CCE, 29 avril 1994, n° 94-296
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
Stichting Baksteen
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
Vu le traité instituant la Communauté européenne, vu le règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d'application des articles 85 et 86 du traité (1), modifié en dernier lieu par l'acte d'adhésion de l'Espagne et du Portugal, et notamment ses articles 6 et 8, vu la notification faite par Stichting Baksteen le 19 août 1991, conformément à l'article 4 du règlement n° 17, concernant une série d'accords entre fabricants néerlandais de briques, vu la décision, prise par la Commission le 28 janvier 1992, d'engager la procédure dans cette affaire, vu la nouvelle notification faite le 10 septembre 1992, conformément à l'article 4 du règlement n° 17, concernant un accord conclu entre Stichting Baksteen et les plus importants producteurs néerlandais de briques le 25 août 1992, - vu la publication du contenu essentiel de la notification (2), faite en application de l'article 19 paragraphe 3 du règlement n° 17, après consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, considérant ce qui suit:
I. LES FAITS
A. Les signataires de l'accord notifié
(1) L'accord de restructuration et d'assainissement du secteur des briques aux Pays-Bas a été conclu le 25 août 1992 entre Stichting Baksteen et les producteurs néerlandais de briques mentionnés ci-après:
- Boral Nedusa Baksteen BV,
- De Jong van Lekkerkerk Holding BV (Desimpel),
- Koramic Baksteengroep BV,
- Rodruza BV,
- Steenfabriek "De Rijswaard" BV,
- BV Steenfabriek Huissenswaard,
- Teewen BV,
- L J Duijs Steenfabrieken BV,
- C R H Kleiwaren Beheer BV,
- Daas Baksteen BV,
- Steenfabriek Zennewijnen BV,
- Steenfabriek "De Waalwaard" BV,
- Hagens Steenfabrieken BV,
- Baksteen Helden BV,
- Smeijers & Voortman BV,
- Steenindustrie Strating BV.
B. Les produits contractuels
(2) Les produits faisant l'objet de l'accord sont les briques de maçonnerie utilisées dans la construction, fabriquées à partir d'une masse argileuse préformée que l'on cuit dans un four, à l'exclusion toutefois des briques dites de parement d'un coût plus élevé et des briques type engineering.
En effet, on distingue, en règle générale, du côté de la demande trois catégories de briques, à savoir les briques ordinaires, les briques de parement et les briques engineering; les briques ordinaires sont utilisées pour les travaux généraux de construction, les briques de parement sont d'un coût plus élevé et sont spécialement faites ou sélectionnées pour donner un aspect attrayant aux parois, tandis que les briques engineering répondent à des critères de qualité plus élevés de résistance et de durabilité.
Cependant, il y a un degré assez élevé de substitution entre elles au niveau de l'offre, ayant comme conséquence que le marché général des briques est considéré comme étant le marché de référence des produits.
(3) Les briques en terre cuite sont en concurrence avec un large éventail de matériaux alternatifs de construction et de finition, notamment les bétons cellulaires, les bétons légers, les briques silico-calcaires et les plaques d'aluminium, d'acier, de matière plastique ou de bois. Les inconvénients principaux des briques comme matériau de construction sont, d'une part, que leur utilisation suppose une quantité plus grande de main d'œuvre par rapport aux autres matériaux de plus large dimension et, d'autre part, que leurs qualités thermiques sont faibles. En revanche, les avantages sont la flexibilité d'utilisation, le faible coût d'entretien, une bonne résistance au feu et une bonne isolation phonique.
(4) Le commerce intracommunautaire de la brique est extrêmement limité en raison du poids du matériau, dont la faible valeur intrinsèque s'accorde mal avec le caractère onéreux des transports; étant donné que les coûts de transport sont particulièrement élevés par rapport aux coûts de production, les transports de longue distance sont peu rentables.
De plus, les normes et les réglementations nationales, provenant de traditions locales vivaces en matière de construction, engendrent des difficultés en matière d'exportation. Par conséquent, l'industrie de la brique est une industrie essentiellement locale; la plupart des briqueteries vendent leurs produits dans un rayon de soixante-dix kilomètres autour de l'usine, ce qui fait que le marché des briques est structurellement régional. Cela n'empêche cependant pas qu'aux Pays-Bas les exportations représentent jusqu'à 25 % de la production nationale, en raison de la dimension de leur pays et pour des raisons historiques, géographiques et géologiques, les producteurs néerlandais ne sont pas très éloignés des clients étrangers, surtout allemands, mais aussi belges et britanniques. Toutefois, les marchés restent dans l'ensemble régionaux et les exportations dépassent rarement plus d'une frontière.
