Cass. crim., 4 mai 1994, n° 93-82.224
COUR DE CASSATION
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Avenel
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Gunehec
Rapporteur :
M. Jorda
Avocat général :
M. Amiel
Avocat :
Me Blondel.
LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par Avenel Bruno, partie civile, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, du 14 avril 1993, qui l'a débouté de ses demandes après relaxe de Gilles C du chef de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue; - Vu le mémoire produit;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1 et suivants de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services, ensemble violation des articles R. 106, R. 115 et R. 241 du Code de la route, violation de l'article 1382 du Code civil et méconnaissance des exigences de l'article 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé le prévenu des fins de la poursuite et a débouté la partie civile de ses demandes d'indemnisation;
"aux motifs qu'il résulte des témoignages recueillis sous serment au cours du complément d'information et dont rien ne permet de douter de la sincérité, que Bruno Avenel avait une pleine connaissance des travaux effectués sur le véhicule, du moins en ce qui concerne les plus importants; qu'il lui incombait dans ces conditions, lors de la transaction d'agir avec prudence et de solliciter tous renseignements utiles sur les transformations pratiquées au besoin par voie d'examen technique préalable à la vente, la profession du vendeur ne pouvant efficacement suppléer à une telle démarche;
"et aux motifs encore qu'il n'est pas démontré que, par des manœuvres diverses (un doute existant quant à la remise des factures ou quant aux démarches afférentes à la carte grise), Gilles C ait trompé ou tenté de tromper son cocontractant sur les qualités substantielles de son véhicule -les qualités d'origine pas plus que la conformité de la carte grise n'étant aucunement requise- en vendant celui-ci, cependant que l'ayant lui-même utilisé avant la vente, il le savait inapte à son usage normal, d'autant qu'il est démontré que l'acheteur s'en est également servi sans critique de sa part pendant plus d'un an avant de déposer plainte (cf. p. 6 de l'arrêt);
"alors que, d'une part, il ne ressort d'aucune mention précise de l'arrêt nonobstant les conclusions circonstanciées de la partie civile, qu'au jour de la vente du véhicule, date de référence, l'acquéreur savait que celui qu'il achetait était le résultat bien insolite d'une transformation totale d'un premier véhicule BMW réduit à l'état d'épave, muni d'une carte grise, véhicule utilisé pour partie puisqu'il a été en certains de ses éléments, intégré dans une caisse nue provenant d'un second véhicule également réduit à l'état d'épave et passé au marbre, ces deux épaves ayant été transformées en utilisant les pièces de cinq autres automobiles BMW accidentées ce qui était en soi spécialement troublant; qu'en se contentant, pour infirmer le jugement entrepris, d'affirmer que l'acquéreur: "avait une pleine connaissance des travaux effectués sur le véhicule, du moins en ce qui concerne les plus importants" sans se prononcer plus précisément sur ce qui avait été effectivement porté à la connaissance de l'acquéreur, la Cour motive insuffisamment sa décision, ne mettant pas à même la Cour de cassation d'exercer son contrôle;
"alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, eu égard à la nature des transformations faisant que le véhicule vendu était le résultat singulier insolite d'un montage à partir d'épaves, ce n'était pas à l'acquéreur non professionnel de se renseigner sur les transformations pratiquées au besoin en faisant procéder à un examen technique préalable à la vente du véhicule, mais au vendeur dans un tel contexte à l'éclairer parfaitement et ce d'autant plus que la Cour admet que le vendeur savait que la BMW vendue était "inapte" à un usage normal; qu'en décidant le contraire sur le fondement de motifs inopérants, la Cour viole les textes cités au moyen;
"et alors que, de troisième part, la Cour se devait de se prononcer clairement sur le moyen avancé par Bruno Avenel qui faisait valoir que le certificat de vente comportait la mention suivante: "je certifie (il s'agit du vendeur) que ce véhicule n'a pas subi de transformation notable susceptible de modifier les indications du certificat de conformité ou de l'actuelle carte grise" cependant que l'acheteur faisait encore valoir dans le droit fil de cette observation que, "par la signature du certificat de vente, C affirmait notamment que le numéro dans la série du type figurant sur la carte grise était bien celui du véhicule cependant que le contraire vient d'être démontré, étant établi au surplus que l'année modèle correspondant à la carte grise est 1985 cependant que l'année modèle correspond à la coque nue et qui porte le numéro de fabrication du constructeur est de l'année modèle 1984", qu'en l'état d'un moyen aussi péremptoire mettant spécialement en relief la tromperie dont a été victime l'acquéreur, la Cour se devait d'y répondre; qu'en retenant une indication amphibiologique et même erronée quant à ce, elle méconnaît derechef les exigences de l'article 593 du Code de procédure pénale";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions prétendument délaissées, a exposé sans insuffisance ni contradiction les motifs dont elle a déduit que n'était pas caractérisé à la charge de Gilles C le délit de tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue et ainsi justifié le débouté de la partie civile; d'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;
Rejette le pourvoi.