Cass. crim., 27 mars 1996, n° 95-81.427
COUR DE CASSATION
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Di Stasi (Consorts)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Simon
Rapporteur :
Mme Verdun
Avocat général :
M. Dintilhac
Avocats :
SCP Waquet, Farge, Hazan.
LA COUR: - Statuant sur le pourvoi formé par M Alain, contre l'arrêt de la Cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 8 février 1995, qui, pour tromperie sur les qualités substantielles de la marchandise vendue, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement avec sursis, a ordonné une mesure de publication, et a prononcé sur l'action civile; - Vu l'arrêt de la Chambre criminelle en date du 29 mai 1991 portant désignation de juridiction; - Vu le mémoire produit; - Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits ou de services, des articles 112-1 et 121-3 du nouveau Code pénal, de l'article 339 de la loi d'adaptation du 16 décembre 1992, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Alain M coupable de tromperie sur les qualités substantielles du cercueil vendu à Michel Di Stasi;
"aux motifs que la famille Di Stasi s'étant adressée à la SARL X, dont Alain M était gérant, en demandant que le cercueil de leur défunt soit en acajou, peu importe que ce soit parce que dans leur esprit c'était ce qu'il y avait de mieux c'est-à-dire de plus cher, dès lors qu'il est établi que sur instructions permanentes d'Alain M à son personnel, et pour placer le plus cher cercueil du catalogue, il leur a, en fait, fourni un cercueil en chêne plus ou moins exotique en le présentant sciemment et mensongèrement comme de l'acajou;
"alors, d'une part, qu'il ressort des éléments des débats et notamment des constatations des premiers juges (jugement p. 4 2 et 3) que c'était le choix du modèle de "la meilleure qualité", et donc pas nécessairement celui de l'essence du bois en elle-même qui constituait, pour les consorts Di Stasi, la qualité substantielle du cercueil acheté; qu'ainsi en s'abstenant de rechercher si ce n'était pas la qualité substantielle du cercueil aux yeux des consorts Di Stasi, la cour d'appel n'a pu caractériser une tromperie légalement punissable;
"alors, d'autre art, que l'article 121-3 du nouveau Code pénal, immédiatement applicable aux infractions commises avant son entrée en vigueur et n'ayant donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée, pose en principe qu'il n'y a point délit sans intention de le commettre; qu'ainsi le délit de tromperie sur les qualités substantielles d'une chose vendue supposant que soit établie l'intention du vendeur de tromper son cocontractant, la cour d'appel devait donc, en l'espèce, caractériser précisément l'élément intentionnel du délit de tromperie reproché à Alain M, qui ne pouvait à tout le moins résulter que d'une violation en toute connaissance de cause d'une prescription légale et réglementaire et non point seulement comme cela a été retenu, en l'espèce, de l'existence de prétendues "instructions permanentes d'Alain M à son personnel" énonciations de par trop générales et imprécises pour que l'on puisse en déduire, dans ces circonstances particulières de l'espèce, que l'exposant ait réellement eu l'intention de tromper les consorts Di Stasi, avec lesquels il n'a d'ailleurs eu aucun contact personnel, sur les qualités substantielles du cercueil vendu par l'entreprise de pompes funèbres;
"alors, de surcroît, que le délit de tromperie étant un délit intentionnel, l'existence même d'une imprudence ou d'une négligence au sens de l'article 339 de la loi d'adaptation du nouveau Code pénal ne saurait, en toute hypothèse, suffire à caractériser le délit à défaut de l'intention coupable exigée par l'article 121-3 alinéa 1° du Code pénal";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les juges du second degré ont, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de tromperie sur les qualités substantielles reproché au prévenu, et ainsi justifié l'allocation au profit de la partie civile de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction; Que le moyen, qui revient à remettre en discussion l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme;
Rejette le pourvoi.