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Décisions

CA Metz, ch. corr., 5 septembre 1991, n° 685-91

METZ

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Nonnenmacher

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Greff

Substitut :

général: M. Soulhol

Conseillers :

MM. Jaouen, Dannenberger

Avocats :

Mes Wolff, Petit.

TGI Metz, ch. corr., du 21 mars 1991

21 mars 1991

Vu le jugement rendu contradictoirement à signifier par le Tribunal correctionnel de Metz le 21 mars 1991 signifié le 28 juin 1991, qui:

Sur l'action publique:

a déclaré:

R Stéphane coupable d'avoir à Lingolsheim le 10 décembre 1987, trompé Monsieur Nonnenmacher Emile sur les qualités substantielles d'un véhicule,

et lui faisant application des articles 1 de la loi du 1er août 1905, 463 du Code pénal, 473 et suivants, 734-1, 749 et 750 du Code de procédure pénale,

l'a condamné à la peine de un mois d'emprisonnement avec sursis,

l'a condamné aux dépens,

a dit que la contrainte par corps s'exercera suivant les modalités fixées par les articles 749 et 750 du Code de procédure pénale, modifiés par la loi du 30 décembre 1985,

Sur l'action civile:

a reçu Monsieur Nonnenmacher Paul Emile en sa constitution de partie civile,

a déclaré le prévenu responsable du préjudice subi par Monsieur Nonnenmacher Paul Emile,

l'a condamné à payer à Monsieur Nonnenmacher Paul Emile la somme de 18 378,01 F à titre de dommages-intérêts,

a condamner le prévenu à verser à Monsieur Nonnenmacher Paul Emile au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, la somme de 1 000 F,

a condamné le prévenu aux frais et dépens de la partie civile,

a condamné le prévenu aux frais taxables de l'avocat ou des avocats de la partie civile dont la présence aux débats a été jugée utile et nécessaire.

LA COUR,

après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué en ces termes:

En la forme:

Attendu que les appels interjetés le 3 juillet 1991 par le prévenu et le 4 juillet 1991 par le Ministère public, réguliers en la forme, ont été enregistrés dans les délais légaux;

Qu'il échet de les déclarer recevables;

Au fond:

Stéphane R conclut à sa ralaxe et à l'irrecevabilité de la constitution de partie civile ainsi qu'à la condamnation d'Emile Nonnenmacher à lui verser la somme de 3 000 F pour les frais non compris dans les dépens;

Monsieur Nonnenmacher faisait l'acquisition le 10 décembre 1987, d'un véhicule Gold diesel d'occasion auprès de Stéphane R, pour le prix de 25 000 F;

Celui-ci fait valoir que l'acquéreur a eu tout le loisir d'examiner la voiture avant de l'acheter; qu'il connaissait ce type de voiture pour en avoir déjà possédé une; que la fiche de contrôle technique lui a été remise; que la voiture avait été révisée entièrement après l'accident qu'elle avait subi, passée au marbre et remise à neuf; que l'acquéreur avait été averti dudit accident; qu'il n'a fait expertiser le véhicule qu'au bout de six mois après avoir parcouru 15 000 kilomètres;

Monsieur Nonnenmacher conclut à la confirmation du jugement et à la condamnation du prévenu à lui verser la somme de 1 500 F pour les frais exposés hors dépens en cause d'appel;

L'acquisition du véhicule faisait suite à une annonce dans le journal "les dernières nouvelles d'Alsace", ainsi libellée: "Vends Gold diesel 80, 4 portes, 105 000 km, moteur 20 000 km, peinture neuve, état exceptionnel, 25 000 F";

L'acquéreur expose qu'il a eu de nombreux incidents quelques jours après son achat alors que le prix était supérieur à la cote Argus; que son préjudice est constitué par cette différence de valeur et le montant des réparations qu'il a dû payer;

Sur ce,

Attendu qu'il convient de relever l'exagération du prix exigé par le prévenu, soit la somme de 25 000 F, alors que sa cote Argus n'était que de 10 000 F;

