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Décisions

CA Nancy, ch. corr., 29 septembre 1992, n° 858-92

NANCY

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Theureaux

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lilti

Substitut :

général: M. Ardiet

Conseillers :

MM. Pacaud, Malherbe

Avocat :

Me Worms.

TGI Nancy, ch. corr., du 18 nov. 1991

18 novembre 1991

Le prévenu a été déféré devant le Tribunal correctionnel de Nancy pour avoir:

A Nancy, le 7 novembre 1987,

Trompé Theureaux Alain sur les qualités substantielles d'un véhicule en l'espèce en lui vendant un véhicule automobile X Jetta GL immatriculé 9942 TH 54 présenté comme étant un millésime année modèle 85 alors qu'il s'agissait d'un millésime année modèle 84.

Infraction prévue et réprimée par les articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905 et l'article 51 alinéa 2 du Code pénal.

Par jugement contradictoire en date du 18 novembre 1991, duquel le Ministère public et la partie civile ont régulièrement et respectivement relevé appel les 25 et 26 novembre 1991, le Tribunal correctionnel de Nancy a:

Sur l'action publique

Renvoyé Monsieur D Jean-Luc des fins de la poursuite sans peine ni dépens en application des dispositions de l'article 470 du Code de procédure pénale;

Sur l'action civile

Déclaré Monsieur Theureaux irrecevable en sa constitution de partie civile en raison de la décision de relaxe.

Vu les articles 473 et suivants du Code de procédure pénale, laisse les dépens à la charge du Trésor.

Le tout en application des articles 406 et suivants et 485 du Code de procédure pénale et des textes susvisés.

Sur ce, LA COUR

I - En la forme

Attendu que les appels interjetés par le Ministère public et la partie civile, régulière en la forme, ont été enregistrés dans les délais légaux;

Qu'il y a lieu de les déclarer recevables;

Attendu qu'à l'audience de la cour, le prévenu ne se présente pas ni personne pour lui; qu'il échet de statuer par défaut à son égard conformément aux dispositions de l'article 412 du Code de procédure pénale;

II - Au fond

1° - Sur la culpabilité:

Attendu que les premiers juges pour relaxer D et débouter la partie civile ont considéré que l'intention frauduleuse n'était pas caractérisée et que le seul responsable pénalement était le chef des ventes de la société "Y" à la date du 7 novembre 1987 et non le PDG de l'entreprise;

Attendu que Alain Theureaux, partie civile soutient que le revendeur professionnel d'automobiles est tenu de vérifier les caractéristiques d'un véhicule proposé à la vente;

Que le PDG doit veiller à la diffusion d'instructions précises permettant le déroulement loyal des transactions;

Qu'il sollicite la condamnation de Theureaux à la somme de 10 468 F avec intérêts au taux légal et celle de 3 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Attendu qu'il résulte des éléments du dossier et notamment d'un procès-verbal d'enquête de la Direction de la Concurrence de la Consommation et de la Répression des Fraudes que Theureaux a acquis le 7 novembre 1987 un véhicule d'occasion X Jetta GL auprès du concessionnaire de cette marque à Nancy pour le prix de 47 000 F;

Attendu que le bon de commande mentionnait l'année modèle 1985;

Attendu que Theureaux a découvert inopinément au mois de décembre 1989 que le véhicule était en réalité un véhicule du millésime 1984;

Attendu que le garage avait reçu en dépôt vente le véhicule en question pour un montant de 43 500 F;

Attendu que le tribunal a considéré que ce prix ainsi que le prix de revente correspondaient à la valeur d'un véhicule de l'année 1985 selon l'argus et non de l'année 1984 et que l'erreur commise par le garagiste avait été commise de bonne foi sans intention de léser le client;

Mais attendu que le garage "X" professionnel de l'automobile et spécialement compétent pour les véhicules de sa marque était tenu de vérifier les caractéristiques des véhicules destinés à la vente;

Que, pour un garagiste, la connaissance de l'année modèle résultait de la lecture du n° de série du véhicule, les lettres Z E figurant dans ce numéro correspondant à l'année modèle 1984;

Attendu qu'il importe peu que le garagiste ait été induit en erreur par la date de première mise en circulation du véhicule - 13 septembre 1984 - postérieure à la date de changement de millésime - le 1er juillet 1984;

Attendu que le garagiste avait l'obligation de procéder aux vérifications essentielles sur le véhicule, celle relative à la lecture et à l'interprétation du n° de série étant au nombre de celles-ci;

Qu'il convient de rappeler, en effet, que l'année de millésime détermine de façon certaine le prix de vente et certaines caractéristiques du véhicule et constitue de ce fait une qualité substantielle de celui-ci;

Attendu que D en qualité de PDG de la SA "Y" était l'employeur du vendeur Monsieur Sommacal lequel a enregistré la vente avec Theureaux qu'il avait donc le pouvoir de donner des instructions précises à son employé pour vérifier l'année de millésime des véhicules vendus;

Attendu que la culpabilité de D doit être retenue;

2° - Sur la peine:

Attendu qu'il existe des circonstances atténuantes en l'espèce; qu'il convient d'infliger à D une peine d'amende de 5 000 F;

3° - Sur la constitution de partie civile:

Attendu que Theureaux victime de la négligence de son vendeur est recevable et bien fondé à réclamer la réparation du préjudice résultant de l'acquisition d'un véhicule de 84 au prix d'un véhicule de 85;

Attendu qu'il convient de fixer à 8 000 F le montant de ce préjudice compte tenu de la différence de valeur entre les deux millésimes sur ce type de véhicule (7 600 F) et des frais de crédit majoré, démarches entraînées par cette déconvenue;

Attendu qu'il est équitable d'allouer à Theureaux une somme de 2 000 F au titre des frais irrépétibles dont il a fait l'avance;

Par ces motifs, LA COUR, statuant publiquement, par défaut à l'égard du prévenu et contradictoirement à l'égard de la partie civile; Reçoit comme réguliers en la forme les appels du Ministère public et de la partie civile du jugement en date du 18 novembre 5991 du Tribunal correctionnel de Nancy; Au fond, Sur l'action publique, Infirme le jugement du Tribunal correctionnel de Nancy en date du 18 novembre 1991 en toutes ses dispositions et statuant à nouveau, Déclare Jean-Luc D coupable de l'infraction qui lui est reprochée; En répression, le condamne à la peine de 5 000 F d'amende; cinq mille francs; Condamne le prévenu aux dépens d'appel nés de l'action civile liquidés à la somme de 474,74 F, en ce non compris les frais de signification du présent arrêt; Dit que la contrainte par corps s'exécutera conformément aux dispositions des articles 750 et suivants du Code de procédure pénale; Le tout par application des dispositions des articles susvisés, 463 du Code pénal, 473, 515, 749 et suivants du Code de procédure pénale; Sur l'action civile, Recevant Alain Theureaux en sa constitution de partie civile Condamne D à payer à Alain Theureaux la somme de huit mille francs (8 000 F) en réparation de son préjudice avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt; Condamne en outre D à payer à Theureaux la somme de 2 000 F en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Condamne D aux dépens d'appel nés de l'action civile. Le tout en application de l'article 1382 du Code civil.