Les importations aux Pays-Bas de la Belgique et de l'Allemagne ont représenté en 1992 7 % des besoins nationaux néerlandais.
(5) Sur le marché néerlandais des briques opèrent environ 25 entreprises et les parties signataires de l'accord représentaient, au moment de la conclusion de l'accord, environ 90 % des capacités installées aux Pays-Bas, recouvrant environ 85 % des ventes de briques aux Pays-Bas. Le chiffre d'affaires total, réalisé au cours d'un exercice par toute l'industrie néerlandaise des briques, se situe autour de 200 millions d'écus.
C. L'origine de l'accord et la situation du secteur
(6) Le 19 août 1991, l'association néerlandaise Stichting Baksteen (qui regroupe et représente sept fabricants néerlandais de briques) avait notifié à la Commission une série d'accords entre fabricants néerlandais de briques qui tendait à la rationalisation de la production en vue de supprimer ou de prévenir des surcapacités.
Toutefois, après une instruction préliminaire du dossier, la Commission s'est opposée formellement à ce premier plan en informant les parties de son intention de prendre une décision provisoire, basée sur l'article 15 paragraphe 6 du règlement n° 17, afin de lever l'immunité d'amendes pour la période postérieure à la notification; en effet, les mesures proposées dans ce premier plan d'assainissement, élaboré pour faire face à une situation de surcapacité structurelle dans le secteur des briques, étaient inadaptées et ne pouvaient se justifier par la seule référence à la crise du secteur des briques car elles allaient bien au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif visé.
Elles comportaient notamment, à côté d'une incitation à la suppression définitive de capacité de production, les dispositions suivantes:
- un accord portant fixation de quotas de production, renforcé par un système d'amendes et ayant comme résultat une répartition quantitative de la quasi-totalité de la production néerlandaise de briques,
- l'introduction d'un système visant le rachat, pour compte commun des entreprises participantes, de producteurs tiers ou d'unités de production de ces fabricants tiers et la suppression totale et irréversible de la production rachetée,
- l'établissement d'une corrélation directe entre l'accord dans le secteur des briques et certains engagements de ces mêmes fabricants de briques concernant la production de pavés.
À la suite de la prise de position de la Commission et de sa communication de griefs, adressée aux parties au début de 1992, celles-ci ont renoncé à ce plan initial. Toutefois, une première série de fermetures a été effectuée par les participants à Stichting Baksteen pour un montant total d'environ 150 millions de briques.
(7) Après avoir réexaminé de manière approfondie la situation et l'évolution du marché, ces mêmes producteurs sont arrivés à la conclusion qu'une opération de réduction coordonnée de capacité de production est cependant indispensable pour faire face aux difficultés qui frappent depuis plusieurs années l'industrie néerlandaise des briques et qui se résument comme suit:
- Les stocks de briques aux Pays-Bas s'élevaient à la fin de 1991 à un montant de 448 millions de briques, ce qui représente environ 32 % de la vente totale de briques par des entreprises néerlandaises. Bien que le secteur considère que des stocks, représentant environ 20 % des débouchés, puissent être considérés comme supportables, un stock de 32 % dépasse largement ce seuil critique et les charges financières, dues au maintien de ces capacités excédentaires inutilisées, apparaissent trop élevées.
Ces excédents proviennent surtout du développement de la technologie (introduction de nouveaux procédés et construction de plus grandes installations pour des raisons d'économie d'échelle) et de l'évolution défavorable de la demande. Il convient de souligner à ce sujet que cette dernière est de nature structurelle et découle directement de la diminution constante de la consommation des briques relativement aux autres matériaux de construction (c'est-à-dire vente de briques par 1 000 florins dépensés dans la production de bâtiments). En effet, il s'avère que cette consommation relative de briques a diminué de 20 % au cours des cinq dernières années. Cette évolution est encore loin d'être achevée notamment en raison de l'avantage de prix des matériaux alternatifs et des meilleurs résultats techniques obtenus avec ceux-ci, ce qui explique la tendance de plus en plus forte à remplacer les murs porteurs en maçonnerie par le béton et l'acier et à utiliser les matériaux en plaques en substitution aux ouvrages en briques apparentes.
