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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 28 octobre 1996, n° 96-00018

PARIS

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

CDR Communication Brillant Médical (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Petit

Avocat général :

M. Fortin

Conseillers :

MM. Guilbaud, Paris

Avocats :

Mes Salem, Franchi-Dutard.

TGI Paris, 31e ch., du 22 nov. 1995

22 novembre 1995

Rappel de la procédure:

Prévention:

Charles J a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par ordonnance d'un juge d'instruction en date du 10 mai 1995 du chef de tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité d'une marchandise pour avoir trompé le contractant sur les qualités substantielles et l'aptitude à l'emploi de la marchandise, en l'espèce 2000 baladeurs "A" vendus sous la dénomination fausse d'appareils stéréo,

Faits commis d'octobre 1990 à janvier 1992, à Paris,

Infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 du Code de la consommation

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a:

Déclaré J Charles coupable des faits de publicité mensongère et de tromperie reprochés,

Faits commis d'octobre 1990 à janvier 1992, à Paris,

Infraction prévue et réprimée par l'article L. 213-1 du Code de la consommation

Et, en application de cet article,

L'a condamné à 10 000 F d'amende,

Dit que la décision était assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 600 F dont est redevable chaque condamné.

Statuant sur l'action civile,

Reçu la société CDR Communication Brillant Médical en sa constitution de partie civile

Condamné solidairement Charles J et Franck T à lui payer la somme de 150 000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 2 500 F chacun sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Les appels:

Appel a été interjeté par:

Monsieur J Charles, le 4 décembre 1995, sur les dispositions pénales et civiles contre CDR Communication Brillant Médical (STE);

M. le Procureur de la République, le 4 décembre 1995 contre Monsieur J Charles;

Décision

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels relevés par le prévenu et le Ministère public à l'encontre du jugement précité auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits et de la prévention;

Par voie de conclusions Charles J sollicite de la cour, par infirmation, son renvoi des fins de la poursuite et le débouté de la société CDR de toutes les demandes formées à son égard;

Il fait essentiellement valoir qu'il n'a pas voulu tromper son cocontractant M. T qui, contrairement à lui, était un professionnel du secteur;

Il soutient par ailleurs qu'il ne peut être considéré comme coauteur de l'infraction de tromperie commise par M. T à l'égard de la société CDR:

Monsieur l'Avocat général observe que le tribunal a déclaré Charles J coupable de publicité mensongère et de tromperie alors que le prévenu était poursuivi du seul chef de tromperie en vertu de l'ordonnance en date du 10 mai 1995;

Il requiert en conséquence la cour d'annuler le jugement déféré, d'évoquer, de déclarer le prévenu coupable du délit de tromperie, tout en s'en remettant à son appréciation sur le quantum de la peine;

Par voie de conclusions la société Communication Brillant Médical, partie civile intimée, demande pour sa part à la cour de confirmer le jugement entrepris et, y ajoutant, de condamner Charles J à lui verser la somme supplémentaire de 10 000 F HT en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

En la forme,

Considérant que la cour constate que les premiers juges ont déclaré Charles J coupable des délits de publicité mensongère et de tromperie alors que l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction ne visait que le délit de tromperie;

Considérant qu'il apparaît d'autre part que Charles J, en première instance, n'a pas accepté de comparaître volontairement sur les faits de publicité mensongère, non dénoncés dans le titre de la poursuite;

Qu'il convient dans ces conditions d'annuler le jugement entrepris dans ses dispositions concernant Charles J, d'évoquer et de statuer sur le fond;

Sur le fond:

Sur l'action publique:

Considérant que le 3 juin 1992 Jean-Marc Collinet, PDG de la SA CDR Communication Brillant Médical déposait plainte avec constitution de partie civile;

Qu'il indiquait qu'en décembre 1991 il était entré en contact avec la société X afin d'acheter 2000 baladeurs stéréophoniques;

Qu'il exposait que la société X lui avait présenté un modèle de baladeur type "A" comportant la mention stéréo sur le boîtier et sur chacun des quatre côtés de l'emballage;

Que fort de ces indications et ayant absolument besoin d'un matériel stéréophonique, Jean Marc Collinet passait commande de 2000 baladeurs "selon modèle présenté" le 12 décembre 1991 à la société X et réglait la facture d'un montant de 126 404 F;

Que peu de temps après, Jean-Marc Collinet s'apercevait qu'il s'agissait d'un matériel monophonique et non stéréophonique;

Considérant que l'information permettait d'établir que les baladeurs litigieux avaient été acquis le 7 janvier 1992 par X auprès de la société Y qui les avait achetés le 10.10.1990 auprès de la société Z, cette dernière s'étant elle même fournie le 3.1.1990 auprès de la société W de Hong Kong;

Que Lors d'une audition du 23.10.1992 Franck T, PDG de X lors des faits, affirmait avoir été abusé par son vendeur ainsi que par la mention "stéréo" portée sur l'emballage et l'appareil;

Qu'entendu le 15 janvier 1993 Charles J reconnaissait pour sa part être l'importateur des baladeurs litigieux en tant que gérant de la SARL Z;

Qu'il indiquait les avoir vendus à la société Y dont il était également le gérant et admettait n'avoir procédé à aucune vérification;

Considérant que vainement Charles J soutient que les éléments constitutifs du délit de tromperie ne sont pas réunis à son encontre;

Qu'en effet en sa qualité d'importateur le prévenu se devait de vérifier que le produit mis sur le marché correspondait bien aux indications portées sur le boîtier et l'emballage;

Qu'en revendant les baladeurs à Franck T sans avoir procédé à cette vérification il a sans conteste engagé sa responsabilité de la même manière que Franck T co-contractant de CDR;

Qu'il a porté atteinte à la loyauté des transactions commerciales et s'est ainsi rendu coupable du délit de tromperie qui lui est reproché;

Que dès lors la cour retiendra Chartes J dans les liens de la prévention et le condamnera à 10 000 F d'amende;

Sur l'action civile:

Considérant qu'il convient de recevoir la société CDR en la constitution de partie civile,

Considérant que si la société CDR n'a pas eu de relations contractuelles avec les sociétés Z et Y il n'en demeure pas moins que les faits délictueux imputables à Charles J sont directement à l'origine du préjudice causé à la partie civile;

Considérant que la cour qui dispose des éléments nécessaires et suffisants pour apprécier le préjudice certain subi par la partie civile et résultant directement des faits visés à la prévention condamnera Charles J à verser à la société CDR Communication Brillant Médical la somme de 150 000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 6 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Par ces motifs: LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Vu l'article 520 du Code de procédure pénale; Annule le jugement dont appel; Evoque, Statuant à nouveau, Déclare Charles J coupable d'avoir à Paris et sur l'ensemble du territoire national d'octobre 1990 à janvier 1992, trompé le contractant sur les qualités substantielles et l'aptitude à l'emploi de la marchandise, en l'espèce 2000 baladeurs "A" vendus sous la dénomination fausse d'appareils stéréo; Faits prévus et punis par les articles L. 213-1, L. 216-2, L. 216-3 du Code de la consommation; Condamne Charles J à 10 000 F d'amende; Reçoit la société CDR Communication Brillant Médical en sa constitution de partie civile, Condamne Charles J à lui verser la somme de 150 000 F à titre de dommages-intérêts ainsi que celle de 6 000 F pour frais irrépétibles; Rejette toutes conclusions plus amples ou contraires; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable chaque condamné.