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Décisions

CCE, 28 juin 2000, n° M.1741

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

MCI WorldCom/Sprint

CCE n° M.1741

28 juin 2000

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, - vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment son article 57, - vu le règlement (CEE) n° 4064-89 du Conseil du 21 décembre 1989 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises(1), tel que modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1310-97 du Conseil(2), et notamment son article 8, paragraphe 3, - vu la décision de la Commission du 21 février 2000 d'engager la procédure dans cette affaire, - après avoir donné aux entreprises intéressées l'occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs retenus par la Commission, - vu l'avis rendu par le comité consultatif en matière de concentrations entre entreprises(3), - Considérant ce qui suit:

(1) Le 11 janvier 2000, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 du règlement (CEE) n° 4064-89, d'un projet de concentration par lequel MCI WorldCom, Inc. (ci-après dénommée "MCI WorldCom") entend fusionner, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point a), dudit règlement, avec Sprint Corporation (ci-après dénommée "Sprint") par voie d'échange d'actions.

I. LES PARTIES

(2) MCI WorldCom et Sprint sont toutes deux des entreprises mondiales de télécommunications. MCI WorldCom offre un large éventail de services de télécommunications aux entreprises et aux particuliers, notamment des services locaux, longue distance et internationaux, des services de libre appel, des cartes à paiement différé, des cartes prépayées et des services internet, grâce à des infrastructures qui lui sont propres. Sprint fournit aux États-Unis d'Amérique des services de télécommunications locales, longue distance et internationales, des services de télécommunications sans fil et des services internet. Sprint menait des activités en Europe par l'entremise de Global One (jusqu'à son retrait de cette entreprise commune créée avec Deutsche Telekom et France Télécom).

II. L'OPÉRATION

(3) Le 4 octobre 1999, MCI WorldCom et Sprint ont signé un accord de fusion prévoyant l'échange des actions Sprint contre des actions MCI WorldCom. Sprint sera absorbée par MCI WorldCom et perdra de ce fait sa personnalité morale distincte, tandis que MCI WorldCom survivra en tant que telle à l'opération. L'opération de concentration envisagée constitue une fusion juridique complète au sens de l'article 3, paragraphe 1, point a), du règlement sur les concentrations.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(4) Les entreprises concernées réalisent un chiffre d'affaires mondial cumulé supérieur à 5 milliards d'euros(4) [...]*(5)(6). MCI WorldCom et Sprint réalisent toutes deux un chiffre d'affaires dans la Communauté qui dépasse 250 millions d'euros [...]*, mais pas plus des deux tiers de leur chiffre d'affaires total dans la Communauté à l'intérieur d'un seul et même État membre.

(5) Les parties notifiantes ont contesté la dimension communautaire de l'opération en question dans leurs lettres des 20 et 26 octobre 1999 ainsi que dans leur réponse à la communication des griefs. Elles ont fait valoir que la part de Sprint dans le chiffre d'affaires de Global One n'aurait pas dû être prise en compte dans le calcul du chiffre d'affaires de Sprint conformément à l'article 5 du règlement sur les concentrations.

(6) En application de l'article 4, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations, l'opération devait, en l'espèce, être notifiée dans un délai de sept jours à compter de la signature d'un accord de fusion contraignant. Le calcul des chiffres d'affaires visant à déterminer si l'opération revêt une dimension communautaire devait donc être effectué à la date de la signature de l'accord de fusion et au regard de la situation de fait à cette date, ou au plus tard à la date à laquelle l'obligation de notification est née(7). Le chiffre d'affaires attribuable à certaines activités ne peut être déduit que lorsque l'accord notifié est assorti d'une condition suspensive prévoyant la cession de ces activités ou si ces dernières ont été cédées entre la clôture des comptes et la signature de l'accord de fusion définitif.

(7) Étant donné que Sprint ne s'était pas retirée de Global One à la date de la signature de l'accord de fusion et que ce retrait ne constituait pas non plus une condition suspensive de l'opération notifiée, cette dernière a donc une dimension communautaire.

IV. PROCÉDURE

A. QUESTIONS DE PROCÉDURE

(8) Le 2 février 2000, les parties notifiantes ont soumis un engagement, en application de l'article 6, paragraphe 2, du règlement sur les concentrations, aux termes duquel Sprint fera tout ce qui est en son pouvoir pour mener à bien, sans retard injustifié, son retrait de l'entreprise commune Global One. Dans l'intervalle, Sprint ne participera en aucune façon à la gestion courante de Global One. Les parties ont fait valoir que le retrait de Sprint de Global One n'aurait pas pour seul effet de diminuer sensiblement le chevauchement qui existe entre les activités des deux entreprises sur le marché des services de portage internationaux et sur celui des services mondiaux de télécommunications destinés aux multinationales, mais qu'il apaiserait aussi toutes les craintes concernant la compatibilité de l'opération de concentration notifiée pour ce qui est des marchés affectés.

(9) Le 21 février 2000, après examen de la notification, la Commission a conclu que, l'engagement proposé n'étant pas suffisant pour résoudre les problèmes de concurrence que poserait l'opération envisagée, celle-ci relevait par conséquent du champ d'application du règlement sur les concentrations et suscitait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le Marché commun. Elle a décidé d'engager la procédure conformément à l'article 6, paragraphe 1, point c), du règlement sur les concentrations.

(10) Les 9 et 14 mars 2000, la Commission a envoyé des demandes de renseignements supplémentaires aux parties, conformément à l'article 11 du règlement sur les concentrations. Le délai imparti pour fournir les renseignements demandés était le 17 mars 2000 à 12 heures, heure d'Europe centrale. À l'expiration du délai fixé par la Commission, les parties n'avaient pas donné de réponse complète aux demandes de renseignements.

(11) Par décision du 20 mars 2000, la Commission a mis MCI WorldCom et Sprint en demeure de lui fournir, pour le 24 mars 2000 à 8 heures, heure d'Europe centrale, au plus tard, les informations manquantes nécessaires pour lui permettre de terminer son examen du dossier. Les 24 et 27 mars 2000, les parties ont communiqué les renseignements manquants. Cela a eu pour effet, conformément à l'article 9 du règlement d'application(8), de reporter du 4 au 12 juillet la date ultime à laquelle la Commission devait rendre sa décision au titre de l'article 8. Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties ont contesté la date du 27 mars 2000, avançant qu'elles avaient fourni les informations demandées par courrier électronique le vendredi 24 mars. Or, elles ont expliqué dans une lettre du 26 mai que la copie électronique de leur réponse à la décision au titre de l'article 11 n'avait pas été complète avant le 27 mars, date à laquelle leur réponse a été versée au dossier sous la forme de plusieurs copies papier. Compte tenu de la date d'adoption de la présente décision, il n'est pas nécessaire de trancher cette question de date.

(12) La Commission a envoyé une communication des griefs aux parties notifiantes le 3 mai 2000. Les parties y ont répondu le 22 mai et une audition a eu lieu, à la demande de tiers, le 30 mai. Le 27 juin 2000, les parties ont informé la Commission de leur intention de retirer formellement leur notification au motif qu'elles n'envisageaient plus de réaliser l'opération de concentration sous la forme présentée dans la notification. Cependant, cela n'a pas constitué un retrait formel de l'accord de fusion, signé le 4 octobre 1999, qui faisait l'objet de la notification. De plus, les parties se sont réservé la possibilité de réaliser l'opération de concentration envisagée sous une forme différente de la notification. C'est pourquoi la Commission n'a pas pu accepter cette communication comme retrait formel de l'opération.

B. COOPÉRATION AVEC LE MINISTÈRE DE LA JUSTICE AMÉRICAIN

(13) Le projet de concentration MCI WorldCom/Sprint a également été notifié, entre autres, à l'Antitrust Division du Department of Justice américain (ci-après dénommé "DoJ"). Les parties ont accordé les dérogations nécessaires pour permettre au DoJ et à la Commission d'échanger les informations et les documents qu'elles leur avaient fournis. De nombreuses entreprises qui ont répondu aux enquêtes parallèles du DoJ et de la Commission étaient disposées à les laisser échanger des informations ou à leur fournir les mêmes renseignements.

(14) Au cours de l'enquête et de l'examen du projet de concentration, le DoJ et la Commission ont étroitement coopéré: échange de vues préalable sur le cadre analytique, demandes coordonnées de renseignements, présence d'observateurs du DoJ à l'audition et d'agents de la Commission à une réunion de haut niveau du DoJ, ainsi que des réunions communes avec les parties notifiantes.

(15) Le 15 mai 2000, le directeur général de la concurrence a adressé une lettre à l'Assistant Attorney General américain en vue d'obtenir que le DoJ participe à l'évaluation de l'incidence de l'opération sur le marché américain des télécommunications longue distance et de ses conséquences dans le domaine de la téléphonie internationale.

V. APPRÉCIATION AU REGARD DE LA CONCURRENCE

A. L'INTERNET

INFORMATIONS GÉNÉRALES

(16) L'internet est un "réseau de réseaux" interconnectés qui assure le transfert des données sous forme d'éléments binaires (bits) entre deux ou plusieurs ordinateurs via des milliers de réseaux interconnectés. Quelque 300 fournisseurs de connectivité internet exploitent des réseaux de transmission longue distance qui, ensemble, forment la "dorsale" mondiale de l'internet. Une poignée d'entre eux exploitent des réseaux connectés à de nombreux pays dans plus d'une région. D'après les estimations, les dix plus grands fournisseurs de connectivité internet contrôlent 70 % de la largeur de bande internationale sur l'internet(9). Viennent ensuite un certain nombre de fournisseurs de connectivité internet qui exercent leurs activités à un niveau régional (Europe, États-Unis et Asie). Il convient aussi de citer les fournisseurs nationaux, qui sont en nombre croissant, et les réseaux universitaires et de recherche qui jouent le rôle de fournisseurs de connectivité internationale sur un plan régional(10).

(17) Pour avoir accès à l'internet, les utilisateurs finals peuvent s'adresser entre autres à des fournisseurs de services internet (FSI) qui fournissent l'accès et des services connexes, à des entreprises de télécommunications et de transmission de données et à des entreprises d'autres secteurs qui offrent un accès à l'internet pour vendre leurs produits. Des fournisseurs de connectivité internet plus importants fournissent ensuite la connectivité sous-jacente entre les différents FSI, fournisseurs de contenu, sites internet, etc., ainsi qu'entre les autres fournisseurs de réseaux. Les utilisateurs finals peuvent être des particuliers, des entreprises, des administrations et des universités. La connectivité internationale étant un besoin et une exigence de ces utilisateurs, les fournisseurs de connectivité internet ont besoin d'une interconnexion au niveau de tout l'internet.

Interconnexion

(18) Les fournisseurs de connectivité internet obtiennent celle-ci de deux manières: a) en concluant des accords de transit (échange de trafic avec compensation financière), qui leur donnent accès à l'internet mondial, et b) en concluant des accords de "peering" (échange de trafic sans compensation financière sur la base de la réciprocité) qui prévoient l'échange, en des points précis, de volumes de trafic comparables entre deux réseaux dotés d'une couverture géographique à peu près équivalente, afin d'en assurer la terminaison.

a) Transit

(19) Le service de transit est un service commercial qui donne accès à l'internet contre paiement. Le transit peut prendre trois formes: accès par ligne spécialisée (mise en place d'une ligne spécialisée pour l'accès à un autre fournisseur de réseaux ou à de gros clients), accès par ligne commutée au détail (destiné aux particuliers et aux entreprises clientes) ou accès par ligne commutée en gros aux FSI(11).

b) Peering

(20) Le peering passe par la conclusion d'un accord bilatéral entre deux réseaux aux termes duquel l'un des réseaux assure la terminaison sur son propre réseau du trafic émanant des clients de l'autre réseau, et réciproquement.

(21) Cet échange de trafic peut être "public" ou "privé" (on dit aussi "direct"). L'échange de trafic public (peering public) s'effectue en des points d'interconnexion publics définis lorsqu'un certain nombre de fournisseurs de connectivité internet conviennent d'échanger du trafic en un point unique, souvent appelé "point d'accès au réseau" ou "PAN". L'échange de trafic privé s'opère entre grands fournisseurs de connectivité internet en des points désignés qui conviennent aux deux réseaux concernés.

(22) La technique du peering a fait son apparition lorsque des réseaux de taille à peu près équivalente ont convenu d'échanger du trafic. Les premiers points d'interconnexion ont été les PAN créés après la privatisation de l'internet par le Gouvernement américain. Ces PAN appartenaient à des entreprises commerciales telles que MCI WorldCom et Sprint, qui en assuraient l'exploitation. La commercialisation de l'internet dans les années 90 a entraîné l'encombrement des PAN pendant la période de transition vers un marché totalement commercial. Les PAN sont toujours encombrés et servent principalement aux fournisseurs de niveau 2 qui n'ont pas les mêmes besoins d'interconnexions de grande capacité. En réponse à l'encombrement des PAN, les grands réseaux qui échangeaient des quantités de trafic considérables entre eux aux PAN ont préféré se tourner vers les accords de peering direct et ont mis en place des points d'interconnexion adaptés à leurs réseaux. C'est encore la pratique que privilégient les grands réseaux. En général, ces derniers utilisent des points d'interconnexion privés (tout en conservant un certain nombre de points d'interconnexion publics) tandis que les petits réseaux utilisent les points d'interconnexion publics.

(23) L'importance de l'échange de trafic privé ressort également de l'exigence de points d'interconnexion privés posée par la clientèle des grandes entreprises. Nombre de grandes entreprises qui lancent des appels d'offres pour des services de télécommunications mondiaux insistent pour que les fournisseurs de connectivité internet qui feront une offre disposent d'un volume prédéfini d'échange privé de trafic (ce volume étant exprimé en nombre de points d'interconnexion et en taille des interconnexions) avec certains fournisseurs de connectivité internet de niveau 1. Cela améliore la fiabilité.

(24) L'intérêt des fournisseurs de connectivité de niveau 1 est de procéder à l'échange privé et gratuit de trafic avec des opérateurs disposant de réseaux similaires en termes de taille, de volume de trafic, de couverture géographique et de qualité. Cette pratique permet aux réseaux de niveau 1 de conserver toutes les recettes de leurs abonnés sans avoir à payer les autres fournisseurs de réseaux. Si le trafic est symétrique, cet arrangement est également avantageux pour les deux parties. L'équilibre géographique apporte aussi plus de parité sur le plan des coûts du réseau (les fournisseurs de réseaux internet trouvent un intérêt économique à acheminer le trafic vers leurs fournisseurs homologues à un point d'interconnexion aussi proche que possible afin de limiter les coûts liés au réseau). Cela signifie que les fournisseurs de connectivité de niveau 1 n'ont aucun intérêt à échanger du trafic avec d'autres fournisseurs que ceux qui traitent plus ou moins le même volume de trafic et disposent d'une couverture géographique équivalente. Dès que le trafic devient trop asymétrique, il est plus avantageux pour les grands fournisseurs de facturer l'interconnexion [...]*(12) [...]*(13) [...]*

c) Différences entre le peering et le transit

(25) Le transit se distingue du peering à trois égards:

- la partie qui obtient des services de transit dispose d'une connectivité mondiale via une ligne spécialisée (et donc permanente), autrement dit la capacité de transmettre et de recevoir du trafic via toutes les liaisons dont disposent le FSI et les FSI homologues, pratiquement partout sur l'internet, et pas uniquement un accès aux seuls clients du fournisseur de transit,

- le transit est un service commercial et, par conséquent, payant, qui comprend aussi des services après-vente et une assistance technique à la clientèle,

- les coûts d'infrastructure relatifs entre les deux réseaux sont imputés d'une manière différente (dans les accords de peering, chaque partie supporte sa part des coûts d'infrastructure, alors que dans le transit, le fournisseur de ce service supporte les coûts fixes d'infrastructure liés à la fourniture de connectivité et le client paie le service).

(26) Le peering consiste essentiellement en un troc (même si certains fournisseurs de connectivité internet échangent du trafic contre rémunération). Sous l'angle du trafic, cela signifie que les deux parties à un tel accord sont à peu près de la même taille. Les deux réseaux profitent de la clientèle de l'autre. Dans cette relation d'échange de trafic, l'équilibre entre les intérêts des deux réseaux implique en outre qu'aucune des deux parties ne peut choisir l'autre pour un routage en dernier ressort. Si un réseau homologue A reçoit du trafic du réseau homologue B, A ne pourra pas, en vertu de l'accord de peering qu'il a conclu avec B, renvoyer le trafic de B à un autre homologue de A, à savoir C. Pour transmettre du trafic à C, B doit soit conclure un accord de peering avec C, soit acheter un service de transit à C ou à un autre fournisseur de connectivité internet.

(27) L'échange de trafic dans le cadre du peering est plus économique que le transit tant que le nombre d'accords de peering conclus n'est pas trop grand, d'où la structure hiérarchisée de l'internet. C'est également un élément implicite dans la stratégie commerciale des parties. Si l'achat de services de transit était plus économique pour elles que le peering, il va de soi que les parties choisiraient cette solution. Or, l'enquête menée par la Commission révèle qu'aucune des parties à l'opération ne paie la connectivité, mais qu'en revanche elles sont rémunérées pour la connectivité qu'elles fournissent. [...]*(14).

(28) De plus, sans connexion directe, le trafic doit effectuer plus de bonds (c'est-à-dire passer par des étapes intermédiaires supplémentaires lors du transit), ce qui nuit à la qualité du service, allonge le temps d'attente (l'acheminement du trafic prenant plus de temps) et augmente les risques de perte de paquets de données. Les relations de peering direct permettent aux réseaux homologues de réduire au minimum ces problèmes de qualité de service. UUNet, la division "Internet" de MCI WorldCom, est tenue, aux termes de son contrat de service garanti (Service Level Agreement ou SLA) d'assurer un temps d'attente mensuel moyen de transmission aller-retour qui ne dépasse pas 85 millièmes de seconde sur le réseau nord-américain d'UUNet et 120 millièmes de seconde entre New York et le concentrateur de la passerelle internationale d'UUNet à Londres. [...]*(15). Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties notifiantes ont contesté l'importance des bonds pour la qualité du service, ce qui a été démenti par les déclarations des tiers lors de l'audition (voir le considérant 63 ci-dessous).

Intranets et extranets

(29) Un intranet est un réseau privé limité à une entreprise ou une organisation. Il peut être constitué d'un grand nombre de réseaux locaux interconnectés ainsi que de lignes louées dans un réseau à grande distance (wide area networks ou LAN). Un intranet comporte normalement des connexions vers l'internet externe via un ou plusieurs ordinateurs passerelles. L'objet principal d'un intranet est le partage des informations et des ressources informatiques d'une entreprise entre les employés. L'intranet peut aussi faciliter le travail en groupe et permettre la réalisation de téléconférences. C'est en quelque sorte une version privée de l'internet grâce à laquelle des entreprises ou des organisations peuvent envoyer des messages privés via le réseau public en utilisant des dispositifs spéciaux de cryptage/décryptage et d'autres mesures de sécurité pour connecter une partie de leur intranet à une autre.

(30) Les grandes entreprises ou les grandes organisations permettent aux utilisateurs reliés à leur intranet d'accéder à l'internet public au moyen de services de pare-feu capables de filtrer le trafic entrant et sortant de manière à préserver la sécurité de l'entreprise.

(31) Lorsqu'une partie d'un intranet est rendue accessible à des personnes extérieures à l'entreprise (clients, partenaires, fournisseurs, etc.), cette partie est un extranet. Les extranets nécessitent la gestion de serveurs pare-feu, la délivrance et l'utilisation de certificats numériques pour l'authentification des différents utilisateurs, le cryptage des messages et l'utilisation des réseaux privés virtuels (RPV) avec transmission des données via le réseau public grâce à un protocole de tunnellisation. Les extranets peuvent servir à échanger de gros volumes de données, à partager des catalogues de produits, à fournir des services ou donner accès à des services fournis par une entreprise ou organisation à un groupe d'autres entreprises. Comme exemple de service, on peut citer une application bancaire en ligne qui est gérée par une entreprise pour le compte de banques affiliées.

Hébergement et centres de traitement informatique

(32) Un fournisseur de services d'hébergement (hébergeur) propose des centres d'hébergement (appelés aussi "centres de traitement informatique" ou "data centres") dans des bâtiments à accès contrôlé, équipés de serveurs surveillés à partir d'un centre d'exploitation centralisé. Les centres d'hébergement sont spécialement conçus pour abriter des serveurs et des équipements pour l'internet. Les clients des centres d'hébergement se connectent au centre de traitement informatique. L'hébergeur assure ensuite la connexion à l'internet via ses propres serveurs qui sont directement reliés aux dorsales de l'internet(16).

(33) L'hébergement de sites internet peut être utilisé par exemple pour garantir la sécurité des données et des équipements et pour assurer un accès rapide et fiable au site. Il permet aussi une plus grande souplesse d'adaptation lorsque la demande exige des capacités supplémentaires ou impose au contraire une diminution des capacités. Actuellement, tous les grands fournisseurs de connectivité internet offrent des services d'hébergement dans le cadre des services internet intégrés qu'ils proposent à la clientèle.

ÉVOLUTION DEPUIS 1998

(34) Ces deux dernières années, de nouvelles techniques ont été mises au point, comme la distribution de contenu, les sites miroirs et les caches afin de rapprocher le contenu de l'utilisateur final. En outre, le multihébergement (multihoming) est une pratique qui permet à des fournisseurs d'accès internet et à des fournisseurs de connectivité internet de se connecter à plusieurs réseaux.

Multihébergement

(35) Le multihébergement désigne la pratique qui consiste, pour les fournisseurs de réseaux et les fournisseurs d'accès internet, à se connecter à plus d'un réseau. Grâce au multihébergement, la connectivité internet reste assurée même lorsqu'une connexion est interrompue, et le réseau peut acheminer le trafic vers n'importe quelle destination sur l'une des connexions disponibles qui offre le meilleur service et éviter ainsi les encombrements vers la destination souhaitée.

(36) Étant donné l'importance de la qualité de la connexion (débit, fiabilité et redondance), l'une des solutions offertes aux fournisseurs d'accès internet et aux fournisseurs de réseaux est de s'assurer eux-mêmes un accès universel à l'internet en recourant au multihébergement. L'enquête menée par la Commission montre que le multihébergement est utilisé principalement pour la sauvegarde et la redondance de manière à garantir la qualité du service. Toutefois, le multihébergement n'empêche pas nécessairement l'acheminement du trafic sur un réseau offrant une connexion dégradée. Il est possible d'influer, dans une certaine mesure, sur la voie empruntée par le trafic sortant, de manière à éviter son acheminement sur un réseau dégradé. Rien de tel n'est possible, en revanche, pour le trafic de retour. Le multihébergement peut aussi servir à assurer des connexions vers certaines régions (par exemple, les États-Unis ou l'Europe). Il donne également aux nouveaux concurrents la possibilité de se connecter aux clients.

(37) En cas de multihébergement, un réseau compte normalement un fournisseur de connectivité principal et un ou plusieurs autres fournisseurs de sauvegarde. En général, les clients des fournisseurs de connectivité internet ont une connexion principale avec le fournisseur qui peut les connecter au plus grand nombre de clients, ainsi que des connexions de sauvegarde avec les petits fournisseurs. C'est ce que confirme l'enquête de la Commission en montrant que la majorité des fournisseurs de niveau 2 ou des petits fournisseurs d'accès internet ou de réseaux pratiquent le multihébergement soit avec l'une des parties à l'opération de concentration, soit avec les deux.

Caches, sites miroirs et réseaux de distribution de contenu (content delivery networks ou CDN)

(38) La fonction première des caches et des sites miroirs est de distribuer du contenu, en le rapprochant de l'utilisateur final. Ces techniques améliorent la qualité de la distribution de contenu, car elles diminuent les temps de réponse et de chargement, l'encombrement des réseaux et les coûts en termes de bande passante et rapprochent le contenu de l'utilisateur final. Elles ne sont toutefois pas encore d'un usage très répandu et se heurtent à des limitations techniques (voir le considérant 172 ci-dessous). En particulier, elles sont plus efficaces pour des équipements statiques et stables qui ne changent pas trop souvent.

Cache

(39) Le cache est la plus ancienne de ces techniques. Les caches créent des copies temporaires d'informations telles que des pages internet, des fichiers d'images ou multimédias (désignés collectivement sous le nom d'"objets"), qui résident dans des ordinateurs (les "caches") autres que l'ordinateur hôte dont provient l'information ("serveur d'origine"). Les caches ne copient pas l'intégralité du contenu d'un site internet, mais seulement les parties de ce site qui contiennent un contenu dynamique, de manière à économiser de la bande passante sur ces serveurs centralisés. Les caches sont installés par le propriétaire/administrateur du réseau en des points déterminés du réseau considéré.

(40) Le cache peut être un simple ordinateur personnel qui fonctionne avec un logiciel courant ou bien un ordinateur (ou un réseau d'ordinateurs) très spécialisé fonctionnant avec des logiciels spéciaux conçus pour tourner sur cet ordinateur. Après son installation dans un réseau, le cache intercepte les requêtes transmises par les ordinateurs hôtes vers le réseau d'origine pour rechercher des objets situés sur d'autres réseaux et vérifie si les objets recherchés sont stockés dans le cache. Dans ce dernier cas (il y a alors "réponse pertinente" ou "hit"), il envoie cet objet à l'hôte qui a émis la requête. Si l'objet n'est pas retrouvé dans le cache ("pas de réponse pertinente" ou "miss"), le serveur cache autorise l'acheminement de la requête vers le serveur d'origine.

(41) Il existe trois types de caches: le cache traditionnel, le cache en mode transparent et le cache de préchargement. Le cache traditionnel, qui est le plus ancien, est appelé "serveur cache" ou "serveur mandataire" (proxy cache). L'utilisation de ce cache oblige à configurer le navigateur du serveur à l'origine de la requête de manière à ce qu'il interroge le serveur cache au lieu d'envoyer les requêtes directement au site internet en question. Les caches en mode transparent, contrairement aux caches traditionnels, peuvent être installés directement sur le réseau et peuvent intercepter toutes les requêtes qui passent par eux. Ils sont en mode "transparent", ce qui signifie qu'il n'est pas nécessaire de reconfigurer le navigateur de l'hôte à l'origine de la requête pour pouvoir utiliser un serveur cache et que l'ordinateur hôte n'est pas conscient que les objets d'une requête qu'il reçoit proviennent d'un serveur cache. Habituellement, les caches ne stockent que les informations retrouvées à l'occasion d'une requête antérieure. On trouve également des caches traditionnels ou en mode transparent qui "préchargent" les objets, autrement dit qui consultent des sites internet sur la base de critères prédéfinis et mettent à jour régulièrement les informations recueillies lors de ces interrogations. Cela permet au serveur cache d'"anticiper" les requêtes et d'améliorer ainsi les performances du cache. Le préchargement est particulièrement utile lorsque le contenu est relativement "dynamique" (par exemple, lorsque des pages internet sont mises à jour quotidiennement, voire selon des fréquences plus courtes).

(42) Le cache en tant que tel n'est pas fourni en tant que service autonome. Il s'agit plutôt d'un dispositif qui est installé par l'opérateur/administrateur du réseau pour améliorer la vitesse et la qualité de transmission du réseau. Les FSI achètent des caches pour les installer dans leurs réseaux pour deux raisons: a) afin de diminuer les besoins en bande passante et b) afin d'améliorer les temps de réponse aux clients. Ces deux aspects sont importants pour tous les acheteurs de caches, mais l'ordre des priorités dépend de chaque FSI.