Dans de telles circonstances, et étant donné les prévisions pessimistes d'évolution des ventes à moyen terme, la croissance des stocks doit être considérée comme un mouvement continu, ce qui aura comme conséquence à court terme un rapport stocks/ventes difficilement supportable.
- Le taux d'utilisation des capacités installées des sept entreprises qui font partie de Stichting Baksteen, qui était encore de 93 % en 1989, a diminué de 10 % jusqu'à 83,4 % en 1991. Étant donné que la production des briques est une activité très intensive en capital, qui se caractérise par des coûts fixes et quasi fixes très élevés, le coût unitaire total de production est très sensible aux taux d'utilisation de la capacité. Dans ce secteur particulier, où la proportion des coûts fixes et quasi fixes par rapport au prix départ usine est élevée, l'utilisation de la capacité doit nécessairement être maximisée afin d'obtenir un niveau normal de rentabilité. De ce point de vue, le taux actuel trop bas d'utilisation apparaît difficilement supportable du point de vue économique sur une longue durée.
Cependant, vu le déséquilibre existant entre l'offre et la demande, provoqué, d'une part, par l'évolution défavorable du marché et la baisse accrue de la demande, et, d'autre part, par l'existence de stocks et de surcapacités de production qui s'accroissent sensiblement, une amélioration de cette évolution ne pourrait être attendue à moyen terme.
- De surcroît, le rendement moyen par livraison de 1 000 briques a également diminué de manière considérable; depuis 1980, le prix de 1 000 briques (en prix constants) a diminué d'environ 30 %.
- La combinaison de tous les éléments précités a eu pour conséquence que les résultats d'exploitation des entreprises impliquées ont connu, les dernières années, une baisse substantielle combinée avec des pertes d'exploitation et les informations disponibles ne permettent pas de prévoir, à moyen terme, une amélioration durable de la situation.
(8) Dans ces circonstances, les parties estiment qu'une action est indispensable afin de restaurer progressivement un équilibre durable entre l'offre et la demande pour redresser ainsi la situation de crise caractérisée de l'industrie néerlandaise.
Le 25 août 1992, un nouvel accord de restructuration et d'assainissement du secteur des briques aux Pays-Bas a été conclu, englobant cette fois-ci seize entreprises et visant une réduction coordonnée de capacité de production de briques de l'ordre de 217 millions d'unités. Cet accord fait l'objet de la présente décision.
D. Le contenu actuel de l'accord
(9) Le montant des capacités à réduire a été déterminé en se basant sur:
- la situation dans l'industrie des briques aux Pays-Bas en 1991, où les capacités, production, vente et stocks s'élevaient respectivement à 1 783 millions, 1 471 millions, 1 390 millions et 448 millions de briques,
- les prévisions de l'EIB (Ekonomisch Instituut voor de Bouwnijverheid) selon lesquelles aucune croissance significative de la demande ne pourrait être attendue à moyen terme; ainsi, les ventes se situeraient en 1993 autour de 1 300 millions de briques,
- le principe que les stocks durables peuvent représenter jusqu'à 20 - 22 % des débouchés, mais pas davantage,
- la constatation que, dans ce secteur particulier, qui se caractérise par une intensité capitalistique des plus élevées au sein des activités manufacturières, la capacité n'est rentable que si elle est utilisée à un taux très élevé.
En partant de ces principes, les signataires de l'accord sont arrivés à la conclusion qu'une réduction de capacité pour un montant de 200-220 millions de briques s'impose afin de restaurer à moyen terme l'équilibre entre l'offre et la demande, tout en tenant compte d'une réduction graduelle des stocks.
(10) Par l'accord, quatre fabricants de briques néerlandais s'engagent à fermer définitivement et irréversiblement sept unités de production: cette mesure va aboutir à un démantèlement effectif d'une surcapacité structurelle de production de l'ordre de 217 millions de briques. Les entreprises en question s'engagent également:
- à ne plus produire des matériaux céramiques de construction dans les sept sites de production à démanteler, cela pendant trente ans (plus transfert automatique de cet engagement aux acheteurs éventuels en cas de vente de ces sites),
- à ne pas vendre les équipements à démanteler pendant trente ans à des producteurs qui les utiliseraient pour accroître leur capacité de production dans un rayon géographique de cinq cents kilomètres à partir de la frontière néerlandaise, et à imposer cette même obligation à des acheteurs éventuels, même s'ils sont situés au-delà de cette zone géographique.
