CA Pau, ch. corr., 4 mai 1994, n° 94-350
PAU
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riboulleau
Substitut :
général: M. Nicod
Conseillers :
MM. Masson, Laventure
Avocat :
Me Cortinas.
Vu l'appel régulier interjeté le 16 décembre 1993 par le Ministère public, à l'encontre du jugement prononcé le 14 décembre précèdent par le Tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan.
Bien qu'appelant le Ministère public requiert la confirmation de la relaxe prononcée par les premiers juges:
Attendu qu'il est fait grief au prévenu:
- d'avoir à Sarbazan (40) le 9 octobre 1990, trompé Monsieur Dupouy sur les qualités substantielles d'un appareil de soins médicaux qui ne pouvait avoir aucun effet curatif sur la maladie dont souffrait la victime,
Infraction prévue et réprimée par les articles 1, 6, et 7 de la loi du 1er août 1906
- d'avoir à Sarbazan (40) le 9 octobre 1990 par moyen de visite à domicile, abusé de la faiblesse ou de l'ignorance de Monsieur Dupouy Daniel en lui faisant souscrire un contrat d'achat d'un appareil de soins médicaux inadapté à sa maladie profitant du fait qu'il cherchait par tous moyens à diminuer sa souffrance;
Infraction prévue et réprimée par l'article 7 de la loi du 22 décembre 1972;
Henri C et son conseil s'associent bien entendu aux réquisitions du Ministère public;
Sur quoi,
LA COUR
Le 9 octobre 1990, Henri C, gérant de la SARL X à vendu à Daniel Dupouy, au domicile de celui-ci à Sarbazan (Landes) un appareil "A"; l'appareil a été livré le même jour, mais le paiement - 10 900 F a été différé au 5 janvier 1991;
Le 2 janvier 1991, les époux Daniel Dupouy - en réalité l'épouse de Daniel Dupouy - ont déposé plainte entre la mains du procureur de la République de Mont-de-Marsan, pour escroquerie à l'encontre d'Henri C, prétendant que ce dernier leur avait fait "d'extraordinaires promesses" alors que l'appareil vendu était totalement inefficace pour guérir Daniel Dupouy lequel est atteint d'hémiplégie et de la maladie de Parkinson;
Après enquête le Parquet a renvoyé Henri C devant le tribunal correctionnel du chef de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue et d'abus de faiblesse et de l'ignorance de Daniel Dupouy;
Le jugement entrepris a relaxé le prévenu;
Le contrat signé le 9 octobre 1990, qui ne figure pas au dossier de la poursuite, a été versé aux débats tant devant le tribunal correctionnel qu'en cour d'appel;
La cour constate qu'il est en conformité avec les dispositions de la loi 72-1137 du 22 décembre 1972 dont les articles 2, 3 et 4 sont intégralement reproduits et qu'en particulier l'acheteur a été informé de la faculté d'annulation de la commande dans un délai de sept jours dont il disposait;
Par ailleurs la documentation livrée en même temps que l'appareil et les indications figurant sur son "tableau de bord" ne comportent aucune référence à l'hémiplégie ou à la maladie de Parkinson;
La documentation fait seulement état d'un soulagement des douleurs; il est d'ailleurs à remarquer que si dans sa plainte du 2 janvier 1991 Paulette Descat-Dupouy soutenait qu'Henri C avait garanti verbalement à la "guérison" de son mari, elle a été beaucoup plus nuancée lors de son audition, du 3 septembre 1991; ce jour là elle a dit que le prévenu avait seulement affirmé que l'appareil allait "soulager" Daniel Dupouy;
C'est donc à juste titre que le jugement entrepris a relaxé Henri C du chef du délit prévu et réprimé par les articles 1er de la loi du 1er août 1905, car les diverses attestations versées aux débats, dont certaines émanent de membres du corps médical, prouvent l'efficacité de l'appareil "A" dans le traitement des douleurs;
Un opuscule écrit par un médecin, le docteur Mueller lui attribue même un effet bénéfique pour certaines personnes atteintes de la maladie de Parkinson;
Le délit poursuivi sur le fondement de l'article 7 de la loi du 22 décembre 1972 n'est pas non plus démontré;
Le contrat litigieux a en effet été établi en présence de l'épouse de Daniel Dupouy; à sa date (9 octobre 1990) Daniel Dupouy pouvait, parait-il, malgré son handicap accompagner des amis et des parents à la chasse à la palombe; il n'a jamais été présenté comme un dément ou un débile mental mais ses souffrances étaient si intenses qu'il a voulu tenter de les diminuer;
Cet espoir s'est avéré vain, mais au moment de la conclusion du contrat, Daniel Dupouy avait été impressionné favorablement par les résultats obtenus par son compatriote Jose Ansalas, lequel a délivré une attestation élogieuse pour l'appareil; il est vrai que lui n'est atteint ni d'hémiplégie ni de la maladie de Parkinson;
Un autre élément doit être pris en considération; la société X, dont Henri C est le gérant a repris l'appareil A le 9 mars 1991, annulé la vente et restitué le 11 mars suivant le chèque de 10 900 F daté du 5 janvier 1991;
Le prévenu affirme qu'à cette date il n'avait pas été informé de la plainte déposée contre lui le 2 janvier précèdent; un fait est certain en tout cas: à la suite de cette plainte il n'a été procédé à son audition que le 25 mars 1991, soit plus de 15 jours après la reprise de l'appareil et 14 jours après l'annulation du contrat par le vendeur.
Par ces motifs: LA COUR statuant contradictoirement et en audience publique, Vu les articles 406, 410 417 et 427 et suivants 462, 470, 485, 486, 497, 512 et suivants du Code de procédure pénale, 1er de la loi du 1er août 1905, 7 de la loi du 22 décembre 1972, 313-4 du nouveau Code pénal; Déclare l'appel régulier et recevable en la forme; Au fond le dit injustifié, Confirme le jugement prononcé le 14 décembre 1993 par le Tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan en ce qu'il a relaxé Henri C.