CA Paris, 13e ch. B, 1 décembre 1994, n° 94-00534
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Beaufrère
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Bertolini
Avocat général :
M. Louise
Conseiller :
Mme Marie M. Laylavoix
Avocats :
Mes Thiant, Knoll.
Rappel de la procédure:
Sur les intérêts civils seuls en cause d'appel
Le jugement:
Le tribunal, après avoir relaxé des fins de la poursuite B Rupert et J Denis du chef de tromperie sur la nature, l'origine ou la qualité d'une prestation de services, a débouté Beaufrère Monique, partie civile, de l'ensemble de ses prétentions.
L'appel:
Appel a été interjeté par:
Madame Beaufrère Monique, le 14 décembre 1993 contre Monsieur J Denis, Monsieur B Rupert.
Décision:
Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant sur le seul appel interjeté par la partie civile à l'encontre du jugement déféré;
S'y référant pour l'exposé de la prévention;
Rappel des faits:
En vertu d'un contrat conclu avec la société X le 25.04.1988 dont le gérant était M. J, Mme Beaufrère avait remis une somme de 75 000 F en contrepartie du droit d'exploiter le code 36-15 Z; il s'est révélé que Mme Beaufrère n'avait jamais été déclarée comme titulaire de ce code à la direction générale des télécommunications et qu'à compter du 30 mars 1988, la société X avait désigné la société Y dirigée par M. B comme titulaire de ce code;
Mme Beaufrère, représentée par son conseil, a déposé des conclusions faisant valoir que le contrat passé entre elle et la société X, représentée par son gérant M. J, avait pour objet la cession d'une banque de données intitulée 36-15 Z pour la somme de 75 000 F hors taxe, qu'il était également prévu la fourniture d'un numéro de commission paritaire permettant le bénéfice d'un tarif réduit pour les communications; que ce contrat était à la fois un contrat de vente et un contrat de prestations de services, la société X s'engageant non seulement à céder les droits d'exploitation d'une banque de données, mais également à mettre à la disposition du co-contractant un matériel informatique en son état de "maintenance" moyennant prélèvement d'une commission avant reversement à Mme Beaufrère d'un pourcentage forfaitaire des sommes réglées par les utilisateurs du service 36-15 "Z" à France Télécom; elle en déduit que si l'on ne peut assimiler les droits d'exploitation d'un code télématique à des marchandises au sens de l'article 1er de la loi du 1er août 1905, la mise à disposition et l'entretien d'un équipement informatique, ainsi que la réversion d'un pourcentage sur les sommes versées par les utilisateurs du minitel moyennant commission constituent des prestations de services au sens de l'article 16 de la loi précitée;
Mme Beaufrère précise que M. J avait déjà cédé à la société Y les droits d'exploitation de la banque de données objet du contrat, que l'acte de tromperie a consisté pour M. J à avoir perçu une somme en échange de droits dont il n'était plus titulaire;
Elle soutient que s'agissant de la culpabilité de M. B, celui-ci ayant en sa qualité de gérant de la société Y acheté des parts de la société X en mai 1989 et étant devenu par la suite le véritable animateur de la société X, ne peut prétendre ignorer l'existence de la convention passée en avril 1988 entre cette société et Mme Beaufrère;
Mme Beaufrère réclame pour la perte éprouvée la somme de 88 950 F correspondant aux dépenses exposées lors de l'achat de la banque de données 36-15 code Z et demande la désignation d'un expert pour déterminer le montant des sommes qui auraient dû lui être reversées depuis la date d'achat du code ainsi que celle de 50 000 F au titre des frais irrépétibles;
M. J Denis, cité à parquet n'a pas comparu, il n'est pas toutefois établi qu'il ait eu connaissance de la citation, il sera, dès lors, statué par défaut à son égard.
M. B Rupert, présent à l'audience, assisté de son conseil, soutient que le délit de tromperie n'est pas constitué et que le tribunal de commerce l'a exonéré de toute responsabilité dans la gestion de la société X; il demande la confirmation du jugement.
Les motifs:
Considérant que le contrat avait pour objet le principal droit d'exploiter une messagerie, c'est à dire, un service permettant par le moyen de la télématique, la communication entre particuliers ou entre groupes;
Considérant que la mise à disposition d'ordinateurs n'était qu'un accessoire du contrat;
Qu'il n'y a pas eu tromperie sur une prestation de services;
Considérant que le terme de "marchandises" de l'article 1er de la loi du 1er août 1905 ne vise que les biens corporels qui se comptent, se pèsent ou se mesurent; qu'une telle définition ne recouvre pas une cession du droit d'exploiter une messagerie;
Qu'ainsi les faits ne sont pas susceptibles de recevoir la qualification de tromperie au sens de la loi du 1er août 1905;
Considérant que la juridiction répressive est incompétente, sauf exception légale, pour statuer sur une action en réparation de dommages résultant de fautes sans caractère pénal;
Considérant que la demande de Mme Beaufrère est fondée sur une faute purement civile;que la cour ne peut donc que se déclarer incompétente;
Considérant que la demande de Mme Beaufrère sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ne saurait en conséquence être accueillie;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement à l'égard de B Rupert et de Beaufrère Monique, par défaut à l'égard de J Denis, Reçoit l'appel de la partie civile, Confirme le jugement en toutes ses dispositions civiles seules en cause d'appel, Déboute Beaufrère Monique de toutes ses demandes fins ou conclusions, La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 francs dont est redevable la partie civile.