CA Agen, ch. corr., 28 mars 1996, n° 95-00446
AGEN
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Centrale des Particuliers, Hennebel
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Louiset
Substitut :
général: M. Kubiec
Conseillers :
MM. Lateve, Treilles
Avocats :
Mes Reulet, Moutou, Dupouy.
Rappel de la procédure:
Le jugement:
Le tribunal, par jugement du Tribunal de grande instance de Marmande en date du 6 juillet 1995 a déclaré L Daniel:
Coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, faits commis le 22 décembre 1993, à Marmande (47) et à Saint-Germain (18), infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 Code de la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation.
Coupable de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise, faits commis le 22 décembre 1993, à Marmande (47) et à Saint-Germain (18), infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 du Code de la consommation.
Et par application de ces articles, a condamné L Daniel à une amende de 5 000 F
Les appels:
Appel a été interjeté par Monsieur L Daniel, le 13 juillet 1995,
M. Hennebel, le 13 juillet 1995,
M. le Procureur de la République le 21 juillet 1995 contre Monsieur L Daniel,
Arrêt
La procédure
Suivant jugement contradictoire du 6 juillet 1995 le Tribunal correctionnel de Marmande a déclaré Daniel L coupable de publicité mensongère ou de nature à induire en erreur et de tromperie sur la qualité, la nature, l'origine ou la quantité d'une marchandise et en répression l'a condamné au paiement d'une amende de 5 000 F. Le tribunal a accueilli les constitutions de partie civile de Monsieur Hennebel et de la "Centrale des Particuliers" et a condamné Monsieur L à payer au premier une somme de 20 000 F à titre de dommages-intérêts et une somme de 1 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale et à la seconde une somme de 5 000 F à titre de dommages-intérêts ainsi qu'une somme de 1 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Par déclarations des 13 juillet 1995 M. L puis Monsieur Hennebel ont relevé appel de ce jugement.
Le Ministère public en a fait de même le 21 juillet 1995.
A l'audience, Monsieur L est présent, assisté de Me Reulet. Monsieur Hennebel absent est représenté par Me Dupouy. La "Centrale des Particuliers" absente est représentée par Me Moutou.
Les motifs
Interjetés dans les délais de la loi et réguliers en la forme les appels du prévenu, de Monsieur Hennebel et du Ministère public doivent être déclarés recevables.
- Sur l'action publique:
Il résulte des pièces du dossier et des débats à l'audience qu'à la suite d'une annonce parue le 22 décembre 1993 dans le magazine "La Centrale des Particuliers" Monsieur Hennebel a acheté à Monsieur L un véhicule de marque BMW "type 525 TDS Pack" d'occasion.
Au cours du mois de janvier 1994 Monsieur Hennebel relevait des traces suspectes sur les bas de caisse du véhicule lui laissant supposer que celui-ci avait été accidenté.
Les démarches entreprises par l'acquéreur ainsi que l'enquête policière ont permis d'établir qu'à la suite d'un accident Monsieur L avait fait réparer son véhicule au mois de décembre 1992 ainsi qu'en fait foi une facture d'un montant de 51 345,85 F.
Le prévenu a reconnu que son véhicule avait été affecté d'un "choc de ville" et qu'il avait omis de le signaler aux services du magazine "La Centrale des Particuliers" ainsi qu'à l'acheteur.
Or, en faisant insérer une annonce dans la publication sus-visée, Monsieur L s'était explicitement engagé à respecter les conditions générales imposées par ce magazine et notamment avait déclaré sur l'honneur que le véhicule n'avait jamais été accidenté. Monsieur L prétend qu'il ignorait tout de cette publication et de ses exigences sur ce point. Il soutiendra même que c'est sa secrétaire qui a répondu aux questions posées par l'annonceur et qu'elle avait, de son propre chef, déclaré que le véhicule n'avait jamais été accidenté compte tenu de son bon état apparent. Ces moyens de défense sont irrecevables. D'une part, le vendeur ne peut raisonnablement arguer du caractère bénin de l'accident subi par sa voiture dès lors que les réparations se sont élevés à 51 343 F d'autre part, et surtout, le caractère accidenté ou non d'un véhicule est toujours considéré comme l'une de ses qualités substantielles et le vendeur qui omet d'en informer l'acheteur commet le délit de tromperie même si le véhicule a été parfaitement réparé. Par ailleurs, la mauvaise foi du prévenu est établie dès lors qu'il a refusé de reprendre le véhicule en litige à son acheteur trompé.
