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Décisions

Cass. crim., 4 mai 1995, n° 94-83.573

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Défendeur :

Egault

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guerder (faisant fonctions)

Rapporteur :

M. Jorda

Avocat général :

M. Amiel

Avocats :

SCP Defrenois, Levis.

Rennes, 3e ch., du 31 mars 1994

31 mars 1994

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : R Guy, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes, 3e chambre, du 31 mars 1994, qui, pour tromperie sur les qualités substantielles d'une prestation de services, l'a condamné à 6 000 francs d'amende, a ordonné l'affichage de la décision et a prononcé sur les intérêts civils ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le premier moyen de cassation pris de la violation du principe du contradictoire, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, méconnaissance des droits de la défense ;

"en ce que la cour d'appel, après le tribunal, a rejeté l'exception de nullité du rapport d'expertise établi non contradictoirement par l'expert de la partie civile, et a, en conséquence, condamné Guy R pour délit de tromperie à 6 000 francs d'amende ainsi qu'à payer des dommages-intérêts à la partie civile ;

"aux motifs propres que les premiers juges ont rejeté l'exception pour des motifs pertinents et que le prévenu a pu débattre avec la partie civile devant la cour (arrêt p. 4, in limine) ;

"et aux motifs adoptés que la preuve des infractions à la loi du 1er août 1905 peut être établie par toutes voies de droit commun ; qu'en l'espèce, la mesure d'expertise n'avait aucun caractère obligatoire ; que l'expertise diligentée par M. Lavole s'analyse en un moyen de preuve, soumis comme tel à l'appréciation du tribunal (jugement p. 5) ; "1°) alors que tant devant les premiers juges que devant la cour d'appel, R avait fait valoir que l'expertise devait être annulée, non pas en raison de son caractère obligatoire au sens de l'article 12 de la loi du 1er août 1905, mais en raison du caractère non contradictoire du rapport d'expertise établi à la seule requête de la partie civile ; qu'en statuant de la sorte, sans se prononcer sur l'atteinte au principe du contradictoire et aux droits de la défense résultant du caractère non contradictoire du rapport d'expertise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; "2°) alors qu'en toute hypothèse, R avait encore fait valoir que la fiche technique du banc électronique concernant la suspension, établie en un seul exemplaire, ne figurait pas au dossier pénal en sorte qu'il n'était pas en mesure de débattre utilement d'une éventuelle tromperie ayant consisté à dissimuler l'état des suspensions ; qu'en statuant de la sorte, sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a privé derechef sa décision de base légale" ;

Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 1, 7 et 8 de la loi du 1er août 1905, devenus les articles L. 213-1, L. 216-3 et L. 216-4 du Code de la consommation, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Guy R coupable du délit de tromperie, l'a condamné à la peine d'amende de 6 000 francs, l'a déclaré responsable du préjudice subi par M. Egault et l'a condamné à payer à ce dernier des dommages-intérêts ;

"aux motifs que le rapport technique du 26 février 1991 a été établi par R après examen du véhicule par son préposé, M. R2 ; qu'un nouveau contrôle technique et une expertise demandée par le nouvel acquéreur ont fait état d'anomalies du châssis et d'une suspension avant faible, les suspensions ayant été remises en état par soudures et adjonction de renforts hors les règles de l'art, lesquelles soudures, selon l'expertise, étaient antérieures au mois de février 1992 ; qu'il en résulte que le contrôle technique du 26 février 1991 a été mal réalisé et qu'il était trompeur pour M. Egault ; que R ne conteste pas avoir établi personnellement le document litigieux, après que l'examen du véhicule eut été effectué par son employé M. R2, lequel en l'absence de preuve d'une participation à une fraude a été, à juste titre, renvoyé des fins de la poursuite par les premiers juges ;

"alors que la tromperie sur la qualité de la chose objet d'un contrat, pour être punissable, doit résulter d'une intention frauduleuse et porter sur des qualités substantielles de la chose ; qu'en statuant ainsi, sans constater que R aurait sciemment trompé M. Egault en signant le contrôle technique litigieux établi par son préposé, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'intention délictueuse du prévenu et a donc violé les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ; - Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, qui a écarté à bon droit l'exception de nullité de "l'expertise" unilatérale versée aux débats par la partie civile, a, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction et en répondant aux conclusions dont elle était saisie, caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ; D'où il suit que les moyens qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause ainsi que de la valeur et de la portée des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.