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Décisions

CA Reims, ch. corr., 20 décembre 1990, n° 1044

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

INAO

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mahieux (faisant fonctions)

Substitut général :

Mme Lafont

Conseillers :

Mlle Gross, Mme Debuisson

Avocats :

Mes Honnet, Lechesne

TGI Troyes, ch. corr., du 23 mai 1989

23 mai 1989

Statuant sur les appels, régulièrement interjetés en la ferme par le prévenu Bernard T et par le Ministère public, d'un jugement du Tribunal correctionnel de Troyes en date du 23 mai 1989 qui, sur l'action publique,

- a déclaré Bernard T coupable des faits qui lui étaient reprochés,

- l'a condamné à une peine d'amende de 50 000 F,

- a ordonné la publication par extraits de la décision dans les journaux L'Est-Eclair et Libération Champagne, en limitant le coût à 5 000 F, sur l'action civile,

- a reçu l'Institut national des appellations d'origine en sa constitution de partie civile,

- a jugé Bernard T entièrement responsable du préjudice directement causé par l'infraction en cause,

- l'a condamné à payer à l'INAO les sommes de :

* 2 934 F a titre de dommages et intérêts,

* 2 500 F en indemnité de procédure.

Suivant citation directe du Ministère public Bernard T a été renvoyé devant le Tribunal correctionnel de Troyes, sous la prévention d'avoir à Celles Sur Ource (10), le 6 octobre 1987 :

* effectué un pressurage au-delà des limites permises, infraction prévue et réprimée par les articles 17 et 22 de la loi du 6 mai 1919,

* fait une fausse déclaration de récolte, infraction prévue et réprimée par les articles 11, 17 et 22 de la loi du 6 mai 1919,

* fait une tentative de tromperie sur les qualités substantielles d'un produit avec circonstance aggravante d'usage d'indication frauduleuse, infraction prévue et réprimée par les articles 1, 2-2°, 6 et 7 de la loi du 1er août 1905.

Appel de cette décision a été relevé dans les formes et délais légaux par le prévenu et par le Ministère public.

Par arrêt avant dire droit du 30 mars 1990, la cour d'appel de céans a ordonné un supplément d'information, confié à Mademoiselle Cordier, Président de la chambre, qui, par ordonnance du 15 mai 1990, a désigné Monsieur Mollier, en qualité d'expert, afin d'examen du dossier concernant l'infraction reprochée à Monsieur T par les services fiscaux pour son pressurage de l'année 1987.

L'expert avait pour mission, connaissance prise du dossier, y compris de l'avis de l'Institut Oenologique de Champagne du 16 septembre 1988 et du procès-verbal de constat de Maître Galmiche du 28 février 1990, de :

- dire si les critiques formulées par T, dans les conclusions prises en son nom par Maître Honnet, sur les conditions dans lesquelles, le 6 octobre 1987, le volume de moûts entreposés dans son pressoir, a été mesuré, sont fondées, dans la négative,

- dire si le volume recensé doit être considéré comme exact,

- dire si les prélèvements d'échantillons ont été correctement opérés,

- dire, au vu du résultat de leur analyse par le laboratoire interrégional de Strasbourg (rapports n° 2018 et 2109), et compte tenu du volume recensé, s'il est possible que le moût ait pu subir une augmentation de volume par l'effet d'un début de fermentation ou de toute autre cause.

Monsieur Mollier a procédé à sa mission et déposé son rapport le 15 mai 1990.

Il conclut que le volume recensé est exact, et que les prélèvements d'échantillons ainsi que les conclusions des examens du laboratoire de Strasbourg sont correctes et non contestables.

Attendu que le Ministère public a requis l'application de la loi ;

Attendu que le prévenu conteste les faits qui lui sont reprochés et reprend l'argumentation initiale, contre les conclusions de l'expert Mollier ;

Sur l'action publique

Vu les articles 427, 464, 509, 512 et 515 du Code pénal ;

Attendu qu'à l'issue des débats devant la cour, les faits demeurent tels qu'ils ont été exposés, analysés et qualifiés par les premiers juges qui ont retenu à bon droit Bernard T dans les liens de la prévention ;

Attendu, en effet, que Bernard T persiste a affirmer qu'il n'a pas procédé à un super pressurage et que l'excédent relevé à son encontre soit 14 hl 67, provient de la surpression qui s'est créée a l'intérieur de la cuve de type fermé, entraînant une erreur à la lecture sur la jauge de niveau ;

Que le travail de l'expert, qui s'est livré à une étude purement théorique ne peut entraîner, selon lui, la conviction de la cour ;

Qu'à titre subsidiaire, il demande la comparution de l'expert, conformément à l'article 168 du Code de procédure pénale ;

Mais attendu que l'expert n'est pas tenu, en matière pénale, d'effectuer une expertise contradictoire entre les parties ; que l'expert Mollier a pris connaissance des rapports d'analyse du laboratoire de Strasbourg et réfuté formellement les allégations du prévenu, concernant l'erreur de jauge résultant de moûts en début de fermentation ; qu'il atteste la véracité du contrôle auquel a procédé l'Administration fiscale et qui est le mode de contrôle communément usité en Champagne ;

Que ses conclusions confortent le rapport d'analyse de contrôle du laboratoire de Strasbourg et fondent les poursuites engagées par l'Administration fiscale ;

Attendu que la peine prononcée est équitable et doit être maintenue eu égard aux circonstances atténuantes qui existent en la cause ;

Sur l'action civile

Vu l'article 2 du Code de procédure pénale ;

Attendu que c'est également par des motifs que la cour prend à son compte que le premier juge a exactement évalué le préjudice subi par la partie civile du fait des infractions en cause ;

Attendu qu'il convient, par suite, de confirmer en toutes ses dispositions tant pénales que civiles le jugement du 23 mai 1989, sans qu'il soit besoin de recourir à la comparution de l'expert ;

Vu l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Attendu qu'il serait inéquitable, en l'espèce, de laisser à la charge de la partie civile les frais de procédure, non inclus dans les dépens, qu'elle a dû exposer pour faire valoir ses droits en appel et qui s'élèvent à 1 000 F ;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement. Homologue le rapport d'expertise de Monsieur Mollier désigné par arrêt avant dire droit du 30 mars 1990. Confirme le jugement rendu le 23 mai 1989 par le Tribunal correctionnel de Troyes. Et y ajoutant, Condamne Bernard T à payer à l'Institut national des appellations d'origine la somme de 1 000 F (mille francs) pour frais irrépétibles d'appel. Condamne Bernard T aux dépens.