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Décisions

CA Paris, 13e ch. A, 22 octobre 1990, n° 90-432

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Dubruc, Massimi, Roesch, Sorain, Henaff (Epoux), Bignault (Epoux), Santoni, Bossard (Epoux), Minaud (Epoux), Perez (Epoux), Léone, Massimi Chevreau, Union féminine civique et sociale

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Couderette

Avocat général :

M. Bouazzouni

Conseillers :

MM. Martinez, de Thoury

Avocats :

Mes Hassan, Léone Crozat.

TGI Paris, 31e ch., du 11 déc. 1989

11 décembre 1989

Rappel de la procédure:

Le jugement:

LE TRIBUNAL a:

Rejeté les conclusions déposées par Me Rémy Hassan;

Déclaré Johnson K coupable de publicité fausse ou de nature à induire en erreur et de tromperie;

Croisière organisée du 2 au 14 octobre 1988 en Egypte sur le Nil

Et par application des articles 44 de la loi n° 73-1193 du 27.12.1973 et 16 de la loi du 1er août 1905;

Condamné K Johnson à la peine de vingt mille francs d'amende;

Ordonné aux frais du prévenu la publication par extraits du jugement dans le journal "Le Monde";

Reçu les consorts Dubruc, Massimi, Roesch, Sorain, Le Bars épouse Henaff, Henaff Jean-Louis, Le Goff épouse Bignault, Bignault André, Santoni, Bossard Georges et Mathilde, Minaud Chantal et Antoine, Paul épouse Perez, Perez Armand, Paul épouse Léone et Massimi Chevreau en leur constitution de partie civile;

Condamné Johnson K à payer à titre de dommages et intérêts les sommes suivantes:

- 5 000 F à Anne-Marie Dubruc

- 5 000 F à Martine Massimi

- 5 000 F à Angeline Massimi Chevreau

- 5 000 F à Edith Roesch

- 5 000 F à Dominique Sorain

- 5 000 F à Anne-Marie Le Bars épouse Henaff

- 5 000 F à Henaff Jean-Louis

- 5 000 F à Odile Le Goff épouse Bignault

- 5 000 F à André Bignault

- 5 000 F à Antoine Minaud

- 5 000 F à Chantal Minaud

- 4 000 F à Georges Bossard

- 4 000 F à Mathilde Bossard

- 4 000 F à Raoul Santoni

- 4 000 F à Michèle Paul épouse Perez

- 4 000 F à Armand Perez

- 4 000 F à Colette Paul épouse Léone;

Condamné le prévenu à payer à chacune de ces parties civiles la somme de 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Reçu l'UFCS en sa constitution de partie civile;

Condamné Johnson K à lui payer la somme de 5 000 F à titre de dommages et intérêts et celle de 2 000 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire des dispositions civiles du jugement;

Débouté Johnson K de ses demandes en dommages-intérêts pour procédure abusive;

Mis hors de cause la société X en qualité de civilement responsable de Johnson K;

Condamné le prévenu aux dépens liquidés à la somme de 314,22 F avancés par les parties civiles, à 50 F, avancés par l'Etat, non compris le montant de la consignation s'élevant à la somme de 5 000 F.

Appels:

Appel a été interjeté par:

K Johnson, le 15 décembre 1989;

Le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris, le 15 décembre 1989.

Décision:

Rendue après en avoir délibéré, conformément à la loi:

I - Les appels:

Statuant sur les appels interjetés par K Johnson Sam Howard, prévenu, et le Ministère public à l'encontre du jugement déféré;

S'y référant pour l'exposé des faits;

Par voie de conclusions, l'appelant principal sollicite sa relaxe des fins de la poursuite, le débouté des parties civiles et leur condamnation à lui payer la somme de 2 000 F à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive;

Il fait valoir que dans l'organisation d'un voyage de 14 jours en Egypte, des aléas peuvent survenir; que d'ailleurs la plaquette publicitaire en avertit la clientèle; que d'autre part, nombre d'entre eux ne lui sont pas imputables tels les retards d'un avion ou d'un mini-bus à la suite d'une panne et si ce retard entraîne la suppression d'une partie du programme prévu il ne doit pas pour autant se voir attrait devant une juridiction pénale;

Enfin, il fait observer d'une part que les modifications de tel ou tel élément du voyage, comme les remplacements du navire "Cléopatra" par le "Fleur" ou celui de l'hôtel "Sheraton" par le "Gifton" à Hurghada ne constituent pas des éléments déterminant dans la constitution des délits poursuivis, même si la superficie des chambres du navire de remplacement est moins favorable, le but essentiel du voyage étant, selon lui, la visite du pays, ses clients étant de surcroît informés de la possible survenance de tels aléas;

En second lieu, il considère que dans le prix de ce voyage qui est de 11 000 F le transport et les prestations représentent chacune la moitié de la somme payée, la marge du tour operator étant déduite; que dans ces conditions vu la modicité du prix réclamé les parties civiles ne peuvent se montrer aussi exigentes qu'elles l'ont été et refusant le dédommagement partiel qui leur était proposé.

