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Décisions

CA Bordeaux, 3e ch. corr., 16 septembre 1997, n° 96-000949

BORDEAUX

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Leotin

Substitut :

général: M. Dauffy

Conseillers :

Mmes Robert, Gounot

Avocat :

Me Faure.

TGI Bergerac, ch. corr., 11 juin 1996

11 juin 1996

Faits

Par actes en date du 12 juin 1996 reçus au secrétariat-greffe du Tribunal de grande instance de Bergerac, le prévenu et le Ministère public ont relevé appel d'un jugement contradictoire rendu par ledit tribunal le 11 juin 1996 à l'encontre de Jean-Jacques G poursuivi comme prévenu:

- d'avoir à Saint-Laurent La Vallée (24) en tout cas sur le territoire national, courant janvier 1995, trompé:

- Eric Brillouet,

- Philippe Ranouil

- Christian Grisoni

- Claude Baquey

- Jacques Aussudre

- Michel Vemazeau

- Jean-Claude Lacoste

- Bernard Ardouin

- Guy Clavier

- Max Lewis

- Jean-Claude Brusle

- Alain Labrousse

- Michel Baris

ses contractants, sur l'origine et les qualités substantielles de truffes.

Faits prévus et réprimés par les articles L. 213-1, L. 216-2 et L. 216-3 du Code de la consommation.

Le tribunal:

- a déclaré Jean-Jacques G coupable des faits qui lui sont reprochés;

- a condamné Jean-Jacques G à la peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis et à 100 000 F d'amende.

- a ordonné la publication du jugement, par extraits, aux frais du prévenu, dans le Sud-ouest Dordogne à concurrence de 5000 F et dans le magazine "Que Choisir" à concurrence de 8 000 F.

- a ordonné l'affichage dudit jugement, par extraits, aux portes de l'entreprise, Format A3, en caractère d'imprimerie, pendant 7 jours.

Sur quoi,

Madame le Président a informé les parties présentes que l'affaire est mise en délibéré à l'audience publique du 16 septembre 1997;

Et à l'audience de ce jour, Madame le Président a donné lecture de la décision suivante

Les appels successivement interjetés le 12 juin 1996 par le prévenu et par le Ministère public à l'encontre d'un jugement rendu le 11 juin 1996 par le Tribunal de grande instance de Bergerac sont recevables pour avoir été déclarés dans les formes et délais de la loi.

Le prévenu, qui comparait assisté de son avocat reprend les explications qu'il a fournies en première instance et sollicite sa relaxe.

Il prétend en effet que:

- Il n'a eu connaissance de la véritable origine des truffes qu'après la réception de la facture de la SARL Impérial le 20 janvier 1995 et qu'il ne pouvait donc en faire état pour les ventes antérieures ce qui explique que dix-sept personnes ayant acheté des "truffes fraîches" entre le 13 et le 18 janvier 1995 n'ont eu connaissance ni de l'origine ni de l'espèce des truffes commercialisées.

- Les factures postérieures au 20 janvier 1995 indiquent sans exception l'origine des truffes importées de Chine.

- La preuve de l'infraction n'est pas rapportée, les truffes qu'il a livrées étant conformes aux caractéristiques et aux qualités des "truffes noires d'hiver" dites "truffes du Périgord".

- Faute de critère déterminant des qualités substantielles des truffes dites du "Périgord" il ne peut y avoir de tromperie en l'absence de convention expresse entre les parties ou de réglementation pour y suppléer.

- En l'absence de réglementation un importateur est bien fondé à dénommer "truffes" des truffes chinoises d'espèce "indicum".

- Le tribunal a retenu à tort sa mauvaise foi.

- Aucune signification ne peut être tirée de la comparaison des prix qu'il pratique par à rapport aux cours officiels des truffes, sa marge étant libre.

- La sévérité des condamnations prononcées par le tribunal a pour effet d'évincer la truffe chinoise du marché local en dissuadant les échanges,

- Subsidiairement, il demande à la cour de faire une application modérée de la loi pénale.

Le Ministère public requiert la confirmation de la décision déférée.

Motivation

En des énonciations suffisantes et par des motifs pertinents que la cour adopte les premiers juges ont exactement exposé les faits poursuivis et justement apprécié les éléments de preuve concernant la culpabilité du prévenu qu'ils ont retenue sous une exacte qualification.

Il suffit d'ajouter que la volonté de tromper résulte de la confusion que Monsieur G a volontairement entretenu en s'abstenant de mentionner sur les factures les origines du produit vendu contrairement aux dispositions de l'article 15 de l'arrêté du 20 juillet 1956, relatif eu commerce de tous fruits et légumes, donc applicable au commerce de champignons, confusion qui ne pouvait qu'être confortée par le prix de vente de 2 200 F HT le kilogramme correspondant normalement à une qualité de truffe du genre "Tuber Melanosporum".

Le prévenu ne peut utilement soutenir que les truffes qu'il a vendues sont conformes aux qualités des truffes noires communément appelées "truffes du Périgord" alors qu'il a reconnu et qu'il est établi par les pièces du dossier qu'il a acheté et revendu de la truffe de Chine de type "Tuber Indicum".

Les analyses de prélèvements effectués ont d'ailleurs révélé que les truffes étaient de variété "Tuber Indicum" et non "Tuber Melanosporum".

Il convient en outre de relever que sur la facture du 10 janvier 1995 de la SARL Impérial figurait déjà le mention "Truffes Fraîches Import"; mais que Monsieur G a délibérément omis de reporter sur ses factures l'indication "Import" en sachant que la seule inscription "Truffes fraîches" était de nature à accréditer qu'il s'agissait de truffes du Périgord ou de truffes françaises et à induire en erreur l'acheteur.Il a d'ailleurs précisé de surcroît à plusieurs de ses clients que les truffes qu'ils achetaient étaient d'origine du Périgord ou encore françaises.

En tant que professionnel averti et spécialisé dans le commerce des champignons, spécialement de la truffe, Monsieur Gillet ne peut prétendre ignorer la réglementation en vigueur et il a d'ailleurs indiqué sur certaines de ses factures l'origine des marchandises vendues.

Enfin contrairement à ce qu'il fait valoir dans ses conclusions, il n'est nullement reproché au prévenu d'avoir donné l'appellation "truffes" et il est donc inopérant de faire état, comme il le fait, d'une réglementation relative à l'appellation "truffes" puisque les faits dont il s'est rendu coupable concernent une tromperie sur l'origine et les qualités substantielles des truffes vendues.

La décision déférée sera donc confirmée sur la qualification des faits et sur la culpabilité.

Quant à la sanction prononcée par les premiers juges elle est adaptée à la gravité des faits et à la personnalité du prévenu. Elle sera également confirmée.

Par ces motifs: LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi statuant publiquement et par arrêt contradictoire; Déclare recevables les appels du prévenu et du Ministère public; Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions; Constate que l'avertissement prévu par l'article 132-29 du Code pénal a pu être donné au prévenu absent lors du prononcé de l'arrêt; Dit que la contrainte par corps s'appliquera dans les conditions prévues aux articles 749 et 750 du Code de procédure pénale; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de huit cents francs dont est redevable chaque condamné par application de l'article 1018 A du Code général des impôts.