Un système d'amendes doit éviter le non-respect d'une de ces obligations et les parties acceptent le principe d'un contrôle de la fermeture définitive de leurs installations par des experts qualifiés indépendants.
(11) Cette opération d'assainissement est soutenue financièrement par la plate-forme des seize entreprises signataires de l'accord, qui contribuent pendant une période de cinq ans, à partir du 1er octobre 1992 (période qui pourrait être réduite), à un fonds de compensation géré par Stichting Baksteen. Chacune d'elles effectue à cet effet un versement (soit de 20, 15 ou 6 florins) par tranche de production de 1 000 briques et s'engage à fournir tous les détails concernant sa production annuelle réalisée à Stichting Baksteen, qui est tenu de ne pas divulguer ces données aux parties.
Les fonds ainsi réunis par Stichting Baksteen seront alloués aux parties, qui ont détruit définitivement ces capacités - à titre de contribution à la couverture des coûts de fermeture et notamment aux coûts sociaux qu'elle entraîne. La fermeture définitive des installations est constatée par des experts qualifiés indépendants.
(12) À l'échelon du secteur industriel, un plan social a été négocié avec les syndicats, dont Stichting Baksteen surveille l'exécution. Les parties s'efforceront de conduire cette opération de restructuration en facilitant, dans toute la mesure du possible, le reclassement du personnel concerné dans le respect des obligations légales et/ou contractuelles en vigueur aux Pays-Bas.
(13) Il est strictement interdit aux parties signataires de l'accord de créer de nouvelles capacités pendant la période de financement et une liste a été établie à ce sujet par Stichting Baksteen mentionnant la capacité de production actuelle de chaque participant.
Les investissements de simple remplacement sont autorisés dans la mesure où ils n'entraînent pas d'augmentation de production pour les participants dans Stichting Baksteen ou dans la mesure où celle-ci est limitée à un maximum de 5 % pendant toute la période de financement pour les autres entreprises participantes.
Les parties restent complètement libres pour ce qui est des fusions/acquisitions.
II. OBSERVATIONS DES TIERS
(14) Le 6 février 1993 a été publié au Journal officiel des Communautés européennes, en application de l'article 19 paragraphe 3 du règlement n° 17, le contenu essentiel de la notification afin de donner aux tiers intéressés l'occasion de faire connaître leurs observations.
À l'expiration du délai consenti aux tiers pour présenter leurs observations, la Commission n'a reçu aucun avis défavorable des concurrents et/ou d'autres opérateurs économiques éventuellement concernés.
III. APPRÉCIATION JURIDIQUE
A. Article 85 paragraphe 1
(15) L'accord notifié est un accord entre entreprises qui a pour objet et pour effet de restreindre la concurrence à l'intérieur du Marché commun.
(16) L'objectif principal de l'accord est de permettre une réduction de capacité et de stocks, supérieure à celle que permettrait une action de restructuration unilatérale.
Le plan notifié constitue une action concertée entre concurrents, visant la fermeture d'usines et la limitation de capacité, renforcée par un système d'amendes en cas de non-respect des engagements et soutenue financièrement par un fonds de compensation. Il a donc une incidence directe sur la concurrence dans le sens qu'il limite les moyens de production et, partant, les investissements et la stratégie concurrentielle des parties.
(17) Bien que le marché des briques soit considéré comme un marché structurellement régional, l'accord notifié est susceptible d'affecter le commerce entre États membres.
En effet, les produits en cause font l'objet d'un commerce entre États membres puisque, aux Pays-Bas, les exportations de briques vers l'Allemagne, la Belgique et la Grande-Bretagne représentent environ 25 % de la production totale néerlandaise, tandis que les importations aux Pays-Bas représentent jusqu'à 7 % des besoins nationaux néerlandais.
B. Article 85 paragraphe 3 (18) Pour évaluer les conditions prévues à l'article 85 paragraphe 3, on doit constater que le secteur des briques aux Pays-Bas se caractérise par l'existence de surcapacités importantes, une croissance continue des stocks et des difficultés d'adaptation des capacités à la demande, difficultés qui tiennent principalement au développement de la technologie (introduction de nouveaux procédés et construction de plus grandes installations pour des raisons d'économie d'échelle), à l'évolution défavorable de la demande inspirée par une diminution constante de la consommation relative de briques, et à une très faible élasticité de la demande par rapport aux prix.
