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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 8 janvier 1993, n° 5539-92

PARIS

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lenormand

Avocat général :

M. Jeanjean.

Conseillers :

Mmes Magnet, Barbarin

TGI Créteil, 11e ch., du 10 oct. 1991

10 octobre 1991

Rappel de la procédure:

Le jugement:

tel qu'il sera rappelé en tête des motifs du présent arrêt,

étant toutefois précisé que:

- les faits ont été commis le 30 septembre 1989

- les dépens de première instance ont été liquidés à 60,48 F.

Appels:

Appel a été interjeté par:

1°) O Vladimir, le 3 avril 1992

2°) le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Créteil le même jour.

Décision:

Rendue après en avoir délibéré conformément à la loi;

Vladimir O a été poursuivi devant le Tribunal de Créteil (11e chambre) sous la prévention "d'avoir à Sucy-en-Brie (94), le 30 septembre 1989, trompé le contractant sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles, la composition et la teneur en principes utiles de la marchandise vendue, en vendant un véhicule automobile Audi qu'il savait maquillé et en mentionnant faussement qu'il s'agissait d'un modèle 1987 et d'une première main, faits prévus et réprimés par les articles 1er, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905.

Par jugement en date du 10 octobre 1991, le tribunal, statuant contradictoirement à l'égard du prévenu en application de l'article 410 du Code de procédure pénale, a déclaré Vladimir O coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis et à deux mille francs d'amende.

Appel de cette décision a été régulièrement interjeté tant par le prévenu que par le Ministère public.

A l'audience de la cour du 20 novembre 1992, Vladimir O a soutenu qu'il n'avait pas trompé l'acheteur sur la qualité de première main de la voiture, une précédente immatriculation figurant sur la carte grise du véhicule; pour le reste, il n'a donné que des explications embarrassées.

Considérant que Vladimir O achetait, fin juillet 1989, à Josef Kuras qui exploite, avec un certain Pytel, un garage de réparation en carrosserie à l'enseigne "carrosserie VGA", sis 26 avenue de la Victoire à Argenteuil (94), un véhicule Audi 100 TD immatriculé 5537 ZW 95 pour le prix do 50 000 F, payé comptant, auquel devait s'ajouter une somme de 10 000 F après certaines finitions, somme que O ne paiera jamais;

Qu'en réalité Joseph Kuras avait acheté, le 19 avril 1989, aux établissements SNDA Buquet, 6 rue du Port Engot, Saint Aubin Les Elbeuf (76), un véhicule Audi 100 TD (Turbo Diesel), année modèle 1987, immatriculé 3463 MI 76, qui avait été classé "en épave" sous ses caractéristiques d'origine, suite à un accident survenu courant décembre 1988, mais sans que le dernier propriétaire ne mentionne sur la carte grise "épave" ou "pour destruction" lors de sa vente aux établissements SNDA Buquet le 27 février 1989; qu'en même temps Kuras achetait aux établissements précités une caisse nue d'Audi 100 provenant d'une voiture dépourvue d'existence administrative bien antérieure au châssis de l'autre voiture puisque datant de 1984; qu'il s'agissait d'une "caisse-essence" et non diesel; qu'il acquérait le tout pour 32 000 F.

Que Joseph Kuras opérait un transfert de coque tout en conservant le numéro du châssis de l'Audi 100 TD correspondant à la carte grise intacte; que ces travaux de transfert de coque et de remise en état du véhicule durèrent plusieurs mois et qu'ils n'étaient pas achevés lorsque le prévenu s'en porta acquéreur, en toute connaissance de cause, étant en relation amicale avec Kuras;

Qu'il est établi, par les pièces de la procédure, qu'à la suite d'une annonce parue sous les numéros 1025 et 1026 dans "la centrale des particu1iers",Vladimir O vendait comme une Audi 100 TD, ré-immatriculée par lui sous le numéro 311 HLB 75, la voiture ainsi "bricolée" à Michel Sallat, demeurant à Sucy-en-Brie (94), le 30 septembre 1989; que l'annonce précisait "84 000 F 100 CD diesel turbo autom. Mai 1987 - gris métal. vernis. int. gris - fermeture électrique radio pr. n. 72 000 km"; que l'annonce paraissait une seconde fois, le 28 septembre 1989, pour le prix de vente de 80 000 F; que finalement Michel Sallat obtenait que le prix soit rabaissé à 78 000 F;

Que, s'il est certain que l'acheteur n'a pu être trompé sur la qualité de première main du véhicule, la précédente immatriculation, soit 5537 ZW 95, figurant sur la carte grise il est établi, en revanche, que Michel Sallat a été trompé sur les autres qualités substantielles du véhicule;

Qu'en effet, il résulte de l'examen technique du véhicule acheté par ce dernier, diligenté par le centre technique de la gendarmerie nationale, qu'il y a discordance entre le compartiment moteur et le reste de la carrosserie qu'en effet la partie moteur, selon les techniciens, comprenant le numéro de série, partie ressoudée, provient d'un modèle 1987 alors que le restant de la carrosserie ainsi que l'habitacle semblent provenir des années 1983-1984;

Considérant qu'O, qui avait été complètement informé par Joseph Kuras sur l'état du véhicule ainsi que l'a affirmé ce dernier et ce que le prévenu ne nie pas, s'est rendu coupable du délit de tromperie en revendant à son tour le véhicule qui avait été reconstitué à partir de deux véhicules et donc maquillé, tout en occultant cet état de chose à son acheteur qui avait cru en toute bonne foi qu'il s'agissait bien d'une voiture Audi 100 TD modèle 1987.

Que, le 13 octobre 1989, du reste, soit une quinzaine de jours après son achat, Michel Sallat avait fait réaliser un contrôle technique complet de son véhicule chez GSCA Val de Marne à La Queue-en-Brie (94) et que celui-ci avait révélé de nombreuses traces de réparation et des séquelles d'accident antérieur;

Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement attaqué sur la déclaration de culpabilité de Vladimir O qu'il y a lieu de lui faire, toutefois, une application différente de la loi pénale, ne s'agissant pas d'un professionnel de l'automobile et la victime de la tromperie ayant été intégralement remboursée par lui;

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit les appels du prévenu et du ministère public; Confirme le jugement attaqué sur la déclaration de culpabilité de Vladimir O mais, l'émondant sur la peine, condamne celui-ci à trois mille (3 000) francs d'amende. Condamne Vladimir O aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers liquidés à la somme de 376 F. Le tout par application des articles 1er de la loi du 1er août 1905, 473, 512 du Code de procédure pénale.