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Décisions

Cass. crim., 13 janvier 2004, n° 03-82.285

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

Mme Salmeron

Avocat général :

M. Chemithe

Avocat :

Me Hemery.

TGI Blois, ch. corr., du 20 nov. 2001

20 novembre 2001

LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par B Hervé, contre l'arrêt de la Cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 25 février 2003, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de tromperie, a confirmé le jugement l'ayant condamné à 2 000 francs d'amende; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation, pris en violation des articles L. 213-1 du Code de la consommation, 1583 du Code civil et 593 du Code de procédure pénale;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Hervé B à 2 000 francs d'amende pour tromperie sur les qualités substantielles d'une chose;

"aux motifs qu'à la date du 15 mai 1999, le bon de commande du véhicule a été signé; à cette date, la vente ne pouvait être conclue, en effet, l'article 5 bis du décret du 4 octobre 1978 exige la remise par le vendeur d'un véhicule automobile soumis à visite technique, à l'acheteur non professionnel, du procès-verbal de la visite technique établi depuis moins de six mois; la vente ne pouvait donc être réalisée qu'après le contrôle technique effectué le 20 mai 1999; en conséquence, la poursuite engagée est bien fondée; d'ailleurs, les pièces jointes à la procédure établissent que la vente a été conclue le 22 mai 1999 (.) les défauts affectant le longeron résultent d'un accident survenu en 1995 et donc bien antérieur au contrôle technique de 1999; il résulte des différents textes réglementant le contrôle technique que l'examen des longerons fait partie des éléments à vérifier; si ce contrôle doit être effectué sans démontage, ce qui a mis Hervé B dans l'impossibilité de déceler la fissure du longeron, masquée par un insonorisant d'origine, il a nécessairement constaté la déformation du même longeron, laquelle était visible en éclairant le dessous du véhicule, placé sur un pont élévateur; en omettant de mentionner ce défaut dans le procès-verbal de contrôle qu'il a signé, il a délibérément trompé l'acheteur du véhicule sur l'état de celui-ci; en effet, le rapport de visite technique est un élément essentiel d'information de l'acheteur sur l'état des organes de sécurité du véhicule et un élément décisif lors de l'acquisition d'un véhicule d'occasion par un acheteur non professionnel; l'infraction est donc constituée;

"alors, d'une part, que la tromperie suppose que l'on ait cherché à obtenir le consentement de la victime qui l'aurait refusé si elle avait été mieux éclairée; que la vente a lieu dès que les parties sont d'accord sur la chose et le prix; que la cour d'appel aurait dû rechercher, comme cela lui était demandé, si le bon de commande du 15 mai 1999, antérieur au contrôle technique, ne marquait pas l'accord du vendeur et de l'acheteur sur la chose et le prix, de sorte que la vente avait eu lieu et que l'erreur contenue dans le rapport de contrôle postérieur, n'avait pas pu déterminer le consentement de l'acheteur;

"alors, d'autre part, que le délit de tromperie est intentionnel; que la cour d'appel ne pouvait se borner à constater qu'Hervé B avait nécessairement vu le défaut du véhicule et ne l'avait pas signalé, sans montrer en quoi il avait voulu tromper l'acheteur et donc commettre le délit qui lui était reproché;

"alors, enfin, que la tromperie doit porter sur des éléments déterminés, comme une qualité substantielle, l'aptitude à l'emploi, ou les risques inhérents à l'utilisation de la chose; que la cour d'appel ne pouvait pas se contenter de considérations générales sur le contrôle technique, sans montrer en quoi l'état du longeron était une qualité substantielle de la voiture ou modifiait son aptitude à l'emploi ou les risques de son utilisation";

Vu l'article 593 du Code de procédure pénale, ensemble l'article L. 213-1 du Code de la consommation; - Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime;

Attendu que, pour condamner Hervé B, contrôleur technique automobile agréé, du chef de tromperie, l'arrêt attaqué, après avoir énoncé que la vente du véhicule, par le garagiste, également condamné pour la même infraction, à un acheteur non professionnel, ne pouvait être réalisée qu'après le contrôle technique, retient que le prévenu, qui a nécessairement constaté la déformation d'un longeron et qui a omis de mentionner cette anomalie dans le procès-verbal de contrôle, a délibérément trompé l'acquéreur sur les qualités substantielles de l'automobile vendue;

Maisattendu qu'en l'état de ces seuls motifs, qui ne caractérisent pas, à l'encontre d'un prévenu n'étant pas le cocontractant de l'acheteur du véhicule, l'élément matériel du délit de tromperie, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si les faits pouvaient répondre à la qualification de complicité de ce délit, n'a pas justifié sa décision;d'où il suit que la cassation est encourue;

Par ces motifs, casse et annule en toutes ses dispositions l'arrêt précité de la Cour d'appel d'Orléans, en date du 25 février 2003, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi; Renvoie la cause et les parties devant la Cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.