CA Angers, ch. corr., 9 mai 1995, n° 9500141
ANGERS
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvel
Substitut :
général: Mme Restous-Gontier
Conseillers :
M. Lemaire, Mme Lourmet
Avocat :
Me Denis.
LA COUR,
Le prévenu et le Ministère public ont interjeté appel du jugement rendu le 13 janvier 1995 par le Tribunal correctionnel d'Angers qui, pour tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise, a condamné Jean-Luc B à une amende de 1 500 F.
Régulièrement cité, le prévenu comparait, assisté de son conseil, lequel sollicite, à titre principal, sa relaxe et, à tout le moins, la confirmation du jugement.
Le Ministère public pour lequel une requalification en tentative de tromperie sur les qualités substantielles s impose requiert l'élévation à 12 000 F de l'amende prononcée.
Attendu que Jean-Luc B est poursuivi pour avoir à Avrille, le 27 juillet 1993, trompé le contractant sur les qualités substantielles et les risques inhérents à l'emploi de l'huile qu'il utilisait pour la préparation des plats servis dans son établissement, en l'espèce une huile impropre à la consommation par la teneur en composés polaires (51 % au lieu de 25 %).
Attendu que le prévenu conteste les faits qui lui sont reprochés en faisant valoir que la teneur élevée en composés polaires serait due à une mise en surchauffe exceptionnelle des friteuses destinée au remplacement de l'huile usagée, que cette opération aurait été effectuée de très bonne heure à un moment où aucun repas ne pouvait être servis et qu'en tout état de cause cette huile n'était pas destinée à la préparation d'aliments.
Attendu cependant que, lors des prélèvements opérés à 10 H 30 du matin, Jean-Luc B a déclaré au contrôleur des services de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes qu'il avait "constaté l'état d'usure dudit bain d'huile, couleur brune-marron" que "l'huile fumait lors des cuissons", qu' " elle moussait " et qu'il " envisageait de la changer ".
Attendu qu'au moment du contrôle l'intéressé n'a à aucun moment indiqué que cette huile avait été mise à chauffer pour échange;que, plus tard, lors de son audition par les services de police, il a tenu à préciser que "l'huile était déjà très foncée au bout de quelques jours" et que "si les composés polaires étaient doubles, cela était dû à une chauffe assez longue durant le week-end".
Attendu qu'ainsi l'explication fournie devant les premiers juges et reprise devant la cour d'une huile destinée, le matin du contrôle, à être changée ne peut être tenue par l'expression de la vérité.
Que cependant, pour tenir compte du fait que, le 27 juillet 1993, aucun client n'avait encore été servi, la qualification de tentative de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise sera préférée au délit de tromperie lui-même.
Attendu que, de l'aveu même du prévenu, son établissement jouit d'une certaine notoriété; que cette circonstance ne peut que conduire à se montrer plus sévère à son égard, sa clientèle étant en droit d'attendre des conditions moins douteuses de préparation de la cuisine.
Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, Déclare, après requalification, Jean-Luc B coupable de tentative de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise, En répression le condamne à une amende de six mille francs (6 000 F), La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable Jean-Luc B, conformément aux dispositions de l'article 1018 A du Code général des impôts, Ainsi jugé et prononcé par application des articles 121-4 et suivants, 313-3 du Code pénal, L. 213-1 du Code de la consommation, 473 du Code de procédure pénale.