Attendu que pour justifier ce dépassement important, il a fait valoir auprès de l'acquéreur l'état exceptionnel de la voiture,le changement récent du moteur, la réfection de la peinture et des réparations effectuées sur l'ensemble du véhicule;

Attendu qu'il est manifeste que c'est l'état exceptionnel affirmé par le vendeur qui a déterminé l'acquéreur à acheter au prix demandé, de sorte que ledit état constituait, dans l'intention commune des parties contractantes, une qualité substantielle;

Que cependant juste après l'achat, une durite de liquide de refroidissement cédait, puis une deuxième quelques jours plus après, ce qui endommageait le joint de culasse;

Que les points d'ancrage des ceintures de sécurité cédaient également;

Attendu que selon un rapport d'expertise dont les conclusions ne sont pas contestées par le prévenu, la peinture du véhicule présentait de nombreuses traces de raccords, la fixation des sièges était défectueuse, les charnières de capot avant avaient été redressées et avaient marqué la partie avant supérieure du tablier, le capot présentait un écartement important par rapport à la partie supérieure des ailes avant, le plancher de caisse présentait un enfoncement et était peint en noir sous les garnitures, l'écartement des ailes avant par rapport aux portières n'était pas identique de chaque côté, ce qui établissait que le véhicule avait subi un accident dont on avait tenté de dissimuler les traces et ne pouvait prétendre au qualificatif d'état exceptionnel indiqué par le vendeur;

Attendu que Stéphane R ne peut affirmer sérieusement qu'il avait averti l'acquéreur de ce que le véhicule avait subi un grave accident ayant nécessité un passage au marbre, alors qu'il n'a jamais communiqué les factures de réparations et que si tel avait été le cas, il n'aurait pu faire valoir l'état exceptionnel du véhicule et exiger un prix largement supérieur à la valeur Argus, alors qu'un passage au marbre ne peut qu'altérer les qualités substantielles d'une voiture au point que quel que puisse être son état par ailleurs, il est normalement impossible de la remettre en vente à un prix supérieur à sa valeur Argus;

Attendu qu'en ne révélant pas l'accident et en présentant le véhicule comme se trouvant dans un état exceptionnel bien qu'ayant été passé au marbre, tout en exigeant un prix très supérieur à sa valeur réelle, Stéphane R a usé de manœuvres destinées à dissimuler les défauts de la voiture qui ont été mis en évidence par l'expert;

Que ce faisant, il a trompé son cocontractant sur les qualités substantielles dudit véhicule;

Attendu que la peine infligée par les premiers juges constitue une sanction proportionnée à la gravité des faits, compte tenu des circonstances atténuantes qui existent en faveur du prévenu et adaptée à sa personnalité;

Attendu que le préjudice a été évalué exactement à la somme de 18 378,01 F en raison de l'exagération du prix, des réparations effectuées par l'acquéreur et des désagréments qu'il a subis;

Qu'il convient de confirmer le jugement en toutes ses dispositions;

Attendu qu'il apparaît inéquitable de laisser à la partie civile la charge de l'ensemble des frais non recouvrables exposés en appel, ce qui conduit à condamner le prévenu à lui verser la somme de 1 200 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Attendu que ce même texte ne permet pas de condamner la partie civile à verser au prévenu une somme correspondant aux frais qu'il a dû lui-même exposer;

Par ces motifs LA COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire; En la forme, Reçoit les appels comme réguliers; Au fond, Sur l'action publique: Confirme le jugement entrepris; Constate que l'avertissement concernant le sursis a été donné à R Stéphane par M. le Président conformément aux dispositions de l'article 737 du Code de procédure pénale; Condamne le prévenu aux dépens d'appel; Prononce, en tant que de besoin, la contrainte par corps en application des articles 749 et 750 du Code de procédure pénale, modifiés par la loi du 30 décembre 1985; Sur l'action civile: Confirme le jugement entrepris; Condamne le prévenu aux dépens d'appel; Le condamne en outre à verser à la partie civile la somme de 1 200 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Dit non recevable la demande du prévenu fondée sur ce même texte;