Cass. com., 31 mars 2004, n° 02-14.911
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Arvor, Goupil
Défendeur :
Association VVF Vacances
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Champalaune
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Me Cossa.
LA COUR: - Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 février 2002), que Monsieur Arvor était le gérant de la société Ardaz, laquelle avait une activité hôtelière et de restauration en Loire-Atlantique; que cette société traitait également, en qualité d'intermédiaire, l'hébergement des équipages de navires en construction dans le département; que cette société a été placée en redressement puis en liquidation judiciaires; que se plaignant de ce que l'association Village de vacances en Loire-Atlantique avait exercé une concurrence déloyale à l'encontre de la société Ardaz, notamment en assurant l'hébergement des équipages de navire, ayant entraîné la liquidation de la société et la perte par M. Arvor de son emploi, M. Arvor et M. Goupil, agissant en qualité de liquidateur de la société Ardaz, ont judiciairement réclamé réparation de leurs préjudices;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches: - Attendu que M. Arvor et M. Goupil, ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande, alors, selon le moyen: 1°) que M. Goupil et M. Arvor avaient longuement fait valoir que l'association VVF avait commis un fait fautif en assurant des prestations similaires à celles réalisées par les entreprises soumises à l'impôt, en violation des agréments délivrés aux villages de vacances VVF de la Turballe et de Batz-sur-Mer, permettant à l'association VVF vacances de percevoir des aides publiques dont les sociétés commerciales ne bénéficient pas, ce dont il résultait que les prestations assurées par l'association VVF avaient généré un trouble commercial au préjudice de la société Ardaz; qu'en ne répondant pas, fût-ce pour l'écarter, à ce moyen déterminant de l'issue du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 2°) que M. Goupil et M. Arvor avaient longuement fait valoir que l'association VVF avait commis un fait fautif en assurant, fût-ce à titre inhabituel, des prestations au profit des membres d'équipage des navires non adhérents à l'association, en violation des agréments délivrés aux villages de vacances VVF de la Turballe et de Batz-sur-Mer, permettant à l'association de percevoir des aides publiques dont les sociétés commerciales ne bénéficient pas, ce dont il résultait que les prestations assurées par l'association VVF avaient généré un trouble commercial au préjudice de la société Ardaz; qu'en ne répondant pas, fût-ce pour l'écarter, à ce moyen déterminant de l'issue du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile; 3°) que M. Goupil et M. Arvor avaient longuement fait valoir que l'association VVF avait commis un fait fautif en recourant à la publicité commerciale, en violation des agréments délivrés aux villages de vacances VVF de la Turballe et de Batz-sur-Mer, permettant à l'association de percevoir des aides publiques dont les sociétés commerciales ne bénéficient pas, ce dont il résultait que les prestations assurées par l'association VVF avaient généré un trouble commercial au préjudice de la société Ardaz; qu'en ne répondant pas, fût-ce pour l'écarter, à ce moyen déterminant de l'issue du litige, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Ardaz ne rapporte pas la preuve de ce que les activités d'hébergement assurées par l'association VVF soient en relation avec ses difficultés et soient à l'origine de ses pertes et retenu que le lien causal entre les difficultés de la société Ardaz et l'exploitation de la clientèle d'équipage n'est pas établi "dès lors qu'apparaît une disjonction dans les phases chronologiques d'exploitation des hébergements par l'une et l'autre partie et les difficultés de la société Ardaz", la cour d'appel, qui en a déduit que faute de preuve du lien de causalité entre le préjudice dont il était demandé réparation et un fait quelconque de l'association VVF, l'action en dommages-intérêts devait être rejetée,n'avait pas à répondre au moyen inopérant tiré des conditions d'exercice de son activité par l'association VVF; qu'inopérant en ses trois branches, le moyen ne peut être accueilli;
Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche: - Vu l'article 559 du nouveau Code de procédure civile; Attendu que pour décider que l'appel de M. Arvor et de M. Goupil était fautif et les condamner au paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que M. Arvor et la société Ardaz, avec lui, ont intenté plusieurs actions successives contre l'association VVF sans obtenir gain de cause, pour des motifs voisins de ceux qui font l'objet de la présente instance, que les premiers juges avaient répondu suffisamment aux demandes de M. Arvor en les rejetant dans un type de contentieux où les décisions antérieures de diverses juridictions saisies par lui ou par sa société lui donnaient des lumières sur les limites de ses droits et que cet appel traduit un entêtement certain dans des demandes sans avenir et révèle les raisons qui l'inspirent: "l'existence d'une activité associative dans un domaine qu'il estime personnellement, mais contre les lois encadrant le marché pour favoriser les activités non lucratives, constituer un domaine marchand";
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir l'abus retenu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi: casse et annule, mais seulement en ce qu'il a condamné M. Arvor et M. Goupil, ès qualités, à payer à l'association VVF une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 15 février 2002, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris; remet en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles.