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Décisions

Cass. crim., 1 mars 1995, n° 94-83.542

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Souppe (faisant fonction)

Rapporteur :

Mme Ferrari

Avocat général :

M. Perfetti

Avocat :

Me Choucroy.

Rennes, 3e ch., du 27 janv. 1994

27 janvier 1994

LA COUR : - Statuant sur le pourvoi formé par : L Jean-Marc, C Catherine, épouse L, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Rennes, 3e chambre, du 27 janvier 1994, qui, pour tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise, les a condamnés, le premier à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 100 000 francs d'amende, la seconde à 50 000 francs d'amende dont 25 000 francs avec sursis et a ordonné une mesure de publication ; - Vu le mémoire produit ; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905 devenus les articles L. 213-1 et suivants du Code de la consommation, 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de tromperie sur les qualités substantielles de produits de conserverie ;

"aux motifs qu'il résulte des éléments du dossier et des débats que, lors d'un contrôle effectué le 21 août 1991, les services de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes constataient, dans les entrepôts de la société X à Crach, la présence d'un lot de conserves de fonds d'artichauts en bocaux de 9 180 unités faisant partie d'une fabrication des 18 et 19 juillet ayant porté sur 45 000 bocaux environ et sur l'étiquette desquels apparaissaient les mentions "mis en bocaux le jour de la récolte" et "Bretagne-France" ; que les produits en cause avaient, en fait, été élaborés avec des fonds d'artichauts congelés importés du Chili, mis en bocaux par la société X dont L est le directeur général et distribués par la société Y dirigée par Mme L ; que, des déclarations mêmes des prévenus, il résulte que les 150 000 bocaux d'artichauts fabriqués au cours du dernier exercice précédant le contrôle et étiquetés avec les mentions "France-Bretagne, mis en bocaux le jour de la récolte Louis H fondée depuis plus de 100 ans" contenaient, pour la plus large part, des produits congelés importés du Chili ; que, seuls 9 180 bocaux ont été retrouvés dans les locaux de la société X, les autres ayant été commercialisés ; que, de plus, si JB H a effectué, le 2 octobre 1874, une démarche afin de déposer sa marque de fabrique, il ne ressort nullement des débats que, depuis 1874, la famille H ait effectivement produit des activités de conserverie, ni d'ailleurs que JB H ait effectivement procédé au dépôt de sa marque, les documents produits étant des courriers d'information sur les formalités à remplir ; que les faits visés à la prévention sont établis par les éléments du dossier, les débats et les aveux mêmes des prévenus ;

"alors que, d'une part, le délit de tromperie sur les qualités substantielles du produit vendu suppose l'existence d'un contrat ayant pour objet la fourniture d'un produit ou d'un service, notamment d'un contrat de vente ; qu'en l'espèce, les demandeurs soulignaient, dans leurs conclusions d'appel auxquelles la cour a omis de répondre, que le produit litigieux n'a jamais été offert à la vente et est demeuré en entrepôt aux fins de modifications ; que les 150 000 bocaux vendus l'année précédente n'ont jamais été revêtus de l'étiquette non conforme ; que rien n'établit qu'un produit portant une étiquette erronée ait été offert à la vente ; que la simple mise en bocaux ne prouve pas la vente des produits litigieux et qu'ainsi, l'élément matériel du délit incriminé fait défaut ;

"alors, d'autre part, que le délit de tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise et sur l'aptitude à l'emploi de celle-ci, pour être punissable au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1905, doit résulter d'une intention frauduleuse et porter sur les qualités substantielles de la marchandise ; qu'il appartient aux juges de constater les circonstances d'où se déduit la mauvaise foi du prévenu et de préciser les qualités substantielles sur lesquelles l'utilisateur de la marchandise a été trompé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui s'est bornée à constater que les étiquettes comportaient des mentions erronées, alors que les demandeurs ont toujours soutenu qu'il s'agissait d'une erreur matérielle d'impression chez l'imprimeur, n'a pas caractérisé l'élément intentionnel du délit et n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ; D'où il suit que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Rejette le pourvoi.