Au surplus, la souscription d'une annonce dans le magazine "La Centrale des particuliers" subordonnée à l'acceptation d'un engagement sur le caractère non accidenté du véhicule atteste la volonté du prévenu de dissimuler l'accident dont ledit véhicule avait été affecté. En conséquence le délit de tromperie sur la qualité du bien vendu est établi ainsi que le délit de publicité mensongère. Le jugement déféré doit donc être confirmé en ses dispositions relatives à la qualification des faits et à la culpabilité pénale du prévenu.
Compte tenu de la nature et de la gravité des faits commis par Monsieur L mais aussi de l'absence d'antécédents judiciaires il convient de le condamner à une peine de 4 mois d'emprisonnement assortis d'un sursis mise à l'épreuve pendant 24 mois avec obligation d'indemniser les victimes.
Sur les actions civiles
La recevabilité des constitutions de partie civile de Monsieur Hennebel et de "la Centrale des particuliers" n'est pas discutée.
Il est établi qu'à la suite de la tromperie commise par son vendeur Monsieur Hennebel est aujourd'hui en possession d'un véhicule qui a une moindre valeur et qu'il aura des difficultés à revendre compte tenu du fait qu'il s'agit d'un véhicule accidenté. L'évaluation à 20 000 F du préjudice subi par la partie civile telle qu'effectuée par le premier juge est donc parfaitement justifiée. Cette somme englobe la totalité du préjudice matériel et moral subi par Monsieur Hennebel.
Toutefois il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Hennebel la totalité des sommes par lui exposées pour faire valoir ses droits Monsieur L devra donc lui verser une somme de 1 500 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Il est constant que Monsieur L a fait passer une annonce dans la publication "La Centrale des particuliers" en partie mensongère dès lors qu'il est établi que ce journal n'accepte de publier que des publicités concernant des véhicules non accidentés. Cette tromperie est de nature à porter une atteinte grave au crédit et à l'image de cette publication dont la politique commerciale est axée sur le caractère loyal et certain des annonces insérées. Dès le préjudice subi par le journal "La centrale des particuliers" est incontestable. En fixant à 5 000 F les dommages-intérêts dus par le prévenu en réparation du préjudice commercial subi par cette partie civile les premiers juges ont fait une juste appréciation des sommes dues à ce titre par l'auteur du délit de publicité mensongère.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de "La Centrale des Particuliers" la totalité des sommes par elle exposées pour faire valoir ses droits. Monsieur L devra donc lui verser une somme de 1 500 F en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Par ces motifs: LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, déclare réguliers et recevables en la forme les appels du prévenu, de Monsieur Hennebel et du Ministère public; Au fond: - Sur l'action publique: Confirme le jugement déféré en ses dispositions relatives à la qualification des faits et à la culpabilité de Monsieur L; Réforme la disposition relative à la peine prononcée et statuant à nouveau: condamne Monsieur L à une peine de 4 mois d'emprisonnement avec sursis mise à l'épreuve pendant 24 mois avec obligation d'indemniser Monsieur Hennebel et la SA "Hebdo-Mag France - Centrale des particuliers"; Constate que l'avertissement prévu à l'article 132-40 du nouveau Code pénal, n'a pu être donné au condamné, lors du prononcé de l'arrêt, - Sur les actions civiles: Confirme les dispositions civiles du jugement déféré et y ajoutant: Dit que Monsieur L paiera une somme de 1 500 F à Monsieur Hennebel et une somme de 1 500 F à la SA "Hebdo Mag-France - Centrale des particuliers" en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Le tout en application des articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation, 132-40 et suivants du Code pénal, 512 et suivants du Code de procédure pénale.