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Décisions

CA Bourges, 2e ch., 23 janvier 1992, n° 39-92

BOURGES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Couturier

Conseillers :

M. Gayat de Wecker, Mlle Renom

Avocat :

Me Aubert.

TGI Bourges, ch. corr., du 23 oct. 1991

23 octobre 1991

Par jugement rendu le 23 octobre 1991, le Tribunal correctionnel de Bourges a relaxé Didier B et Jean-Pierre L du chef de tromperie sur les qualités substantielles d'un véhicule, fait commis à Vierzon le 20 mai 1989 au préjudice de M. Ferré dont la constitution de partie civile a été déclarée irrecevable;

Ce jugement a été frappé d'appel le 24 octobre 1991 par le Ministère public;

A l'audience M. l'Avocat général s'en rapporte 4 droit sur la relaxe de M. B mais sollicite une sanction dissuasive à l'encontre de M. L, qui avait l'obligation, en tant que professionnel, de garantir le kilométrage du véhicule vendu après l'avoir vérifié et sans se satisfaire de l'attestation délivrée par l'ancien propriétaire;

M. L conclut à la confirmation de la relaxe prononcée à son profit rappelant qu'il n'avait pas connaissance du kilométrage réel du véhicule et qu'il a donc effectué la vente à M. Ferré en toute sincérité;

M. B demande également la confirmation de la relaxe prononcée par les premiers juges, indiquant s'être toujours lié au kilométrage affiché au compteur;

Sur quoi LA COUR

Attendu qu'il résulte du dossier et des débats que le 20 mai 1989 M. Ferré a acheté à X du Berry, dont le responsable est M. L, un véhicule Golf Oti ayant 68 000 km, moyennant le prix de 57 000 F;

Qu'en consultant le carnet d'entretien du véhicule il s'est rendu compte que celui-ci avait en réalité 98 000 km, alors que le kilométrage lui avait été garanti par référence à "l'attestation km" signée le 31 janvier 1989 par l'ancien propriétaire M. B lors de la reprise du véhicule pour 50 000 F;

Attendu que l'enquête consécutive à la plainte de M. Ferré a établi que M. B avait lui-même acheté ce véhicule mis en circulation en novembre 1985 au garage L de Bourges courant 1987;

Que la facture et le bon de commande relatifs à cette transaction font expressément référence à un kilométrage réel de 61 370 alors que le compteur n'affichait que 31 370 km, différence qui s'explique par le remplacement en 1986 dudit compteur au titre de la garantie 30 000;

Attendu que M. B a déclaré avoir acheté le véhicule présenté par le vendeur comme n'ayant que 31 000 km sans se préoccuper du kilométrage réel et avoir, lors de sa revente, rédigé en toute bonne foi l'attestation kilomètre;

Que M. L prétend n'avoir été que la victime des agissements de M. B et n'avoir nullement cherché à tromper M. Ferré pour réaliser une opération spéculative;

qu'à l'audience il a précisé que le véhicule repris pour 50 000 F à M. B était en très bon état et que personne n'avait pensé à consulter le carnet d'entretien;

Qu'il a ajouté qu'en fonction de son kilométrage réel il subissait une décote d'environ 7 000 F;

Attendu que concernant M. B, qui n'a nullement participé le 20 mai 1989 à la vente du véhicule à M. Ferré même si son attitude envers la société X est révélatrice d'une malhonnêteté intellectuelle destinée à obtenir une reprise de son véhicule au meilleur prix, il y a lieu de confirmer la décision de relaxe;

Attendu que s'il est certain que M. L, en tant que responsable de la vente de voitures d'occasion, devait garantir à M. Ferré l'état général, l'année et le kilométrage du véhicule acheté par celui-ci, encore fallait-il qu'il soit informé du kilométrage réellement parcouru et qu'il l'ait sciemment dissimulé à son cocontractant;

Que si l'on peut s'étonner qu'un professionnel, recevant un véhicule d'occasion en vue de sa revente, n'ait pas le premier réflexe de consulter le carnet d'entretien, cet élément est insuffisant pour caractériser l'intention frauduleuse qui doit animer la fraude reprochée à M. L alors que le bon état général du véhicule ne permettait pas de supposer qu'il avait un kilométrage supérieur à celui affiché au compteur;

Qu'en conséquence les premiers juges ont à bon droit, à défaut de preuve de l'élément intentionnel de l'infraction, renvoyé M. L des fins de la poursuite;

Par ces motifs: LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement après en avoir délibéré, Reçoit le Ministère Public en son appel; Au fond confirme le jugement rendu le 23 octobre 1991 par le Tribunal correctionnel de Bourges prononçant la relaxe des deux prévenus; Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.