(19) L'objectif de l'accord est la réduction des capacités pour parvenir à un meilleur degré d'utilisation des capacités maintenues et pour restaurer progressivement et à moyen terme un équilibre durable entre l'offre et la demande.
(20) Dans une économie de marché, il revient en premier lieu aux entreprises d'apprécier individuellement à quel moment leurs surcapacités deviennent économiquement insupportables et d'adopter les mesures nécessaires pour les réduire.
(21) En l'espèce, les forces en présence sur le marché n'ont pas réussi par elles-même et ne sont toujours pas en mesure de réaliser individuellement les réductions de capacités nécessaires pour le rétablissement et le maintien à terme d'une structure concurrentielle efficace. C'est pourquoi les entreprises concernées ont organisé, collectivement et pour une période de temps limitée, l'adaptation structurelle nécessaire.
(22) S'il est exact qu'en principe il appartient aux entreprises d'adopter une politique de prix flexible afin d'influencer le niveau de la demande, il convient de relever que la demande de briques est une demande dérivée, les briques elles-mêmes constituant seulement 2-3 % du prix d'un immeuble. Il s'ensuit que l'élasticité de la demande par référence au niveau des prix est très faible, voire nulle à court ou moyen terme; le niveau de prix des briques n'est pas susceptible d'influencer le taux de construction et, de là, la demande totale de matériaux de construction.
(23) De plus, le procédé de production des briques est très peu flexible, non seulement quant aux changements dans l'utilisation de capacité en raison des coûts fixes et semi-fixes très élevés, mais aussi quant à la réduction de capacité. Déjà la moitié des participants ne dispose que d'un seul four et est dès lors techniquement incapable de réduire quelque capacité que ce soit.
(24) Les autres participants, en tant que producteurs de premier plan, ne se seraient pas résolus individuellement et de manière autonome à une réduction de leurs capacités s'ils n'avaient eu la certitude que leurs concurrents suivraient leur exemple ou soutiendraient l'opération financièrement et qu'aucune nouvelle capacité ne serait installée pendant la durée de l'accord.
(25) Le fait que seulement quatre participants aient réalisé la réduction, pour des raisons économiques, techniques ou sociales qui leur sont propres, n'enlève rien à l'efficacité des engagements collectifs touchant à la réduction des capacités.
(26) La réduction des capacités permet aux entreprises de se libérer des charges financières dues au maintien des capacités excédentaires inutilisées, sans que pour autant il y ait une baisse de production, grâce à l'augmentation du taux d'utilisation des capacités maintenues.
Du fait que les unités de production, prises en considération comme capacités à fermer, sont les plus inadaptées et les moins performantes en raison de leur vétusté, de leur taille réduite et/ou de leur technologie dépassée, la production sera désormais concentrée dans les usines les plus modernes, qui pourront alors fonctionner à un niveau de capacité et de productivité plus élevé; cela va diminuer d'autant l'incidence des coûts fixes, qui constituent une très grande partie du prix de revient.
En conséquence, il est permis de prévoir une augmentation à terme de la rentabilité de l'industrie des briques aux Pays-Bas et, donc, un retour à une compétitivité normale.
(27) En outre, la coordination des fermetures permet de conduire les opérations de restructuration dans des conditions sociales acceptables et en facilitant le reclassement du personnel.
(28) Il convient donc de considérer que l'accord contribue à améliorer la production et à promouvoir le progrès technique et économique.
(29) L'article 85 paragraphe 3 prescrit également qu'un accord doit réserver aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte. En l'occurrence, les utilisateurs devraient profiter de l'amélioration de la production du fait qu'ils se trouveront à long terme en présence d'un secteur assaini et d'une offre compétitive, tout en continuant à bénéficier, à court terme, de la concurrence qui subsiste entre les participants. En outre, l'accord leur assure que l'adaptation structurelle maintient sur le marché des entreprises ou des capacités compétitives tout en éliminant les capacités inadaptées ou vétustes qui auraient pu subsister au détriment des capacités saines grâces à des compensations de pertes au sein d'un groupe.