(43) Si le cache est particulièrement avantageux pour les entreprises clientes, il ne l'est pas pour les fournisseurs de contenu, dans la mesure où il ne leur permet pas de compter le nombre de réponses pertinentes (et donc de visites de leur site) qui est nécessaire pour calculer et générer des recettes publicitaires [...]*.

Création de sites miroirs

(44) La technique des sites miroirs est à peu près identique à celle des caches. Les données qui font (ou feront) l'objet de requêtes répétées sont dupliquées sur différents ordinateurs et transmises à toutes les personnes qui les demandent à partir d'un ordinateur plus proche que celui du fournisseur de contenu d'origine. L'objectif est de diminuer la dépendance par rapport aux serveurs centraux et de distribuer le contenu plus efficacement et plus rapidement aux utilisateurs locaux.

(45) Alors que le cache est une technique de gestion du réseau dans le cadre de laquelle l'opérateur de réseau installe un ordinateur qui fonctionne sous un cache logiciel spécial en vue d'améliorer la vitesse de transmission sur le réseau et de diminuer les besoins en bande passante, la création de sites miroirs est une technique qui consiste à dupliquer un contenu sur des serveurs géographiquement dispersés.

(46) En général, le site miroir n'est pas offert en tant que service autonome. Il peut arriver, dans certains cas, qu'un fournisseur de contenu décide d'installer ses propres serveurs sur d'autres réseaux plus proches des utilisateurs finals. Le cas le plus courant est celui d'un fournisseur de contenu qui dispose d'un petit nombre de fichiers volumineux qu'il souhaite rapprocher de certaines catégories d'utilisateurs finals. Ainsi, Microsoft et Netscape utilisent des serveurs distincts pour permettre à leurs clients européens de télécharger des logiciels plus rapidement qu'ils ne le pourraient s'ils devaient le faire à partir du serveur d'origine installé aux États-Unis.

(47) Il est toutefois plus courant d'offrir la création de sites miroirs dans le cadre de l'offre d'hébergement (voir les considérants 32 et 33) ou de services de colocalisation. Les entreprises qui proposent ce type de services disposent de centres de traitement informatique répartis de par le monde et connectés à de multiples dorsales internet. Tous les grands fournisseurs de connectivité internet offrent des services d'hébergement et de colocalisation. Par exemple, MCI WorldCom a annoncé le 31 mai 2000 qu'elle créerait 13 grands centres de traitement informatique en Europe en vue de cibler les FSI, les FSA (fournisseurs de services d'application) et les grandes multinationales. Ces nouveaux centres s'ajouteront à ses 28 centres européens existants de plus petite taille(17). La création et la tenue de sites miroirs assurées par ces opérateurs de centres de traitement informatique implique la mise en place de serveurs multiples dans des lieux géographiquement dispersés, chacun de ces serveurs étant capable de traiter les mêmes requêtes et de fournir les mêmes informations. La dispersion géographique permet aux hébergeurs d'utiliser le système d'adressage par domaine (DNS) soit pour diriger les requêtes vers le serveur le plus proche, soit pour les répartir entre différents serveurs de manière à équilibrer la charge qui pèse sur chacun d'eux.

Réseaux de distribution (ou de diffusion) de contenu (content delivery networks ou CDN)

(48) La combinaison des techniques du cache et du miroir a permis l'émergence d'une forme plus avancée de distribution du contenu, le réseau de distribution de contenu ou CDN. Les réseaux de distribution de contenu recourent à l'installation de serveurs caches ou de dispositifs similaires sur de multiples réseaux et dans divers lieux. Un réseau de ce type fournit au client (le fournisseur de contenu) un logiciel qui reconfigure automatiquement les pages internet de ce client de manière à diriger les recherches d'objets volumineux effectuées par un utilisateur final soit vers le serveur de ce réseau qui est le plus proche de cet utilisateur final, soit, dans certains cas (sur la base d'algorithmes de routage et de surveillance du réseau en temps réel), vers le serveur capable de distribuer le contenu plus rapidement à cet utilisateur final (par exemple, si l'encombrement ralentit le serveur le plus proche).

(49) Le réseau de distribution de contenu a une fonction analogue à celle du cache, mais, à l'inverse des FSI qui utilisent des caches pour renforcer leur capacité de rapatrier du contenu sur leurs réseaux de manière à le rapprocher de leurs clients, il permet aux fournisseurs de contenu d'assurer une distribution sélective ou personnalisée du contenu via leurs réseaux jusque chez le client (technologie "push"). En tant que telles, ces deux approches sont complémentaires quant à leurs effets sur l'utilisation des dorsales internet.

(50) Les fournisseurs de contenu cherchent avant tout à distribuer un contenu à l'utilisateur final aussi vite que possible. La forte croissance du volume des informations transportées sur l'internet entraîne des contraintes de capacités et augmente le temps de réponse des sites internet. Le réseau de distribution de contenu diminue le temps de réponse en réduisant le volume des données qui doivent transiter par différents réseaux. Le recours à un réseau de ce type permet au fournisseur de contenu d'économiser de la bande passante et de diminuer le coût de ses équipements pour une quantité de données identique. Un fournisseur de contenu qui utilise un service de distribution de contenu a besoin de moins de capacités et mobilise un plus petit nombre de ses propres serveurs, car il n'envoie pas directement une grande quantité de contenu. Le réseau de distribution de contenu doit supporter une partie de ces coûts, mais il peut les répercuter sur le fournisseur de contenu. Il peut cependant être plus économique pour un fournisseur de contenu d'utiliser un tel réseau que de fournir des contenus à partir de ses propres serveurs ou de serveurs situés dans les centres de traitement informatique d'un hébergeur.

(51) Outre les techniques précitées, on assiste actuellement sur l'internet à l'émergence de nouveaux services tels que le commerce électronique, la vidéo en ligne, la téléphonie sur l'internet, etc., qui exigent beaucoup plus de capacités que ce n'était le cas jusqu'ici et qui sont fournis en temps réel. Pour que ces prestations soient possibles, il faut des réseaux qui ne présentent aucun risque de panne ni de "pertes de paquets" (sans quoi la qualité d'une conversation vidéo ou téléphonique, par exemple, en serait gravement affectée).

B. MARCHÉS DE PRODUITS EN CAUSE

CONNECTIVITÉ INTERNET DE NIVEAU 1 OU UNIVERSELLE

(52) Dans sa décision WorldCom/MCI du 8 juillet 1998(18) (ci-après "WorldCom/MCI"), la Commission a distingué trois marchés de produits: i) la fourniture de services d'accès reliant l'hôte au point de présence; ii) la fourniture de services d'accès à l'internet et iii) la fourniture de connectivité internet du plus haut niveau ou universelle. Dans cette affaire, la Commission a conclu qu'il existait une concurrence notable sur le marché des services d'accès à l'internet et a donc concentré son analyse sur le marché de la fourniture de connectivité internet du plus haut niveau ou universelle, sur lequel opéraient les deux parties à l'opération de concentration. L'enquête menée par la Commission dans la présente affaire confirme que, pour l'appréciation de l'opération envisagée, l'analyse doit à nouveau porter sur le marché de la fourniture de connectivité internet du plus haut niveau (de niveau 1) ou universelle déjà examiné dans la décision WorldCom/MCI.

(53) Dans la décision précitée, la Commission a estimé que la fourniture de connectivité internet de niveau 1 ou universelle constituait un marché distinct parce que seuls les fournisseurs de connectivité internet de niveau 1 sont capables de fournir eux-mêmes entièrement une connectivité internet intégrale et que la connectivité est fournie entièrement soit sur la base d'accords de peering entre ces réseaux de niveau 1, soit en interne. Les fournisseurs de connectivité internet de niveau 2 (les "fournisseurs de niveau 2") peuvent fournir une partie de la connectivité dont ils disposent grâce à leurs accords de peering, mais qu'ils doivent aussi compléter en achetant du transit. La Commission a constaté que les FSI de niveau 2 ne peuvent faire autrement que de continuer à acheter du transit aux réseaux de niveau 1 et ne peuvent exercer de pressions concurrentielles sur les prix que pratiquent ces réseaux. Il en va de même pour les revendeurs. Il y avait donc lieu de conclure que le marché en cause sur lequel MCI et WorldCom exerçaient leurs activités était celui de la fourniture de connectivité internet de niveau 1 ou "universelle".

(54) À l'époque des faits, MCI et WorldCom contestaient la thèse de la Commission selon laquelle l'internet était hiérarchisé. Or, Sprint soutenait que l'internet présentait certaines caractéristiques d'une hiérarchie et n'est pas revenue depuis sur cette affirmation(19). Dans la présente affaire, les parties allèguent que l'internet n'est pas hiérarchisé. [...]*(20) [...]* L'enquête menée en l'espèce a cependant confirmé la conclusion à laquelle la Commission est parvenue dans sa décision WorldCom/MCI et suivant laquelle l'internet a une structure hiérarchisée: il existe un premier niveau constitué par les fournisseurs de réseaux de niveau 1 qui couvrent tous leurs besoins en connectivité soit par le biais d'accords de peering conclus entre eux, soit en interne. L'enquête révèle en outre que les fournisseurs de réseaux de niveau 1 continuent à recourir à des échanges de trafic réciproques sans contrepartie financière (peering) via des points d'interconnexion privés. Par ailleurs, les petits fournisseurs de réseaux (de niveau 2) continuent à dépendre d'accords de peering qu'ils concluent avec des fournisseurs de réseaux nationaux ou régionaux, y compris les filiales européennes de MCI WorldCom, pour obtenir la connectivité nationale, régionale, voire européenne dont ils ont besoin. Toutefois, pour l'obtention d'une connectivité mondiale, même les grands fournisseurs de réseaux européens achètent de la connectivité en transit à un ou plusieurs fournisseurs de connectivité internet de niveau 1. Les segments suivants sont constitués par les fournisseurs de réseaux régionaux et par les fournisseurs d'accès internet qui achètent de la connectivité pour leur clientèle au détail. Les autres clients des grands fournisseurs de connectivité internet sont les sites internet et les entreprises utilisant les accès par ligne spécialisée [...]*. Pour résumer, toutes les entreprises qui fournissent des services internet achètent du transit et sont des clients directs ou indirects des fournisseurs de connectivité internet de niveau 1. Aucune ne peut assurer une connectivité mondiale sans avoir accès aux réseaux des fournisseurs de connectivité de niveau 1.

(55) Les parties confirment également la hiérarchie géographique de l'internet, c'est-à-dire le fait que les réseaux américains soient considérés comme plus importants que les autres. MCI WorldCom dispose de trois dorsales régionales: AS 701 (Amérique du Nord), AS 702 (Europe) et AS 703 (Asie-Pacifique). [Pour pouvoir conclure des accords de peering de portée mondiale, le fournisseur de réseaux doit satisfaire aux critères fixés par UUNet pour le peering en Amérique du Nord]*. Sprint ne fournit des services internet qu'aux États-Unis. Les accords de peering que Sprint a conclus n'offrent à ses fournisseurs homologues une connectivité à son réseau aux États-Unis que si ces derniers proposent un réseau mondial.

(56) Les parties font valoir que l'analyse du marché de produits en cause doit tenir compte de l'évolution récente de la nature et de la portée de l'internet. Selon elles, la croissance de la demande de connectivité universelle a entraîné une augmentation de l'offre tant aux États-Unis qu'en Europe. En particulier, avec la libéralisation des marchés des télécommunications dans l'Union européenne, de nouveaux fournisseurs importants de réseaux internet réussissent constamment à s'imposer sur le marché, et les fournisseurs européens dans ce domaine jouent un rôle de plus en plus grand. L'émergence des services de distribution de contenu, la conclusion d'accords de peering régionaux et le recours accru à la création de sites miroirs, au cache et au multihébergement ont également joué un rôle crucial au cours de ces deux dernières années en réduisant la dépendance des FSI et des fournisseurs de contenu internet à l'égard des fournisseurs de réseaux dorsaux américains.

(57) L'enquête menée par la Commission montre que, en dépit de l'arrivée notable sur le marché de détail de nouveaux FSI, en Europe et ailleurs, aucun nouveau fournisseur important de réseaux internet de niveau 1 n'est entré sur le marché. Les deux seuls fournisseurs de ce type qui sont entrés sur le marché sont Cable & Wireless(21), qui a racheté les activités de MCI dans le domaine de l'internet, et AT & T, par le biais de son acquisition, entre autres, d'IBM Global Networks. Ces opérations n'ont pas modifié le niveau de concentration du marché, car les réseaux acquis appartenaient déjà au niveau 1 des fournisseurs de connectivité internet.

(58) Au cours de son enquête, la Commission a également constaté que même si les courants de trafic ont changé et si le trafic en provenance d'Europe à destination des États-Unis a diminué, les fournisseurs européens de réseaux internet continuent à dépendre, dans une large mesure, des fournisseurs de connectivité américains. Même les grands fournisseurs européens de réseaux internet acheminent vers les États-Unis de 50 à 80 % de leur trafic internet sortant. [...]*(22). Les tiers reconnaissent généralement que ce pourcentage est susceptible de baisser, dans une certaine mesure, dans les prochaines années en raison de la croissance du contenu national. Toutefois, malgré cette tendance, ils s'attendent à un maintien de cette forte dépendance par rapport aux grands fournisseurs de réseaux américains pour l'obtention de connectivité. Cela tient au fait que les clients européens continuent à demander l'accès aux sites internet les plus populaires au monde, à savoir ceux qui se trouvent aux États-Unis. Le recours accru à la création de sites miroirs et aux caches ne devrait pas modifier sensiblement la situation, étant donné le nombre croissant de sites internet et de contenus internet américains. Malgré l'utilisation accrue de ces techniques, il existe toujours une forte dépendance à l'égard des fournisseurs de connectivité de niveau 1 pour l'obtention d'une connectivité universelle (mondiale).

(59) Quoi qu'il en soit, même si une bonne partie du trafic qui était acheminé auparavant vers les États-Unis est maintenant envoyée vers d'autres destinations et, dans une certaine mesure, vers des sites miroirs créés en Europe, une grande partie du trafic sortant de l'Europe continuera à être acheminée vers des filiales des fournisseurs de réseaux américains installées en Europe, puisque nombre de ces fournisseurs mettent en place des réseaux dans d'autres régions, y compris l'Europe, de sorte que le trafic passe inévitablement par ces réseaux. C'est pourquoi, même s'il devait se produire une modification des courants de trafic, la dépendance par rapport aux fournisseurs de connectivité de niveau 1 (à savoir les fournisseurs américains) subsisterait. Le multihébergement ne semble pas non plus avoir eu un grand impact sur les courants de trafic. Il est ressorti de l'étude du marché que les FSI européens achètent de la connectivité aux fournisseurs de connectivité (européens) régionaux de niveau 2, mais qu'ils dépendent aussi du transit fourni par au moins l'un des fournisseurs de connectivité de niveau 1 pour l'obtention d'une connectivité universelle.

(60) La Commission a donc conclu dans sa communication des griefs que, en dépit des évolutions que connaît l'internet depuis 1998, il existe un marché distinct de la fourniture de connectivité internet de niveau 1 ou universelle. Le recours croissant aux caches et aux sites miroirs ainsi qu'au multihébergement ne modifie en rien cette conclusion.

La réponse des parties

(61) Dans leur réponse à la communication des griefs (ci-après dénommée "la réponse"), les parties ont contesté la définition du marché des produits de la Commission et le caractère hiérarchisé de la structure du marché. Elles ont avancé que les fournisseurs de niveau 2 pouvaient se passer des fournisseurs de niveau 1 pour obtenir une connectivité universelle. Elles ont en outre prétendu que les nouvelles évolutions technologiques modifieraient le caractère hiérarchisé du secteur.

(62) Il convient tout d'abord de constater que les parties reconnaissent dans leur réponse commune à la communication des griefs que "les [f]ournisseurs de niveau 2 [...] ne font pas partie du noyau 'sans faille' de l'internet, c'est-à-dire qu'ils ne peuvent acheminer du trafic vers toutes les destinations internet sans acheter du transit à un autre FSI"(23). De plus, les parties définissent différemment le marché de produits en cause. Dans la réponse, Sprint fait valoir que quatre autres entreprises devraient figurer parmi les entreprises considérées par la Commission comme des acteurs du marché de niveau 1. Cependant, elle ne conteste pas le caractère hiérarchisé de l'internet. MCI WorldCom maintient que le marché en cause est beaucoup plus vaste que le marché défini par la Commission.

(63) Au cours de l'audition, un tiers a apporté la preuve que la qualité de ses services s'était détériorée faute de connexions directes de peering avec MCI WorldCom en Europe.

(64) Les parties ont allégué que les accords de peering de niveau 2 (peering entre des fournisseurs locaux et régionaux de connectivité) permettaient aux clients des fournisseurs de connectivité de niveau 1 d'exercer une pression concurrentielle sur ces derniers. Les parties ont avancé que si tous les fournisseurs de connectivité de niveau 1 devaient augmenter leurs prix de 5 à 10 %, ceux de niveau 2 pourraient rediriger - et redirigeraient effectivement - leur trafic dans une telle mesure que cette hausse du prix du transit ne serait pas rentable. En outre, comme variante de l'argument selon lequel la structure de l'internet ne serait pas hiérarchisée, les parties ont prétendu dans leur réponse que la définition du marché de la Commission ne tenait pas compte de l'évolution en dehors des États-Unis ni de l'émergence d'opérateurs puissants en Europe.

(65) Les parties méconnaissent le fait que les clients qui achètent du transit aux fournisseurs de connectivité de niveau 1 ne disposeraient d'aucune autre source pour obtenir une connectivité universelle. Pour se passer de la connectivité offerte par les fournisseurs de niveau 1, les fournisseurs de niveau 2 devraient conclure un très grand nombre d'accords de peering et de transit avec les FSI qu'ils ne pouvaient atteindre auparavant que par l'intermédiaire des fournisseurs de niveau 1. Vu qu'il existe des milliers de FSI dans le monde, cette approche ne serait certainement pas rentable par rapport à une hausse relative du prix du transit(24).

(66) De surcroît, les parties allèguent que la Commission n'a pas dûment tenu compte des effets des techniques de stockage et de distribution de contenu dans son appréciation du marché en cause. Elles prétendent en effet que ces techniques ne constituent pas des services autonomes, mais qu'elles remplacent en partie le transport par dorsale. Ces techniques rapprocheraient le contenu des utilisateurs et, partant, permettraient à "la plus grande partie du trafic" d'éviter les dorsales.

(67) Comme cela a été indiqué au considérant 38 et est examiné plus en détail au considérant 172, l'enquête de la Commission a montré que l'utilisation accrue de ces techniques n'avait pas eu de grande incidence sur la structure du marché. L'essentiel du trafic passe toujours actuellement par les fournisseurs de connectivité de niveau 1. De plus, comme ces techniques ne permettent pas d'éviter complètement les fournisseurs de connectivité de niveau 1, il existe toujours forcément une dépendance à leur égard pour l'obtention d'une connectivité universelle. En tout état de cause, elles sont non seulement utilisées par les fournisseurs de contenu et les petits fournisseurs de connectivité, mais également par les fournisseurs de connectivité plus importants en tant que fournisseurs de centres de traitement informatique et de services de colocalisation.

(68) Les parties ont aussi fait valoir que la définition du marché de la Commission ne tenait pas compte du fait que le marché de la fourniture de connectivité de "niveau 1" est devenu nettement plus concurrentiel puisque la part de marché relative de chacun des "principaux acteurs" identifiés dans la décision WorldCom/MCI a diminué.

(69) Cet argument est sans rapport avec la question de la définition des marchés en cause, car il concerne l'appréciation du niveau de concurrence du marché. En outre, contrairement aux affirmations des parties, aucun concurrent important n'est entré sur le marché depuis 1998. Premièrement, dans sa décision WorldCom/MCI de 1998, la Commission avait examiné un marché en cause composé de 16 fournisseurs de connectivité de niveau 1. Ces opérateurs échangeaient du trafic (peering) avec les quatre principaux fournisseurs. Dans la présente procédure, la Commission a estimé que le marché comptait 17 fournisseurs de niveau 1. Elle est parvenue à ce chiffre en tenant compte à la fois des fournisseurs qui échangent du trafic (peering) avec les deux parties notifiantes et de l'avis des tiers. Il en découle qu'elle a retenu ces opérateurs dans la présente procédure sur la base de critères plus favorables aux parties que ceux qu'elle avait utilisés dans la procédure WorldCom/MCI. En tout état de cause, l'arrivée d'AT & T sur le marché (notamment par la prise de contrôle de fournisseurs de niveau 1 déjà en place) n'a guère eu d'incidence sur la part de marché de MCI WorldCom, qui est restée relativement stable au cours de ces deux dernières années selon la méthode de calcul des parts de marché utilisée.

SERVICES MONDIAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS

(70) Les services mondiaux de télécommunications sont des services de télécommunications qui relient un certain nombre de sites différents d'un même client, en général sur au moins deux continents et dans un grand nombre de pays. Ce sont habituellement les multinationales présentes dans de nombreux pays et sur plusieurs continents qui achètent de tels services. Il s'agit de services améliorés - c'est-à-dire allant au-delà de la simple fourniture de services de téléphonie vocale et de télécopie - qui apportent aux clients des solutions globales, notamment des réseaux privés virtuels, pour la transmission de la voix et des données, ainsi que des fonctions avancées.

Caractéristiques de la demande

(71) Les parties ont expliqué au cours de l'étude de marché que la fourniture des services mondiaux de télécommunications se déroulait en deux étapes(25). La première consiste normalement, pour les clients qui veulent obtenir ce type de services, à lancer un appel d'offres (comprenant une description détaillée des besoins propres à ces clients) auprès d'une liste de fournisseurs potentiels. La seconde suit la présentation des offres, les clients menant alors des négociations restreintes avec un petit nombre de fournisseurs présélectionnés avant de choisir un soumissionnaire déterminé. Les clients conduisent ensuite d'étroites négociations avec le soumissionnaire retenu en vue de la conclusion d'un contrat.

(72) Les clients des services mondiaux de télécommunications exigent de leur fournisseur qu'il leur propose des réseaux et des services sur mesure en continu. Ils veulent des réseaux d'une couverture suffisante pour relier un très grand nombre de sites géographiques dispersés, situés pour certains dans des régions éloignées (par exemple, des installations pétrolières dans des régions désertes). La bande passante dont ils ont besoin doit être suffisante pour supporter d'une manière fiable le trafic entrant et sortant de tous leurs sites. Les plus gros fournisseurs de services mondiaux de télécommunications peuvent être à même d'offrir les services demandés via leurs propres réseaux. Ce n'est pourtant pas le cas de la plupart des fournisseurs qui, pour certains sites, sont contraints d'utiliser (de louer) les réseaux d'autres entreprises pour pouvoir couvrir des régions qu'ils ne desservent pas eux-mêmes et assurer la fiabilité des transmissions.

(73) La majorité des clients recherchent une offre groupée de services, tandis qu'un petit nombre d'entre eux achètent des services séparés pour répondre à des besoins spécifiques et assurer eux-mêmes une intégration plus ou moins poussée. Les marchés ne sont toutefois pas subdivisés de manière à permettre à des fournisseurs individuels de soumissionner pour des "lots" différents.

(74) Interrogée sur les principaux critères qui sont appliqués pour la sélection d'un fournisseur de services mondiaux de télécommunications, une entreprise a cité une étude du Yankee Group(26) qui montre que le prix n'apparaît qu'en quatrième position parmi les critères les plus importants pour apprécier l'offre de produits d'un fournisseur, derrière la fiabilité, le service/assistance, et la combinaison connectivité/compatibilité/infrastructure. Les autres critères sont notamment les suivants: culture/langue/fuseau horaire, bande passante/capacité, gestion du réseau, délais d'installation, couverture mondiale, questions relatives au personnel, coordination et compétence. Les clients qui ont répondu à l'enquête de la Commission ont confirmé que le prix n'était pas le seul critère dont ils tenaient compte pour le choix d'un fournisseur. De toute façon, le prix n'était généralement pas considéré comme le critère prioritaire durant la première étape de la procédure de sélection. Il ne devenait un critère crucial que pendant la seconde étape de la procédure (lors de la comparaison des différents fournisseurs présélectionnés).

(75) Pour être crédibles, les fournisseurs de services mondiaux de télécommunications qui soumissionnent doivent disposer de leur propre infrastructure (autrement dit, leurs propres réseaux pour l'essentiel de leur trafic afin de garantir de hauts niveaux de fiabilité et de qualité de service, de fournir une bande passante suffisante et de maîtriser les coûts), d'une couverture mondiale et de services d'assistance à la clientèle (certains clients exigent que les locaux à partir desquels s'effectue l'assistance à la clientèle soient très proches de chez eux, même si leur localisation n'est pas une considération technique déterminante). L'existence d'une clientèle établie est également un élément important pour convaincre les clients de la capacité du fournisseur de fournir effectivement les services demandés.

Caractéristiques de l'offre

(76) Les fournisseurs disposent de divers moyens pour répondre aux besoins des clients. Les clients peuvent acheter les éléments de base d'une offre globale de services mondiaux de télécommunications, comme un réseau de transmission de données assorti des applications qui tournent spécifiquement sur ce réseau ou le service de libre-appel international (le numéro 800), assembler ensuite eux-mêmes les services qu'ils achètent à différents fournisseurs afin de créer des services améliorés, et mettre en place à l'intérieur de leur propre entreprise les installations de maintenance et d'assistance dont ils ont besoin. À l'inverse, des clients peuvent acheter des ensembles de services personnalisés à des fournisseurs spécialisés qui assurent eux-mêmes l'assemblage de ces ensembles et les services de maintenance et d'assistance à la clientèle, et peuvent aussi accorder la garantie de meilleures performances à un moindre coût en raison du caractère intégré des ensembles de services qu'ils mettent ainsi au point. Le dernier cas de figure en matière de fourniture est lorsque le client sous-traite toutes ces activités au fournisseur. Cette solution implique souvent un transfert de personnel au fournisseur et pas simplement la fourniture d'un ensemble intégré de services.

(77) Quels que soient les besoins précis d'un client, les services qu'il exige comprennent toujours une combinaison d'éléments similaires (un réseau, un protocole pour l'échange de données - par exemple, X.25, relais de trames, ATM ou IP), d'autres services utilisant le même protocole, ainsi qu'un certain nombre d'éléments qualitatifs tels que la couverture géographique, la capacité de garantir la qualité du service (grâce à la continuité, une assistance à la clientèle proche de celle-ci, un haut niveau de fiabilité, etc.), pour un coût qui est donc plus ou moins identique. Les fournisseurs doivent être à même de proposer toutes ces caractéristiques. Le fait de disposer de tout cet éventail de services présente aussi des avantages sous l'angle de la maîtrise des coûts et de la fiabilité de l'ensemble de services proposé, ce qui améliore la manière dont le fournisseur est perçu par le client.

La procédure d'appels d'offres

(78) Au cours de l'enquête, les parties notifiantes ont donné à la Commission des explications sur la procédure d'appels d'offres. En général, les clients passent des appels d'offres auprès des fournisseurs potentiels. Dans certains cas, ils peuvent publier des demandes d'informations, préalablement à l'appel d'offres, afin de se faire une idée des différentes options que proposent les grands fournisseurs. Les appels d'offres peuvent être de longs documents: un client a indiqué qu'ils pouvaient comporter une centaine de pages. Le document relatif à l'appel d'offres est ensuite communiqué aux fournisseurs retenus afin de soumissionner pour le marché considéré.

