CA Aix-en-Provence, 5e ch. corr., 26 janvier 1994, n° 75
AIX-EN-PROVENCE
Arrêt
PARTIES
Défendeur :
Salon
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Ellul
Substitut général :
M. Ceccaldi
Conseillers :
Mmes Coux, Durand
Avocats :
Mes Escallon, Tournaire
Par jugement contradictoire du Tribunal correctionnel de Marseille en date du 18 octobre 1991, M Eric a été déclaré coupable d'avoir :
- a Marseille, le 25 mai 1990, en tout cas depuis un temps non couvert par la prescription, étant ou non partie au contrat, trompé ou tenté de tromper le contractant par quelque moyen ou procédé que ce soit, même par l'intermédiaire d'un tiers :
- sur la nature, l'espèce, l'origine, les qualités substantielles, la composition ou la teneur en principe utile d'une marchandise,
- sur la quantité des choses livrées, ou leur identité, par la livraison d'une marchandise autre que la chose déterminée qui a fait l'objet du contrat,
- sur l'aptitude à l'emploi, les risques inhérents à l'utilisation du produit, les contrôle effectués, les modes d'emplois sur les précaution à prendre,
En l'espèce, en n'ayant pas informé l'acquéreur que la coque du véhicule avait été changée.
Faits prévus et réprimés par l'article 1 de la loi du 1er août 1905.
Et il a été condamné à une peine d'amende de 3 000 F avec sursis.
Mademoiselle Salon Emmanuelle a été déclarée recevable en sa constitution de partie civile et le prévenu a été condamné à lui payer une somme de 5 000 F à titre de dommages et intérêts ainsi que 1 500 F sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
M Eric a interjeté appel de cette décision le 24 octobre 1991, le Ministère public l'a suivi dans cette voie le 28 octobre 1991 et la partie civile a également interjeté appel le 4 novembre 1991.
Ces appels formés dans le délai légal doivent être déclarés recevables,
A l'audience le prévenu a comparu et a fait plaider la relaxe.
Le Ministère public a conclu à la confirmation de la décision déférée et la partie civile a réclamé 20 000 F à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance ainsi qu'une somme de 8 302 F TTC en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
Sur ce, LA COUR
Attendu qu'il est constant que M Eric a acheté le 19 février 1990 un véhicule Peugeot 205 immatriculé 933 PF 13 sachant que "la coque du véhicule avait été changée à la suite d'un choc et réparée dans les règles de l'art" puisqu'il avait porté de sa main sur la facture "pris connaissance de la clause accident" et qu'il avait signé ce document en portant la mention " lu et approuvé " ;
Que le prévenu a vendu ce même véhicule à Melle Salon le 25 mai 1990 et "qu'il ne se souvient pas" s'il a avisé cette personne du changement de coque ;
Qu'en réalité l'acquéreur affirme ne pas avoir été informée de cet élément important et que si le prévenu avait pris soin de la faire il n'aurait pas manqué d'être affirmatif sur ce point à l'audience;
Qu'en omettant d'aviser l'acheteur du changement de coque, bien que les dégâts aient été réparés "dans les règles de l'art", le prévenu a volontairement commis un manquement à son obligation d'information et de renseignement et qu'il s'est ainsi rendu coupable des faits qui lui sont reprochés pour avoir sciemment trompé sa cocontractante qui pensait acquérir un véhicule d'occasion n'ayant subi aucune modification importante ;
Qu'en conséquence il échet de confirmer le jugement déféré sur la culpabilité ainsi que sur la peine, les premiers juges ayant fait une application équitable de la loi pénale.
Sur les intérêts civils
Attendu que ce n'est pas le changement de coque qui est à l'origine des vices cachés invoqués par la partie civile à l'appui de sa réclamation mais un accident que le prévenu ignorait totalement au moment de la vente ainsi que cela résulte du rapport d'expertise de M. Edmond Jadot expert désigné par ordonnance de référé en date du 18 septembre 1990 ;
Qu'en réalité la partie civile réclame la réparation d'un préjudice (20 000 F pour perte de jouissance) qui ne découle pas directement de l'infraction, puisque M n'est poursuivi que pour avoir caché à l'acquéreur le seul changement de coque et qu'il n'est pas démontré que se soit ce vice caché qui a été à l'origine de l'immobilisation du véhicule ; qu'il convient à cet égard d'observer que le rapport expertal produit par Melle Salon révèle que si le véhicule litigieux a fait l'objet d'une procédure VGA (dont il n'est pas établi que le prévenu en ait été lui même avisé par ses vendeurs) avec changement de "coque" et qui a par la suite été accidenté à l'avant droit (sinistre également ignoré par le prévenu), "la réparation avant droite qui a suivi a laissé apparaître des malfaçons et non façons qui n'ont eu aucune influence sur le comportement et la tenue de route", l'expert ajoutant que le vice caché rendant le véhicule impropre à l'usage est en réalité constitué par "la motorisation qui présente une pression d'huile faible à chaud" ; qu'en conséquence la partie civile doit être purement et simplement déboutée de toutes ses demandes fins et conclusions ;
Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière correctionnelle ; En la forme : Reçoit les appels ; Au fond Confirme le jugement déféré sur la culpabilité et sur la peine ; Emendant sur les intérêts civils et statuant à nouveau, Déboute la partie civile de toutes ses demandes, fins et conclusions. Le tout conformément aux articles visés au jugement, au présent arrêt et aux articles 512 et suivants du Code de procédure pénale.