(30) Le nombre de producteurs signataires et non signataires qui subsiste laisse aux utilisateurs un choix suffisant de fournisseurs et leur donne une sécurité d'approvisionnement tout en excluant le risque d'une forte concentration de l'offre.
(31) Un accord de réduction de capacités, assorti d'un système de financement, est susceptible cependant d'entraîner à court terme une augmentation des prix pour les utilisateurs. Toutefois, en l'espèce, de tels risques sont largement compensés par le fait que les coûts élevés, liés au financement des stocks, vont diminuer. Le caractère particulier du marché des briques, où le coût unitaire est très sensible au taux d'utilisation de la capacité, permet d'escompter une incidence favorable sur les prix de vente. En outre, les utilisateurs sont en mesure, face à des prix inéquitables des signataires, de faire appel à d'autres sources d'approvisionnement existant.
(32) Un autre élément déterminant quant à l'application de l'article 85 paragraphe 3 est celui de savoir si les mesures prévues dans le but de réduire les capacités se limitent à celles qui sont indispensables à la réalisation de cet objectif même.
(33) L'entente ne porte que sur la réduction des capacités excédentaires: à cet effet, il est nécessaire que l'accord contienne un programme de fermeture détaillé et contraignant qui garantisse, d'une part, que les surcapacités seront effectivement démantelées de façon irréversible et, d'autre part, que, pendant sa durée d'application, aucune capacité nouvelle ne sera créée, hormis celles qui sont prévues par le programme de restructuration en tant que capacités de remplacement. Pour le reste, la liberté des parties en ce qui concerne la production, les prix, les conditions de vente, les importations/exportations, les livraisons et les fusions/acquisitions n'est pas touchée par l'accord. Les dispositions du premier accord qui auraient pu porter atteinte à cette liberté ont été éliminées. D'ailleurs, aucune disposition de l'accord ne vise à coordonner le comportement commercial des signataires.
(34) Le système de versements compensatoires doit être considéré comme indispensable à la réalisation de l'objectif du projet; en effet, la moitié des entreprises concernées n'était pas en mesure de réduire leur capacité dans la mesure où elles ne disposent que d'un seul four, et le système de financement doit donc être considéré comme un encouragement aux autres de réduire les surcapacités structurelles. Il fonctionne comme un système de compensation pour les entreprises qui procèdent à des fermetures, afin de les aider à faire face aux coûts de l'opération, et notamment aux charges sociales qu'elle entraîne. La durée de cinq ans (période qui pourrait être réduite en fonction des financements effectivement réalisés) sert à amortir, répartir et échelonner ces charges financières.
(35) Il a été jugé indispensable d'introduire des garanties contraignantes quant à la fermeture définitive des sept unités de production concernées et quant au démantèlement effectif des équipements, cela afin de s'assurer du caractère irréversible de l'opération de réduction de surcapacité. L'efficacité de l'accord dépendant du respect de ces engagements, des pénalités contractuelles ont été prévues et l'extension de ces obligations au non-signataire acheteur de ces sites ou équipements est nécessaire pour assurer que toutes les capacités à détruire le sont effectivement.
(36) L'accord est strictement limité dans le temps: toutes les réductions prévues en application de l'accord (c.-à-d. démantèlement d'une capacité de 217 millions de briques) ont déjà été réalisées avant la fin 1992, ce volet du plan de restructuration est donc terminé.
Quant au système de financement et aux autres engagements des parties, l'accord expirera au plus tard le 30 septembre 1997.
(37) En conclusion, les restrictions des moyens de production imposées aux signataires sont indispensables pour atteindre les objectifs prévus.
(38) Au sens de l'article 85 paragraphe 3, l'accord ne donne pas aux entreprises la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause.
(39) En premier lieu, il importe de constater que la concurrence continue à jouer entre les entreprises participantes en ce qui concerne notamment les prix et, plus généralement, tout ce qui n'est pas touché par l'accord; la réduction ordonnée de surcapacités ne concernant qu'un des éléments, important certes, de la stratégie concurrentielle des entreprises, celles-ci ne renoncent pas à toute liberté d'action sur le marché, ce qui préserve un certain degré de concurrence interne.
(40) En outre, une concurrence externe est généralement assurée par la présence sur le marché d'autres producteurs non signataires et d'importateurs.