(79) La réponse à l'appel d'offres peut également être longue et vise à satisfaire aux exigences techniques posées par le client. D'après MCI WorldCom, le prix initialement proposé en réponse à l'appel d'offres est fixé sur la base de l'expérience acquise en ce qui concerne les services à fournir et la couverture géographique de ces derniers [...]*.

(80) [Le calcul du coût supporté par un opérateur pour exécuter un contrat de fourniture de services mondiaux de télécommunications est un exercice complexe qui implique la prise en compte d'un grand nombre d'éléments de coût, tels que les coûts de gestion, de marketing, de vente et d'après-vente, de personnel, d'administration et d'équipement.]*

(81) [...]*. Dès réception des soumissions, le client constate généralement qu'aucun fournisseur ne satisfait aux exigences détaillées de l'appel d'offres, de sorte que des réunions sont nécessaires pour clarifier et évaluer les aspects techniques des offres. Ce processus d'évaluation peut mobiliser une équipe d'experts pendant plusieurs mois.

(82) Les parties expliquent que, dès qu'un fournisseur de services mondiaux de télécommunications est parvenu à la seconde étape de la procédure d'appel d'offres (autrement dit, lorsque le client a dressé une liste des fournisseurs présélectionnés), les négociations sur le prix commencent avec le client potentiel. Habituellement, le nombre de fournisseurs présélectionnés va de trois à cinq. Sur la base de la description de la procédure d'appel d'offres communiquée par les parties notifiantes et des renseignements transmis par les tiers, même si chaque offre est négociée séparément en pratique, l'équipe chargée de répondre à un appel d'offres sait d'office, si elle est compétente, quels seront ses adversaires lors de la seconde étape de la procédure. Il est fréquent que le soumissionnaire soit informé de l'identité des concurrents en lice et ait une bonne idée des chances de réussite de certaines offres.

(83) Lorsque le fournisseur a été choisi, le marché lui est attribué, et l'accord détaillé est finalisé. Certains clients recourent à des consultants pour une partie de la procédure d'appel d'offres: par exemple, pour la préparation de l'appel d'offres voire, parfois, pour la conduite de la quasi-totalité de la procédure.

La fourniture d'ensembles de services mondiaux de télécommunications

(84) La fourniture d'ensembles de services de télécommunications personnalisés, améliorés et à valeur ajoutée destinés aux entreprises, constitue un marché de produits en cause aux fins de la présente affaire.

(85) Dans leur notification, les parties prennent note des définitions de marché utilisées par la Commission dans un certain nombre de décisions concernant la fourniture de services mondiaux de télécommunications aux multinationales. Les dernières en date qu'elles citent concernent les affaires BT/AT & T(27) et AT & T/IBM(28). Dans l'affaire BT/AT & T, la Commission a retenu un marché distinct pour la "fourniture d'ensembles de services mondiaux de télécommunications personnalisés, améliorés et à valeur ajoutée destinés aux entreprises (ci-après 'marché de la fourniture de services mondiaux de télécommunications')". Dans leur notification, les parties se rallient à l'appréciation de la Commission dans l'affaire BT/AT & T selon laquelle le marché de produits en cause ne doit pas être divisé en marchés plus étroits pour chacun des services inclus dans la gamme des services mondiaux de télécommunications. Les parties notent en outre que les ensembles de services mondiaux de télécommunications sont des solutions personnalisées et qu'ils sont par conséquent conçus, assemblés et gérés séparément pour répondre à tout moment aux besoins d'un client déterminé en matière de télécommunications.

(86) Les services que les parties notifiantes citent comme faisant partie du panier de services inclus dans le marché de produits sont les suivants: communications téléphoniques nationales et internationales, transmissions de données nationales et internationales assurées en utilisant différents protocoles, tels que le relais de trames, l'ATM et l'IP, services améliorés de transmission de la voie et des données, numéros de libre appel international, services de messagerie, centres d'appel, services de vidéoconférence et d'audioconférence, intranets et extranets, réseaux privés virtuels, accès spécialisé à l'internet et cartes à paiement différé pour les entreprises.

(87) La Commission a vérifié la validité de cette définition du marché de produits en cause. Il lui a fallu, à cette fin, déterminer si certains ou l'ensemble des services pouvaient être isolés du panier de services mondiaux et considérés comme des marchés de produits en cause distincts. Dans un second temps, la Commission a dû examiner dans quelle mesure l'internalisation ou l'externalisation de la fourniture de services mondiaux de télécommunications devaient être considérées comme une concurrence réelle ou potentielle ou comme sans intérêt pour l'analyse au regard de la concurrence.

Services distincts ou ensemble de services

(88) Les clients se rallient, pour la plupart, à la conclusion selon laquelle le marché serait constitué d'ensembles de services mondiaux. Des clients estiment toutefois que certains services pourraient être considérés comme des marchés de produits distincts. C'est ainsi qu'un client a répondu qu'il achetait les services séparément et non sous forme d'ensembles. Un autre a déclaré, comme cela est indiqué au considérant 95, qu'il envisagerait l'achat de services séparés si le prix des ensembles de services augmentait.

(89) Pour vérifier la validité de la définition du marché en cause, la Commission s'est également demandé ce qui arriverait si les prix des ensembles de services mondiaux de télécommunications connaissaient une augmentation uniforme de 5 à 10 %. (Cette approche permet de prévoir si les clients reporteraient leur choix sur d'autres produits, auquel cas ces autres produits feraient partie du même marché.) Ainsi qu'il est écrit au considérant 76, les clients ne considèrent pas le prix comme l'un des principaux facteurs déterminant leur choix d'un fournisseur. Cette remarque s'applique par analogie au choix opéré entre, d'une part, l'achat de services de base et l'internalisation de la fourniture de services améliorés en plus de ces services de base et, d'autre part, l'achat de ces mêmes services dans le cadre d'ensembles taillés sur mesure. Une seule des entreprises interrogées a répondu que, si le prix des ensembles de services augmentait, elle étudierait la possibilité d'acheter des services séparés qu'elle regrouperait ensuite en interne. Les autres entreprises interrogées ont souligné qu'elles ne s'attendaient pas à des hausses de prix ou que, sinon, elles accepteraient une telle augmentation uniforme parce qu'elles n'avaient pas le choix, étant donné que ces services leur étaient indispensables.

(90) La définition d'un service déterminé comme marché en cause distinct serait contraire à la logique économique qui sous-tend le fonctionnement du marché. D'une part, en effet, comme il ressort des explications qui précèdent au considérant 77, chacun de ces services repose sur des éléments de base similaires qui sont accessibles aux principaux fournisseurs. Il existe donc un certain degré de substituabilité du côté de l'offre entre un service et un autre. D'autre part, les clients définissent des besoins qu'il est possible de satisfaire de plusieurs manières en utilisant divers services. Les clients ont aussi la possibilité de demander des fonctions ou des services supplémentaires dans le cadre d'un contrat qui implique l'utilisation de certains autres services. Il faut donc définir un marché de produits en cause dont le coeur est constitué par les éléments centraux d'un réseau (à savoir les protocoles de transfert de données) et par les autres caractéristiques des services mondiaux de télécommunications. Ces protocoles de transfert de données sont l'élément fondamental sur lequel viennent se greffer les autres services mondiaux de télécommunications qui sont plus complexes.

(91) Chaque service peut être subdivisé en plusieurs sous-groupes à l'intérieur desquels il existe une certaine substituabilité entre services, mais cette substituabilité n'est pas parfaite. Ce que semble rechercher le client, c'est un ensemble de services qui réponde à ses besoins. Différents opérateurs peuvent, pour répondre à un même besoin, offrir des solutions fondées sur des services différents.

(92) Les entreprises ayant répondu à l'enquête de la Commission sont généralement d'accord avec les catégories qu'elle a distinguées sur la base de la liste des services de télécommunications communiquée par les parties. Divers concurrents ont toutefois retenu des subdivisions différentes lorsqu'ils ont essayé de déterminer si le marché était plus étroit. En outre, un tiers a fait valoir que d'autres services, tels que le protocole X.25, les réseaux SDN mondiaux, la gestion de la largeur de bande, les services IP (hébergement, services IP à valeur ajoutée, réseaux IP gérés, messagerie globale, caches) et les terminaux VSAT, faisaient également partie des services à inclure dans le marché de produits en cause.

(93) La Commission a demandé l'avis des concurrents et des clients sur la définition du marché de produits. Il y a eu un quasi-consensus sur l'éventail des produits à inclure dans le marché, à l'exception de certains éléments sur lesquels la Commission a noté des divergences de vues.

(94) Deux entreprises ont répondu que, selon elles, il existait un marché distinct pour une catégorie de clients de premier niveau, distincte des autres clients. L'une des entreprises interrogées a caractérisé ce marché comme étant celui où les clients concernés ont des activités à l'échelle mondiale et ont besoin d'un panier de services sur un réseau mondial privé capable de connecter tous les établissements de l'entreprise. Il est cependant difficile d'isoler un tel groupe d'entreprises. La nature et la répartition des sites d'une entreprise, quelle qu'elle soit, varient en fonction de l'entreprise considérée. Par exemple, la densité du réseau peut être beaucoup plus importante dans un pays où l'entreprise dispose d'un grand réseau de distribution que dans un pays voisin où elle n'a ouvert que des usines de production. Les acquisitions d'entreprises peuvent en outre modifier très rapidement le marché. En pratique, tous les acteurs présents sur le marché des services mondiaux de télécommunications, tels qu'ils sont définis aux considérants 206 à 218, peuvent fournir des services non seulement aux quelques entreprises qui ont des activités mondiales, mais également aux entreprises qui ont besoin de réseaux dont la couverture se limite à un plus petit nombre de pays. Ces dernières peuvent avoir d'autres fournisseurs locaux qui couvrent une partie de leurs besoins, mais seules les entreprises véritablement mondiales peuvent leur fournir un réseau mondial.

Internalisation et externalisation

(95) Les clients qui choisissent de couvrir en interne leurs besoins en services mondiaux de télécommunications achètent certains des éléments contenus dans des ensembles de services de ce type. Cette internalisation ne constitue pas pour autant une partie du marché défini au considérant 86. De plus, comme il est dit dans la décision BT/AT & T, cette internalisation est un choix stratégique. Les clients qui décident d'acheter des ensembles de services ont peu de chances d'internaliser à nouveau cette fourniture, même si cette solution n'est pas impossible, car les coûts de réorientation et de mise en place des ressources et des compétences internes nécessaires que cela supposerait seraient trop élevés. Un seul client a donné un exemple concret d'internalisation de la bande passante brute, qui n'a été réalisée que dans un seul pays. L'option de l'internalisation a été expressément rejetée pour un service paneuropéen, car elle ne pouvait s'effectuer à l'échelle de toute l'Europe, et à plus forte raison à l'échelle mondiale. D'autres clients ont explicitement exclu la possibilité de revenir à un réseau interne, sauf pour certains services. Un argument similaire a été exposé en ce qui concerne l'externalisation, dans le cadre de laquelle non seulement le réseau est fourni par une entreprise extérieure, mais en outre le personnel qui exploite le réseau travaille pour le fournisseur. Dans un tel cas de figure, le retour à une certaine forme d'internalisation serait encore plus difficile. Aucune de ces activités ne peut par conséquent être considérée comme faisant partie du marché en cause.

Conclusion

(96) L'enquête menée par la Commission confirme donc la validité de la définition du marché retenue dans la décision BT/AT & T et précisée par l'établissement d'une distinction entre les protocoles de base pour le transfert de données et les services à plus grande valeur ajoutée qui fonctionnent grâce à ces protocoles.

C. MARCHÉ GÉOGRAPHIQUE EN CAUSE

CONNECTIVITÉ INTERNET DE NIVEAU 1 OU UNIVERSELLE

(97) Dans la décision WorldCom/MCI, la Commission avait estimé que le marché de la fourniture de connectivité de niveau 1 était de dimension mondiale. Les parties n'ont pas contesté cette affirmation en soi et reconnaissent que la demande de connectivité est effectivement mondiale. Néanmoins, elles font valoir qu'il existe une demande régionale (européenne) de plus en plus grande et que le marché n'est pas hiérarchisé, ce qu'elles ont réitéré dans leur réponse à la communication des griefs. Or, ce n'est pas ce que montre l'enquête réalisée par la Commission dans la présente procédure, puisqu'elle a, au contraire, confirmé que la demande de connectivité internet restait de dimension mondiale et que, malgré un contenu régional de plus en plus important, l'entrée sur le marché d'un certain nombre de nouveaux arrivants et le recours à des sites miroirs, des mémoires caches, etc., les FSI de niveau 2 continuaient à dépendre d'un nombre limité de fournisseurs de niveau 1 pour ce qui est de la connectivité mondiale. Bien que la majorité des fournisseurs de réseaux de niveau 1 qui sont apparus à ce jour possèdent des centres d'opération implantés aux États-Unis, ils sont les seuls fournisseurs à pouvoir proposer des services de transit sur toutes les parties de l'internet. En raison de la structure hiérarchisée de l'internet, une augmentation des prix d'accès aux réseaux de niveau 1 se répercuterait sur tous les consommateurs, partout dans le monde. Il y a donc effectivement un marché mondial.

SERVICES MONDIAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS (SMT)

(98) Dans la décision BT/AT & T, la Commission avait estimé que le marché de la fourniture de SMT était de dimension mondiale. Dans leur notification, les parties notifiantes se sont déclarées d'accord avec cette définition du marché, qui est également largement confirmée par des tiers. D'après l'un de ceux-ci, certaines sociétés européennes s'adresseraient généralement d'abord à un fournisseur européen pour certains services, et ne se tourneraient vers des fournisseurs américains que si les prix devaient augmenter de 5 à 10 %. Toutefois, la liste des fournisseurs communiquée par les clients confirme que ce sont les opérateurs de dimension mondiale qui sont considérés comme les principaux fournisseurs de SMT.

(99) En conséquence, la Commission a fondé son analyse sur la définition mentionnée au considérant 98, c'est-à-dire un marché géographique de dimension mondiale, qu'elle avait déjà utilisée dans son analyse de l'affaire BT/AT & T, notamment parce que l'enquête n'a laissé apparaître aucun élément permettant de contester cette définition.

D. APPRÉCIATION

CONNECTIVITÉ INTERNET DE NIVEAU 1 OU UNIVERSELLE

Statistiques publiées sur les parts de marché

(100) Dans la décision WorldCom/MCI, la Commission avait estimé que le regroupement des activités internet de MCI et de WorldCom aurait entraîné la création d'une position dominante sur le marché de la connectivité de niveau 1. Les activités actuelles de MCI WorldCom dans le secteur de l'internet ont été apportées par WorldCom après l'acceptation, par la Commission, de la cession des activités internet de MCI, comme condition préalable à l'autorisation de l'opération de concentration entre MCI et WorldCom. À l'époque où la Commission a pris cette décision, MCI et WorldCom étaient les deux leaders du marché, avec une part cumulée de l'ordre de [30-40]* % pour l'ancien groupe WorldCom et de [10-20]* % pour l'ancien groupe MCI. À l'époque, Sprint était considérée comme le deuxième fournisseur de réseaux de niveau 1, avec une part de marché de l'ordre de 10 à 15 %.

(101) Les parties font valoir que, ainsi que la Commission l'avait déclaré dans la décision WorldCom/MCI, il n'existe aucune estimation officielle fiable ni sur la taille du secteur internet dans son ensemble ni sur celle de l'un ou l'autre sous-secteur, et il n'y a pas non plus de consensus sur l'unité de mesure la plus appropriée. En outre, ainsi que la Commission l'avait constaté dans la décision, les FSI ne sont soumis à aucune obligation de publication de leurs recettes internet et il n'y a aucune cohérence dans les chiffres publiés. De ce fait, les parties ne sont pas en mesure de fournir une estimation précise de la taille du secteur internet ni de déterminer la taille du marché. Même les recettes internet dont MCI et WorldCom estimaient, dans la décision WorldCom/MCI, qu'elles constituaient le meilleur outil pour déterminer les parts de marché, peuvent facilement, d'après les parties, se révéler imprécises. Les flux de trafic, utilisés par la Commission dans la décision WorldCom/MCI, présenteraient des inconvénients encore plus grands et ne pourraient pas être mesurés techniquement avec précision, en raison de l'absence de mesures généralement acceptées [...]*. Toutefois, Sprint estime les parts de marché des fournisseurs de réseaux de niveau 1 en 1999, sur la base des recettes, à [35-40]* % pour MCI WorldCom, [10-15]* % pour AT & T, [moins de 10]* % pour Sprint et pour Qwest [moins de 5]* %(29).

(102) Les parties ont fourni un certain nombre de sources publiées qui contiennent des estimations de parts de marché(30). D'après ces sources, les parts de marché de MCI WorldCom et Sprint seraient comprises entre un minimum de 17 % et 3 % respectivement et une fourchette de 21 à 45 % et 13 à 21 % respectivement. Les estimations relatives aux 17 % et 3 % sont basées sur les recettes des fournisseurs de services internet et la part de marché par vendeur. Or, elles ne devraient pas être prises en compte, dans la mesure où elles comprennent des sociétés telles que AOL et MSN, qui n'opèrent pas sur le marché en cause, puisqu'elles ne possèdent aucun réseau fournissant une connectivité de niveau 1. On aboutit alors à des parts de marché cumulées de l'ordre de 34 à 55 %. Des estimations réalisées par des tiers indépendants et qui ont été communiquées par les parties situent, elles aussi, les parts de marché des parties à la concentration entre 20 à 25 % et 13 à 20 % pour MCI WorldCom et Sprint respectivement, et entre 34 à 45 %(31) pour la nouvelle entité. Ces parts de marchés sont également conformes aux chiffres fournis par des personnes ayant répondu à l'enquête sur le marché réalisée par la Commission(32). La taille des flux de trafic des parties à la concentration devrait également être mise en relation avec le réseau mondial (capacité) de la nouvelle entité. La division internet de MCI WorldCom, UUNet, possède "plus de 2000 points de présence, dont 500 sont situés en dehors des États-Unis. Cela lui confère une taille au moins deux fois supérieure à celle de n'importe quel autre réseau IP de la planète et de 4 à 5 fois supérieure à celle de la plupart des dorsales dans le monde"(33). En outre, UUNet possède une très importante banque de modems destinée à des clients utilisateurs en gros de lignes commutées [...]*.

Estimation des parts de marché par la Commission

(103) Les acteurs du marché sont ceux ayant conclu un ensemble d'accords de peering qui leur permet de disposer d'une connectivité totale et gratuite sur l'internet. Pour identifier ces acteurs, il faut considérer l'ensemble des connexions de peering et connexions de transit entre fournisseurs de connectivité internet et isoler ceux qui obtiennent leur connectivité soit auprès de leur clientèle, soit grâce à des accords de peering conclus avec d'autres réseaux. Étant donné les problèmes de qualité posés par les points d'interconnexion publics, il est probable que seuls ceux ayant conclu des accords de peering privés avec d'autres réseaux sont réellement en mesure d'obtenir une connectivité de niveau 1.

(104) Un grand nombre des personnes consultées au cours de l'enquête de la Commission ont cité les mêmes cinq réseaux niveau 1 (MCI WorldCom, Sprint, AT & T, Cable & Wireless et GTE) comme ayant une position plus forte que celle de tous les autres. En conséquence, la Commission a examiné les accords de peering concernant ces grands opérateurs, afin d'établir une liste de candidats à la qualité de fournisseurs de connectivité de niveau 1. La publication des accords de peering posant des problèmes de confidentialité, la Commission a choisi, pour déterminer qui pourrait être considéré comme un fournisseur de niveau 1, les sociétés ayant passé des accords de peering à la fois avec MCI WorldCom et Sprint. Cet examen lui a permis d'établir la liste de sociétés suivante: [...]*.

(105) Toutefois, un tiers a proposé sa propre liste de fournisseurs de connectivité de niveau 1, établie en mesurant le nombre d'itinéraires disponibles pour accéder à leurs réseaux. S'il est possible d'y accéder directement, et non en passant par un réseau tiers, alors ils devraient être ajoutés à la liste. L'examen de cette liste fait apparaître certains écarts par rapport à la liste des réseaux ayant conclu des accords de peering à la fois avec les réseaux MCI WorldCom et Sprint. Les sociétés ne figurant pas sur la liste établie par des tiers n'ont pas été retirées de la population des intervenants sur le marché, alors que celles qui y figuraient, mais qui n'avaient pas conclu d'accord de peering avec les deux réseaux, ont été ajoutées. Les quatre sociétés ainsi ajoutées sont les suivantes: Exodus, Digex, Abovenet et Epoch. Globalement, l'analyse a abouti à une population de 17 réseaux (ou groupes de réseaux) intervenant sur le marché de la connectivité internet de niveau 1.

(106) Tous les fournisseurs de connectivité internet ne figurant pas sur cette liste doivent acheter des services de transit à au moins l'un des cinq grands fournisseurs. Si un réseau ne réussit pas à passer des accords de peering avec au moins les cinq principaux acteurs, c'est une partie substantielle de l'ensemble du réseau internet qu'il ne réussira pas à couvrir. Il est possible que le nombre des acteurs qui sont réellement des réseaux de niveau 1 soit en réalité plus faible que l'ensemble de ceux qui ont passé des accords de peering avec Sprint and MCI WorldCom. Il est possible que certains de ceux qui figurent sur cette liste acquièrent de la connectivité par le biais d'accords de peering publics qui ne leur permettent pas de fournir une connectivité de la meilleure qualité. De même, chaque société ajoutée à la liste, bien qu'ayant évidemment conclu un accord de peering avec MCI WordlCom et Sprint, n'a pas obligatoirement conclu de tels accords avec chacune des autres sociétés ayant elles-mêmes conclu des accords de peering avec MCI WorldCom et Sprint. De ce fait, il est possible qu'elles ne soient pas en mesure de couvrir l'ensemble de l'internet gratuitement. Toutefois, aux fins de la présente appréciation, il a été supposé que toute société ayant conclu des accords de peering de portée mondiale avec MCI WorldCom et Sprint serait considérée comme un partenaire recherché, pour des accords de peering, par toutes les autres sociétés ayant conclu de tels accords avec MCI WorldCom et Sprint. Une telle supposition est favorable aux parties, dans la mesure où elle élargit le champ des intervenants sur le marché.

a) Parts de marché basées sur les flux de trafic

(107) Les parties ont fait valoir que les mesures basées sur les flux de trafic présentaient de grands inconvénients. En effet, la mesure des flux de trafic porte sur le trafic passant à travers certaines parties bien précises du réseau, à certains moments donnés. Or, dans la mesure où l'acheminement IP est une donnée dynamique, les mêmes informations transmises entre deux hôtes ne passent pas nécessairement par les mêmes réseaux. En outre, du fait que le trafic passe par plus d'un réseau pour aller de son point de départ à son point d'arrivée, toute estimation du trafic total obtenue en additionnant les quantités de trafic sur chacune des dorsales implique inévitablement des doubles comptages. Compte tenu du fait que le nombre des doubles comptages différera selon les dorsales, les parts de marché calculées sur la base d'estimations du trafic peuvent être inexactes.

(108) Les parties font également valoir que les estimations basées sur les flux de trafic peuvent refléter l'architecture spécifique du réseau concerné. C'est ainsi qu'un fournisseur de dorsales possédant de nombreux noeuds peut générer un faible trafic si on le compare à celui d'un fournisseur n'ayant que peu de noeuds, simplement en raison de l'architecture de réseau qu'il utilise, du fait qu'un noeud peut diriger directement le trafic vers tous les utilisateurs finals qui peuvent être atteints par son intermédiaire et n'envoyer vers la dorsale que le trafic allant vers des destinations qui sont atteintes par l'intermédiaire d'autres noeuds, seul ce dernier type de trafic étant alors considéré comme émanant d'un fournisseur de dorsales.

(109) Toutefois, comme la taille globale d'un réseau donné peut conférer un pouvoir de marché, on peut arguer que les parts de marché calculées sur la base des flux de trafic constituent une estimation plus précise du pouvoir de marché.

(110) Il n'existe pas de statistiques immédiatement disponibles sur les volumes globaux de trafic envoyés ou reçus par l'intermédiaire de réseaux. Il a donc fallu adopter une approche "ascendante" pour calculer les parts de marché sur la base du trafic. Pour cela, il faut tout d'abord identifier les opérateurs présents sur le marché, puis additionner les quantités de trafic passant par leurs réseaux respectifs, afin d'obtenir la taille du marché. Toutefois, il n'a pas été possible d'établir avec certitude que toutes les mesures des flux de trafic ont été effectuées de façon entièrement cohérente par les opérateurs concernés. Il a donc fallu mettre au point une autre façon de calculer les parts de marché sur la base du trafic.

(111) Le flux de trafic total d'un réseau comprend le trafic échangé avec d'autres réseaux ainsi que son trafic interne (c'est-à-dire le trafic entre clients échangé sur ce réseau). Les parts de marché peuvent être calculées à l'aide des ratios de trafic, sans nécessairement devoir utiliser le flux de trafic total sur l'internet, à l'aide de la méthode suivante. Le ratio part de marché du réseau A/part de marché du réseau B est égal au ratio trafic total passant par le réseau A/trafic total passant par le réseau B. Si les deux termes de ce ratio sont divisés par le trafic total échangé entre les réseaux A et B, le ratio part de marché du réseau A/part de marché du réseau B est égal au ratio part relative du réseau A dans le trafic total passant par le réseau B/part relative du réseau B dans le trafic total passant par le réseau A. Les parts de marché peuvent ainsi être calculées sur la base des parts relatives de chaque réseau dans le trafic total passant par chacun d'entre eux. Les parts relatives peuvent alors être calculées pour chaque réseau uniquement à l'aide des statistiques sur le trafic généré par ce réseau. Il n'est alors plus nécessaire d'additionner les mesures effectuées par différents réseaux pour évaluer les parts de marché. Cela évite également que les calculs de parts de marché ne soient faussés par d'éventuelles différences dans les méthodes de mesure utilisées par les divers réseaux.

(112) À partir des données fournies par les cinq plus grands réseaux, il a été possible de calculer la part relative du trafic échangé par chacun d'entre eux avec les quatre autres réseaux, ainsi qu'avec les autres réseaux avec lesquels ils ont respectivement conclu des accords de peering. Lorsqu'une société possédait plusieurs réseaux et que certains d'entre eux achetaient du transit alors que d'autres avaient conclu des accords de peering, tout le trafic a été additionné et considéré comme du trafic de peering. Une telle supposition est favorable aux parties dans la mesure où c'est généralement ce qui se produit avec leurs concurrents moins importants.

(113) En combinant la part relative du trafic échangé entre les réseaux A et B, tout d'abord du point de vue de A, et ensuite du point de vue de B, on obtient le ratio des parts de marché du réseau A et du réseau B. Cette méthode peut également être appliquée aux réseaux A et C, puis aux réseaux C et B, pour obtenir une autre estimation du ratio des parts de marché du réseau A et du réseau B. La Commission a appliqué cette approche à chacun des cinq grands réseaux et obtenu le tableau suivant aux fins de la communication des griefs(34).

>EMPLACEMENT TABLE>

(114) Si l'on applique cette méthode à un marché hypothétique comprenant MCI WorldCom, Sprint, Cable & Wireless, GTE et AT & T (ce qui correspond au marché en cause tel qu'il est défini par Sprint dans sa communication de 1998 relative à la concentration WorldCom/MCI), les résultats donneraient au groupe MCI WorldCom une part de marché de 46 à 51 %, avec [10-20]* % pour Sprint, ce qui ferait au total [56-71]* %.

