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Décisions

CA Paris, 13e ch. B, 25 novembre 1992, n° 5047-92

PARIS

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Lenormand

Avocat général :

M. Jeanjean

Conseillers :

Mmes Magnet, Barbarin

Avocat :

Me Morel.

TGI Sens, ch., corr., du 1er avr. 1992

1 avril 1992

Rappel de la procédure

Le jugement

Tel qu'il sera rappelé en tête des motifs du présent arrêt,

Etant toutefois précisé que :

- les faits ont été commis le 17 avril 1991

- les dépens de première instance ont été liquidés à 563,41 F ;

Appels

Appel a été interjeté par :

1°) Robert B, le 3 avril 1992

2°) le Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Sens le même jour

Décision :

Rendue, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Par jugement contradictoire su date du 1er avril 1992, le Tribunal de Sens a condamné Robert B, pour tromperie sur les qualités substantielles d'une marchandise, en l'espèce un véhicule "Renault 5 Turbo", à deux mois d'emprisonnement avec sursis et à 10 000 F d'amende ; en outre, le tribunal a ordonné la publication par extraits du jugement, ses frais, dans le journal "L'Yonne Républicaine", sans que le coût de l'insertion puisse dépasser 1 500 F ;

Appel de cette décision a régulièrement été interjeté par le prévenu et par le Ministère public.

Les premiers juges ayant exactement rappelé les termes de la prévention et les faits de la cause, la cour s'en rapporte, sur ces points, aux énonciations du jugement attaqué ;

A l'audience de la cour du 28 octobre 1992 ,le prévenu, assisté de son conseil, sollicite sa relaxe, faisant valoir que la comparaison entre l'auto bilan réalisé dans le garage X, qu'il exploite, et celui qui a été effectué au centre de contrôle technique Y ne révèle pas de divergences importantes, sinon l'état des essieux, qui peut s'être révélé défectueux après le premier contrôle, le véhicule ayant parcouru 5 000 kilomètres avant d'être examiné au garage d'Evry, deux mois plus tard. Il soutient, également, que le contrôle a été fait dans les règles de l'art par son employé, Dominique M, et justifie que le bureau "Veritas", qui a expertisé le centre de contrôle dépendant du "garage X", les 14 février 1990 et 6 novembre 1991, a conclu qu'il fonctionnait de maniére satisfaisante.

Considérant qu'il est reproché au prévenu, président du conseil d'administration de la Société Anonyme "X" d'avoir trompé Jean Pingal, acheteur d'une voiture R5 Turbo, sur les qualités substantielles du véhicule en remettant au vendeur (le garage Z exploité par Alain Bizet) une riche de contrôle technique qui ne reflétait pas son état réel ; que les poursuites sont fondées, d'une part, sur les constatations de M. Talvat garagiste, et sur celles des gendarmes ayant procédé à l'enquête, d'autre part, sur la comparaison des fiches techniques établies, d'abord par le "garage X", le 17 avril 1991, puis par le garage "Y", le 10 juin 1991 ;

Considérant, sur le premier point, que, le 10 juin 1991, la brigade de gendarmerie de Villeneuve L'archevêque était informée par Michel Talvat, garagiste à Molinons, du mauvais état du véhicule "Renault 5 Turbo" que son propriétaire, Jean Pingal, lui avait confié pour réparation ; que ce garagiste indiquait aux gendarme, qu'il ne pouvait pas procéder a l'échange "standard" du moteur du fait que le numéro de celui-ci avait été refrappé ; que les enquêteurs constataient, outre cette anomalie, un regravage du numéro de série sur le passage de roue avant droit et des traces de pliure de la carrosserie ; que l'enquête démontrait qu'Alain Bizet, responsable du garage Z ayant servi d'intermédiaire entre le vendeur du véhicule,Daniel Mauroy, et Jean Pingal, avait auparavant procédé à une véritable reconstruction de la carrosserie de la voiture, laquelle avait été accidentée, qu'il avait refrappé le numéro de série en inversant certains chiffres et remplacé le compteur en portant un kilométrage moindre que celui indiqué sur le précédent (45 500 au lieu de 77 082).; que le rattrapage du numéro de moteur restait, quant à lui, inexpliqué ;

Considérant que Robert B et son employé mécanicien Dominique Monnet, qui a procédé au contrôle technique précédant la vente, font valoir à juste titre que la tromperie sur le kilométrage n'était pas de leur fait, et qu'ils ne pouvaient que reporter sur la fiche de contrôle le kilométrage indiqué au compteur ; que, si Dominique Monnet n'a pas remarqué une inversion de chiffres sur le numéro de série, il s'agit d'une anomalie n'ayant aucune répercussion sur la sécurité du véhicule et ne portant pas sur une qualité substantielle ; qu'il en est de même pour le numéro de moteur, que le garage X n'avait d'ailleurs pas l'obligation de vérifier, et pour les traces de pliure de la carrosserie ;

Considérant, sur le second point, que la comparaison entre les deux contrôles techniques ne révèle pas de divergences importantes sur l'état du véhicule, si ce n'est que le garage "Y" a observé que les essieux avant et arrière étaient à régler dès que possible ; que la voiture ayant parcouru 5 000 kilomètre, entre les deux contrôles, il n'est pas établi que cette défectuosité existait au moment où Dominique Monnet l'a examinée ;

Considérant, dé. lors, qu'il n'est pas établi que, dans la fiche technique remise à Alain Bizet par le garage X, aient été dissimulées des anomalies portant sur les qualités substantielle du véhicule, la tromperie sur le kilométrage n'étant pas de son fait ;

Que, l'élément matériel et, a fortiori, l'élément intentionnel du délit visé à la prévention n'étant pas constitué, convient, en infirmant le jugement attaqué, de renvoyer Robert B des fins de la poursuite exercée à son encontre ;

Par ces motifs, Statuant publiquement et contradictoirement, LA COUR, Reçoit les appels du prévenu et du Ministère public ; Infirmant le jugement attaqué, Relaxe Robert B du chef de tromperie sur les qualités substantielles d'un véhicule automobile ; Laisse les dépens à la charge du Trésor public.