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Décisions

Cass. com., 23 juin 2004, n° 02-15.204

COUR DE CASSATION

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Fiat Auto France (SA)

Défendeur :

Bernard Molia (SA), Molia

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

Mme Champalaune

Avocat général :

M. Jobard

Avocats :

SCP Defrenois, Levis, SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez

T. com. Paris, 1re ch., du 16 nov. 1998

16 novembre 1998

LA COUR : - Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Fiat auto France que sur le pourvoi incident relevé par la société Bernard Molia et M. Molia; - Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Paris, 8 mars 2002) que M. Molia était le concessionnaire de la société Fiat auto France (la société Fiat) à Orthez; que la société Etablissements Debibie (la société Debibie) était le concessionnaire de cette marque à Dax; que la société Debibie connaissait des difficultés ; que M. Molia et la société Fiat ont entrepris des discussions sur la reprise par M. Molia de la concession détenue par la société Debibie; que la société Fiat a soumis, selon lettre du 26 septembre 1994, la reprise de la concession de Dax par M. Molia à un certain nombre de conditions, parmi lesquelles l'acquisition d'un terrain en vue de la construction de nouveaux bâtiments abritant la concession ; que le 26 novembre 1996, la société Fiat et la société Bernard Molia ont signé deux contrats de concession pour la distribution de véhicules légers et de véhicules utilitaires renouvelant ceux afférents à la concession de Dax, lesquels ont été résiliés par la société Fiat le 4 août 1997 avec effet au 4 août 1999; que par acte du 5 mai 1998, la société Bernard Molia et M. Molia ont assigné la société Fiat en paiement de dommages-intérêts en se prévalant de la résiliation abusive de ces contrats ainsi que du défaut de paiement de primes contractuelles;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche : - Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil; - Attendu que pour décider que la société Fiat avait manqué à son obligation de loyauté et abusé de son droit de résiliation, l'arrêt retient que la société Fiat a "conditionné" le 26 septembre 1994 son accord pour la poursuite à Dax, par M. Molia, du contrat de concession consenti à la société Debibie à l'acquisition de cette société avec un apport de 1 000 000 francs, à la fourniture d'une caution bancaire de l 100 000 francs, à la présentation et à l'acquisition d'un nouveau terrain avant le 31 décembre 1995, à la construction d'un nouveau garage conforme aux concessions Fiat avant le 30 juin 1996, que la reprise de la société Debibie s'est faite nonobstant une situation financière qui la conduisait au dépôt de bilan, que M. Molia a fourni la caution exigée, qu'il est justifié des multiples recherches entreprises pour trouver un terrain ;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs, caractérisant seulement l'accomplissement partiel des conditions mises par la société Fiat à son accord au transfert à la société Molia de la concession de Dax et la société Etablissements Debebie, impropres à établir l'abus commis par la société Fiat dans l'exercice de son droit de résilier les contrats renouvelés le 26 novembre 1996, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;

Sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa quatrième branche : - Vu les articles 1134 et 1147 du Code civil ; - Attendu que pour décider que la société Fiat avait manqué à son obligation de loyauté et abusé de son droit de résiliation, l'arrêt retient encore qu'il est prouvé qu'elle avait déjà décidé de transformer son dispositif national de vente et d'implantation de son réseau de concessionnaires qu'une "macrozone" regroupant Pau, Orthez, Dax, Anglet et Mont de Marsan était ainsi à l'étude ; qu'un rendez-vous a été pris le 2 juin 1996 avec M. Ripert, candidat repreneur, qu'il n'est pas contesté que M. Ripert est le dirigeant de la société Sodex laquelle par l'intermédiaire de la société SCV Auto deviendra le concessionnaire Fiat à Dax, comme le confirme une lettre de la société Fiat datée du 6 avril 1998, alors que la période de préavis de la société Bernard Molia n'était pas encore terminée;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs, impropres à établir l'abus de la société Fiat, ou le manquement par celle-ci à son obligation de loyauté, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;

Sur le premier moyen du pourvoi incident : - Vu les articles 4 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts à concurrence de 248 426,18 francs de la société Bernard Molia au titre de primes dites "MOS" auxquelles elle estimait pouvoir contractuellement prétendre pour l'année 1995, l'arrêt retient que s'agissant du préjudice, les prétentions relatives aux primes sont incompréhensibles;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Bernard Molia exposait que lui étaient dues des primes pour l'exercice 1995 calculées selon un dispositif résultant selon elle d'une circulaire du concédant du 27 décembre 1994, la cour d'appel a violé les textes susvisés;

Et sur le deuxième moyen du pourvoi incident : - Vu les articles 4 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ; - Attendu que pour rejeter la demande en paiement de dommages-intérêts à hauteur de 201 091,45 francs de la société Bernard Molia au titre de primes dites "MOS" auxquelles elle estimait pouvoir contractuellement prétendre pour l'année 1997, l'arrêt retient que s'agissant du préjudice, les prétentions relatives aux primes sont incompréhensibles;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Bernard Molia exposait que la société Fiat s'était fondée pour le calcul des primes de l'année 1997 sur des objectifs de vente que le concessionnaire n'avait pas acceptés et que lui étaient dues des primes pour cet exercice, la cour d'appel a violé les textes susvisés;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi principal : Casse et annule, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 mars 2002, entre les parties, par la Cour d'appel de Paris; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel de Versailles.