(115) Pour calculer les parts de marché sur la base d'une population de 17 réseaux de niveau 1 potentiels, il a fallu faire des hypothèses quant à la taille des 12 autres réseaux. L'hypothèse générale, conforme aux chiffres relatifs aux recettes, était que le trafic passant par l'un de ces réseaux ne pouvait pas être plus important que le trafic passant par l'un des cinq grands réseaux. Étant donné que le ratio trafic total passant par le plus petit des cinq fournisseurs de connectivité internet de niveau 1/trafic MCI WorldCom est [...]*, le ratio total pour les douze autres réseaux ne peut pas être supérieur à douze fois [...]*.

(116) Sur cette base et si l'on suppose que ces douze réseaux sont de tailles différentes, le trafic total passant par ces réseaux devrait être équivalent au trafic de MCI WorldCom. Selon les estimations, le groupe MCI WorldCom détiendrait une part de marché de l'ordre de 32 à 36 % et Sprint de [5-15]* %, aucun concurrent ne détenant de part de marché supérieure à 10 à 15 %. Les parts de marché cumulées de Sprint et MCI WorldCom seraient alors de [37-51]* %. Ce calcul permet d'obtenir les parts de marché suivantes.

>EMPLACEMENT TABLE>

(117) Même si l'on prenait comme hypothèse que le volume total de trafic passant par ces douze autres réseaux représente le double de celui du groupe MCI WorldCom (ce qui - comme indiqué au considérant 115 - est impossible, car leur taille totale ne peut représenter plus de 1,8 fois celle de MCI WorldCom), la part de marché cumulée des parties resterait toujours d'environ 32 à 35 %, c'est-à-dire [jusqu'à]* trois fois supérieure à celle de leur plus proche concurrent.

b) Évaluation de la taille du marché et des parts de marché sur la base des recettes

(118) Sur la base de cette méthode, ce sont au total 17 fournisseurs de connectivité internet qui entreraient dans la catégorie des réseaux de niveau 1. En ce qui concerne la taille totale du marché, les informations disponibles n'étaient pas exhaustives et il a fallu estimer le chiffre d'affaires de deux sociétés pour lesquelles aucun chiffre précis n'était disponible(35). Les recettes de chacune des deux sociétés en question ont été estimées à 100 millions d'USD, ce que l'on pense être une surestimation considérable de leurs recettes effectives.

(119) Les parts de marché indiquées dans la communication des griefs ont été calculées à l'aide de deux méthodes différentes. La première tenait compte des recettes internet totales (y compris l'accès par lignes d'abonnés et par lignes spécialisées, l'hébergement, la colocalisation, etc.). Les résultats des calculs ainsi effectués sont les suivants; taille du marché: environ 6500 millions d'USD; parts de marché: [40-50]* % et [5-15]* % respectivement pour MCI WorldCom et Sprint. Un seul autre opérateur (AT & T) avait une part de marché de 10 à 15 % et deux autres des parts de l'ordre de 5 à 10 % (C & W et PSINet). Toutes ces recettes sont liées à la fourniture de connectivité internet [...]*. De même, la fourniture d'accès par lignes d'abonnés génère du trafic, accroît la clientèle et améliore ainsi la position d'une société sur le marché.

(120) La seconde méthode utilise les recettes émanant de la fourniture d'accès spécialisé. L'avantage de cette méthode est qu'elle utilise uniquement les recettes liées à la fourniture de connectivité, même si elle ne couvre pas l'ensemble de ces recettes. Toutefois, les personnes ayant répondu à l'enquête n'ont pas toujours été en mesure de ventiler leurs recettes internet, et cette approche exclut en outre les recettes issues de la fourniture d'accès par lignes d'abonnés. En tout état de cause, comme elle ne tient pas compte de l'ensemble des recettes internet considérées, cette méthode ne peut être utilisée que pour obtenir une indication supplémentaire des parts de marché. Pour les sociétés ne disposant pas de chiffres sur les recettes issues de la fourniture d'accès spécialisé, ceux-ci ont été fixés à un niveau égal à un tiers du total des recettes internet. Cela correspond au rapport entre ce type de recettes et les recettes internet totales des deux parties notifiantes ([...]* et [...]*). En supposant que ces recettes soient égales à la moitié des recettes internet totales, on obtiendrait une part de marché cumulée de [30-40]* %. Sur cette base, la part de MCI WorldCom serait de [15-25]* %, celle de Sprint d'environ [5-15]* %, ce qui conférerait au nouveau groupe environ [20- 40]* % du marché, les trois concurrents les plus proches possédant des parts se situant entre 10 et 15 %.

(121) Bien que les parties aient à plusieurs reprises souligné que, à leurs avis, les recettes constituaient le seul indicateur fiable pour les parts de marché dans ce domaine, de nombreux autres concurrents ont souligné les risques qu'il pouvait y avoir à se fier trop exclusivement aux seules données sur les recettes. Bien que les chiffres relatifs aux recettes provenant de l'accès de base à internet soient utilisés à chaque fois que cela est possible, les sociétés concernées ne sont soumises à aucune obligation ni en ce qui concerne les modalités de publication ni même en ce qui concerne la publication de données elle-même. Il est donc nécessaire de traiter les chiffres avec prudence.

(122) Les sociétés qui ont conclu des accords de peering avec jusqu'à quatre des principaux fournisseurs ne peuvent guère prétendre être considérées comme des réseaux de niveau 1, dans la mesure où le fait de ne pas avoir conclu d'accord de peering avec l'un des cinq grands réseaux indique une nette réduction de leur capacité à fournir de la connectivité internet. Toutefois, dans le but de réaliser une analyse de sensibilité, on a procédé à des estimations de parts de marché pour voir si l'ajout des opérateurs qui ne figuraient pas déjà sur la liste des intervenants sur le marché entraînerait une modification notable des chiffres. Sur cette base (qui, il faut le souligner, est extrêmement prudente), les parties notifiantes sont toujours créditées de parts de marché de [35-45]* % selon les recettes internet totales.

c) Conclusion sur les calculs de parts de marché

(123) Si l'on se fonde sur les parts de marché calculées en fonction des flux de trafic ainsi que des recettes, la part de marché de la nouvelle entité se situerait entre [37-51]* % sur la base du trafic échangé(36) et [30-65]* % sur la base des recettes. La part de marché du plus proche concurrent n'est jamais supérieure à 15 %.Quelle que soit la méthode utilisée, l'enquête de la Commission montre que la nouvelle entité aura une part de marché sur la base des recettes plus de trois fois supérieure à celles de ses principaux concurrents et une part de marché sur la base du trafic quatre fois supérieure à celles de ces derniers. Ces résultats resteraient exacts même si l'on partait de l'hypothèse - invraisemblable - selon laquelle la taille cumulée des douze réseaux de niveau 1 plus petits représenterait le double de celle de MCI WorldCom.

d) La réponse des parties

(124) Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties ont fait valoir que les estimations de parts de marché de la Commission n'étaient pas assez précises et que si l'on considérait la valeur inférieure de l'intervalle, leur part de marché ne soulevait pas de problèmes de concurrence. Tant les estimations de la Commission que celles des tiers démontreraient que la part de marché de MCI WorldCom a considérablement diminué depuis 1998. En outre, les parties ont contesté la mesure des recettes et du trafic en l'espèce, car les méthodes employées seraient susceptibles de surévaluer la part de marché de la nouvelle entité.

(125) Selon les informations dont disposait la Commission à la date de la communication des griefs, la part de marché de MCI WorldCom sur la base des recettes internet totales est de [40- 50 %]* sur un marché comptant 17 fournisseurs de connectivité de niveau 1(37). Ce chiffre doit être comparé à la part de marché de [35-45 %]* que WorldCom détenait en 1998. Bien que les hypothèses émises par la Commission dans la présente procédure soient plus favorables aux parties que celles sur lesquelles elle s'était fondée dans la décision WorldCom/MCI de 1998, on peut conclure des considérations qui précèdent que la part de marché de MCI WorldCom sur la base des recettes internet totales a augmenté depuis 1998.

(126) Or, après la transmission de la communication des griefs, les parties ont informé la Commission que 110 millions d'USD supplémentaires devaient être ajoutés aux recettes de MCI WorldCom tirées de la fourniture d'accès spécialisé en Amérique du Nord. Par conséquent, la part de marché de MCI WorldCom sur la base de ces recettes passerait de [20-30]* % (voir le considérant 120) à [25-35]* %, ce qui conférerait à la nouvelle entité une part de marché cumulée de [35-45]* %.

(127) De plus, la part de marché de MCI WorldCom sur la base des flux de trafic s'élève à [32-36]* % contre [30-40]* % en 1998, sachant que le marché comptait alors un plus petit nombre (16) de fournisseurs de niveau 1.

(128) Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties ont prétendu que la Commission avait commis des erreurs dans ses tableaux et que sa méthode de calcul des parts de marché sur la base des flux de trafic était imparfaite. La Commission a présenté à chacun des trois fournisseurs de dorsales cités au considérant 113 l'ensemble des calculs effectués sur la base de leurs informations et leur a demandé s'ils estimaient que leurs données avaient été reproduites d'une manière exacte et si la méthode utilisée était valable. Chacun de ces tiers a relevé quelques erreurs d'écriture, mais a aussi déclaré que ces données reflétaient fidèlement leurs mesures et a approuvé la méthode de la Commission. Lorsque cette dernière a recalculé les parts de marché en tenant compte de toutes les erreurs d'écriture portées à son attention par les parties notifiantes et les tiers, ses estimations de parts de marché n'ont que très légèrement varié (moins d'un demi-point de pourcentage).

Impact de la concentration sur la concurrence

a) Caractéristiques actuelles du marché

(129) Tout semble indiquer que MCI WorldCom possède actuellement une très forte position sur le marché, qui ne se traduit pas nécessairement par une position dominante individuelle sur le marché de la connectivité de niveau 1. Toutefois, il est clair que MCI WorldCom n'est pas loin d'atteindre une telle position. En 1997 déjà, la filiale de MCI WorldCom, UUNet, possédait une part de marché sensiblement supérieure à celle de ses concurrents, ainsi qu'en témoigne la décision qu'elle avait prise, début 1997, de tenter de mettre fin unilatéralement à plusieurs accords de peering (une tentative qui a finalement échoué).

(130) Depuis la fusion entre MCI et WorldCom, MCI WorldCom a été en mesure de garder sa position de leader, et la plupart de ses concurrents estiment qu'elle n'est pas loin de détenir une position dominante. Cela est confirmé par le fait que MCI WorldCom peut demander des prix sensiblement plus élevés (de 20 à 100 %) que ceux de n'importe lequel de ses concurrents, tout en restant le numéro 1 du marché [...]*(38) [...]*(39) [...]*(40). Néanmoins, aux fins de l'appréciation de la présente opération, la question de la position dominante individuelle de MCI WorldCom peut être laissée en suspens, dans la mesure où l'enquête a montré que la concentration aboutirait à la création d'une position dominante.

(131) Les parties ont contesté l'existence d'un écart de prix avec leurs concurrents en expliquant notamment qu'AT & T appliquait des prix analogues à ceux de MCI WorldCom. Toutefois, on constate des écarts de prix importants dès que l'on étend la comparaison à d'autres opérateurs.

(132) Les informations communiquées par les parties à la concentration montrent également qu'entre [40-80]* % du trafic des deux parties sont du trafic interne (c'est-à-dire du trafic qui n'est pas échangé avec des réseaux homologues). Aucun autre concurrent n'a un pourcentage de trafic interne supérieur à 30 à 35 %. En outre, même les trois principaux concurrents des parties à la concentration échangent plus de 15 % de leur trafic avec la nouvelle entité. Cela montre que les parties à la concentration sont beaucoup plus indépendantes que leurs concurrents et que ceux-ci dépendent actuellement d'elles dans une mesure déjà importante. Cela montre également que la concentration éliminera du marché l'un des plus puissants concurrents de MCI WorldCom. En outre, ces chiffres soulignent l'importance qu'il y a à disposer d'une clientèle.

(133) Cela est confirmé par les chiffres fournis par les parties à propos de leur pourcentage de clients pratiquant le multihébergement [...]*.

(134) La puissance de MCI WorldCom et, à un moindre degré, de Sprint est en contraste avec l'évolution de Cable & Wireless. Ce réseau est la conséquence de la cession du réseau internet de MCI en 1998. La part relative du trafic interne de ce réseau n'a cessé de diminuer depuis la cession et sa position sur le marché s'est détériorée. Cette détérioration a sans doute de multiples causes, mais l'une d'entre elles est que le marché a eu l'impression que le transfert n'était pas complet et que la qualité de l'offre avait baissé.

(135) Une comparaison des quantités de trafic interne parmi les réseaux de niveau 1 met également en évidence le déséquilibre en ce qui concerne la taille et la dépendance qui existe d'ores et déjà parmi les opérateurs présents sur le marché. Les autres réseaux achètent une partie beaucoup plus faible de leur connectivité à leurs clients et dépendent donc beaucoup plus que MCI WorldCom et Sprint de leurs accords de peering (notamment ceux passés avec ces deux sociétés) pour pouvoir offrir une connectivité universelle.

(136) Les personnes ayant répondu à l'enquête de la Commission admettent généralement que le grand réseau de la nouvelle entité, ainsi que son accès au plus grand nombre d'hôtes et de clients, et aussi au plus grand nombre de sites internet, constitue un élément indispensable pour leurs propres performances, dans la mesure où leurs clients réclament une connectivité avec le réseau de la nouvelle entité. Étant donné que celle-ci disposerait du plus grand nombre de clients, c'est également elle qui pourrait fournir une connectivité à la partie la plus importante d'internet [...]*(41) [...]*(42).

(137) Il a été dit que posséder ses propres installations n'était pas important et qu'il existait énormément de capacités susceptibles d'être louées. Or, cela est en contradiction avec les propres prévisions de MCI WorldCom(43) [...]*(44). L'enquête de la Commission a également montré que bien que le coût du transit ait sensiblement baissé, notamment en Europe, au cours de ces dernières années, il n'a pas toujours baissé dans la même proportion que le coût de la location des infrastructures. La connectivité internet a donc un coût, qui est plus important pour les grands réseaux, bien implantés, qui possèdent le plus grand nombre de routes. Afin d'échapper au coût de la location de capacité ou du transit, les plus importants FSI européens ont aujourd'hui créé leurs propres circuits vers les États-Unis, afin de réduire le coût du transit. Toutefois, ils continuent à acheter du transit auprès des fournisseurs de connectivité de niveau 1 aux États-Unis.

(138) Les parties font également valoir que le fait de posséder un grand réseau ne constitue pas une garantie de qualité. Cette affirmation est démentie par les résultats de l'enquête de la Commission, ainsi que par les informations qui lui ont été fournies par les parties [...]*(45). Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'importance des accords de peering privés est confirmée par la demande de ce type de peering émanant des grandes sociétés(46), dans la mesure où ceux-ci améliorent la fiabilité de l'interconnexion. Étant donné que seuls les plus grands fournisseurs de connectivité de niveau 1 ont passé des accords de peering privés les uns avec les autres, la taille du réseau et son architecture influent sur la fiabilité [...]*(47). L'enquête de la Commission a également montré que la qualité du service déjà offert actuellement par UUnet, par l'intermédiaire de son contrat de garantie de service (Service Level Agreement: SLA), garantit des délais d'attente très inférieurs à ceux de tous les autres concurrents. De ce fait, outre sa clientèle, la nouvelle entité aurait également l'un des plus grands réseaux, couvrant au moins [...]* pays, et un niveau de service qu'aucun de ses concurrents ne peut actuellement égaler.

b) Conséquences de la croissance de l'internet depuis 1998

(139) L'internet a connu une croissance sans précédent au cours des dernières années. D'après les parties, cette croissance rapide a entraîné l'entrée de nombreux nouveaux opérateurs sur le marché, cet accroissement de l'offre faisant peser des contraintes concurrentielles sur les fournisseurs de connectivité. En outre, l'utilisation accrue du multihébergement et des services de fourniture de contenu aurait enlevé du trafic aux réseaux de niveau 1, au profit de réseaux plus petits. Plus important encore, il y aurait eu une modification des flux de trafic, qui seraient moins centrés sur les États-Unis et deviendraient plus régionaux, notamment européens, en raison de l'augmentation du nombre des réseaux et des contenus locaux dans d'autres parties du monde.

(140) Néanmoins, ainsi que l'a reconnu le président-directeur général adjoint de MCI WorldCom, John Sidgmore, il est probable que les fournisseurs de connectivité ne seront pas en mesure d'augmenter la capacité pour répondre à l'accroissement de la demande. Étant donné que plus de personnes sont connectées à l'internet, avec des ordinateurs plus rapides et des connexions locales à grande vitesse, elles envoient plus de données vers les dorsales. L'utilisation de plus en plus grande d'applications multimédias, par exemple, contribue également à l'augmentation du trafic. "UUNet voit la demande devenir de 8 à 10 fois plus élevée, ce qui fait que nous devons augmenter la capacité de 800 à 1 000 % uniquement pour faire face à l'utilisation courante". Il a reconnu qu'il craignait de ne pas avoir suffisamment d'espace réseau pour faire face à l'accroissement de la demande(48).

(141) Toutefois, contrairement à ce que prétendent les parties, la croissance rapide du trafic internet ne les a pas empêchées de conserver des parts de marché importantes sur le marché de la fourniture de connectivité de niveau 1 ou universelle. En particulier, contrairement à ce qu'affirment les parties à la concentration, cela n'a pas entraîné une diminution de la concentration des fournisseurs de réseaux de niveau 1. Bien que de nombreux nouveaux fournisseurs d'accès à internet aient pénétré sur le marché, l'enquête de la Commission a montré que le nombre des fournisseurs de connectivité de niveau 1 (universelle) restait limité, en raison de l'existence de fortes barrières à l'entrée sur ce marché. Il n'est possible d'obtenir gratuitement une connectivité universelle que si le réseau concerné possède une clientèle et une couverture géographique suffisantes. Or, comme les réseaux de niveau 1 croissent en même temps que l'internet, il devient de plus en plus difficile, pour des tiers, de parvenir à une taille leur permettant de passer des accords de peering avec ces réseaux de niveau 1.

(142) La majorité des nouveaux fournisseurs d'accès à internet qui ont pénétré sur le marché sont de petits fournisseurs d'accès locaux ou régionaux, qui achètent du transit pour de la connectivité universelle aux fournisseurs de niveau 1. En outre, les fournisseurs de connectivité de niveau 1 qui ont pénétré sur le marché (Cable & Wireless et AT & T) l'ont fait en rachetant des réseaux existants (Cable & Wireless a racheté le secteur internet de MCI après la fusion entre MCI et WorldCom, et AT & T a racheté le secteur "réseau mondial" d'IBM), mais ils n'ont pas été en mesure d'enlever beaucoup de parts de marché aux parties à la concentration.

(143) Bien que les parties prétendent que le marché est désormais moins axé sur les États- Unis et qu'il y a eu une forte augmentation des contenus européens, elles ont elles-mêmes constaté que les 50 plus importants sites internet dans le monde étaient basés aux États-Unis. Cela est d'ailleurs corroboré par l'enquête de la Commission, qui révèle que, en dépit d'un accroissement des contenus européens, il y a une forte demande des clients européens pour un accès aux sites internet américains. Malgré une diminution du trafic allant de l'Union européenne vers les États-Unis, il n'en reste pas moins que de 50 à 80 % du trafic partant de l'Union européenne va vers les États-Unis. L'enquête de la Commission a également clairement montré que pour que les fournisseurs d'accès à internet et de réseaux européens puissent fournir de tels services à leurs clients, contrairement à ce que prétendent les parties, même les plus gros fournisseurs européens dépendent toujours du transit fourni par un ou plusieurs des fournisseurs de connectivité de niveau 1, pour les services qu'ils offrent à leurs clients.

(144) L'enquête de la Commission a également montré que le recours accru au multihébergement et aux services de contenus répartis n'a pas eu d'impact réel sur les parts de marché des fournisseurs de connectivité de niveau 1, et ce parce que tous les nouveaux arrivants sur le marché et tous les utilisateurs de ces techniques, qu'ils soient basés en Europe ou aux États-Unis, ont besoin d'acheter de la connectivité aux fournisseurs de niveau 1.

c) Caractéristiques du marché après la concentration

(145) La concentration entre MCI WorldCom et Sprint aboutira à la création d'un fournisseur de réseau de niveau 1 qui, uniquement de par sa taille, pourrait se comporter dans une large mesure indépendamment de ses concurrents et de ses clients. Compte tenu de la taille mondiale du marché, cela aura des répercussions sur les consommateurs européens, comme sur tous les autres consommateurs.

(146) La concentration aboutira à la création d'un fournisseur de connectivité internet mondial d'un niveau supérieur à tout ce que l'on connaît actuellement. Il bénéficiera d'une position forte de par sa nature même, en raison de sa taille absolue et relative, comparée à celle de ses concurrents. Compte tenu de la taille de la nouvelle entité, celle-ci sera en mesure de contrôler les prix de ses concurrents et de ses clients. Elle pourra également contrôler l'évolution technique. En outre, elle pourra perpétuer ce comportement, du fait qu'elle possède la capacité nécessaire pour discipliner le marché, notamment en menaçant de procéder à une détérioration sélective de l'offre de connectivité internet de ses concurrents (voir considérants 152 à 164) et aussi parce qu'elle peut fondamentalement déterminer et accepter toutes les nouveautés techniques permettant des services internet avancés (voir considérants 147 à 151).

1. Capacité de contrôle de l'évolution technique

(147) Le réseau de la nouvelle entité lui permettra de fournir des services d'un niveau de qualité tel que ses concurrents devront éventuellement lui demander l'autorisation pour les reproduire. Cela sera de plus en plus le cas pour les nouveaux services internet avancés. Afin d'envoyer des données vocales par IP ou des images vidéo sur l'internet, les données transmises doivent être comprimées avant de pouvoir être transmises sur un réseau internet(49).

(148) La technique de la commutation par paquets(50) permet d'envoyer les données sur la route la plus efficace parmi celles qui sont disponibles (mais pas nécessairement sur la même route). Afin de proposer des services de bonne qualité, il est nécessaire que toutes les données soient rassemblées dans le bon ordre et au moment voulu. S'il n'existe pas de moyens convenus de donner une priorité à certains types de données passant sur l'internet, les images ou les sons risquent de n'être transmis à l'ordinateur de l'utilisateur qu'une fois que tous les paquets seront arrivés (ce qui entraîne des retards) ou de n'être transmis que sous une forme incomplète.

(149) Afin de pouvoir fournir des services internet avancés de qualité, par exemple la transmission de données vocales sur IP, la vidéo conférence et la banque par internet, il est essentiel que la connexion soit fiable. Pour cela, les fournisseurs de connectivité internet doivent se mettre d'accord sur une norme (un protocole) qui garantira la qualité de ces services lorsqu'ils passeront à travers des réseaux différents. Actuellement, il n'existe aucun protocole pour de tels services. La nouvelle entité se trouverait donc dans une situation idéale pour mettre au point des normes pour ces services, qui seraient proposés soit uniquement sur son réseau, ou avec une qualité bien meilleure sur son réseau, à moins que ses concurrents n'acceptent certaines conditions. En raison de la taille absolue et relative de la nouvelle entité, celle-ci serait en mesure de dicter les conditions auxquelles ses futures normes de qualité devront répondre. Cela est d'ailleurs confirmé par les parties elles-mêmes [...]*(51).

(150) Une société réunissant MCI WorldCom et Sprint aurait plus de [40-80]* % de son trafic qui demeurerait en interne. Tous les autres réseaux ont un trafic interne qui ne dépasse pas les 32 %. Les autres fournisseurs de connectivité internet de niveau 1 échangeront environ 20 % de leur trafic total avec la nouvelle entité. Le trafic échangé avec les autres fournisseurs de niveau 1 représente moins de [0-5]* % du trafic total de la nouvelle entité.

(151) Les plus importants des nouveaux services internet, tels que la transmission de données vocales sur IP, la vidéo conférence en direct et les possibilités de commerce électronique de pointe ne pourront être viables que si des niveaux appropriés de qualité de service peuvent être obtenus sur l'intégralité des réseaux par lesquels ces services passent. Cela est possible avec la qualité de service qui peut être obtenue en maintenant tout le trafic en interne, c'est-à- dire sur un seul réseau [...]*(52). En outre, lorsque le trafic passe par un point de peering, il y a un risque de perte des "paquets" et de retard, susceptible de rendre impossible la fourniture de tels services. Le pourcentage élevé de trafic en "interne" qui sera celui de la nouvelle entité l'incitera encore plus à réduire la qualité de l'interconnexion et à refuser d'accepter des normes de qualité de service interréseaux, pour renforcer l'attrait de son propre réseau.

2. Capacité à augmenter les prix

(152) Étant donné la taille et l'importance de son trafic interne, la nouvelle entité sera également en mesure d'augmenter le prix relatif de ses connexions clients. Aucun concurrent n'entravera l'action des parties, dans la mesure où il serait alors exposé à la menace d'une action de détérioration sélective. La nouvelle entité aura toute possibilité de contrôler la qualité de ses propres connexions ainsi que celle des connexions de ses concurrents et de ses clients, et ce parce que, par rapport aux autres fournisseurs de connectivité internet de niveau 1, elle ne dépendra que dans une mesure limitée de ses concurrents pour la fourniture de connectivité.

3. Possibilité de discipliner le marché

(153) On pourrait dire que puisque "tout le monde a besoin d'une connectivité mondiale", et puisque la nouvelle entité sera, elle aussi, dépendante de ses concurrents à cet égard, elle ne pourra pas s'autoriser des comportements anticoncurrentiels. Toutefois, à la suite de la concentration, la nouvelle entité sera en mesure d'imposer une discipline au marché par la seule menace d'une dégradation sélective de la connectivité de ses concurrents. Cela lui permettra de contrôler les concurrents tant réels que potentiels, ainsi que les clients, sur ce marché.

(154) Un réseau non dominant aurait trop besoin de ses concurrents et de leur clientèle pour prendre le risque de voir la qualité de son offre de connectivité se détériorer. Une détérioration de l'interface de peering entre deux concurrents de taille égale serait dommageable pour les deux fournisseurs de connectivité, puisqu'ils verraient la qualité de leur offre se détériorer dans la mesure où leur connectivité dépend de l'autre réseau concerné. En réaction à une telle action de détérioration, les clients des deux réseaux se tourneraient probablement vers d'autres fournisseurs. Mais lorsqu'il y a déséquilibre de taille entre les deux réseaux, le plus grand dépend moins du plus petit pour obtenir de la connectivité, que l'inverse. Une détérioration de la qualité aurait donc des répercussions plus importantes pour le petit réseau que pour le grand, dans la mesure où le premier serait plus dépendant du réseau dominant pour l'obtention d'une connectivité mondiale.

(155) Toutefois, à moins que la détérioration ne soit tellement faible que les clients du grand réseau ne la remarquent pas, ou qu'elle soit contrebalancée par les avantages particuliers qu'offre ce réseau (tels que sa taille absolue et la mesure dans laquelle il fournit de la connectivité provenant de ses clients), le grand réseau verrait aussi son offre de connectivité devenir moins concurrentielle que celle des autres réseaux sur lesquels il n'y aurait aucune détérioration. Avant la concentration, il n'est pas certain que ni MCI WorldCom ni Sprint n'aient atteint le niveau de déséquilibre de taille de leur réseau internet, par rapport à la taille des autres réseaux, qui leur donnerait la possibilité de détériorer, à leur avantage, les connexions de peering établies avec leurs concurrents. Toutefois, la fusion des activités internet de MCI WorldCom et de Sprint donnera à la nouvelle entité un réseau d'une taille absolue ([30-55]* % de l'internet et plus de [40-80]* % du trafic restant en interne) et relative ([plusieurs]* fois plus importante que celle du numéro deux sur le marché) telle qu'elle sera en mesure de se comporter indépendamment des sociétés avec lesquelles elle a conclu des accords de peering, en détériorant sélectivement la qualité de la connectivité pour ces dernières. La seule menace d'une telle détérioration permettra à la nouvelle entité de contrôler à la fois l'évolution technologique sur le marché et les prix de ses concurrents.

