (Sté)

Défendeur :

Cazalis

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Sicard

Conseillers :

Mme Minini, M. Armingaud

Avoués :

SCP Touzery-Cottalorda, SCP Negre

Avocats :

Mes Coste, De Cabissole.

TGI Montpellier, du 23 oct. 1989

23 octobre 1989

La Compagnie d'assurance UAP a relevé appel d'un jugement contradictoire rendu le 23 octobre 1989 par le Tribunal de grande instance de Montpellier qui, après avoir dit qu'elle devait sa garantie à Antoine Cazalis pour le vol subi par celui-ci dans son domaine des Aresquiers à Vic-la-Gardiole en avril ou mai 1987 a, avant dire droit sur le quantum de la réparation du préjudice réclamé par l'assuré, ordonné une expertise aux fins de l'évaluer, commis à ces fins Monsieur Jean-Pierre Merenda et l'a condamnée à payer à Antoine Cazalis, une indemnité provisionnelle de 87 000 F.

Elle conclut à sa réformation et demande à la cour de constater que l'indemnité conventionnelle est limitée à 20 % du capital assuré quand le vol a eu lieu dans les dépendances et qu'en conséquence, l'indemnité pour ce poste de préjudice ne peut dépasser la somme de 7 700 F; elle devra, en outre, avant dire droit sur l'évaluation du préjudice, désigner un expert qui, après avoir pris connaissance des dires des parties, du procès-verbal de gendarmerie et de la procédure pénale qui en a été la suite, devra rechercher la localisation, dans la propriété et ses dépendances, des objets définitivement volés et évaluer les biens mobiliers.

Antoine Cazalis, intimé, conclut pour sa part à la confirmation intégrale de la décision déférée, la limitation de garantie dont se prévaut l'adversaire en ce qui concerne le vol dans les dépendances, ne saurait prospérer. Il n'a jamais été informé d'une quelconque exclusion ou limitation en ce qui concerne le vol, il a simplement demandé à être assuré pour l'ensemble de sa propriété, laquelle correspond à une surface développée de 2 040 m² telle qu'elle est mentionnée au contrat. Par ailleurs, en tout état de cause, il résulte des dispositions de l'article L. 112-4 dernier alinéa du Code des assurances, que l'exclusion de garantie doit, pour être valable, être insérée dans une clause de la police, laquelle doit être rédigée en caractères très apparents; il ne saurait par ailleurs s'opposer à l'expertise ordonnée aux fins de chiffrer son préjudice définitif; il réclame enfin à son adversaire une somme de 3 000 F sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 7 janvier 1994.

Discussion et décision

Attendu qu'il est constant que Antoine Cazalis a contracté, le 2 avril 1986, une police d'assurance habitation-propriétaire occupant partiel auprès de la Compagnie UAP garantissant, pour sa propriété des Aresquiers à Vic-la-Gardiole, multi-risques et notamment le vol; que, courant mai 1987, il a été victime de vols par effraction;

Qu'il a déposé plainte auprès des services de gendarmerie et effectué une déclaration de sinistre régulière auprès de son co-contractant;

Que les auteurs des vols ont été arrêtés, jugés et condamnés par le Tribunal correctionnel de Montpellier et que Antoine Cazalis s'est vu, à cette occasion, allouer une indemnité de 25 000 F par le jugement du 30 juin 1987 sur les 100 000 F qu'il réclamait;

Attendu que l'Expert de Antoine Cazalis a évalué son préjudice à une somme de 87 977,60 F; que le Tribunal de grande instance de Montpellier, qui a statué sans que la Compagnie d'assurance UAP ait pu conclure compte tenu de sa constitution tardive, a fait droit pour partie à la demande de l'assuré, ordonnant seulement une expertise afin d'évaluer avec précision le quantum des dommages;

Attendu qu'aujourd'hui, l'assureur est en désaccord sur deux points essentiels, la limitation de sa garantie en ce qui concerne les vols dans les dépendances et le quantum même du préjudice, un certain nombre d'objets volés ayant été retrouvés et restitués;

Sur la limitation de garantie

Attendu que la police d'assurance souscrite fait état dans les "conditions particulières" en ce qui concerne l'étendue de la garantie, d'une surface développée de bâtiment de 2 040 m², comprenant la totalité des immeubles bâtis, donc incluant les dépendances; que ces "clauses et conditions particulières" dont le nombre de feuillets est important (8) fait référence au tableau des garanties (modèle 318002 éd. 12.84) que l'assuré reconnaît, par mention imprimée, avoir reçu;

Que ce tableau des garanties énumère les limites de garantie par sinistre et précise, en ce qui concerne le mobilier personnel "Contenu des dépendances compris, à concurrence de 20 % de ce capital avec maximum de 20 fois l'indice";

Attendu qu'il existe une contradiction entre, d'une part, la surface développée de la garantie qui englobe la totalité des biens immobiliers appartenant au souscripteur de la police, contenu dans les conditions particulières qui spécifient son engagement qui seules l'intéressent et qui portent sa signature et, d'autre part, une limitation de garantie noyée dans une liste de 36 rubriques, elles-mêmes décomposées en paragraphes, inscrite dans un "Tableau des garanties" annexé aux "conditions générales" qu'il reconnaît, par mention seulement imprimée certes, avoir reçu, mais dont il conteste aujourd'hui avoir eu connaissance ou été informé par l'assureur;qu'il convient de rappeler qu'en droit et de façon générale, sont abusives les clauses qui n'apparaissent pas clairement et en toutes lettres très apparentes dans le contrat spécifique de l'assuré, le seul qui l'intéresse et qui définit les modalités particulières des engagements de son co-contractant;

Qu'en l'espèce, la cour estime que l'UAP aurait dû, pour se prévaloir effectivement de la limitation de garantie qu'elle invoque aujourd'hui, faire figurer celle-ci dans un document unique et personnalisé, signé par les deux parties;

Que le premier jugement consacrant le principe de la garantie due par la Compagnie d'assurance UAP à Antoine Cazalis, sera donc confirmé sur ce point;

Sur la réparation du préjudice

Attendu qu'il convient de confirmer la mesure expertale qui apparaît comme étant seule de nature à déterminer le quantum du préjudice actuellement non réparé par Antoine Cazalis; que l'homme de l'art devra, en effet, par consultation du dossier pénal, déterminer les objets volés non restitués qui peuvent seuls faire l'objet d'une indemnisation et les sommes déjà reçues au titre de la condamnation pénale des auteurs du sinistre;

Qu'il conviendra également qu'il tienne compte, dans son calcul, des frais de mise en état des objets restitués;

Attendu qu'il n'y a pas lieu, pour l'instant, de faire droit aux demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;

Par ces motifs, statuant publiquement et contradictoirement; reçoit l'appel en la forme; Au fond, Confirme le jugement déféré; Et, ajoutant à la mission de l'Expert Merenda: Dit que, pour parvenir à l'accomplissement de sa mission, il devra, compte tenu des énonciations du dossier pénal qu'il se sera fait préalablement communiquer, chiffrer le préjudice en tenant compte: - des objets volés restitués, - des sommes effectivement perçues par Antoine Cazalis du fait de la condamnation pénale des auteurs du vol; - des frais de remise en état des objets restitués; Réserve les dépens.