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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 17 mars 1995, n° 94-03344

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

AFOC nationale

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bertolini

Avocat général :

M. Bartoli

Conseillers :

Mmes Magnet, Marie

Avocats :

Mes Amar, Martiano

TGI Paris, 11e ch., du 28 mars 1994

28 mars 1994

Rappel de la procédure:

Le jugement:

Le tribunal, par jugement contradictoire, a déclaré S Samir coupable de:

- détention, exposition ou vente de marchandise sans élément d'identification, le 22 janvier 1991, à Paris, infraction prévue par l'article L. 217-3, L. 217-2 du Code de la consommation et réprimée par l'article L. 217-3, L. 213-4 al. 1 du Code de la consommation,

- publicité mensongère ou de nature à induire en erreur, le 22 janvier 1991, à Paris, infraction prévue par les articles L. 121-1, L. 121-5, L. 121-6 al. 1 du Code la consommation et réprimée par les articles L. 121-6, L. 213-1 du Code de la consommation,

et, en application de ces articles, l'a condamné à 15 000 F d'amende, a ordonné la publication par extraits dans le journal "France Soir";

Sur l'action, civile le tribunal a reçu l'AFOC en sa constitution de partie civile et a condamné Samir S à lui payer la somme de 1 000 F à titre de dommages-intérêts et celle de 1 500 F au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.

Les appels:

Appel a été interjeté par:

Monsieur S Samir, le 1er avril 1994, sur les dispositions pénales et civiles,

Monsieur le Procureur de la République, le 1er avril 1994.

Décision:

Rendue contradictoirement après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant sur les appels régulièrement interjetés par le prévenu Samir S et le Ministère public à l'encontre du jugement déféré auquel il est fait référence pour l'exposé de la prévention;

Rappel des faits:

Etant expressément fait référence à l'exposé des faits, il sera rappelé les faits suivants:

Lors d'un contrôle effectué le 22 janvier 1991, par les agents de Direction de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes dans le magasin X, exploité <adresse> à Paris 12e par la société Y, dont S Samir est le gérant, il a été constaté la présence, dans un conservateur-bahut, de 25 paquets de 225 grammes de crevettes entières crues d'origine malgache et de marque Oso dont les emballages portaient une étiquette surajoutée indiquant comme date de congélation avril 1989 et comme date limite de consommation avril 1991; sous ce sur-étiquetage les enquêteurs découvrirent sur 14 paquets les dates respectives d'octobre 1988 et avril 1990, et sur les autres paquets des dates grattées, effacées ou illisibles;

Au vu des factures ces produits avaient été livrés au magasin par l'entrepôt de la société Y le 30 octobre 1990;

Les enquêteurs ont par ailleurs, relevé la mise en vente sous la dénomination "truites vidées France" des truites en réalité importées du Chili;

Monsieur S Samir s'est présenté assisté d'un avocat, par voie de conclusions, il fait valoir:

- en premier lieu, que l'organigramme de la société Y, qui avait absorbé une dizaine de magasins X ne permet pas d'imputer les fautes relevées par la Direction Générale de la Concurrence de la Répression et des Fraudes, à Monsieur S;

- en deuxième lieu, s'agissant des truités provenant du Chili et indiquées comme provenant de la France, que les deux paquets litigieux se trouvaient dans un bahut fermé avec des étiquettes mobiles, Monsieur S précise que le client se servant seul peut vérifier que l'étiquette imprimée qui mentionne bien la provenance Chili et non la "provenance" alléguée France;

- en troisième lieu que s'agissant du sur-étiquetage des 25 paquets de crevettes provenant de Madagascar, et importées par la société Delta Pêche, rien n'établit que ce procédé puisse être imputé à Monsieur S, les étiquettes litigieuses ayant pu être apposées avant la livraison à Y;

Il sollicite en conséquence sa relaxe.

L'AFOC nationale, partie civile, demande la confirmation du jugement déféré, et réclame en outre la somme de 5 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Sur ce

Sur l'action publique:

* sur les conclusions de M. S tendant à être reçu en son opposition:

Considérant que c'est à tort que Monsieur S, dans ses conclusions, demande à être reçu en son opposition, la cour n'étant saisie que de son appel interjeté contre un jugement rendu contradictoirement;

Que cette demande doit donc être écartée;

* sur le moyen tiré de la délégation de pouvoir:

Considérant que, si le chef d'entreprise, qui n'a pas personnellement pris part à l'infraction, peut s'exonérer de sa responsabilité pénale en rapportant la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires, encore faut-il qu'il désigne le préposé investi des moyens propres à l'accomplissement de sa tâche et ne se borne pas à une simple allégation comme le fait Monsieur S;

* sur l'infraction de détention, exposition, mise en vente de marchandises dont les signes servant à les identifier ont été modifiés:

Considérant que, contrairement à ce que soutient Monsieur S, le président du conseil d'administration de la société Delata Gel fournisseur de la société Y, a déclaré, de façon nette, aux inspecteurs de la DGCCFR le 26 mars 1991, que les crevettes étaient importées de Madagascar avec un étiquetage définitif qui n'est en aucun cas modifié en France;

Qu'il a ajouté que le sur-étiquetage apposé sur les crevettes entières crues détenues par Y avait été certainement effectué par son client à savoir Y;

Considérant que, les faits sont constants, malgré les dénégations du prévenu qui n'apparaissent en rien convaincantes;

Considérant qua, la modification de la date de congélation sur un produit congelés, constitue l'infraction prévue et réprimées par les articles 1er de la loi du 24 juin 1928 et 1er de la loi du 1er août 1905, ce dernier texte étant repris par l'article L. 231-1 du Code de la consommation;

Considérant que, ce texte à pour finalité la protection de la santé publique, qui est mise en cause par les agissements du prévenu;

Qu'en effet, le sur-étiquetage ne permet pas à l'acquéreur de connaître la date à laquelle les produits ne peuvent plus être consommés sans danger;

Qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine prononcée laquelle est équitable;

* sur la publicité de nature à induire en erreur:

Considérant que la mention "truites vidées France", alors que l'affichette désignait des truites congelées provenant du Chili, était mensongère;

Que la publicité mensongère est punie comme la publicité de nature à induire en erreur;

Que les éléments constitutifs de l'infraction sont les mêmes;

Que les faits sont constants et l'infraction caractérisée dans tous ses éléments;

Qu'il convient donc de confirmer le jugement tant sur la déclaration de culpabilité que sur la peine prononcée;

Sur l'action civile:

Considérant que le tribunal a fait une exacte appréciation du préjudice résultant directement pour la partie civile des agissements répréhensibles du prévenu;

Que dès lors, il convient de confirmer, sur ce point le jugement attaqué;

Sur la demande de la partie civile fondée sur les dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale;

Considérant que, la demande d'une somme de 5 000 F formulée par la partie civile, au titre des frais irrépétibles, est justifiée dans son principe, mais doit être limitée à 3 000 F;

Par ces motifs et ceux non contraires des premiers juges, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, Reçoit les appels du prévenu et du Ministère public, Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions tant pénales que civiles, Y ajoutant, condamné Samir S à payer à la partie civile la somme de 3 000 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 800 F dont est redevable le condamné.