(156) Si la nouvelle entité décidait de réduire la capacité aux points de peering privés (qui sont les principaux points d'interconnexion entre les fournisseurs de connectivité de niveau 1), ou plutôt de ne pas augmenter la capacité en fonction de la demande, la détérioration ne serait pas instantanée pour les autres fournisseurs de niveau 1 ou pour les clients de la nouvelle entité, mais elle aurait en revanche des conséquences immédiates pour le concurrent visé et pour ses clients. D'après les tiers interrogés, les concurrents et les clients, ainsi que d'après des documents internes des parties, les clients exigent des hauts niveaux de qualité. La réaction des clients des réseaux dont le service aurait été détérioré serait donc de trouver une autre solution pour remplacer la connectivité ainsi détériorée, en ayant recours au multihébergement et/ou en quittant le réseau détérioré.

(157) L'enquête de la Commission a tout d'abord montré que le multihébergement était utilisé comme moyen d'appui et de redondance, ainsi que pour garantir une connectivité mondiale. Elle a également montré qu'un accès direct aux clients améliorait la qualité du service (c'est-à-dire moins de délai d'attente et moins de risque de perte de paquets). Voilà pourquoi les clients de la nouvelle entité n'auraient aucun motif économique de confier la plus grande partie de leur trafic au réseau dont le service serait détérioré, alors qu'ils pourraient continuer à être clients de la nouvelle entité, qui leur fournit une connectivité directe et un accès direct à une large clientèle. Cet argument vaut également pour les clients du concurrent de niveau 1 dont le service se serait détérioré. S'ils comparaient la qualité du service offert par la nouvelle entité à ses concurrents, ces clients trouveraient également qu'il serait plus avantageux pour eux de retirer la plus grande partie de leur trafic du réseau dont le service se serait détérioré pour le confier à la nouvelle entité. En outre, du seul fait de la possibilité (par la menace) qu'aurait la nouvelle entité de détériorer également les réseaux d'autres concurrents, les clients du réseau dont le service est détérioré choisiraient très probablement la nouvelle entité, plutôt que d'autres concurrents, dans la mesure où celle-ci disposerait du réseau de loin le plus important et serait également en mesure de garantir un accès direct au plus grand nombre de clients. Néanmoins, même avec un multihébergement substantiel, l'action de détérioration entraînerait un déplacement du trafic des autres réseaux de niveau 1 vers le réseau dominant, qui accroîtrait l'avantage de celui-ci par rapport aux autres fournisseurs de connectivité de niveau 1, en termes de clients servis. Tout cela aboutirait fort probablement à une situation dans laquelle l'ancien concurrent de niveau 1 deviendrait un client de la nouvelle entité, dans la mesure où il ne pourrait désormais plus viser d'accords de peering.

(158) En outre, si le concurrent souhaitait se lancer dans une politique de peering et de transit de grande envergure, il devrait supporter une charge supplémentaire dans la mesure où il serait contraint de conclure de nouveaux contrats ainsi que des contrats complémentaires. Cela lui coûterait du temps et de l'argent. Plus important encore, la qualité du service rendu en matière de connectivité baisserait encore plus, étant donné que le trafic ne serait plus dirigé directement vers le client de la nouvelle entité, mais devrait passer à travers d'autres réseaux. Contrairement à ce qu'affirment les parties, le fait de devoir effectuer un grand nombre de sauts affecte la qualité des performances et provoque des retards (les délais d'attente augmentent avec le nombre de sauts) [...]*(53) [...]*. Malgré cette affirmation de Sprint, les parties ont contesté dans leur réponse l'existence d'un lien entre le nombre de sauts et la qualité du service proposé. Toutefois, lors de l'audition, des tiers ont fourni des éléments de preuve contredisant l'argument des parties. De ce fait, les clients du réseau détérioré trouveraient le grand réseau plus attirant, et le réseau détérioré aurait plus de difficultés à regagner la confiance des clients ainsi perdus.

(159) De plus, la nouvelle entité pourrait détériorer la connectivité vers ses concurrents (autres fournisseurs de connectivité de niveau 1) si ceux-ci refusaient de la rémunérer (par le biais d'un peering ou transit payants). Le concurrent concerné devrait alors répercuter ses nouveaux coûts sur ses clients, et ceux-ci sur leurs propres clients. Les clients du concurrent concerné réagiraient à cette augmentation des coûts de connexion en changeant de fournisseur de connectivité ou en transférant la plus grande partie de leur trafic vers un autre fournisseur de réseau de niveau 1, afin de réduire leurs coûts. Compte tenu de la taille du réseau de la nouvelle entité (et de la proportion de ses clients en interne), celle-ci constituerait le choix le meilleur et le plus naturel pour ces clients.

(160) Dans une situation comme celle qui vient d'être décrite, les solutions dont pourrait disposer le concurrent visé seraient aussi limitées que si la détérioration dont il serait la victime prenait la forme d'une diminution de capacité. Ainsi que nous l'avons déjà montré au considérant 160, si la nouvelle entité détériorait de façon sélective la connectivité proposée à un concurrent, c'est vers elle que les clients du concurrent visé se tourneraient le plus naturellement, du fait qu'elle possède déjà un accès direct à une clientèle beaucoup plus vaste qu'aucun de ses concurrents. Étant donné que les clients exigent une connectivité mondiale et un service de qualité, la réaction des nouveaux clients serait la même. Eux aussi privilégieraient la nouvelle entité par rapport aux autres concurrents, pour les mêmes raisons.

(161) La seule possibilité de rétorsion qu'aurait le fournisseur de niveau 1 dont le service se trouverait ainsi détérioré serait de persuader les clients de la nouvelle entité hébergés sur un seul serveur de passer sur son réseau, probablement en ayant recours au multihébergement, ou de se lancer dans une nouvelle politique de peering et de transit de grande envergure afin de s'assurer le maintien de sa clientèle. Dans le cas contraire, il est probable que ces clients (clients en gros ou grosses sociétés) décideraient de confier leur trafic à la nouvelle entité, ou du moins d'avoir recours au multihébergement, avec celle-ci.

(162) Même si la poursuite d'une stratégie de détérioration portait atteinte à la qualité du service tant de la nouvelle entité que du concurrent visé, ce dernier serait touché dans une plus large mesure, du fait que ses clients se verraient privés de connectivité à une plus grande portion de l'internet que les clients de la nouvelle entité. Le pourcentage de trafic affecté par une telle stratégie serait plus élevé pour le petit réseau (la nouvelle entité aurait [40-80]* % de trafic en interne, alors que ce chiffre serait au maximum de 32 % pour ses concurrents. Les petits réseaux sont donc proportionnellement plus dépendants de la nouvelle entité que l'inverse).

(163) En outre, si les clients du réseau victime de l'action de détérioration décidaient de ne pas le quitter, ils seraient plus incités à pratiquer le multihébergement que les clients de la nouvelle entité, dans la mesure où le réseau ainsi détérioré ne serait plus à même de fournir une connectivité mondiale de même qualité. Le réseau détérioré étant un réseau plus petit, ses clients seraient incités à pratiquer le multihébergement avec un réseau plus grand (c'est-à-dire la nouvelle entité), puisque celui-ci pourrait garantir une connexion directe de bonne qualité au plus grand nombre de clients. Les effets de la détérioration se verraient ainsi accentués du fait que les clients de la nouvelle entité pourraient beaucoup plus facilement remplacer des services/contenus en interne par des services/contenus en externe que ne pourraient le faire les clients de l'autre réseau. La conséquence en serait à nouveau que la nouvelle entité gagnerait des clients et du trafic, alors que le concurrent visé en perdrait.

(164) En supposant même que les clients de la nouvelle entité et ceux du réseau détérioré soient les uns et les autres susceptibles d'avoir recours au multihébergement en réponse à l'action de détérioration, il est fort probable que c'est néanmoins la nouvelle entité qui en tirerait le plus de profit et qui réussirait à consolider ainsi sa position dominante. Même avec un multihébergement substantiel, la détérioration entraînerait un déplacement du trafic des autres fournisseurs de connectivité de niveau 1 vers le réseau de la nouvelle entité, renforçant ainsi l'avantage dont celle-ci bénéficie par rapport aux autres concurrents en raison du nombre de clients directement connectés à ses réseaux. Cela renforcerait la puissance de marché de la nouvelle entité et lui procurerait des recettes supplémentaires. On peut donc en conclure que le multihébergement ne constitue pas un élément susceptible de dissuader la nouvelle entité de pratiquer des actions de détérioration des réseaux.

4. Concurrence potentielle

(165) Les parties ont déclaré à la Federal Communications Commission(54) que la concentration n'aura pas de répercussions sur la forte concurrence qui s'exerce dans le secteur des fournisseurs de services sur dorsales pour l'internet, parce que les barrières à l'expansion et à l'entrée sont très faibles et échappent au contrôle des parties à la concentration. Toutefois, bien que plusieurs nouvelles sociétés aient commencé à offrir de la connectivité internet et qu'il ait eu une forte augmentation de capacité dans ce secteur, il n'y a toujours pas eu de nouvel arrivant de taille sur le marché des réseaux de niveau 1. Tout changement d'identité des principaux opérateurs (tels que l'entrée de Qwest, Level 3, Global Crossing, et d'AT & T) résulte d'un changement de l'actionnariat dans des réseaux existants, et non de la construction de nouveaux réseaux. Toutefois, ces changements en termes de contrôle ne modifient pas le niveau de concentration sur le marché.

(166) Compte tenu du fait que tout nouvel arrivant potentiel, s'il souhaitait passer des accords de peering avec la nouvelle entité, devrait avoir un réseau d'une taille comparable au sien, il lui faudrait s'assurer une très grande partie de la future croissance du trafic internet pour atteindre les seuils requis. Pour pouvoir obtenir des clients, il devrait toujours s'appuyer, dans un premier temps, sur la nouvelle entité. Même si un nouvel arrivant devait se constituer une clientèle importante, la nouvelle entité n'aurait qu'à adopter, vis-à-vis de ce concurrent potentiel, la même attitude qu'envers un concurrent réel. Elle pourrait alors empêcher ce concurrent potentiel de parvenir à la taille requise pour pouvoir passer avec elle des accords de peering, et ce en le menaçant d'une détérioration de la connectivité, ou elle pourrait l'empêcher de devenir un fournisseur de niveau 1 en fixant les prix du transit à un niveau suffisamment élevé pour empêcher ce concurrent potentiel d'obtenir des parts de marché suffisantes. Cela est possible du fait que les réseaux plus petits (de niveau 1 ou autres) dépendent de la nouvelle entité pour la connectivité mondiale.

(167) Même si des concurrents potentiels souhaitaient réunir leurs forces, ils ne seraient pas mieux placés que n'importe quel autre concurrent ou client, dans la mesure où ils ne pourraient pas se passer de la connectivité fournie par les actuels fournisseurs de niveau 1, s'ils veulent que leurs clients n'aillent pas chez un autre fournisseur de connectivité. Les concurrents potentiels seraient tous confrontés à ce problème, qu'ils soient européens ou qu'ils viennent d'une autre partie du monde. En outre, tout nouvel arrivant potentiel serait en concurrence avec les fournisseurs de connectivité de niveau 1 déjà en place, qui s'efforceront eux aussi d'attirer de nouveaux clients afin de conserver leur position. Les concurrents potentiels seraient ainsi confrontés à une concurrence en provenance, d'une part, des fournisseurs de connectivité de niveau 1 qui sont en concurrence avec la nouvelle entité et doivent conserver leur clientèle pour garantir que leurs accords de peering avec la nouvelle entité ne sont pas mis en péril et, d'autre part, de la nouvelle entité elle-même, qui n'aurait aucune raison de permettre à un concurrent potentiel de menacer sa position dominante.

5. Réaction des clients

(168) Compte tenu de l'importance qu'il y a à être connecté aux réseaux de la nouvelle entité, les clients de celle-ci ne seraient pas, eux non plus, à même de prendre des mesures de rétorsion en cas d'augmentation des prix ou de détérioration de la connectivité. Ainsi qu'il a été dit au considérant 130, les clients de MCI WorldCom acceptent d'ores et déjà des prix supérieurs de plus de 20 à ceux de ses concurrents, et ce parce que cette société possède une vaste clientèle, directe et indirecte, et propose à ses clients une garantie de qualité de service (garantie de délai d'attente).

(169) Ainsi que l'a déclaré un FSI européen, il ne pourrait pas faire autrement que de quitter ses actuels fournisseurs de transit de niveau 1 pour acheter du transit auprès de la nouvelle entité, ou au moins entrer dans une situation de multihébergement avec celle-ci. Ce sont les propres clients des petits FSI qui imposeraient à ceux-ci d'avoir un lien direct avec les clients de la nouvelle entité pour accepter de leur acheter des services. De ce fait, pour autant qu'ils n'achètent pas déjà la plus grande partie de leur transit auprès de l'une des parties à la concentration, l'enquête de la Commission a montré que les clients établiraient une connexion directe avec la nouvelle entité, en raison de sa vaste clientèle, directe et indirecte.

(170) Si la nouvelle entité décidait d'augmenter ses prix, les clients pourraient tenter de contrer une telle stratégie en allant vers d'autres réseaux, afin de contrebalancer le pouvoir de la nouvelle entité. Toutefois, à moins que les clients ne puissent agir ensemble (et rien n'indique que la clientèle soit suffisamment concentrée pour que cela soit possible), aucun client individuel ne voudra prendre le risque de changer de fournisseur pour obtenir éventuellement un service de moindre qualité, sans avoir aucune assurance qu'un nombre suffisant d'autres clients feront de même. Le risque d'une détérioration de la connectivité avec la nouvelle entité serait trop grand. En outre, les clients connectés à la nouvelle entité ne migreraient pas facilement vers un plus petit réseau, car ils continueraient à s'appuyer sur la nouvelle entité pour obtenir une connectivité intégrale.

(171) D'après les parties, l'évolution des services de contenus répartis (notamment les sites miroirs et les mémoires caches) augmente la puissance de négociation de clients tels que les sites internet et les fournisseurs de contenus vis-à-vis des fournisseurs de connectivité. Les parties prétendent que les premiers pourraient facilement changer de fournisseurs ou faire passer une partie du trafic sur leurs propres réseaux.

(172) Le but des services de contenus répartis est d'accélérer la vitesse de fourniture des contenus aux clients en limitant la quantité du trafic échangé sur internet. Toutefois, ils n'éliminent pas la nécessité, pour les fournisseurs de contenus, d'avoir accès à autant de clients que possible. Il est donc difficile de comprendre quel impact un recours accru à ce type de services pourrait avoir sur le choix d'un fournisseur de connectivité. Si ce qui compte, c'est la qualité, alors les clients continueront à avoir tout intérêt à choisir le réseau de la nouvelle entité, qui leur donnerait accès à une partie de l'internet sans commune mesure avec les possibilités offertes par les concurrents. L'enquête de la Commission a également clairement montré que les fournisseurs de contenus internet préfèrent travailler avec un seul fournisseur qui peut leur procurer des possibilités de colocalisation et d'hébergement sur une base mondiale, dans différents centres de données. Cela simplifie la gestion, la facturation et les contrats avec les clients. Étant donné que la nouvelle entité aura la plus grande clientèle, les fournisseurs de contenus utilisant des sites miroirs ou d'autres techniques auraient, tout autant que n'importe quel autre client, besoin d'avoir accès à cette clientèle. Une fois cela réalisé, la situation en matière de concurrence sera la même que celle qui prévalait dans le contexte du multihébergement.

(173) La concentration créera donc un "effet boule de neige", parce que la nouvelle entité sera mieux placée que n'importe quel autre concurrent pour capter la croissance future grâce à de nouveaux clients, en raison de l'attrait, pour ceux-ci, d'une connexion directe avec le réseau le plus important et avec sa clientèle, et en raison du manque d'attrait relatif de l'offre des concurrents, du fait de la menace de déconnexion ou de détérioration du peering à laquelle les concurrents de la nouvelle entité seront soumis en permanence. De ce fait, la concentration donnera à la nouvelle entité la possibilité d'accroître encore sa part de marché.

(174) Un recours accru au multihébergement et aux services de fourniture de contenus ne modifiera pas cette situation. En dépit du recours accru à ces techniques, tous les opérateurs, actuels et futurs, auraient tout intérêt à se connecter, directement ou indirectement, avec la nouvelle entité, pour s'assurer une connectivité mondiale. En raison de la puissance de marché accrue dont bénéficiera la nouvelle entité, du fait de l'importance de sa clientèle et de la taille de son réseau à couverture mondiale, aucun concurrent ou client réel ou potentiel ne pourra engager de mesures de rétorsion à son encontre.

La réponse des parties

(175) Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties font valoir que lorsqu'elle a conclu à la position dominante de la nouvelle entité, la Commission n'a pas analysé, comme il convient, d'autres éléments que les parts de marché.

(176) En effet, d'après les parties, la Commission n'a pas pris en compte a) la brièveté du délai nécessaire pour déployer une dorsale internet et entrer sur le marché ainsi que les coûts irrécupérables liés au fonctionnement/construction de cette dorsale; b) le fait que les fournisseurs de connectivité de niveau 1 sont des entreprises complexes qui ont accès aux informations du marché et n'accepteront vraisemblablement aucune détérioration, de quelque niveau qu'elle soit; c) le rôle fondamental que joue l'innovation pour ne pas être distancé par une demande sans cesse croissante de services de grande qualité et, d) le fait que le marché en cause se caractérise par la volatilité des parts de marché.

(177) Il convient de souligner que la réponse des parties va à contre-courant de toutes les déclarations faites par Sprint au cours de l'examen de l'opération de concentration WorldCom/MCI, où celle-ci affirmait que la réunion de WorldCom et MCI donnerait naissance à une entité qui, en raison de sa taille absolue et relative, serait en mesure de détériorer les connexions de peering de ses concurrents (y compris de Sprint).

Barrières à l'entrée

(178) Il a été expliqué au considérant 166 que les barrières à l'entrée sur le marché en cause identifié étaient élevées. L'enquête de la Commission a montré que c'est peut-être le fournisseur de niveau 1 en place qui est le mieux placé pour capter la croissance future. MCI WorldCom a pu, en raison de la taille de son réseau, de sa clientèle et de son flux de trafic, conserver sa place de numéro un malgré la croissance accrue enregistrée sur le marché ces deux dernières années. Pour qu'un nouveau venu puisse contester cette position, il doit non seulement disposer d'un vaste réseau, mais aussi d'une clientèle nombreuse.Sans une clientèle et des flux de trafic importants, un nouvel entrant serait incapable de conclure des accords de peering avec des fournisseurs de connectivité de niveau 1.

(179) C'est la raison pour laquelle les parties affirment dans leur réponse à la communication des griefs que les accords de peering ne constituent pas une barrière à l'entrée. Ce raisonnement se fonde toutefois sur l'hypothèse selon laquelle l'internet n'est pas hiérarchisé, hypothèse que contredisent les affirmations de Sprint et les conclusions de la Commission dans la présente procédure. Les fournisseurs de connectivité de niveau 1 ne peuvent maintenir leur position qu'en s'assurant qu'ils continuent à avoir des accords de peering avec la totalité des autres réseaux de niveau 1, faute de quoi ils seront rétrogradés dans la catégorie de niveau 2. En tout état de cause, comme l'a reconnu Sprint dans une communication à la Commission [...]*(55).

Réaction des clients

(180) Les parties assurent qu'une politique de détérioration serait contre-productive sur l'internet, où les fournisseurs de services de connectivité internet rivalisent pour fournir des connexions de grande qualité. Selon elles, une stratégie de détérioration porterait autant préjudice aux clients de la nouvelle entité qu'à ceux des réseaux détériorés et la durée importante requise pour mettre pleinement en œuvre cette stratégie ferait perdre des parts de marché à la nouvelle entité. Les parties considèrent également que cette détérioration serait facile à déceler.

(181) Les parties ont aussi affirmé que si elle devait se lancer dans une politique de détérioration sélective, la nouvelle entité en pâtirait plus que ses concurrents, étant donné qu'un client serait fortement incité à changer de fournisseur et à se tourner, non pas vers la nouvelle entité, mais vers ses rivaux les plus importants, car eux seuls proposent un service non détérioré. Les parties ont fait valoir que la qualité globale de la nouvelle entité serait inférieure à celle de l'un quelconque de ses concurrents.

(182) La Commission ne saurait partager cette analyse. Comme indiqué au considérant 164, si la nouvelle entité ralentissait la modernisation des points de peering privés, cela n'aurait pas nécessairement de conséquence importante sur ses propres clients. Cela ressort d'ailleurs des informations communiquées à la Commission par les parties elles-mêmes(56). Vu l'importance de sa clientèle, conjuguée à la vaste couverture de son réseau, la nouvelle entité sera capable de maintenir la qualité des services, car les clients ne seront pas nécessairement contraints de quitter le réseau, ce qui, dans le cas contraire, augmenterait les problèmes de temps d'attente, de fiabilité et de performances générales.

(183) Du fait que la nouvelle entité ne fait que très peu appel à ses concurrents de petite taille, tandis qu'elle constitue pour chacun d'eux une source de connectivité importante, une stratégie de détérioration sélective n'affecterait pas sensiblement la qualité du service proposée par MCI WorldCom/Sprint. Si la nouvelle entité détériorait la connectivité d'un de ses quatre plus gros concurrents, cela ne concernerait que [0-10]* % environ de la totalité de son trafic. Ce pourcentage dépasserait toutefois [10-20]* % d'un tel trafic en cas d'échange entre les concurrents les plus puissants et la nouvelle entité (trafic en externe). Dans l'hypothèse où cela déclencherait une diminution de 50 % de la qualité de la connexion entre les deux réseaux, cela se traduirait par une diminution d'un point de pourcentage de la qualité du service fourni par MCI WorldCom et de sept points de pourcentage pour son concurrent de petite taille.

(184) En outre, le trafic en interne de la nouvelle entité représentera environ [40-80]* % du trafic passant par sa dorsale. Autrement dit, tout client de la nouvelle entité pourrait accéder à [40-80]* % de l'espace internet sans utiliser de connexions de peering. En tout état de cause, [40-80]* % de la qualité du service seraient à l'abri d'une détérioration. Il convient de noter que les parties notifiantes ont contesté l'importance du trafic en interne, tel qu'il a été mesuré par la Commission. Elles estiment que ce trafic ne devrait comprendre que le trafic échangé entre les clients finals des parties à la concentration et non pas entre des revendeurs de connectivité internet qui s'avèrent être des clients de MCI WorldCom/Sprint. Cette allégation ne résiste pas à un examen plus poussé, car ce qui importe est le fait que les clients de la nouvelle entité accéderaient directement à [40-80]* % de l'espace internet sans passer par une connexion de peering. La détérioration de cette connexion n'affecterait pas cet accès à [40-80]* % de l'espace internet.

(185) La croissance rapide du trafic internet permettrait à la nouvelle entité de mettre en place sa stratégie de détérioration en privilégiant le développement de son propre réseau et de ses propres clients au détriment de la modernisation des liens avec ses concurrents. Il en est ainsi étant donné notamment l'importance de la clientèle de MCI WorldCom/Sprint par rapport à celle des concurrents de la nouvelle entité. Si, comme les parties l'affirment, les clients pouvaient facilement détecter cette stratégie, tant les clients actuels de la nouvelle entité, les clients des concurrents de la nouvelle entité que les nouveaux clients seraient plus enclins à opter pour MCI WorldCom en tant que fournisseur principal de connectivité. Cela sera sans doute particulièrement vrai pour les gros clients confrontés aux FSI et aux fournisseurs de contenu, qui doivent maintenir une connectivité de bonne qualité par rapport à leurs sites et à leurs clients. Les clients bien informés réagiront probablement plus rapidement à une action de détérioration que d'autres clients. De même, ils seront en meilleure position que les clients moins avisés pour comprendre les avantages que procure le fait d'être directement connecté à la vaste clientèle de la nouvelle entité.

(186) Les parties ont affirmé dans leur réponse que le multihébergement pouvait être utilisé pour éviter la détérioration. Un client pourrait ainsi aisément la compenser en utilisant une connexion directe qui contournerait la connexion de peering détériorée.

(187) Toutefois, comme il a déjà été mentionné au considérant 36, le multihébergement n'empêche pas nécessairement l'acheminement du trafic sur un réseau offrant une connexion dégradée. Il est possible d'influer, dans une certaine mesure, sur la voie empruntée par le trafic sortant, de manière à éviter son acheminement sur un réseau dégradé. Rien de tel n'est possible, en revanche, pour le trafic de retour. Dans cette situation, un client optera, selon toute vraisemblance, pour l'option la plus sûre et contournera le point de peering détérioré en se connectant directement à la nouvelle entité au lieu de se connecter à un plus petit fournisseur de connectivité, car il aura ainsi directement accès à la clientèle de la nouvelle entité. S'il décidait de pratiquer le multihébergement avec un autre fournisseur de connectivité, on peut penser que cette connexion serait secondaire par rapport à l'accord conclu avec la nouvelle entité et servirait de sauvegarde vis-à-vis du fournisseur principal de connectivité, MCI WorldCom/Sprint.

(188) Les parties ont affirmé que l'éventualité d'une augmentation des prix du transit venant s'ajouter à la détérioration du service aurait simplement pour effet d'accélérer la fuite des clients de la nouvelle entité vers d'autres fournisseurs de connectivité de niveau 1, qui offriraient une meilleure qualité à un moindre prix.

(189) Dans leur raisonnement, les parties supposent que la nouvelle entité appliquerait cette stratégie de manière aveugle et sans discernement. Les parties seront toutefois en mesure de cibler l'action de détérioration et/ou la hausse des prix sur des concurrents potentiels donnés qui souhaiteraient entrer sur le marché. Comme il ressort de l'enquête de la Commission, un concurrent potentiel ne sera pas en mesure de rester compétitif (et de fournir une connectivité universelle) sans obtenir une connectivité fournie par les clients de la nouvelle entité. Si le concurrent potentiel n'achète pas du transit à la nouvelle entité, il devra passer un accord de peering avec elle ou devenir son client. Il n'est toutefois pas certain que la nouvelle entité soit d'accord pour conclure un accord de peering. Sinon, la crainte d'une action de détérioration ou d'une hausse de prix pourrait discipliner les clients actuels. Étant donné la dépendance des concurrents potentiels et des clients par rapport à la nouvelle entité, cette stratégie pourrait être effectivement appliquée à des entreprises ciblées sans risque majeur pour la propre position de la nouvelle entité sur le marché. En d'autres termes, il est hautement improbable que la nouvelle entité augmente uniformément ses prix ou détériore ses connexions pour discipliner le marché.

(190) Par ailleurs, la présence d'une clientèle importante conjuguée à l'existence d'un vaste réseau permet à un fournisseur de connectivité de maintenir des normes de meilleure qualité qu'un fournisseur de réseau de petite taille, que ses clients seraient contraints de quitter, aggravant ainsi les problèmes de temps d'attente, de fiabilité et de performances générales.