(41) Les produits contractuels entrent en concurrence avec un large éventail de matériaux alternatifs de construction et de finition, suffisamment substituables pour les rendre concurrents.
(42) Enfin, l'accord étant strictement limité dans le temps, dès l'origine, la certitude du retour à une situation pleinement concurrentielle dans un avenir rapproché incite les entreprises concernées à tenir compte, dans les dispositions qu'elles prennent pendant la durée même de l'accord, du fait qu'elles redeviendront à terme des concurrents à part entière.
C. Articles 6 et 8 du règlement n° 17
(43) L'accord signé le 25 août 1992 a été notifié le 10 septembre 1992. Conformément à l'article 6 du règlement n° 17, la décision d'application de l'article 85 paragraphe 3 du traité peut prendre effet au 10 septembre 1992.
(44) En raison du fait que l'accord expirera le 30 septembre 1997, il est opportun de fixer, en application de l'article 8 paragraphe 1 du règlement n° 17, la date d'expiration de la durée de la présente décision au 30 septembre 1997.
(45) Toutefois, l'application de l'accord ne doit pas être à même de donner lieu à des échanges d'informations qui pourraient être à la base de pratiques concertées, incompatibles avec l'article 85 du traité; à cet effet, il est nécessaire d'imposer aux entreprises signataires de s'abstenir de toute communication entre elles des données individualisées sur la production et les livraisons de briques de chaque entreprise, effectuée soit directement entre elles ou certaines d'entre elles soit par l'intermédiaire d'un organe fiduciaire ou d'une tierce personne,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
Les dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité CE sont déclarées inapplicables - avec effet au 10 septembre 1992 pour la période allant jusqu'au 30 septembre 1997 - conformément à l'article 85 paragraphe 3, à l'accord conclu entre Stichting Baksteen et les plus importants producteurs néerlandais de briques mentionnés à l'article 3, notifié le 10 septembre 1992.
Article 2
La présente décision est assortie de la condition que les entreprises signataires s'abstiennent de toute communication entre elles des données individualisées sur la production et les livraisons de briques, effectuée soit directement entre elles ou certaines d'entre elles, soit par l'intermédiaire d'un organe fiduciaire ou d'une tierce personne.
Article 3
La présente décision est adressée à:
1°) Rodruza BV,
Sint-Canisiussingel 20,
NL-6511 TJ Nijmegen;
2°) Teewen BV,
Kaldenkerkerweg 33,
NL-5932 CT Tegelen;
3°) Boral Nedusa Baksteen BV,
Spijksedijk 11,
NL-6917 AB Spijk;
4°) Koramic Baksteengroep BV,
Kerkstraat 23,
NL-5527 EE Hapert;
5°) De Jong van Lekkerkerk Holding BV (Desimpel),
Van Ginnekenweg 12,
NL-5071 NJ Udenhout;
6°) Steenfabriek Huissenswaard BV,
Scherpekamp 1-7,
NL-6687 ML Angeren;
7°) Steenfabriek De Rijswaard BV,
Rijswaard 2,
NL-5308 LV Aalst (Gld);
8°) L. J. Duijs Steenfabrieken BV,
Beekveld 26,
NL-5258 SJ Berlicum;
9°) Daas Baksteen BV,
Terborgseweg 30,
NL-7045 AL Azewyn;
10°) C. R. H. Kleiwaren Beheer BV,
Olivier van Noortlaan 110,
NL-3133 AT Vlaardingen;
11°) Steenfabriek Zennewijnen BV,
Utrechtseweg 151,
NL-6862 AH Oosterbeek;
12°) Steenfabriek De Waalwaard BV,
Waalbandijk 69,
NL-6669 MC Dodewaard;
13°) Hagens Steenfabrieken BV,
Windvleugel 3,
NL-6581 DT Malden;
14°) Baksteen Helden BV,
Steenstraat 8B,
NL-5981 AE Panningen;
15°) Smeijers & Voortman BV,
Rijssenseweg 66,
NL-7475 VC Markelo;
16°) Steenindustrie Strating BV,
Gelmswijk 4,
NL-9665 RR Oude Pekela;
17°) Stichting Baksteen,
Coolsingel 139,
NL-3012 AG Rotterdam.
Notes
(1) JO n° 13 du 21. 2. 1962, p. 204-62.
(2) JO n° C 34 du 6. 2. 1993, p. 11.