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Décisions

CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 27 septembre 1995, n° 632

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Amet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ellul

Substitut général :

M. Ceccaldi

Conseillers :

Mmes Coux, Zentar-Drillon

Avocats :

Mes Sebag, Cesari

TGI Nice, 5e ch. corr., du 24 mars 1993

24 mars 1993

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Par ordonnance en date du 18 décembre 1992, le juge d'instruction de Nice a renvoyé G Josette épouse B et Irène B devant le tribunal correctionnel de son siège sous la prévention d'avoir :

- à Nice au cours du mois d'octobre 1990 et du 2e trimestre de l'année 1990, en tout cas sur le territoire national et depuis temps non couvert par la prescription escroqué partie de la fortune de Delphine Debruyne, Carine Carlier et Nathalie Amet, par des manœuvres frauduleuses pour persuader l'existence de fausses entreprises ou pour faire naître l'espérance d'un succès en encaissant des frais d'une scolarité imaginaire.

Délit prévu et réprimé par l'article 405 du Code pénal.

Selon jugement contradictoire en date du 24 mars 1993, le tribunal correctionnel a disqualifié les faits en délit de tromperie sur les qualités substantielles des services rendus et a déclaré les deux prévenues coupables, les a condamnées l'une et l'autre à 30 000 F d'amende ainsi qu'à payer 10 000 F de dommages-intérêts à Melle Amet qui s'était constituée partie civile.

Par déclaration au greffe du Tribunal de grande instance de Nice en date du 29 mars 1993 le conseil des 2 prévenues a relevé appel de cette décision.

Le 31 mars 1993, le Ministère public a formé appel incident.

Régulièrement citées pour voir être statué sur ces recours à l'audience du 8 février 1995, les deux prévenues avaient comparu. Cependant, l'affaire a été renvoyée à leur contradictoire à l'audience du 14 juin 1995.

A cette date, B Irène et G Juliette épouse B ont de nouveau comparu assistées de leur conseil commun qui a déposé des conclusions tendant à la relaxe pure et simple des deux prévenues au motif essentiel que les griefs formulés par les divers plaignants (dont Melle Amet) sont inconsistants dans la mesure où elles avaient pris toutes dispositions pour que le Centre Pédagogique X qu'elles avaient ouvert à Nice fonctionne, ainsi qu'il a d'ailleurs fonctionné, dans des conditions correctes et conformes à l'intérêt des étudiants qu'elles n'ont nullement trompé sur la qualité des prestations promises.

Le Ministère public a requis l'application de la loi

Motifs de la décision

Attendu que les recours exercés dans les formes et délais légaux doivent être déclarés recevables ;

Attendu qu'en ce qui concerne les faits délictueux reprochés aux deux prévenues tels qu'ils résultent de la procédure et des débats, il convient de rappeler que dès le début de l'année 1991 le parquet de Nice a été saisi de plaintes déposées par divers étudiants (Gal Eric, Carlier Carine, Debruyne Delphine, Amet Nathalie) qui exposaient notamment avoir été abusés par Josette G et sa fille Irène B, dirigeantes d'un établissement d'enseignement privé de Nice auxquelles ils avaient remis des sommes substantielles en règlement de frais de scolarité alors qu'en contrepartie l'enseignement qui leur avait été dispensé était quasi-inexistant et en tout cas sans aucune comparaison possible avec celui qui leur avait été promis et qu'ils étaient en droit d'attendre en fonction du diplôme envisagé ;

Attendu que les témoignages des divers plaignants étaient concordants en ce sens qu'il en ressortait essentiellement qu'ils avaient été attirés courant avril ou mai 1990 par de la publicité relative à l'Ecole X située <adresse>, qu'ils avaient été reçus soit par Melle B Irène soit par sa mère ou encore les deux à la fois lesquelles après leur avoir vanté les mérites de l'enseignement dispensé par leur établissement avaient exigé le paiement d'avance des frais de scolarité pour l'année 1990/1991, que les cours avaient commencé avec retard fin octobre 1990 dans des locaux différents et plus exigus que ceux qui leur avaient été présentés, que tous les cours prévus n'étaient pas assurés ou encore étaient mal adaptés et qu'ils avaient été surpris par le nombre ridiculement bas (7) des élèves suivant les cours de cet établissement prétendument hors pair ;

Attendu que les témoignages des plaignants ont été corroborés par celui de Debruyne Franck (recruté en qualité d'enseignant par Melle Irène B à la mi-août 1990) qui a déclaré aux enquêteurs avoir été surpris par l'exiguïté des locaux alors qu'on lui avait parlé d'une école importante, que les professeurs étaient peu nombreux (5 ou 5 selon lui), que l'école ne correspondait pas aux dires de Mlle B, que certains cours nécessaires et obligatoires pour l'obtention de diplômes n'étant pas assurés, il avait pris sur lui d'aider certains élèves (ceux qui étaient restés malgré les conditions difficiles rencontrées) dans des disciplines qui n'étaient pas les siennes qu'il ajoutait même que lorsque Melle Amet avait engagé son action en justice, Mmes Irène et Juliette B avaient tenté de le circonvenir pour qu'il atteste mensongèrement que cet élève avait eu un mauvais comportement ;

Attendu que les investigations ont permis d'établir en outre qu'à l'époque où les étudiants plaignants se faisaient inscrire et payaient les frais de scolarité, Mmes Irène et Juliette B co-gérantes de la société Y (exploitant l'établissement d'enseignement privé sous la licence X) étaient sous le coup d'une procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire le 9 août 1990 d'où leur empressement à remettre en place dans des conditions hasardeuses et au mépris de la réglementation une nouvelle structure d'enseignement privé ayant fonctionné de façon anormale au détriment de l'intérêt des élèves attirés par une publicité flatteuse établie au nom de l'Ecole X ; qu'en l'état de ces éléments de fait, c'est à bon droit que les premiers juges ont disqualifié les faits visés à la prévention et déclaré les deux prévenues coupables du délit de tromperie tel que prévu et réprimé par la loi du 1er août 1905 modifiée par celle du 10 janvier 1978 ;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer la décision déférée sur l'action publique, les premiers juges ayant justement apprécié la sanction qu'il convenait d'infliger aux deux prévenues ;

Que, par ailleurs, c'est à juste titre que le tribunal a déclaré recevable et fondée la constitution de partie civile de Melle Amet, l'une des étudiantes abusées par les deux prévenues dans les conditions ci-dessus exposées ; que le préjudice souffert par la plaignante ayant été équitablement évalué, la décision mérite encore confirmation sur ce point;

Attendu qu'il apparaît par ailleurs équitable d'allouer à Mlle Amet la somme de 4 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière correctionnelle, Déclare les appels recevables en la forme, Au fond, Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré, Y ajoutant, Condamne solidairement Irène B et Juliette G épouse B à payer à Nathalie Amet la somme de 4 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, dit qu'en application des dispositions de l'article 473 du Code de procédure pénale modifié par la loi 93-2 du 4 janvier 1993, la contrainte par corps s'exercera conformément aux dispositions des articles 749 et suivants du Code de procédure pénale. Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.