Effet de l'innovation

(191) Dans leur réponse à la communication des griefs, les parties ont aussi affirmé que tant les clients que les utilisateurs finals avaient la possibilité de contourner les points de peering détériorés au moyen des nouvelles technologies telles que le cache et autres techniques de stockage.

(192) La Commission ne partage pas cet avis, car cela n'est vrai que dans une mesure limitée. Si elles sont en effet de plus en plus employées pour lutter contre l'encombrement et les délais d'attente, ces techniques ne peuvent cependant pas être utilisées pour toutes les catégories de contenu. De plus, le trafic doit toujours passer par des fournisseurs de connectivité de niveau 1 pour garantir une connectivité intégrale. En tout état de cause, ces derniers utilisent également certaines de ces techniques pour alléger l'encombrement du trafic et rapprocher le contenu de leurs clients.

(193) Les parties ont contesté l'affirmation selon laquelle la nouvelle entité serait en mesure de contrôler les évolutions techniques. Selon elles, aucun FSI pris isolément ne serait capable d'imposer des normes sur l'internet au niveau du réseau.

(194) Toutefois, étant donné que l'innovation jouera à l'avenir un rôle de plus en plus important dans le développement de l'internet, un opérateur dominant doté d'une clientèle importante sera le mieux placé pour jouer un rôle directeur dans cette innovation. La technologie utilisée par l'opérateur dominant pour fournir un service donné deviendra une norme de fait, car tous les clients de cette entreprise en position dominante adopteront la technique choisie par l'opérateur en place.

Volatilité des parts de marché

(195) Les parties ont également affirmé que les parts de marché étaient volatiles. Or, comme exposé à la section concernant le calcul des parts de marché, la part de marché de MCI WorldCom a fait montre d'une stabilité remarquable d'une procédure à l'autre. En ce qui concerne les autres participants au marché, les chiffres font apparaître une augmentation de la part de marché d'AT & T et une diminution de celle de tous les autres concurrents.

Conclusion

(196) Au vu de ce qui précède, l'opération notifiée donnera naissance, si elle n'est pas modifiée, à une entité dont la taille, en valeur absolue (plus de [35-45]* % du marché) et relative ([plusieurs]* fois plus importante que son concurrent immédiat), sera de nature à lui permettre de se comporter indépendamment de ses concurrents et de ses clients. C'est ainsi qu'elle pourra augmenter les prix facturés à ses clients ou imposer ses propres normes au secteur. La nouvelle entité sera capable de discipliner le marché par une action de détérioration sélective qui lui permettra de faire baisser, à tout moment, la qualité de service de ses concurrents. Il y a donc lieu de conclure que l'opération notifiée entraînera la création ou le renforcement d'une position dominante sur le marché de la fourniture de connectivité internet de niveau 1 ou universelle.

SERVICES MONDIAUX DE TÉLÉCOMMUNICATIONS

Caractéristiques actuelles du marché

a) Paramètres de la concurrence

(197) Les services mondiaux de télécommunications sont spécialement adaptés aux besoins des sociétés multinationales. Du fait de leur très grande technicité, le marché s'organise en général autour d'appels d'offres lancés par les clients, pour lesquels les fournisseurs de services mondiaux de télécommunications sont invités à soumissionner.

(198) Pour être crédible, un candidat doit satisfaire à des exigences de qualité élevées (il lui faudra par exemple prouver que son réseau couvre le monde entier, qu'il est fiable, bénéficie de l'assistance d'un personnel commercial et technique en nombre suffisant pour remédier à toute défaillance dans le service fourni, etc.). Il semble que la perception de la marque comme gage de qualité constitue également un élément clé de la concurrence. Lorsqu'ils évaluent la crédibilité d'un soumissionnaire, les clients accordent une importance déterminante au fait qu'un fournisseur compte déjà un grand nombre de clients dans le secteur des services mondiaux de télécommunications, ainsi que certains autres gros clients. Les acheteurs ont confirmé que le prix ne constituait que le deuxième élément d'appréciation dans une procédure d'appel d'offres, une fois obtenue la garantie que le service en question présentait des niveaux de qualité satisfaisants.

(199) L'enquête montre que la participation à ces appels d'offres est coûteuse, prend du temps et nécessite des ressources importantes. Pour pouvoir soumissionner de manière compétitive, la connaissance des appels d'offres passés est un atout majeur, car cela renseigne très utilement sur les derniers développements concernant les prix sur le marché et le comportement des concurrents en matière d'offres. Un opérateur peut ainsi s'assurer que le prix proposé dans un premier temps se situe dans une fourchette acceptable pour le client potentiel et affiner ensuite ce prix lors de la deuxième étape des négociations.

b) Barrières à l'entrée

(200) D'après les parties notifiantes, les barrières à l'entrée sur le marché des services mondiaux de télécommunications sont peu élevées. Toutefois, tant ces dernières que des tiers ont fourni des éléments d'appréciation qui donnent à penser que tel n'est pas le cas. Les coûts d'une participation à un appel d'offres varient de quelques milliers de dollars à plus de 500 000 dollars pour certaines offres. Il peut s'écouler jusqu'à un an avant qu'une procédure de ce type soit entièrement achevée et le fournisseur devra sans doute faire appel à d'importants effectifs pour la mener à son terme. En conséquence, la participation au marché entraîne des coûts irrécupérables considérables. Selon un tiers, un opérateur véritablement mondial peut s'attendre à recevoir annuellement plusieurs centaines de demandes d'offres complexes et un nombre bien plus grand de demandes plus simples. Un tel volume d'appels d'offres et leur fréquence, ainsi que le coût de la soumission à chacun d'eux, semblent indiquer que le coût d'entrée sur le marché des services mondiaux de télécommunications est élevé. En outre, même si les nouveaux venus sont disposés à supporter les coûts irrécupérables liés aux appels d'offres, ils devront ensuite surmonter la difficulté supplémentaire que constitue l'absence d'une clientèle existante susceptible de convaincre l'acheteur de leur qualité de candidats sérieux capables de pénétrer sur le marché. Il faudra notamment qu'ils disposent au sein de leur organisation d'un personnel d'assistance et de vente ayant l'expérience pratique de la soumission aux appels d'offres.

(201) D'après un tiers, un opérateur qui veut pénétrer sur le marché doit choisir entre deux solutions: la première, rapide mais plus coûteuse, consiste à construire un réseau à partir de lignes louées, la deuxième, qui lui permettra de maîtriser ses coûts futurs, mais sera plus longue à mettre en œuvre, passera par la mise en place de son propre réseau. Les difficultés auxquelles se heurtent les nouveaux venus sont par conséquent doubles: dans l'hypothèse où ils parviennent à la seconde étape d'une procédure d'appel d'offres, ceux qui choisissent de pénétrer rapidement sur le marché seront incapables, s'ils font appel aux lignes louées, de rivaliser au niveau des coûts avec les opérateurs en place dotés de leurs propres réseaux, tandis que la construction d'un nouveau réseau retardera davantage l'entrée de la société sur le marché. Il convient également de noter qu'Equant, un des acteurs du marché, a récemment annoncé qu'il envisageait de construire son propre réseau au lieu de louer des fibres optiques. Des clients ont également expliqué qu'ils préféraient traiter avec des fournisseurs qui possèdent leurs propres réseaux, car ces derniers contrôlent directement les câbles sous- jacents et sont donc mieux à même de maîtriser la qualité de leur offre.

(202) [...]* Si une société aussi puissante que Sprint mettait autant de temps, en cas d'échec de l'opération de concentration, pour implanter son activité en dehors des États-Unis, la tâche de nouveaux venus, qui ne pourraient compter sur le réseau de Sprint aux États-Unis, la réputation de sa marque et son importante clientèle, serait encore plus ardue.

(203) [...]*

(204) [...]*(57)

(205) En conclusion, contrairement à ce qu'ont affirmé les parties notifiantes dans les documents transmis à la Commission, les considérants visés ci-dessus montrent que les barrières à l'entrée sur le marché sont importantes pour les nouveaux venus. Pour pouvoir pénétrer sur le marché à grande échelle, les nouveaux arrivants sont obligés de soumissionner pour un grand nombre de marchés, ce qui est coûteux. Pour les obtenir, ces sociétés doivent être retenues pour la deuxième étape d'une procédure d'appel d'offres et doivent disposer d'un réseau en place qui réponde aux conditions exigeantes que les clients fixent dans leurs appels d'offres. De plus, ce réseau devra généralement être étendu pour satisfaire aux besoins du client et fournir des services à faible coût. Même s'ils peuvent répondre à ces exigences, l'expérience des opérateurs en place en matière de soumission fera toujours défaut aux nouveaux venus. Cette expérience leur permettrait d'être informés des prix pratiqués dans le passé par leurs concurrents, d'établir des hypothèses sur leurs coûts et leur comportement, autant d'éléments nécessaires pour les aider à livrer une concurrence effective.

c) Les acteurs du marché

(206) Du côté de l'offre, le marché comptait, avant l'opération de concentration, trois fournisseurs principaux et un certain nombre de concurrents de plus petite taille. Les trois grands acteurs du marché étaient l'alliance Concert (composée de BT, d'AT & T et de Concert, leur entreprise commune), l'alliance MCI WorldCom et l'alliance Global One (comprenant France Télécom, Deutsche Telekom, Sprint et Global One, leur entreprise commune). Tous les trois avaient une clientèle importante, étaient capables de répondre à la majorité des appels d'offres publiés par les clients et de fournir tout type de services mondiaux de télécommunications. Les acteurs de petite taille, Cable & Wireless et Equant, ne pouvaient participer qu'à un petit nombre d'appels d'offres, obtenaient rarement des marchés importants et n'étaient pas nécessairement en mesure de fournir tous les services. Un des avantages concurrentiels importants dont jouissaient les trois principaux acteurs était constitué par leur participation massive aux appels d'offres (plusieurs centaines par an), grâce à laquelle ils pouvaient réunir des renseignements sur le coût et le prix de la plupart des services globaux de télécommunication demandés par les clients.

(207) Dans la décision BT/AT & T, la Commission avait conclu que le nombre de concurrents, réels ou potentiels, sur le marché des services mondiaux de télécommunications était limité. Ceux-ci englobaient BT/Concert, AT & T/AUCS/Unisource/WorldPartners, Global One, Equant, Cable & Wireless, ainsi que d'autres sociétés locales et des entreprises du secteur des technologies de l'information qui constituaient potentiellement des concurrents sur le marché. Dans la même décision, la Commission a constaté, du côté de la demande, que certains clients ont déclaré qu'ils disposaient d'une liste de fournisseurs sélectionnés auxquels ils pouvaient toujours envisager de recourir lorsqu'ils lançaient un appel d'offres (BT/Concert, AT & T/AUCS/Unisource/WorldPartners, Global One, Equant et Cable & Wireless)(58).

(208) Les informations fournies par des tiers à propos des offres de l'année passée relatives à l'obtention de services de télécommunications mondiaux ont confirmé que c'est en général le même petit nombre de fournisseurs qui soumissionnent le plus souvent pour ces marchés, en l'occurrence Equant, MCI WorldCom, BT, AT & T, C & W et Global One.

(209) Les parties ne mentionnent pas dans leur notification quelles sont les sociétés présentes sur ce marché et celles qui le sont pas. En revanche, elles comparent l'appréciation effectuée par la Commission dans la décision BT/AT & T à celle de la Federal Communications Commission (FCC) sur la même opération(59). La décision de la FCC "a recensé un certain nombre d'autres entreprises qui sont en train d'apparaître comme d'importants fournisseurs de services mondiaux de télécommunications". Elles comprenaient notamment les sociétés du groupe Bell (RBOC) et "[d]e nouveaux opérateurs", tels que Qwest, IXC et Level 3, ainsi que Global Crossing/Frontier, GTS (qui a acheté Esprit Telecom en 1999) et Colt. Dans leur notification, les parties n'analysent que la concurrence potentielle et ne contestent pas la liste des concurrents réels figurant dans la décision BT/AT & T. Dans des documents complémentaires qu'elles ont transmis à la Commission, les parties ont répertorié d'autres entrants, tels que Deutsche Telekom, Infonet, Telecom Italia et Telefónica.

(210) Les allégations des parties selon lesquelles un grand nombre de concurrents potentiels peuvent facilement pénétrer sur le marché sont battues en brèche à la fois par les informations communiquées par les parties elles-mêmes et par l'enquête de la Commission, qui toutes deux confirment l'analyse menée dans l'affaire BT/AT & T.

(211) Dans le cadre de la procédure BT/AT & T, qui concernait des produits analogues à ceux analysés en l'espèce, MCI WorldCom avait déclaré(60) que: [...]*(61) [...]*.

(212) En outre, dans les documents transmis à la Commission au cours de l'enquête(62), [...]*.

(213) Dans sa décision d'autoriser l'opération BT/AT & T, la Commission a défini le marché le plus étroitement possible, afin d'analyser l'opération de la manière la plus rigoureuse. Bien que les parties notifiantes ne soient en aucun cas parvenues à contester le nombre de concurrents présents sur le marché, il convient d'examiner si les acteurs du marché ont changé au cours de l'année dernière et de mesurer l'effet de cette opération.

(214) Comme le laissait présager la décision BT/AT & T, Unisource a cessé d'exister dans sa forme antérieure et l'alliance WorldPartners semble aujourd'hui moribonde. AUCS, l'ancienne entreprise commune créée entre AT & T et Unisource, fait à présent partie d'Infonet. Certaines multinationales ont constaté qu'AUCS/Infonet figurait parmi les soumissionnaires pour certains appels d'offres. Une autre société l'a par ailleurs reconnue comme concurrente pour certaines procédures d'appels d'offres, mais émanant essentiellement de petites et moyennes entreprises en Europe, et non en qualité de véritable acteur de taille mondiale. Les données communiquées en matière d'attribution des contrats par le sociétés présentes sur le marché confirment cette situation: Infonet figurait en effet très rarement parmi les soumissionnaires, retenus ou refusés, pour les marchés au sujet desquels la Commission a reçu des informations.

(215) La Commission a également examiné le cas de plusieurs autres nouveaux entrants potentiels, recensés comme tels par les parties notifiantes. Comme indiqué ci-dessus, il s'agissait des sociétés du groupe Bell (RBOC), de Qwest, de Global Crossing/Frontier, IXC, Level 3, GTS (qui a acheté Esprit Telecom en 1999) et de Colt. Cependant, la Commission a relevé, dans sa communication des griefs, qu'à l'exception de Qwest, dont la position est examinée au considérant 216, aucune de ces sociétés ne figure de manière tant soit peu significative sur les listes des marchés gagnés/perdus transmises par les principaux fournisseurs, ni dans l'appréciation communiquée par les clients en réponse aux questions de la Commission. De fait, certains de ces clients semblent ne pas connaître un grand nombre des entreprises susmentionnées, car ils n'ont rien écrit ou ont indiqué un point d'interrogation en face de leur nom dans le tableau des concurrents éventuels. De plus, l'analyse interne fournie par MCI WorldCom et Sprint ne recense aucune des sociétés mentionnées ci-dessus, à l'exception de Qwest, parmi les concurrents sérieux sur les marchés de la transmission des données: dans le cas où elles sont considérées comme des concurrents, elles sont regroupées sous la catégorie "autres" de l'analyse. Enfin, Berge Ayvazian, président-directeur général de Yankee Group, une importante société de conseil en télécommunications, a qualifié deux des concurrents en ces termes: "concurrents de niveau 2 tels que Qwest et Level 3"(63).

(216) Comme indiqué précédemment au considérant 215, parmi les concurrents potentiels répertoriés par les parties notifiantes, Qwest est celui qui réunit le plus d'atouts pour réussir effectivement à pénétrer sur le marché des services mondiaux de télécommunications. D'après les données communiquées par MCI WorldCom et un tiers concernant les marchés gagnés/perdus, Qwest commence à être considérée comme un concurrent pour certains appels d'offres. [...]*(64) [...]* De plus, comme l'ont constaté les parties dans leur analyse des concurrents potentiels sur ce marché, Qwest détient avec KPN une entreprise commune qui possède "en Europe d'importants réseaux et savoir-faire dans le secteur des fibres optiques longue distance". Par conséquent, sur la totalité des nouveaux venus potentiels depuis la décision BT/AT & T, Qwest semble le plus crédible.

(217) En dépit des éléments de preuve ci-dessus, étant donné les divergences d'interprétation sur le nombre d'acteurs du marché, la Commission a, aux fins de la présente analyse, élargi sa définition des acteurs du marché et posé en principe que certains acteurs secondaires étaient présents sur le marché. Elle a ensuite vérifié si, à l'issue de l'opération de concentration, ces acteurs seront en mesure d'exercer une influence significative sur les principaux opérateurs du marché [MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert(65)] ou si, une fois l'opération réalisée, ces derniers détiendront individuellement ou collectivement une position dominante sur le marché.

(218) Les documents remis à la Commission au cours de la procédure contiennent des informations communiquées à la fois par MCI WorldCom et Sprint sur leur appréciation des acteurs du marché, réalisée à partir d'une liste des gammes de services que ceux-ci commercialisent sur le marché. Globalement, elle a donné les résultats suivants:

>EMPLACEMENT TABLE>

(219) L'analyse présentée ci-dessus, qui prend pour base le point de vue des parties sur les gammes de services offertes, montre que, après l'opération de concentration, MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert proposeront toutes deux un éventail complet de prestations. Certains autres opérateurs offrent une gamme de services similaire, mais les parties notifiantes estiment que l'ensemble de ces services n'a pas une aussi bonne cote sur le marché.

Effet de l'opération de concentration

(220) Dans l'affaire BT/AT & T, la Commission a constaté que les parts de marché (situées dans la fourchette 39 à 47 % - voir considérants 106 à 108 de la décision BT/AT & T) ne laissaient pas en soi supposer la création d'une position dominante individuelle. En effet, l'alliance Concert était confrontée à la présence de puissants concurrents tels que Sprint/Global One et MCI WorldCom, ainsi que, dans une moindre mesure, Equant et C & W, capables, d'après les conclusions de la Commission, de lutter à armes égales avec l'entreprise commune. Celle-ci a établi que ces acteurs exerçaient collectivement des pressions concurrentielles sur les parties notifiantes au moment de soumissionner pour un client. En réalité, ils garantissent aux clients la présence de soumissionnaires en nombre suffisant pour que la concurrence soit maintenue. Ceci s'explique soit par le fait que ces sociétés sont également invitées à soumissionner par ce client, soit parce que les parties savent, lorsqu'elles ont affaire à des clients difficiles, qu'elles ne pourront imposer leurs conditions, ces clients invitant alors les autres fournisseurs à soumissionner.

(221) Au même moment que l'opération de concentration notifiée, l'alliance Global One a perdu deux de ses membres, ce qui a eu une double incidence sur la concurrence. Premièrement, l'entrée de Sprint dans le groupe MCI WorldCom, un concurrent direct de Global One, fera perdre à Global One son distributeur et entraînera donc sa disparition du marché aux États-Unis. Deuxièmement, la dissolution de l'entreprise commune Global One et la vente de ses actifs à France Télécom aura également la même conséquence en Allemagne; toutefois, il n'existe pas de lien de cause à effet entre l'opération notifiée et le retrait de Deutsche Telekom de Global One.

(222) Les parties soulignent dans des documents internes l'importance que revêt Sprint pour la position de Global One sur le marché. [...]*.

(223) Les clients actuels et potentiels de Global One ont témoigné une certaine fidélité à leur fournisseur lorsque la Commission leur a demandé s'ils envisageaient d'en changer. Ils ont toutefois indiqué que la question de la capacité de Global One à assurer une couverture aux États-Unis serait examinée attentivement pendant la durée résiduelle du contrat en cours et lors de ses renouvellements. En réponse à l'enquête de la Commission, la quasi-totalité des clients actuels ou potentiels de Global One lui ont attribué, après son acquisition par France Télécom, une place d'acteur de rang moyen, derrière MCI WorldCom et l'alliance Concert. L'absence soudaine de couverture aux États-Unis explique en partie ce classement.

(224) Deuxièmement, l'opération de concentration notifiée aura pour effet d'ajouter les clients de Sprint aux États-Unis à ceux de MCI WorldCom. Ce regroupement renforcera la position, déjà solide, de cette dernière sur le marché des services mondiaux de télécommunications.

(225) Les parties notifiantes ont fait valoir, dans leur notification et au cours de la procédure, que les clients actuels de Sprint qui utilisent les services de Global One deviendraient clients de Global One et quitteraient Sprint. Elles estiment que ces clients sont liés, d'une manière ou d'une autre, au réseau de Global One. Or, l'enquête n'a pas confirmé ces affirmations, contredites par l'analyse que les deux parties ont réalisée sur l'avenir de Global One.

(226) [...]* D'une manière générale, l'analyse prévoit également que Global One perdra une part importante de sa clientèle actuelle à la suite de l'opération de concentration, en raison notamment, comme cela a été expliqué précédemment, de son absence de couverture aux États-Unis, comme expliqué au considérant 221.

(227) Un document de Sprint transmis à la Commission confirme que l'opération aura probablement comme seconde conséquence ce passage des clients de Global One à l'entité issue de l'opération de concentration. [...]*(66) Une multinationale a par exemple expliqué qu'il manque à Global One une implantation aux États-Unis, que sa position n'est pas particulièrement forte à l'échelle mondiale, mais qu'elle est très présente en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique, et dispose de bonnes capacités en termes de services. Une autre a indiqué qu'elle cesserait probablement ses relations avec Global One, mais attend l'émergence d'éléments nouveaux autour de cette société.

(228) En conséquence, l'opération entraînera la disparition de Global One en tant que concurrent réel de premier plan sur le marché des services mondiaux de télécommunications, du fait du manque de couverture aux États-Unis et de la perte escomptée d'une partie importante de ses clients aux États-Unis, qui se tourneront vers l'entité issue de la concentration. Dès lors, l'analyse suivante se fonde sur l'hypothèse selon laquelle, si Global One se maintient sur le marché, ce sera en tant qu'opérateur spécialisé qui ne pourra soumissionner que pour un ensemble limité de marchés, en raison de son absence d'implantation propre aux États-Unis et, partant, de sa dépendance par rapport à Sprint, à court terme tout au moins.

a) Analyse des parts de marché

(229) Dans un document(67) transmis à la Commission au cours de l'enquête, Sprint a fait connaître sa perception des parts de marché aux États-Unis en matière de services de transmission de données (comprenant, selon sa définition, IP, relais de trame et ATM) ainsi que pour le marché du trafic total sortant (qui englobe le trafic sortant des données, des lignes spécialisées, des appels internationaux, des appels gratuits et des entreprises). Sprint a fourni des chiffres pour ces deux marchés. [...]* En 1999, Sprint détenait [5-15]* % du marché des services de transmission de données, MCI WorldCom [35-45]* %, AT & T [15-25]* %, Qwest [0-10]* % et l'ensemble des autres opérateurs [20-30]* %. En ce qui concerne tous les services considérés, les parts de marché se répartissaient comme suit: Sprint: [5-15]* %, MCI WorldCom: [30-40]* %, AT & T: [30-40]* %, Qwest: [0-10]* % et l'ensemble des autres opérateurs: [20-30]* %. Ces données, communiquées par une des parties notifiantes, attestent la solidité de la position détenue sur le marché des services mondiaux de télécommunications par les sociétés parties à l'opération de concentration.

(230) La Commission a utilisé deux méthodes pour calculer la taille du marché des services mondiaux de télécommunications:

Méthode A: calcul du total des recettes dégagées par les produits compris dans le marché des services mondiaux de télécommunications;

Méthode B: analyse des ventes totales des entreprises actives sur le marché des services mondiaux de télécommunications à quelque 200 grandes sociétés grosses consommatrices de télécommunications (méthode identique à celle utilisée dans l'affaire BT/AT & T).

(231) La Commission a en outre analysé la manière dont les clients et les concurrents perçoivent les sociétés présentes sur le marché.

(232) Les hypothèses retenues pour élaborer les tableaux et calculer la taille du marché selon les méthodes A et B se sont fondées sur la présence d'un nombre d'entreprises plus élevé que dans le cas de BT/AT & T, comprenant des sociétés qui, d'après la notification des parties, étaient des concurrents réels ou potentiels sur le marché. BT n'a pas été en mesure de fournir ses données en temps voulu à la Commission, de sorte que les chiffres qui lui ont été attribués sont ceux fournis dans le cadre de l'enquête BT/AT & T. La position de BT sur le marché s'en trouve probablement sous-estimée.

(233) Trois hypothèses supplémentaires ont été posées, qui se révèlent toutes favorables aux parties notifiantes et à l'alliance Concert. Premièrement, la Commission est partie du principe que Global One se maintiendrait sur le marché, alors que tout porte à croire que les clients actuels de Global One seront nombreux à se tourner vers Sprint ou d'autres fournisseurs et que les nouveaux clients potentiels n'opteront probablement pas pour Global One tant que sa présence aux États-Unis et en Allemagne ne sera pas confirmée. Deuxièmement, même si Qwest n'a pas été en mesure de fournir des informations dans le cadre de l'enquête de la Commission, une part de marché de 5 % lui a été attribuée, soit un chiffre bien supérieur à la part de marché qui, d'après les estimations de Sprint, est celle de la société aux États-Unis. Enfin, même si Infonet n'a pas transmis de données, le chiffre concernant AUCS a été multiplié par deux pour prendre en compte les ventes d'Infonet sur ce marché. Cela impliquerait qu'Infonet détient une part de marché de 5 %, équivalente à celle de Qwest, ce chiffre étant surévalué, car Sprint ne qualifie pas Infonet de concurrent important dans son analyse susmentionnée au considérant 216, à la différence de Qwest.

(234) Au vu de ce qui précède, les tableaux ci-dessous établis en application des méthodes A et B donnent vraisemblablement une image du marché plus favorable qu'elle ne l'est en réalité en ce qui concerne à la fois MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert.

1. Méthode A

(235) La méthode A a nécessité la collecte, auprès des sociétés présentes sur le marché, de données sur les recettes globales dégagées par la vente d'un ensemble de services. La définition retenue était celle des services de réseaux mondiaux(68).

>EMPLACEMENT TABLE>

2. Méthode B

(236) La Commission a ensuite collecté des données auprès des sociétés présentes sur le marché afin de calculer les recettes dégagées par chacune d'elles sur les ventes de services de réseaux mondiaux. Cette méthode, également utilisée dans l'enquête BT/AT & T, a consisté à s'adresser à chaque fournisseur du marché, en vue d'obtenir des données concernant ses ventes aux quelque 200 sociétés qui dépensent le plus dans le domaine des télécommunications internationales, à l'échelle mondiale. Leur liste a été établie à partir d'une liste plus large comprenant 2000 sociétés répondant à ce même critère. Ces 200 sociétés représentaient au moins 35 % des dépenses de télécommunications des 2000 sociétés. Les services sont les mêmes que ceux utilisés pour la méthode A.

(237) Les parties notifiantes, invitées à commenter la liste en question, ont indiqué qu'il s'agissait de grandes sociétés multinationales et ont considéré que la méthode pouvait convenir pour mesurer approximativement la taille du marché. Là encore, une analyse analogue à celle que comprend la méthode A a été effectuée.

>EMPLACEMENT TABLE>

(238) Les données figurant dans les tableaux ci-dessus semblent corroborer ce que Sprint a déjà constaté concernant la position des parties notifiantes et de l'alliance Concert, à savoir qu'elles constituent les principaux acteurs du marché, loin devant tous les autres.