Par voie de conclusions également les parties civiles intimées et représentées par leur conseil demandent à la cour de confirmer la décision critiquée et la condamnation du prévenu à leur payer à chacune la somme supplémentaire de 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

II - Les motifs

1°) L'action publique:

Considérant au fond que la matérialité des faits n'est pas contestée;

Que notamment les plaignants ont voyagé sur le navire "Le fleur" au lieu du "Cléopatra";

Que la plaquette publicitaire présente ce dernier comme un "hôtel flottant cinq étoiles de niveau international avec son aménagement, son décor raffiné et agréable, sa table soignée et son service discret" alors que sur le "Fleur" navire de conception ancienne, outre la superficie plus réduite de chambres, il n'existait pas de climatisation, les douches étaient vétustes, le carrelage cassé, les moquettes usées et les repas de type "fast food";

Considérant d'autre part, que l'hôtel "Gifton" proposé en remplacement du "Sheraton" est de catégorie inférieure;

Que ses prestations étaient déplorables si l'on juge par les photos produites au dossier par les victimes, les chambres donnaient sur une ruelle face aux moteurs de climatisation et la nourriture de mauvaise qualité alors d'une part que selon les plaignants des chambres étaient disponibles dans l'hôtel prévu et que d'autre part, les prix des chambres dans ces hôtels variaient du simple au triple;

Considérant enfin que la visite d'Assouan n'a pas eu lieu alors qu'elle était prévue et que celle d'Abou Simbel l'a été dans un temps réduit;

Considérant dans ces conditions que si des modifications peuvent survenir dans l'organisation d'un voyage, le terme d'aléa est impropre lorsque les changements affectent la quasi-totalité des prestations promises;

Qu'en effet le caractère systématique de ces modifications du projet qui entraînaient le remplacement de prestations annoncées par d'autres de qualité nettement inférieure permet de considérer que le délit de publicité mensongère ou de nature à tromper est constitué; le montant du prix du voyage librement fixé par l'annonceur étant sans influence sur la réalisation de ce délit;

Considérant cependant, et s'agissant de l'infraction à la loi du 1er août 1905, que la cour estime en l'absence de preuve formelle de l'élément intentionnel qu'il échet de relaxer K Johnson Sam Howard de ce chef;

Considérant que la peine qui lui a été infligée constitue la juste sanction des faits dont il est reconnu coupable;

Considérant qu'il convient de confirmer également la mesure de publication décidée par les premiers juges tout en fixant à 5 000 F son montant;

2°) Les intérêts civils:

Considérant que la cour qui dispose des éléments d'appréciation nécessaires et suffisants pour chiffrer le préjudice causé aux parties civiles et résultant directement des faits sanctionnés, estime devoir condamner K Johnson à payer la somme de:

- 3 000 F à Anne-Marie Dubruc, Martine Massimi, Angeline Massimi Chevreau, Edith Roesch, Dominique Sorain, Anne-Marie Le Bars épouse Henaff, Jean-Louis Henaff, Odile Le Goff épouse Bignault, André Bignault, Antoine Minaud, Chantal Minaud et l'Union féminine civique et sociale;

- 2 000 F à Georges Bossard, Mathilde Bossard, Raoul Santoni, Michèle Paul épouse Perez, Armand Perez et Colette Perez épouse Léone;

Considérant d'autre part que la cour estime devoir allouer à chacune de ces parties civiles la somme supplémentaire de 100 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges qu'elle adopte, LA COUR Statuant par défaut pour le civilement responsable et contradictoirement pour les autres parties; Sur l'action publique: Confirme le jugement déféré sur la déclaration de culpabilité concernant l'infraction à l'article 44 de la loi n° 73-1193 du 27.12.1973, la peine prononcée et la mesure de publication en fixant son coût à 5 000 F; L'infirme pour le surplus et relaxe K Johnson du chef de l'article 16 de la loi du 1er août 1905; Sur l'action civile: Infirme le jugement déféré et condamne K Johnson à payer la somme de: - 3 000 F à Anne-Marie Dubruc, Martine Massimi, Angeline Massimi Chevreau, Edith Roesch, Dominique Sorain, Anne Maire Le Bars épouse Henaff, Jean-Louis Henaff, Odile Le Goff épouse Bignault, André Bignault, Antoine Minaud, Chantal Minaud et l'Union féminine civique et sociale; - 2 000 F à Georges Bossard, Mathilde Bossard, Raoul Santoni, Michèle Paul épouse Perez, Armand Perez et Colette Perez épouse Léone; Condamne K Johnson à payer à ces parties civiles la somme supplémentaire de 100 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale; Rejette comme non fondées toutes autres conclusions contraires ou plus amples; Condamne le prévenu aux dépens, ceux d'appel étant liquidés à la somme de 2 878,57 F.