Cass. soc., 30 juin 2004, n° 02-42.877
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Lafosse
Défendeur :
SPIMC (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Le Roux-Cocheril (faisant fonctions)
Rapporteur :
Mme Mazars
Avocat général :
M. Legoux
Avocats :
SCP Peignot, Garreau.
LA COUR : - Attendu que M. Lafosse a été engagé en qualité de VRP par la société SPIMC, entreprise de vente et entretien de matériel de sécurité et de protection contre l'incendie, par contrat de travail du 4 août 1994 comportant une clause de non-concurrence ; qu'il a démissionné le 17 mai 1999; qu'ayant appris en septembre 1999 que son ancien salarié exerçait une activité concurrente, l'employeur a cessé de lui verser l'indemnité mensuelle en contrepartie financière de l'obligation de non-concurrence ; que M. Lafosse a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la reprise de ces versements et le paiement de dommages-intérêts; que la société SPMIC a sollicité reconventionnellement la condamnation de l'intéressé au remboursement des sommes versées à ce titre et au paiement du montant de la clause pénale;
Sur le premier moyen : - Attendu que M. Lafosse fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande et d'avoir fait droit aux demandes reconventionnelles de l'employeur alors, selon le moyen : 1°) que les dispositions de la convention collective plus favorables que celles du contrat de travail s'imposent aux parties; qu'ainsi, en l'espèce, les dispositions de l'article 17 de l'accord interprofessionnel du 3 octobre 1975 qui prévoient que l'interdiction de non-concurrence n'est valable que pour "le secteur ou la catégorie de client que le représentant de commerce était chargé de visiter au moment de la notification de la rupture" devaient prévaloir sur celles du contrat de travail interdisant au salarié de s'intéresser à une activité similaire de celle de son employeur dans un rayon de 200 km à vol d'oiseau de l'agence à laquelle il était rattaché, soit celle d'Yvrac (Gironde) ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel qui a tout à la fois relevé "que le secteur d'activité de M. La fosse était limité à la Gironde" et que M. La fosse n'avait pas respecté la clause de non-concurrence imposée par son contrat de travail en ce que, en toute hypothèse, le siège de sa nouvelle activité dans le Gers était à moins de 200 kilomètres de la Gironde; a violé l'article 17 de l'accord interprofessionnel du 3 octobre 1975, ensemble les articles L. 135-2 du Code du travail et 1134 du Code civil ; 2°) qu'il appartient aux juges du fond de rechercher, le cas échéant en invitant les parties à s'en expliquer, si le principe de la proportionnalité ne justifie pas au regard de la liberté du travail une limitation de la portée de l'obligation de non-concurrence sur laquelle ils doivent statuer; que dès lors, en s'abstenant de rechercher si le principe de la proportionnalité ne justifiait pas que le champ d'application géographique de la clause de non-concurrence imposée à M. La fosse fût limité au seul département de la Gironde, qui était le secteur d'activité du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe constitutionnel de la liberté du travail et des articles 7 de la loi des 2-17 mars 1791 et L. 120-2 du Code du travail;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que M. Lafosse avait créé une activité directement concurrente de celle de son employeur dans le département du Gers, alors que le secteur de son activité de VRP pour le compte de la société SPIMC n'était pas limité au département de la Gironde et s'étendait aux départements voisins notamment au département du Gers où il avait prospecté des clients et pris des commandes; que par ce seul motif elle a caractérisé la violation par le salarié de l'interdiction contractuelle de concurrence sans méconnaître l'article 17 de la Convention collective nationale interprofessionnelle du 3 octobre 1975 ;Que le moyen n'est pas fondé;
Mais sur le second moyen : - Vu l'article 1152 du Code civil; - Attendu que, pour allouer à la société une indemnité égale à la rémunération totale perçue par M. Lafosse pendant les vingt quatre derniers mois de l'exécution de son contrat de travail, la cour d'appel se borne à énoncer, par motifs adoptés, qu'il y a lieu de condamner le salarié au paiement de la somme prévue par la clause pénale contractuelle forfaitaire ; Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié demandait la réduction de la clause pénale, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si celle-ci n'était pas manifestement excessive, a violé le texte susvisé;
Par ces motifs : Casse et annule, mais seulement sur le montant de la réparation accordée à la société au titre de la clause pénale, l'arrêt rendu le 28 mai 2001, entre les parties, par la Cour d'appel de Bordeaux; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Agen.