(239) Les analyses relatives aux marchés gagnés/perdus, communiquées à la Commission par les parties, des tiers et les soumissionnaires en concurrence pour la fourniture de services aux quelque 200 principales entreprises, confirment ces chiffres de parts de marché.

b) Perception des fournisseurs par les clients et les tiers

(240) Les parts de marché indiquées au considérant 237 rendent compte des marchés gagnés et perdus dans le passé à la suite d'appels d'offres, mais pas nécessairement de la capacité à obtenir des marchés à l'avenir. Ces chiffres donnent une indication sur le pouvoir de marché futur, mais le marché des appels d'offres se fonde aussi sur la perception du fournisseur par le client et sur la capacité de ces fournisseurs à supporter les coûts et à surmonter les problèmes posés par la soumission pour ces marchés.

(241) Afin de déterminer comment les clients et les concurrents du marché perçoivent les fournisseurs, la Commission a demandé à des tiers de classer les acteurs du marché des services mondiaux de télécommunications sur une échelle allant de 1 à 5 (de la plus mauvaise à la meilleure note), en fonction d'un certain nombre de critères: présence aux États-Unis(69), présence au niveau mondial, capacité de service, infrastructures, portefeuille de marques et clientèle. Plusieurs des personnes interrogées ont fourni des analyses qualitatives plutôt que quantitatives, qui ont confirmé les données quantitatives selon lesquelles les sociétés les plus puissantes du marché sont MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert, suivies d'Equant, de Cable & Wireless et de Global One, qui présentent quelques points faibles, mais sont cependant actives sur le marché. L'analyse quantitative, lorsqu'elle a été effectuée, a donné les résultats suivants:

>EMPLACEMENT TABLE>

(242) Comme le montre le tableau, le classement des clients et celui des concurrents sont généralement concordants, bien que les concurrents attribuent systématiquement une meilleure note aux opérateurs, ce qui pourrait s'expliquer par leur plus large connaissance du marché. Les deux principaux opérateurs du marché - MCI WorldCom et l'alliance Concert - sont les mieux notés, à la fois par les clients et les concurrents. On trouve ensuite un certain nombre de sociétés dont les notes sont très proches, avec en tête de ce groupe Global One et Equant.

(243) Il convient de noter que les chiffres du tableau ci-dessus correspondent à la moyenne de différentes notes attribuées à chaque société. MCI WorldCom et l'alliance Concert sont les seules à obtenir de la part de presque toutes les personnes interrogées une note systématiquement élevée pour l'ensemble des critères.

(244) Le tableau semble également indiquer que les acteurs qualifiés par les parties notifiantes de nouveaux arrivants ne sont en réalité considérés comme de véritables acteurs sur le marché ni par ces sociétés elles-mêmes ni par leurs clients. Cette constatation confirme le point de vue de la Commission selon lequel la définition qu'elle a donnée du marché dans son analyse est large.

c) Conclusion

(245) La communication des griefs a conclu, sur la base de l'analyse des parts de marché ainsi que des appréciations de la clientèle et des concurrents exposées ci-dessus, que seuls deux opérateurs sont capables de prendre part à un nombre élevé d'appels d'offres. Cette constatation semble valable pour les 200 premières multinationales comme pour les autres composantes de la demande, puisque les parts de marché ainsi obtenues sont concordantes, à la fois en valeur absolue et relative.

d) La réponse des parties à la communication des griefs

(246) Les parties déclarent que la hausse de leur part de marché résultant de l'opération de concentration est minimale. La raison en est que Sprint est peu présente dans le secteur des services mondiaux de télécommunications du fait de sa participation dans Global One, et l'augmentation de la part de marché attribuable à Sprint découlant de l'opération de concentration n'est que de [...]* [0-10]* % à [...]* %. Les parties affirment que cette augmentation ne justifie pas l'ouverture d'une procédure au titre du règlement sur les concentrations.

(247) Il convient de noter qu'il appartient à la Commission d'examiner l'éventualité d'une création ou d'un renforcement de position dominante dans une opération notifiée. L'augmentation de la part de marché des parties est un des indicateurs pris en compte pour apprécier les modifications de la puissance de marché détenue par les parties notifiantes. La communication des griefs a constaté que cette hausse contribuerait, conjointement avec la disparition, pour tout concurrent sur le marché en cause, d'un appui potentiel aux États-Unis, à la création d'une position dominante conjointe, telle qu'identifiée dans ladite communication.

(248) Les parties allèguent ensuite que l'opération de concentration n'a pas de lien de cause à effet avec la modification intervenue en ce qui concerne l'actionnariat et le contrôle de Global One. Elles déclarent que la décision de modifier la structure de propriété de Global One a été prise bien avant la décision de Sprint de fusionner avec WorldCom. Elles ajoutent que la communication des griefs ne met pas l'accent sur la faiblesse de l'augmentation de la part de marché attribuable à Sprint, mais privilégie les conséquences d'une autre opération qui avait déjà été appréciée par la Commission.

(249) La Commission admet qu'il n'existe pas de lien de cause à effet entre la présente opération et le démantèlement de Global One (voir considérant 221). Toutefois, ce démantèlement doit être pris en considération pour apprécier la situation de la concurrence sur le marché. La Commission est tenue de prendre en compte les données du marché et de réaliser des projections sur la façon dont le marché évoluera à l'avenir. Le recul de Global One est de fait une donnée consécutive au changement de propriété et à la perte Sprint, son partenaire américain.

(250) Les parties ont ensuite attiré l'attention sur la décision BT/AT & T, où la Commission avait constaté que le marché des services mondiaux de télécommunications comptait "des concurrents importants" et était "extrêmement concurrentiel et en perpétuel changement", et que les clients étaient "difficiles" et "suffisamment puissants pour dicter leurs exigences". Elles ont également mis en évidence le nombre de concurrents potentiels sérieux dont la Commission a fait état dans cette décision. Elles ont par ailleurs mentionné la décision adoptée en octobre 1999 par la FCC sur l'affaire BT/AT & T, où cet organisme n'avait pas non plus recensé de graves problèmes de concurrence. Elles pensent que le changement de structure du marché constaté par la Commission dans sa communication des griefs n'a pu se produire dans un délai aussi court.

(251) Comme exposé aux considérants 206 à 218, la Commission considère que les acteurs du marché n'englobent pas uniquement les entreprises qui, selon elle, étaient présentes sur le marché dans la décision BT/AT & T (et qui, de l'avis de MCI WorldCom, constituaient les acteurs du marché au cours de la procédure BT/AT & T, conjointement avec la société Unisource, désormais défunte), mais également d'autres entreprises qui, aux dires des parties, étaient aussi actives sur le marché (certaines d'entre elles ne figuraient pas dans une mesure importante sur les listes relatives aux marchés gagnés ou perdus obtenues par la Commission).

(252) Les parties ont affirmé dans leur réponse que la Commission avait sous-estimé le degré de concurrence existant sur le marché des services mondiaux de télécommunications. En ce qui concerne les concurrents réels, elles ont tout d'abord soutenu qu'Equant et Cable & Wireless resteraient des concurrents mondiaux sur le marché. Elles ont ensuite indiqué qu'Infonet, Level 3 et Teleglobe constituaient de nouveaux opérateurs de poids. Les parties ont ajouté que Global One continuerait à représenter une force importante sur le marché, car l'opérateur renforcera sa présence aux États-Unis au moyen de nouveaux investissements et d'une éventuelle alliance avec un opérateur américain; de même il conservera ses clients américains actuels et s'emparera de certains clients de Sprint lorsque Sprint est un distributeur d'un nouveau service de Global One. D'après les parties, les clients confirment le point de vue selon lequel Global One restera un opérateur important, même une fois que ses liens avec Sprint auront disparu.

(253) Les parties critiquent la communication des griefs de la Commission qui faisait observer que les concurrents potentiels recensés dans la décision BT/AT & T n'étaient pas représentés dans une mesure importante sur les listes relatives aux marchés gagnés ou perdus fournies à la Commission. Selon elles, seuls les concurrents réels figureraient sur ces listes, à l'exclusion des concurrents potentiels. En outre, les parties font remarquer que RBOC et Global Crossing, en particulier, constituent des concurrents potentiels de poids.

(254) En ce qui concerne les concurrents potentiels, les parties citent dans leur réponse de larges extraits de la décision BT/AT & T. Cette décision ayant été adoptée en mars 1999, seules les entreprises que la Commission a répertoriées sur le marché, telles que Qwest, Williams et GTS, ont commencé à figurer dans les appels d'offres. Cela donne à penser que le rôle des autres sociétés définies comme concurrents potentiels dans la décision BT/AT & T est moins crédible que ce que l'on pensait à ce moment-là.

(255) Enfin, les parties contestent l'analyse de la Commission au motif que sa communication des griefs surestimerait la puissance de marché de la nouvelle entité. Elles ont notamment mis en évidence quatre défauts principaux dans la méthodologie adoptée. Premièrement, la méthode utilisée pour calculer les parts de marché en ce qui concerne les services de réseaux mondiaux ne correspondait pas à la définition du marché et a exagéré la part de marché de Concert. Deuxièmement, elles ont indiqué que la méthode B était imparfaite, car on ne saurait justifier comment un échantillon de 200 entreprises, constitué à partir d'un échantillon plus large de 2000 entreprises, peut être considéré comme représentatif de toute la clientèle constituée par les sociétés multinationales. Troisièmement, elles ont estimé que la part de marché attribuable à Sprint était trop élevée, car la communication des griefs supposait que Sprint conserverait la totalité de ses clients qui utilisent les services de Global One. Enfin, elles ont fait valoir que la Commission ne pouvait traiter l'alliance Concert comme une entité unique pour calculer la part de marché, car BT, AT & T et Concert sont en concurrence pour l'obtention de certains contrats.

(256) La Commission fait observer que l'échantillon de 200 entreprises est une autre méthode de calcul possible de la part de marché en plus de la méthode fondée sur les recettes totales. La remarque relative à la part de marché de Sprint a déjà été traitée au considérant 249. En ce qui concerne l'ajout des parts de marché de l'alliance Concert, cette addition des parts de marché d'un groupe d'entreprises liées par des accords d'entreprise commune cadre pleinement avec une analyse habituelle en droit de la concurrence. Il convient également d'observer que les membres de l'alliance Concert distribuent les mêmes produits Concert.

Création d'un duopole en position dominante

a) Absence de position dominante individuelle

(257) Eu égard aux informations ci-dessus (considérants 235 et 237) concernant les parts de marché et à la capacité de MCI WorldCom/Sprint et de l'alliance Concert de soumissionner largement pour de nouveaux marchés, aucun des deux opérateurs ne peut compter sur le bénéfice d'une position dominante individuelle. Si une des deux sociétés essayait d'exercer seule un pouvoir de marché, l'autre serait en mesure de faire échec à cette tentative, étant donné son propre poids sur le marché. Toutefois, la Commission a considéré dans la communication des griefs que les deux sociétés occuperaient ensemble une place qui leur permettrait d'exercer une position dominante conjointe sur le marché des services mondiaux de télécommunications.

b) Critères d'un comportement parallèle

(258) Dans de nombreuses affaires précédentes, la Commission a appliqué plusieurs critères pour déterminer la probabilité d'une création ou d'un renforcement d'une position dominante collective. Ces critères sont les suivants: i) homogénéité du produit en cause; ii) stabilité et symétrie des parts de marché; iii) existence de barrières à l'entrée; iv) symétrie des coûts; v) stabilité et inélasticité de la demande, et iv) niveau peu élevé des changements technologiques.

(259) Ces critères sont dans la plupart des cas très utiles pour répondre aux quatre questions fondamentales posées dans le cadre de l'analyse des affaires de position dominante collective en vertu du règlement sur les concentrations, à savoir:

a) existe-t-il des éléments susceptibles d'inciter les opérateurs du marché à adopter un comportement parallèle?

b) les opérateurs du marché sont-ils facilement en mesure de contrôler le comportement concurrentiel des autres acteurs du marché?

c) existe-t-il des éléments susceptibles de décourager les opérateurs du marché de s'écarter d'un comportement parallèle?

d) est-il possible, du côté de la demande, de limiter le comportement parallèle?

(260) En bref, la communication des griefs a pris la position suivante quant à ces critères. Les services mondiaux de télécommunications étant adaptés spécialement à chaque client, à première vue, ils semblent ne pas être homogènes. Toutefois, les services mondiaux de télécommunications sont assemblés à partir des mêmes composants de base et les besoins des clients qui fondent la concurrence entre fournisseurs pour l'obtention de la clientèle d'une société donnée sont identiques. Le caractère récent du marché et les changements apparus concernant les alliances (dont la présente opération de concentration n'est que la dernière en date) et les opérations de concentration ces deux dernières années compliquent l'appréciation de la symétrie et de la stabilité des parts de marché. Les barrières à l'entrée sont certainement élevées, car un acteur du marché doit posséder d'importantes infrastructures et supporter les coûts irrécupérables occasionnés par sa participation à des procédures d'appels d'offres. La demande augmente sensiblement en valeur, même si, en volume (c'est-à-dire mesurée par le nombre de clients qui ont des besoins en services mondiaux de télécommunications), cette croissance est beaucoup plus faible. La demande n'est pas très sensible au prix, car la qualité est le moteur de la concurrence sur ce marché. Celui-ci connaît des changements technologiques, mais qui affectent tous les acteurs de la même manière.

(261) La communication des griefs a fait valoir que dans le cas d'un marché tel que la vente au détail de carburant (voir les affaires Exxon/Mobil et TotalFina), la concurrence s'exerce sur les prix et le marché fonctionne avec des individus qui doivent les accepter. Il est alors utile d'examiner les différents critères exposés au considérant 258(70). Dans ces affaires, la Commission a établi que les opérateurs étaient fortement incités à coordonner leur comportement, car ils achetaient tous du carburant sur un marché de gros et leurs parts de marché étaient symétriques. En raison de l'homogénéité du carburant et de la transparence totale des prix, les acteurs du marché pouvaient facilement surveiller le comportement concurrentiel de leurs concurrents. Étant donné les capacités de raffinage excédentaires, il était simple de prendre des mesures de représailles contre un concurrent qui se serait avisé de tricher. La faiblesse de l'élasticité de la demande par rapport aux prix et son caractère dispersé expliquent qu'il était très difficile, du point de vue des clients, de contrecarrer tout comportement parallèle.

(262) La communication des griefs a indiqué que, en ce qui concerne le marché allemand du transport de gaz à longue distance (voir l'affaire Exxon/Mobil), la Commission avait soulevé des objections contre l'opération en cause, même si peu de critères parmi ceux qui sont exposés au considérant 258 étaient remplis. Ces objections ne visaient pas un comportement collusoire en matière de prix, mais un cloisonnement géographique du marché. Le marché étant déjà cartellisé, ses différents acteurs (à une exception près) détenaient chacun un territoire où ils occupaient une solide position. Les participants avaient tous intérêt à préserver la position importante qui était la leur sur ce territoire. En outre, cette délimitation géographique rendait relativement simple la surveillance du comportement des concurrents: en effet, si un des opérateurs franchissait la frontière de son territoire, un autre, en guise de représailles, faisait de même.

(263) En l'espèce, le marché fonctionne à partir d'appels d'offres où les fournisseurs sont essentiellement choisis, dans les premières phases de la procédure, en fonction de leur capacité à proposer des services sophistiqués de grande qualité spécialement adaptés, que seuls peuvent offrir un nombre limité d'opérateurs. Étant donné que les barrières à l'entrée sont importantes (comme il a été indiqué précédemment au considérant 205, il ne suffit pas d'être capable de fournir le réseau et éventuellement aussi les services, de bonnes "références" sont également indispensables), s'il existait un comportement parallèle, il se concentrerait autour du processus d'appel d'offres et de la capacité à proposer des services concurrentiels aux entreprises qui en ont besoin. Dans ce cas, le comportement collusoire ne s'exercerait pas sur les prix, mais sur la question de savoir qui obtient et qui a obtenu quels marchés.

c) Modification des éléments susceptibles d'encourager la concurrence

1. Deux acteurs de premier plan, suivis de plusieurs petits concurrents

(264) La communication des griefs a affirmé que, puisque l'opération de concentration notifiée serait mise en œuvre parallèlement à la diminution considérable de la position concurrentielle de Global One, ladite opération aurait pour effet de créer un marché comprenant deux acteurs principaux (MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert), suivis de concurrents de taille plus réduite. L'ajout de la part de marché de Sprint à celle de MCI WorldCom renforcera la présence sur le marché de l'entité issue de l'opération de concentration. Une fois celle-ci réalisée, les deux premiers opérateurs du marché présenteraient donc des caractéristiques concurrentielles analogues et bénéficieraient d'avantages non négligeables par rapport aux autres concurrents.

(265) Premièrement, comme le montre l'analyse des parts de marché, leur clientèle sera plus ou moins la même (à eux deux, ils détiendront entre 60 et 80 % environ de la clientèle), ainsi que leur position respective sur le marché.

(266) Deuxièmement, la communication des griefs a montré que leurs coûts au niveau des infrastructures seraient similaires. Les parties notifiantes ont systématiquement fait valoir qu'il y avait de la capacité brute sur le marché. En conséquence, le coût de la fourniture d'un réseau dépend nécessairement des prix pratiqués sur le marché pour cette capacité brute. Comme l'ont expliqué les parties, les coûts occasionnés en termes de réseau pour fournir des services plus sophistiqués sont fonction des coûts de réseau sous-jacents. Les fonctions et les intrants étant similaires, les coûts de réseau sont par conséquent identiques pour les deux acteurs du marché. En outre, la taille de leurs réseaux et l'importance de leur offre de services permettent aux deux entités de réaliser des économies d'échelle et de gamme dont sont privés leurs concurrents plus petits. Ni MCI WorldCom/Sprint ni l'alliance Concert ne doit, pour pénétrer sur le marché, supporter les coûts irrécupérables occasionnés par la construction de réseaux mondiaux, la fourniture de services d'assistance ou le recrutement d'équipes de vente. Comme indiqué aux considérants 200 à 205, il s'agit d'un processus long et coûteux, qui même pour un opérateur existant s'étant retiré d'une alliance au cours de la période récente (Sprint ou Global One par exemple), prendra plusieurs années avant que cet opérateur puisse entrer à nouveau de manière crédible sur le marché. Les autres postes de coûts concernent soit l'équipement de télécommunications ou la main-d'œuvre. La communication des griefs a affirmé qu'il s'agissait dans les deux cas de marchés exogènes au marché en cause, qui sont donc les mêmes pour les deux principaux acteurs. Étant donné leur taille, les coûts de matériel et de main-d'œuvre seront vraisemblablement moins élevés pour ces sociétés que pour les petites entreprises, ce qui leur donnera des avantages concurrentiels supplémentaires.

(267) Troisièmement, la nouvelle entité et l'alliance Concert tireront profit d'une gamme de produits et d'une qualité de service similaires, que leurs principaux concurrents n'offrent pas dans une mesure aussi importante. L'analyse des parts de marché exposée ci-dessus aux considérants 229 à 244 ainsi que l'enquête réalisée sur le marché confirment cette hypothèse. Tous deux disposent d'une large gamme de services qu'ils peuvent proposer à de grosses sociétés multinationales clientes. D'autres concurrents offrent une gamme de services étendue, mais MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert sont systématiquement très bien notées pour la majorité de leurs services, tandis que d'autres accusent de réels points faibles.

(268) Quatrièmement, la communication des griefs a fait valoir que la nouvelle entité et l'alliance Concert bénéficiaient toutes deux d'une image de marque solidement établie et étaient de ce fait en général perçues comme des fournisseurs très fiables offrant des prestations de grande qualité. Dans une bonne partie du monde, la nouvelle entité et l'alliance Concert disposent de leurs propres installations, ce qui leur permet de bien maîtriser la qualité de leur réseau et d'avoir une vaste couverture géographique. Les petits concurrents peuvent posséder des réseaux mondiaux de qualité, mais sont considérés sur le marché comme des détenteurs de réseaux "étroits", dont la largeur de bande pourrait se révéler insuffisante pour répondre aux exigences croissantes de la clientèle à l'avenir. De même, les deux oligopoleurs mettent à la disposition de leurs clients, dans le monde entier, les services d'assistance technique et de vente dont ceux-ci ont besoin.

(269) Enfin, contrairement aux autres acteurs du marché, la nouvelle entité et l'alliance Concert participent à la majorité des appels d'offres et obtiennent ainsi des renseignements beaucoup plus complets sur leurs concurrents et sur les différentes procédures qu'aucun concurrent de petite taille, qui ne peut prendre part à la totalité d'entre eux. D'après les données obtenues par la Commission sur les marchés gagnés/perdus, soit MCI WorldCom/Sprint soit l'alliance Concert sont présentes dans la majorité des procédures d'appels d'offres. Les informations reçues à ce sujet en provenance de BT, par exemple, montrent que, sur le total des appels d'offres lancés, l'attributaire est, dans de très nombreux cas, soit MCI WorldCom/Sprint, soit l'alliance Concert. En ce qui concerne C & W, il ressort de ses données que MCI WorldCom et l'alliance Concert figurent comme concurrents dans une proportion tout aussi considérable des marchés que cette société a perdus. Quant aux propres listes de MCI WorldCom relatives aux marchés gagnés ou perdus, les petits opérateurs n'y figurent guère, que ce soit comme attributaires ou comme principaux concurrents susceptibles de figurer sur la liste de présélection définitive. À l'inverse, dans la moitié des cas où MCI WorldCom n'a pas obtenu le marché, les soumissionnaires retenus étaient Sprint ou l'alliance Concert. D'après les données communiquées par AT & T à ce sujet, dans le cas où des marchés ont été attribués à de puissants concurrents, il s'agissait le plus souvent de MCI WorldCom ou de Sprint.

(270) De même, il convient de noter que MCI distribue les services de Concert depuis le démantèlement de l'accord avec BT, cependant que Sprint continuera à distribuer ceux de Global One et à honorer les contrats de cette dernière aux États-Unis pendant une période provisoire. Lors de la publication du prochain appel d'offres, la transparence du marché s'en trouvera ainsi renforcée au niveau de l'identité des clients et de la nature des services qu'ils utilisent.

(271) La communication des griefs a conclu que l'opération de concentration mettrait MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert quasiment à égalité sur le marché des services mondiaux de télécommunications.

2. Le jeu des appels d'offres

(272) La communication des griefs a en outre assuré que, étant donné la manière dont MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert participent toutes deux aux appels d'offres, la nouvelle structure de marché issue de l'opération de concentration prédisposera les deux sociétés à coordonner tacitement leur comportement.

(273) Deux scénarios sont possibles en matière d'appels d'offres. Dans le premier cas, il s'agit de renouveler ou de moderniser une offre de télécommunications pour laquelle soit la nouvelle entité soit l'alliance Concert est le fournisseur en place. Dans ce contexte, la communication des griefs a fait valoir que l'autre concurrent ne serait pas fortement incité à contester la position de l'opérateur en place. L'avantage dont bénéficie par nature l'opérateur en place en matière de coût (les coûts de transfert peuvent atteindre 20 %) renforce cette probabilité; de plus, les clients manifesteront des craintes compréhensibles sur les conséquences du changement (modification des connexions au réseau occasionnée par le passage d'un fournisseur à un autre, maintien du réseau en état de fonctionnement pendant le transfert). Un client a ainsi déclaré que s'il n'était pas satisfait de son fournisseur actuel, la différence par rapport à ce dernier en termes de rapport prix/efficacité devrait être suffisamment importante pour dépasser les coûts de la migration vers un nouveau fournisseur. Dans le second cas, ni la nouvelle entité ni l'alliance Concert n'est l'opérateur en place (autrement dit, il s'agit d'un nouvel acheteur de services mondiaux de télécommunications ou d'un nouveau service à fournir à une société déjà cliente en services mondiaux de télécommunications).

i) Le fournisseur déjà en place est MCI WorldCom/Sprint ou l'alliance Concert

(274) Lorsque, dans le cas d'un renouvellement de contrat, le fournisseur en place est soit la nouvelle entité soit l'alliance Concert, la communication des griefs affirme que l'autre aura intérêt à participer à la procédure d'appels d'offres, mais pas au point de mettre en danger la position de ce dernier. Le second oligopoleur retirera divers avantages de cette participation. Premièrement, il pourra ainsi obtenir des renseignements complémentaires qu'il pourra utiliser pour de futures offres. Il renforce en outre son image de soumissionnaire concurrentiel, tout en limitant, par sa simple présence, la capacité des tiers à constituer des prétendants sérieux dans la procédure d'appel d'offres.

(275) En s'abstenant de livrer une vive concurrence sur les prix lors de la deuxième étape, l'autre concurrent encourage l'opérateur en place à faire de même dans la situation inverse. Étant donné la fréquence des appels d'offres, cela se produira vraisemblablement à brève échéance. En outre, l'autre fournisseur, en favorisant le maintien de prix élevés, veille à ce que le marché dispose de renseignements sur les prix qui ne mettront pas en péril ce même type de stratégie dans d'autres appels d'offres où il sera l'opérateur en place.

ii) Le client est nouveau ou le fournisseur en place est un tiers

(276) Lorsque ni la nouvelle entité ni l'alliance Concert n'est l'opérateur en place, la communication des griefs affirme que les deux entités ont des chances égales de se voir attribuer le marché et savent qu'elles profiteront d'avantages dont ne disposent pas leurs concurrents de plus petite taille.

(277) La communication des griefs a décrit comme suit leur stratégie. Dans un premier temps, elle consistera donc à présenter une offre de services adaptés spécialement au client, que seules les deux sociétés seront, en principe, capables de proposer; autrement dit, au stade initial de la procédure d'appel d'offres, elles concourront essentiellement sur la base d'éléments autres que le prix. Ensuite, elles commenceront vraisemblablement par proposer des tarifs dans une fourchette donnée (même si, au moment où l'entreprise répond à l'appel d'offres, le prix n'est pas la question la plus importante). La partie supérieure de la fourchette se fondera sur des renseignements tirés de précédents appels d'offres, où aucune des deux sociétés n'était le fournisseur en place. La partie inférieure de la fourchette, en revanche, sera le prix maximal que pourront pratiquer les deux opérateurs pour exclure avec certitude, le cas échéant, d'autres soumissionnaires.

(278) La communication des griefs a assuré qu'il était dans l'intérêt tant de la nouvelle entité que de l'alliance Concert de remporter ces appels d'offres et d'acquérir des informations. Elles renforceront ainsi leur réputation de leaders auprès de leurs clients, tout en augmentant les barrières à l'entrée et à l'expansion des autres concurrents réels ou potentiels, qui devront supporter des coûts irrécupérables qu'eux-mêmes pourront financer par le biais de recettes découlant d'une clientèle préexistante. La situation plus favorable de MCI WorldCom/Sprint et/ou de l'alliance Concert en matière de renseignements sur les appels d'offres passés incite chaque entreprise à sacrifier des bénéfices à court terme en augmentant son prix, afin d'asseoir une réputation et d'appliquer à long terme des prix systématiquement plus élevés.

d) Caractère durable du comportement parallèle

1. Incitation à ne pas s'écarter du comportement parallèle

(279) La communication des griefs a constaté que, dans une situation où les appels d'offres sont fréquents, MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert auront toutes deux intérêt à ne pas déroger au comportement parallèle exposé au considérant 273. En optant pour un comportement parallèle, mais indépendant, chacune des entreprises court le risque que l'autre casse les prix lors de la dernière étape du processus d'appel d'offres et que ce premier marché soit ainsi perdu. Toutefois, étant donné que l'identité de l'attributaire est immédiatement connue, l'entreprise qui a triché se révèle elle-même comme une société non coopérative. Comme les appels d'offres sont fréquents, elle s'expose à des représailles et se prive par conséquent de bénéfices supplémentaires qu'elle aurait pu retirer à l'avenir d'un comportement parallèle. Si l'échéance est suffisamment longue (c'est-à-dire si le nombre d'appels d'offres où les deux leaders peuvent agir l'un sur l'autre est assez grand) la perte des bénéfices futurs dépasse le profit immédiat que procure le fait de tricher. Les chances des deux sociétés de participer à des appels d'offres et d'être retenues étant égales, elles ont donc intérêt à coordonner leur comportement. Les données transmises par BT indiquent que MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert ont pris part en 1999 à plus de 70 procédures de ce type.

