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Décisions

Cass. crim., 29 juin 1999, n° 98-86.244

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

M. Blondet

Avocat général :

M. Géronimi

Avocats :

SCP Delaporte, Briard, SCP Waquet, Farge, Hazan.

TGI Nîmes, ch. corr., du 18 juin 1998

18 juin 1998

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par le Procureur général près la Cour d'appel de Nîmes, contre l'arrêt de ladite cour en date du 18 juin 1998, qui a relaxé Jean-Michel Q et Josette F, épouse B, des chefs de tromperies et tentatives de tromperie. - Vu les mémoires produits en demande et en défense; - Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs: - Vu les articles 213-1, 213-2, 216-1 du Code de la consommation; - Attendu que caractérise l'élément matériel du délit de tromperie sur les qualités substantielles d'une prestation de services, le fait pour les médecins, le personnel médical ou les responsables d'établissements de soins, de réutiliser, même après restérilisation, un dispositif médical présenté par le fabricant, pour satisfaire à la réglementation, comme étant destiné à un usage unique;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Jean-Michel Q, docteur en médecine, spécialisé en cardiologie, exerçant son activité dans la clinique que dirige Josette B, procédait habituellement à des stimulations cardiaques en réutilisant, après stérilisation à l'oxyde d'éthylène, des sondes électrophysiologiques commercialisées par leur fabricant sous un emballage stérile portant la mention "à usage unique"; Que Jean-Michel Q et Josette B sont poursuivis pour tromperie et tentative de tromperie des consommateurs sur les qualités substantielles des prestations de soins;

Attendu que, pour relaxer les prévenus, la cour d'appel relève que la pratique qui leur est reprochée est répandue tant en France qu'à l'étranger et qu'aucune étude scientifique n'a démontré l'existence de risques qui lui seraient liés; Qu'elle énonce qu'aucun texte législatif ou réglementaire spécifique ne rend obligatoire l'usage unique des dispositifs médicaux visés, que les circulaires du ministère de la Santé en date des 14 avril 1986 et 29 décembre 1994 qui le prescrivent n'ont pas de valeur réglementaire, et qu'il n'est pas établi que les actes de réutilisation reprochés au médecin, bien qu'ils aient contrevenu à l'instruction formulée, de façon unilatérale et non désintéressée, par le fabricant des matériels, aient mis en danger les patients; Que les juges ajoutent que, dès lors que la nocivité de cette pratique n'est pas établie, l'absence d'information du médecin à ses patients au sujet de l'utilisation répétée des mêmes dispositifs médicaux restérilisés ne caractérise ni un manquement à son obligation contractuelle, ni l'élément moral du délit de tromperie;

Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si l'obligation d'usage unique ne découlait pas des articles L. 665-3 et suivants du Code de la santé publique et des textes pris pour leur application, n'a pas justifié sa décision;

Par ces motifs: casse et annule, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la Cour d'appel de Nîmes, en date du 18 juin 1998, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Montpellier.