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Décisions

CA Limoges, ch. corr., 5 octobre 1994, n° 68-94

LIMOGES

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Payard (faisant fonctions)

Substitut général :

M. Vergne

Avocat :

Me Labrousse

TGI Tulle, ch. corr., du 22 sept. 1993

22 septembre 1993

Décision dont appel

Le tribunal a déclaré Monsieur X Michel coupable des faits qui lui sont reproches, l'a condamné à la peine d'amende de 6 000 F, vu l'article 7 de la loi du 1er août 1905, a ordonné aux frais du condamné la publication par extraits de la présente décision dans les journaux suivants : La Montagne, Le Populaire du Centre et L'écho du Centre, a dit que le coût de ces publications ne devra pas dépasser la somme de 2 000 F et l'a condamné au paiement d'un droit fixe de procédure d'un montant de 600 F.

Appel

Le prévenu et le Ministère public ont relevé appel de cette décision le 1er octobre 1993;

Arrêt de renvoi du 20 mai 1994

La cour a prononcé le renvoi de l'affaire à l'audience du 21 septembre 1994 à 8 heures et a réservé les dépens ;

LA COUR,

Le prévenu et le Ministère public ont interjeté appel du jugement dont le dispositif est ci-dessus rapporté rendu le 22 septembre 1993 par le Tribunal correctionnel de Tulle;

Ces appels sont réguliers et recevables en la forme ;

Le prévenu qui comparaît assisté de son conseil reconnaît avoir vendu un véhicule défectueux mais sollicite l'indulgence de la cour, lui demandant notamment de le relever de la publicité ordonnée en première instance faisant valoir qu'il a fait contrôler le véhicule à deux reprises et a proposé à l'acquéreur de le reprendre.

Il conteste avoir trafiqué le compteur kilométrique, expliquant que la facture d'achat du véhicule ne lui a été transmise que plusieurs mois après la transaction et se référant au kilométrage porté sur la fiche d'atelier.

Le Ministère public requiert aggravation de la sanction pécuniaire prononcée.

Attendu qu'il est constant que le 31 octobre 1992, Monsieur Hermabessière a acheté au garage exploité par Monsieur X un véhicule Volkswagen Golf au prix de 55 000 F dont le certificat de garantie mentionnait un kilométrage de 40 137 Kms ;

Qu'ayant constaté à deux reprises et malgré un réglage du parallélisme, une usure anormale des pneumatiques avant, il a présenté le véhicule à un centre agréé qui a décelé d'importantes anomalies le contraignant à déposer plainte bien que Monsieur X lui ait offert de rembourser les 55 000 F;

Attendu que l'expert désigné dans le cadre de l'enquête a relevé une dissymétrie du bloc avant de la droite vers la gauche, constate que le véhicule avait subi un violent choc sur le tiers avant droit et que la coque non réparée selon les règles de l'art présentait des plis résiduels qui ne pouvaient être éliminés compte tenu de l'état moléculaire du métal ;

Qu'il a conclu que le véhicule était dangereux à l'utilisation ;

Attendu que les diligences effectuées auprès de son précédent propriétaire la société Y ont permis d'établir que lots de la vente du véhicule à Monsieur X, le kilométrage était déjà de 57 012 Kms ;

Attendu que le prévenu a expliqué avoir effectivement acheté ce véhicule Golf à l'état d'épave pour la somme de 32 000 F ;

Qu'ayant appris que la société Y ne l'avait payé que 18 000 F et ayant constaté que les dégâts étaient plus importants qu'en apparence, il avait décidé de le réparer à moindres frais ;

Qu'il a reconnu s'être rendu compte des malfaçons lorsque le client était venu la première fois faire régler le parallélisme ;

Qu'il a contesté avoir modifié le kilométrage, prétendant n'avoir reçu la facture de Y mentionnant un kilométrage de 57 012 Kms qu'après avoir revendu le véhicule et accusant cette société d'être à l'origine de la modification du compteur;

Attendu que les documents relatifs à l'achat du véhicule par la société Y y compris son registre de police, font tous état d'un kilométrage de 57 012 Kms;

Que la facture concernant la transaction avec le garage X contient une indication identique ;

Que Monsieur X soutient n'avoir été destinataire de ce document qu'environ trois mois après la transaction alors que le compteur ne totalisait que 40 137 Kms ;

Mais attendu que cette facture comporte son cachet et sa signature lesquels n'ont pu être apposés, compte tenu des engagements liés à la prise de possession du véhicule, que le jour de la vente;

Que celle-ci est intervenue le 16 mai 1992 ;

Qu'à supposer même que Monsieur X n'ait reçu la facture que trois mois après, il disposait de tout le temps nécessaire pour rétablir la vérité avant la vente à Monsieur Hermabessière qui date du 31 octobre suivant;

Qu'il ne peut valablement se prévaloir d'une fiche de travail établie par son propre atelier et d'ailleurs non versée aux débats pour démontrer que le véhicule n'avait que 40 137 Kms lorsqu'il l'a acquis;

Attendu que la modification du kilométrage est incontestablement intervenue dans son établissement et dans des conditions engageant sa responsabilité qui a été à bon droit également retenue en ce qui concerne l'état du véhicule vendu ;

Qu'il résulte en effet suffisamment des éléments du dossier et particulièrement de l'expertise de Monsieur Comeille que le véhicule Golf, gravement accidenté, acheté à l'état d'épave n'a pas été réparé dans les règles de l'art et comportait, lorsqu'il a été revendu, des malfaçons insusceptibles d'être reprises et le rendant dangereux à l'usage, donc inapte à la circulation ;

Que ces malfaçons sont imputables à Monsieur X qui, en tant que professionnel, a décidé de réparer le véhicule à moindre frais et l'a en connaissance de cause laissé circuler, ne proposant à l'acquéreur de le reprendre que pour éviter des poursuites pénales ;

Attendu que les premiers juges ont exactement analysé les faits qui leur étaient soumis et en ont justement déduit que Michel X devait être déclaré coupable de l'infraction visée à la prévention telle que spécifiée dans le jugement attaqué auquel il est expressément fait référence ;

Que le jugement entrepris doit donc être confirmé quant à la culpabilité ;

Attendu que la sanction pécuniaire prononcée n assure pas, compte tenu de l'ensemble des éléments de la cause et des antécédents du prévenu, une répression suffisante ;

Qu'il convient de porter l'amende à 10 000 F ;

Attendu que la publication ordonnée apparaît en l'espèce particulièrement adaptée pour informer les consommateurs et assainir le marché de la voiture d'occasion;

Qu'elle sera donc confirmée ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement ; Reçoit Monsieur Michel X et le Ministère public en leurs appels ; Confirme le jugement entrepris quant à la culpabilité et la publication ordonnée ; L'émendant quant au montant de l'amende et statuant à nouveau : Condamne Monsieur Michel X à une amende de dix mille francs (10 000 francs); Condamne Monsieur Michel X au paiement d'un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F. Le tout par application des articles 1, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905, 473 et 800 du Code de procédure pénale.