CA Limoges, ch. corr., 18 janvier 1991, n° 394-90
LIMOGES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Laumonier
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Thierry (faisant fonction)
Substitut :
général: M. Soumireu-Mourat
Conseillers :
Mme Descard-Mazabraud, M. Eichler
Avocat :
Me Leveque.
Décision dont appel
Sur l'action publique:
Le tribunal a déclaré Gérard D coupable des faits qui lui sont reprochés, en répression l'a condamné à la peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 F d'amende ainsi qu'aux dépens;
Sur l'action civile:
Le tribunal a reçu Jean-Louis Laumonier en sa constitution de partie civile, a déclaré Gérard D responsable du préjudice subi par lui, l'a condamné à payer à Jean-Louis Laumonier la somme de 8 000 F à titre de dommages-intérêts ainsi qu'aux dépens;
Appels
Le prévenu et le Ministère public ont relevé appel de cette décision respectivement les 21 et 24 septembre 1990;
LA COUR,
Au mois de juillet 1989, Monsieur Gérard D a manifesté auprès de Monsieur Boissière, garagiste à Aixe-sur-Vienne (Haute-Vienne), le désir de se rendre acquéreur d'une voiture automobile Peugeot "205 Junior" qui avait été accidentée le mois précédent et que celui-ci avait en dépôt dans son garage. Ce véhicule, immatriculé sous le numéro 2640 RH 87, appartenait à Madame Louise Contet épouse Chaminade avec qui Monsieur Gérard D conclut la vente au prix de 15 000 F qu'il régla par chèque au mois d'août, mais sans qu'aucune mention ne soit portée sur la carte grise qui demeurait ainsi au nom de la précédente propriétaire.
Monsieur D, qui avait exercé dans le passé la profession de carrossier, a alors réparé lui-même le véhicule dans le garage de Monsieur Boissière en utilisant l'outillage que celui-ci mettait à sa disposition. Pour ce faire, il avait commandé, toujours par l'intermédiaire de Monsieur Boissière, les pièces nécessaires à la remise en état, pour un montant total de 11 709,36 F, parmi lesquelles une coque neuve valant 9 479,44 F hors taxes, auprès de la SA Ducros, concessionnaire Peugeot à Saint-Léonard-de-Noblat.
Après avoir réparé le véhicule, Monsieur D a fait passer une annonce dans différents journaux et l'a vendu, le 9 décembre 1989, à Monsieur Jean-Louis Laumonier au prix de 40 000 F réglé au moyen d'un chèque dépourvu de l'indication du nom du bénéficiaire.
A l'occasion de cette vente, Monsieur D a barré lui-même la carte grise qui était au nom de Madame Chaminade et a établi le certificat de cession également au nom et à l'adresse de Madame Chaminade, apposant toutefois sa propre signature qui est illisible.
Auparavant, le 14 novembre 1989, le vendeur avait fait procéder par Monsieur Nozière à un contrôle technique du véhicule et aucune anomalie n'avait été décelée.
Le 18 décembre 1989, Monsieur Jean-Louis Laumonier a déposé plainte contre Monsieur Gérard D pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue en déclarant que celui-ci lui avait présenté le véhicule comme étant de première main et n'ayant jamais été accidenté. Il a prétendu qu'aux dires et au comportement de Monsieur D, il avait acquis la conviction qu'il avait affaire au mari du titulaire de la carte grise.
Monsieur Gérard D a soutenu qu'il n'y avait eu aucune dissimulation et que Monsieur Laumonier avait été dûment informé de la véritable situation du véhicule, en particulier lors d'une conversation téléphonique qu'il avait eue avec l'épouse du vendeur.
Monsieur Gérard D a été cité devant le Tribunal correctionnel de Limoges sous la prévention d'avoir à Panazol, le 9 décembre 1989, trompé son cocontractant, Jean-Louis Laumonier, sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles de la marchandise vendue, en l'espèce sur les qualités substantielles d'un véhicule automobile, infraction prévue et réprimée par les articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905.
Par jugement du 17 septembre 1990, le tribunal a statué ainsi qu'il est mentionné ci-dessus.
Ont interjeté appel de ce jugement:
- le 21 septembre 1990, le prévenu,
- le 24 septembre 1990, le Ministère public.
Le prévenu, qui comparaît en personne assisté de son conseil, conteste les faits qui lui sont reprochés et plaide sa relaxe.
Monsieur le Procureur général conclut à la confirmation du jugement.
Sur ce:
Attendu que l'examen des procédés utilisés par Monsieur D confirme largement la thèse soutenue par le plaignant et selon laquelle le véhicule lui avait été présenté comme étant de première main et n'ayant jamais été accidenté;
Attendu en effet qu'il a directement barré, pour la remettre à Monsieur Laumonier, la carte grise au nom de la précédente propriétaire, Madame Louise Chaminade, laissant ainsi apparaître la mention "NEUF";
Que cette manœuvre s'est accompagnée de celle consistant à renseigner le certificat de cession également au nom de Madame Chaminade et d'y apposer une signature qui, pour être la sienne n'en est pas moins illisible, ce qui n'a pas manqué d'abuser l'acquéreur sur la véritable identité du vendeur;
Attendu en outre que le vendeur s'est abstenu de communiquer à l'acquéreur le rapport d'expertise de Monsieur Nozière, pourtant favorable, mais qui, portant le cachet d'un expert agréé, aurait pu attirer l'attention de Monsieur Laumonier sur les raisons qui avaient conduit Monsieur D à prendre une telle précaution;
Attendu en conséquence que, l'absence d'accident antérieur et le véritable état du véhicule constituant pour l'acheteur des conditions essentielles à la conclusion du contrat de vente, c'est après avoir exactement analysé les faits qui leur étaient soumis que les premiers juges en ont justement déduit que Gérard D devait être déclaré coupable de l'infraction visée à la prévention;
Attendu qu'en prononçant les peines de deux mois d'emprisonnement avec sursis et de 5 000 F d'amende, ils ont correctement sanctionné cette infraction;
Que le jugement frappé d'appel doit donc être confirmé en toutes ses dispositions;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement Recoit Gérard D et le Ministère public en leurs appels Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 17 septembre 1990 par le Tribunal correctionnel de Limoges; Monsieur le Président n'a pu donner lecture de l'avertissement prévu par l'article 737 du Code de procédure pénale; Condamne Monsieur Gérard D aux dépens le tout par application des articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905, 473 et 800 du Code de procédure pénale.