(280) Il ressort des renseignements disponibles sur les marchés gagnés/perdus et des informations relatives à l'approvisionnement des 200 plus grandes entreprises que les sociétés connaissent l'identité du fournisseur en place de cette clientèle composée de grandes sociétés multinationales. Par exemple, selon Sprint: "L'équipe de suivi de client aura plus de chances de connaître les fournisseurs en place et d'en établir la liste. AT & T et MCI WorldCom étant les fournisseurs en place dans un nombre relativement important d'appels d'offres, ils seront probablement cités plus souvent que leurs concurrents qui ne sont pas aussi fréquemment dans cette situation."(71) Tout écart par rapport au comportement parallèle peut donc être facilement décelé.

(281) D'après la communication des griefs, pour certaines catégories de contrats, le scénario exposé au considérant 273 débouchera sur des prix supérieurs à ceux du marché et pour d'autres, les prix avoisineront ceux du marché. On peut faire valoir que les prix élevés ne pourront se maintenir pendant longtemps, étant donné que ces clients seront informés des prix inférieurs pratiqués dans le secteur. La communication des griefs a constaté que cela était peu probable pour les raisons suivantes. Premièrement, ces services sont différenciés et il est difficile pour les clients d'établir des comparaisons à partir des prix. De fait, même si les paramètres fondamentaux des coûts sont connus, les autres clients ignorent quels sont les besoins spécifiques d'un client donné. Deuxièmement, cet argument repose sur l'hypothèse selon laquelle les deux principaux acteurs auraient intérêt à se faire concurrence lorsque l'un d'entre eux est le fournisseur en place. Comme indiqué précédemment au considérant 275, cela n'est pas le cas. De même, les petits acteurs ne seront pas capables de défier l'opérateur en place, car ils devraient surmonter le problème du coût de transfert occasionné au client et les handicaps concurrentiels imputables au manque d'informations, au coût et à la qualité.

(282) Un autre argument consiste en outre à affirmer que l'augmentation, en valeur, du marché de la fourniture de services mondiaux de télécommunications encouragerait les sociétés à se démarquer du comportement parallèle. La communication des griefs a répondu comme suit à cet argument. Une fois traduite en nombre de clients, cette croissance est nettement plus faible, car les nouvelles sociétés qui ont des besoins en télécommunications mondiales sont peu nombreuses. De plus, étant donné que la nouvelle entité et l'alliance Concert ont des chances égales de gagner de nouveaux marchés, le fait de se livrer concurrence ne remet pas en cause la stabilité de leur comportement parallèle. Cela aura plutôt pour effet de les enraciner plus profondément dans leurs positions d'oligopoleurs en position dominante, car les petits acteurs auront encore plus de difficultés à obtenir de gros clients, et leur réputation en sortira grandie.

2. Les petits concurrents et les nouveaux entrants ne seront pas capables de remettre en question le comportement parallèle

(283) La communication des griefs a indiqué que les petits concurrents seront très probablement incapables, pour trois raisons essentielles, de soumissionner avec succès contre les deux leaders du marché.

(284) Premièrement, ils ne présentent pas les mêmes qualités générales que les deux principaux opérateurs du marché. Comme le montrent les notes que leurs concurrents leur ont attribuées, MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert disposent d'une couverture globale excellente, d'un réseau mondial fiable doté d'une importante largeur de bande sur les principaux marchés; leur offre de produits est également très bonne et englobe tant les anciennes technologies, pour lesquelles il existe toujours une demande, que les nouvelles, sur lesquelles semblent compter les nouveaux arrivants potentiels.

(285) Deuxièmement, en ce qui concerne les coûts et l'information sur les prix, les concurrents ne bénéficient pas du même avantage que MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert. S'il veut être dynamique et avoir une chance de gagner au terme du processus d'appel d'offres, le soumissionnaire devra absolument disposer d'un avantage au niveau des coûts et d'informations sur les prix; en effet, la participation à un appel d'offres est très coûteuse et, sans cet avantage, il est extrêmement difficile de soutenir cet effort. En réalité, les concurrents n'ont pas les mêmes systèmes perfectionnés d'information sur les prix et d'orientation des coûts, associés aux importantes économies d'échelle et de gamme dont bénéficient les parties notifiantes et l'alliance Concert. Enfin, la communication des griefs a fait valoir qu'ils ne possédaient pas de clientèle aussi considérable, indispensable pour maîtriser les coûts, et étaient privés d'accès, faute d'informations sur l'évolution passée des prix des offres, à d'utiles renseignements sur les coûts supportés par leurs rivaux. Les appréciations systématiquement élevées des concurrents sur MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert le confirment, aucun autre concurrent n'obtenant de notes aussi bonnes.

(286) En réalité, les concurrents auront sans doute intérêt à suivre les signaux émis par les deux acteurs principaux au niveau des prix. S'ils déclenchaient des guerres de prix afin de gagner des clients, en supposant qu'ils soient capables d'atteindre la deuxième étape du processus d'appel d'offres, les petits concurrents risqueraient fort de voir les deux oligopoleurs proposer des prix très concurrentiels, ce qui, au bout du compte, aurait pour effet de les éliminer du marché. Les deux grands acteurs du marché pourraient supporter cette situation, car les petits opérateurs participent à beaucoup moins d'appels d'offres qu'eux-mêmes. Rester sur le marché pourrait rapidement se révéler non rentable en cas d'échecs répétés. Les deux principaux acteurs pourront également orienter des actions de représailles contre un petit concurrent donné, en disputant âprement les appels d'offres pour lesquels ce dernier sera l'opérateur en place.

(287) Lorsqu'un nouvel arrivant souhaitera soumissionner, il sera confronté aux points forts des deux leaders, qui bénéficieront toujours d'un avantage comparatif considérable. Un nouveau concurrent devra effectuer d'importants investissements dans la capacité du réseau, les points de présence et les équipes de ventes, ce qui impliquera des coûts que MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert auront déjà amortis. Par conséquent, tout au moins pour les premières séries d'appels d'offres, alors que les opérateurs en place pourraient être prêts à baisser le prix de leur offre jusqu'au niveau de leurs coûts moyens variables, les nouveaux venus ne présenteront pas d'offre inférieure à leur coût total moyen. Un nouveau soumissionnaire potentiel peut être plus efficace que l'opérateur en place, mais ce dernier sera toujours en mesure de casser les prix, dissuadant ainsi toute éventuelle entrée. La communication des griefs a constaté que MCI WorldCom/Sprint et l'alliance Concert seraient de ce fait capables d'obtenir le renouvellement du contrat existant à des conditions non concurrentielles.

(288) Ladite communication a aussi montré que la durée de la procédure de chaque appel d'offres pouvait aussi constituer un motif de dissuasion supplémentaire. Même si le nouvel arrivant pensait avoir des chances de gagner un marché, il devrait prendre en considération la période qui s'écoulera avant qu'il ne perçoive des recettes.

(289) La communication des griefs a en outre laissé entendre que la présence de MCI WorldCom/Sprint et de l'alliance Concert en tant que concurrents sur un certain nombre d'autres marchés augmentait les possibilités de représailles. Ceux-ci comprennent la connectivité internet de niveau 1, la téléphonie longue distance et internationale aux États-Unis et en Europe et la propriété de la capacité fournie par des câbles internationaux. Ces activités exercées sur d'autres marchés permettent aux sociétés en position dominante conjointe de continuer à discipliner celui des services mondiaux de télécommunications, car la possibilité de sanction sur un autre marché se trouve de ce fait accrue.

(290) Au vu de ce qui précède, la communication des griefs a conclu qu'il est très probable que ni les petits concurrents ni les nouveaux arrivants ne seront capables d'empêcher ce comportement parallèle.

3. Les clients ne seront pas en mesure de remettre en question le comportement parallèle

(291) D'après la communication des griefs, rien n'indique, du côté de la demande, que les clients exercent des pressions empêchant ce comportement parallèle. Elle affirme que même s'ils envisagent, pour une raison ou une autre, de changer de fournisseur, les solutions disponibles sont coûteuses. Ils peuvent revenir à la solution de la fourniture interne qui, même si elle est possible (ce qui, d'après les réponses des clients, est peu vraisemblable), serait coûteuse et longue à mettre en œuvre. Toutefois, des clients ont indiqué que "[l]a société aura besoin de ces services, donc, la question ne se pose pas, nous devrons les acheter." ou "[e]n cas de hausse uniforme du prix d'un service en particulier, nous serons probablement obligés de continuer à l'acheter". Le degré de perfectionnement croissant des services proposés aux multinationales, ainsi que la durée, le coût et les complications considérables inhérents à un changement de fournisseur, conjugués à la diminution du nombre des acteurs effectivement présents sur le marché, sont autant d'éléments qui affaiblissent l'influence du client sur le fournisseur.

(292) Selon la communication des griefs, la solution de remplacement dont dispose un client qui choisirait de passer de MCI WorldCom/Sprint ou de l'alliance Concert à un autre fournisseur consisterait à conclure un contrat avec un fournisseur plus petit et de qualité inférieure, et à procéder par ses propres moyens à une certaine intégration de services, ce qui l'exposerait à des coûts supplémentaires et pourrait mettre en danger la fiabilité du réseau. Cela incitera encore plus fortement les clients à conserver comme fournisseur une des deux sociétés.

e) La réponse des parties à la communication des griefs

Procédure d'appel d'offres

(293) Les parties ont signalé quatre erreurs dans l'analyse du marché concurrentiel des appels d'offres par la Commission. Premièrement, elles ont indiqué que les procédures d'appel d'offres ne se déroulaient pas toutes en deux étapes. En effet, après réception des offres, certains clients en retiennent une et éliminent toutes les autres; dans ce cas, la seconde étape visée au considérant 78 n'intervient pas. Deuxièmement, les parties ont fait valoir que la Commission n'accordait pas au prix l'importance qui lui revient dans la procédure d'appel d'offres, importance qui a d'ailleurs été soulignée par certains clients dans leur réponse. Troisièmement, elles contestent la thèse de la Commission selon laquelle il est nécessaire de posséder sa propre infrastructure pour fournir des services mondiaux de télécommunications et être un soumissionnaire crédible, et prétendent que cette condition n'est pas imposée par les clients.

(294) Par ailleurs, elles avancent que même si la procédure d'appel d'offres se déroulait en une étape au lieu de deux, une coordination tacite pourrait toujours être possible. Tous les avantages liés à l'asymétrie des informations, à une plus grande expérience en matière de soumission et à un niveau de coûts plus bas seraient tout aussi déterminants dans le cadre d'autres formes d'appels d'offres, étant donné que l'acheteur devrait nécessairement opérer une première sélection, implicite ou explicite, des soumissionnaires en fonction de la qualité.

Création d'une position dominante collective

(295) Les parties ont invoqué quatre arguments principaux pour démontrer que l'opération de concentration n'entraînerait pas la création d'une position dominante collective de MCI WorldCom/Sprint et de l'alliance Concert. Premièrement, comme cela a été indiqué au considérant 248, les parties ont déclaré que l'opération n'aurait qu'une incidence négligeable sur le marché et la part de marché cumulée de la nouvelle entité. Deuxièmement, comme cela a également été mentionné plus haut, les parties n'estiment pas que l'alliance Concert puisse être considérée comme une seule entité avec une part de marché globale. Troisièmement, les parties ont avancé que, à l'issue de l'opération de concentration, la notion de position dominante collective n'aurait aucun fondement économique sur le marché de la fourniture des services mondiaux de télécommunications. Les parties ont notamment expliqué que sur les marchés des appels d'offres, les fournisseurs étaient en mesure d'appliquer des prix différents à leurs clients. En outre, elles ont indiqué que les entreprises détenant une petite part de marché, comme Equant et Cable & Wireless, pouvaient effectivement influencer le comportement d'entreprises dotées d'une part de marché plus importante. Enfin, elles ont prétendu que la conclusion selon laquelle l'opération entraînerait la création d'une position dominante collective était dénuée de fondement juridique.

(296) En ce qui concerne les motifs de droit pouvant justifier une telle conclusion, les parties citent, entre autres, l'arrêt Kali und Salz, et déclarent que la Commission doit établir qu'il existe une croissance modérée de la demande, que cette dernière est inélastique et que la puissance d'achat des clients est négligeable pour conclure à l'existence d'une position dominante collective. L'offre doit être hautement concentrée, le marché très transparent, le produit homogène, la technique de production arrivée à maturité, les barrières à l'entrée élevées et les fournisseurs doivent avoir des liens financiers et des contacts avec plusieurs marchés. Les parties ont fait valoir que la communication des griefs portait uniquement sur l'homogénéité des produits, l'importance des barrières à l'entrée, la transparence du marché, l'inélasticité et la stagnation de la demande, la maturité de la technique de production et les représailles, mais sans démontrer aucun de ces points. En outre, elles ont allégué que la communication des griefs négligeait un critère essentiel, pris en compte dans l'affaire Gencor/Lonrho, à savoir la puissance d'achat compensatrice des clients.

(297) Les parties imputent à la Commission une analyse erronée de l'offre sur le marché des services mondiaux de télécommunications. Premièrement, elles avancent que la Commission ne rend pas précisément compte du caractère hétérogène des produits offerts aux clients. Deuxièmement, elles affirment que l'analyse des coûts réalisée par la Commission est contradictoire et que les fournisseurs n'ont pas tous les mêmes structures de coûts. Elles contestent la conclusion de la Commission selon laquelle le marché des services mondiaux de télécommunications est homogène, en faisant valoir qu'il n'existe pas d'ensembles de services identiques et que ces ensembles sont personnalisés pour répondre aux besoins de chaque client.

(298) En ce qui concerne les barrières à l'entrée, les parties prétendent qu'aucun des éléments suivants ne constitue une barrière élevée à l'entrée sur le marché des services mondiaux de télécommunications: les marques, la clientèle existante, les coûts de participation aux appels d'offres, l'expérience en matière de soumission et le fait de posséder sa propre infrastructure.

(299) Les parties ont expliqué que la quantité d'informations fournie aux soumissionnaires au cours de la procédure d'appel d'offres est bien moindre que ne l'indique la communication des griefs.

(300) Les parties ont allégué dans leur réponse que le marché connaissait actuellement une croissance rapide et que la demande était sensible au prix contrairement à ce qui est indiqué dans la communication des griefs. Elles ont déclaré que les changements technologiques étaient rapides sur ce marché et que les clients exigeraient les nouvelles technologies une fois qu'ils seraient convaincus qu'elles peuvent répondre à leurs besoins. Les parties ont conclu que toute possibilité de représailles signifierait que ce marché fonctionne comme une entente.

(301) Enfin, les parties ont affirmé que la communication des griefs méconnaissait complètement la puissance d'achat des utilisateurs de services mondiaux de télécommunications, alors que ces derniers ont une taille suffisante, sont exigeants, disposent de suffisamment d'informations et imposent la durée des contrats. Les parties ont indiqué que les acheteurs étaient difficiles et jouissaient d'une puissance d'achat compensatrice. En particulier, elles ont souligné le rôle des consultants qui agissent pour le compte des clients ainsi que la tendance des entreprises à recourir aux services de plusieurs fournisseurs afin de pouvoir passer de l'un à l'autre à un coût inférieur à celui d'un nouvel appel d'offres.

Conclusion

(302) La Commission reconnaît qu'elle n'a pas été en mesure de démontrer que des concurrents existants, tels qu'Equant et Cable & Wireless, n'exerçaient pas de pressions concurrentielles sur les parties à la concentration ni sur l'alliance Concert. Or, si de telles pressions concurrentielles existaient, cela signifierait que les clients pourraient contrebalancer tout comportement parallèle des deux leaders du marché. En effet, ils pourraient favoriser l'émergence d'autres leaders en concluant des contrats avec de plus petits concurrents existants. Par conséquent, la Commission n'a pas pu démontrer que l'un des principaux critères permettant d'affirmer qu'une opération entraînera la création d'une position dominante collective - c'est-à-dire l'absence de possibilité pour les acheteurs (la demande) de contrebalancer la position des possibles oligopoleurs - était rempli. Indépendamment de la question du bien-fondé des autres arguments invoqués par les parties dans leur réponse, la Commission a décidé de ne plus élever d'objection à l'égard du marché de la fourniture des services mondiaux de télécommunications.

C. TÉLÉPHONIE VOCALE INTERNATIONALE

(303) En ce qui concerne le marché de la téléphonie vocale internationale, la Commission a reçu un certain nombre de commentaires d'opérateurs américains et communautaires qui estiment que la concentration aboutira à la création d'une position dominante sur le marché de la téléphonie vocale en raison de l'importance de la position que les parties occuperont, avec AT & T, sur les marchés américains de la téléphonie longue distance au détail et en gros.

(304) Après avoir examiné les problèmes de concurrence soulevés par des tiers, la Commission est parvenue à la conclusion que s'il devait y avoir un risque de création ou de renforcement d'une position dominante, au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations, sur le marché de la téléphonie vocale internationale, il serait la conséquence de la position dominante détenue par les parties sur les marchés intérieurs de la téléphonie longue distance au détail et/ou en gros aux États-Unis. Il n'est pas certain, en revanche, qu'une position dominante exercée sur un autre marché aboutisse à la création ou au renforcement d'une position dominante dans l'Union européenne. On ne peut donc pas affirmer que la concentration entre les parties sur les marchés longue distance américains aura des effets immédiats, sensibles et prévisibles sur le marché communautaire.

(305) Les deux principaux moyens dont dispose un opérateur européen pour transmettre des appels téléphoniques entre l'Europe et les États-Unis sont les suivants:

- l'opérateur européen qui achemine l'appel téléphonique peut convenir avec un opérateur américain qu'il lui transmettra le trafic à un point virtuel situé au milieu de l'Atlantique (demi-circuit). Ce type d'accord fait l'objet de négociations commerciales et il n'y a généralement compensation financière que si l'une des parties envoie plus de minutes d'appels téléphoniques que l'autre. La condition sine qua non pour qu'une telle transaction ait lieu est que chaque opérateur soit susceptible d'apporter un nombre de minutes au moins équivalent à celui apporté par l'autre;

- l'opérateur européen peut aussi posséder un circuit intégral à travers l'Atlantique et passer un contrat avec un opérateur américain pour que celui-ci achemine ensuite les appels jusqu'à leur destination sur le territoire américain.

(306) Dans les deux cas, l'appel suivra le même itinéraire une fois qu'il sera arrivé aux États- Unis. Il sera tout d'abord acheminé par des opérateurs longue distance vers un commutateur local ou régional et ensuite, le cas échéant, amené à son point de terminaison par un opérateur local. Les consommateurs finals achètent généralement les services de téléphonie de la boucle locale à des opérateurs locaux et les services longue distance (y compris les services internationaux) à des opérateurs longue distance.

(307) AT & T, MCI WorldCom et Sprint sont les trois leaders incontestés du marché longue distance au détail. Cette position semble notamment être due à la notoriété élevée de leurs marques auprès des consommateurs finals. Ces trois sociétés sont également les seuls opérateurs propriétaires d'un réseau couvrant l'intégralité du territoire américain. Certains autres opérateurs possèdent des réseaux qui couvrent une partie importante de ce territoire, alors que d'autres sont de simples revendeurs d'acheminement longue distance. Cette diversité des opérateurs longue distance s'est traduite par la mise en place d'un marché longue distance de gros généralement caractérisé comme concurrentiel.

(308) Le projet de concentration entre MCI WorldCom et Sprint ramènera le nombre des opérateurs longue distance américains de niveau 1 de trois à deux. Plusieurs plaignants ont expliqué que cela entraînerait une augmentation des prix des appels internationaux entre les États-Unis et l'Europe. Deux théories ont été exposées à la Commission.

(309) D'après la première, AT & T et MCI WorldCom/Sprint pourront, après la concentration, utiliser leur couverture unique du territoire américain sur le marché longue distance pour s'assurer une position dominante collective sur le marché longue distance de gros. Elles pourraient dicter leurs conditions aux opérateurs européens qui souhaiteraient passer un accord de compensation avec elles pour leurs appels internationaux ou leur demanderaient d'acheminer en longue distance les appels qu'eux-mêmes auront transportés jusqu'au territoire américain.

(310) Il est toutefois improbable que la concentration puisse avoir un tel effet. Les parties ont montré que la concentration ne ramènerait le nombre des opérateurs longue distance à deux que sur 12 territoires locaux. Or, ces zones (par exemple certaines parties du centre-ouest des États-Unis ainsi que l'Alaska) sont peu peuplées et représentent moins d'un point de pourcentage du total des appels longue distance aux États-Unis. En outre, même les plaignants ont admis qu'il ne serait pas facile, pour AT & T ou MCI WorldCom/Sprint, de regrouper leur offre longue distance vers ces régions isolées avec les services longue distance vers le reste du territoire américain. Toutefois, cette appréciation repose sur l'hypothèse selon laquelle le ou les marchés longue distance au détail resteront concurrentiels. Si ce n'était pas le cas, il serait possible que les parties abusent de leur position dominante sur le marché longue distance au détail et éliminent leurs concurrents grossites du marché, en internalisant leurs achats courants sur le marché de gros ou par d'autres types de comportement.

(311) La seconde théorie porte sur le marché au détail de la téléphonie longue distance. La concentration aboutirait à la création d'un duopole AT & T et MCI WorldCom/Sprint sur ce marché. Grâce à cette position, ces deux opérateurs pourraient s'assurer la plus grande partie des minutes de téléphonie internationale qui seront échangées avec les opérateurs européens. Cela assurerait aux deux sociétés un fort pouvoir de négociations vis-à-vis de ces opérateurs européens et elles pourraient ainsi leur imposer leurs conditions lors des négociations sur la compensation financière des appels échangés.

(312) Toutefois, tant que le marché longue distance de gros demeurera concurrentiel, les opérateurs européens auront la possibilité de transporter les appels sur leurs propres circuits transatlantiques et de recourir ensuite au marché longue distance de gros pour les faire acheminer directement vers leur point de terminaison plutôt que d'avoir recours à des accords de compensation.

(313) C'est pourquoi, si elle veut prouver que la concentration aura des effets anticoncurrentiels sur les marchés de la téléphonie vocale internationale, la Commission devra tout d'abord établir que la nouvelle entité occuperait une position dominante collective avec AT & T sur le ou les marchés longue distance au détail et, ensuite, que AT & T, MCI WorldCom et Sprint seraient en mesure d'étendre cette domination au marché longue distance de gros. Or, une telle extension de la position dominante ne semble pas suffisamment prévisible et immédiate pour habiliter la Commission à trancher sur cet aspect de l'opération en vertu du règlement sur les concentrations.

(314) En supposant qu'il y ait position dominante sur le marché longue distance au détail, il semble difficile de prévoir qu'elle se traduirait nécessairement par une position dominante sur le marché de gros. En effet, sur ce marché, la demande n'émane pas uniquement de détaillants, mais également de clients tels que de grosses sociétés ou de grands opérateurs étrangers. Même si l'entité fusionnée et AT & T décidaient chacune d'intégrer leurs activités verticalement et de cesser d'acheter sur le marché de gros, l'offre et la demande émanant du reste du marché seraient toujours en mesure de s'équilibrer. Il faudrait sans doute que les parties abusent délibérément de leur position dominante sur le marché longue distance au détail pour qu'elles parviennent à une position dominante sur le marché de gros. Il est donc impossible de conclure que la position dominante qui sera celle des parties sur le marché longue distance au détail aura des conséquences immédiates et prévisibles sur le marché de la téléphonie vocale internationale.

(315) La Commission n'est donc pas habilitée à examiner les effets de la concentration sur les marchés longue distance aux États-Unis en vertu du règlement sur les concentrations.

VI. ENGAGEMENTS

(316) Le 8 juin 2000, les parties notifiantes ont remis à la Commission un engagement relatif à la cession de l'activité internet de Sprint. Le texte de cet engagement est joint à la [version confidentielle de la présente décision]*. Le 27 juin 2000, les parties ont retiré cet engagement.

A. RÉSUMÉ DE L'ENGAGEMENT PROPOSÉ

1) ACTIVITÉS

(317) Les parties proposent de céder des activités de Sprint dans le domaine de l'internet public (ci-après dénommées "Sprint Internet"). Ces activités comprennent les services suivants.

Accès internet par ligne spécialisée

(318) Également appelé SprintLink, ce service offre un accès continu à haut débit à l'internet par l'intermédiaire de la dorsale Sprint, à des débits allant de 56 Kbps à 2,5 Gbps (OC48). Le service SprintLink est accessible dans le monde entier par l'intermédiaire de 320 points de présence aux États-Unis et six points de présence en Europe.

Accès internet par ligne commutée

(319) Également appelé DialNet, ce service fournit un accès internet par ligne commutée 56 Kbps et ISDN, ainsi que les services y afférents, aux FSI et aux clients de détail, en les reliant aux réseaux Sprint par l'intermédiaire de plus de 450 points de présence situés sur tout le territoire américain. Le service DialNet est également vendu à plus de [...]* clients commerciaux et entreprises aux États-Unis sous forme d'un service d'accès à distance appelé "IP Dial", qui permet aux entreprises de fournir à leurs salariés qui se déplacent dans le monde un accès sécurisé par ligne commutée aux intranets et aux extranets, ainsi qu'à l'internet.

Réseaux internet privés virtuels

(320) Le service "réseaux internet privés virtuels" de Sprint Internet est un service de protocole réseau amélioré qui permet aux entreprises d'établir des liaisons continues, rapides et sécurisées avec des employés, des clients et des partenaires géographiquement éloignés, sur les réseaux Sprint d'accès à l'internet par ligne spécialisée ou commutée.

Hébergement internet

(321) Ces services permettent aux sociétés de gérer leurs contenus et applications internet sur une infrastructure partagée gérée par Sprint Internet dans ses noeuds de réseaux et centres de données.

Sécurité gérée

(322) Ces services sont destinés à protéger le trafic internet et les réseaux internes des clients contre tout accès non autorisé. Sprint Internet fournit par exemple un pare-feu géré entièrement intégré et des services d'authentification des utilisateurs, tels que les logiciels SecureID et ACE/Server, avec toute une série de solutions sécurité IP gérées.

2) ACTIFS

(323) Les engagements proposés comprennent l'ensemble des routeurs, serveurs, modems, ports, noms de domaine et serveurs d'authentification pour l'accès à l'internet, serveurs d'hébergement sur l'internet, serveurs pour les réseaux de lignes commutées ainsi que les autres équipements jugés nécessaires par les parties pour exploiter Sprint Internet, tant aux États-Unis qu'à l'échelle internationale.

(324) Les parties ont proposé, le cas échéant, de mettre des systèmes, des infrastructures et du personnel partagés à la disposition de l'acquéreur des activités cédées. [...]*

(325) [...]*

(326) Les parties proposent, si l'acquéreur le désire, de conclure avec lui un ou plusieurs accords d'assistance liés aux réseaux, afin, selon les parties, de donner son plein effet à la cession proposée. [...]*

(327) Cette proposition englobe les accords suivants:

- Accord sur les infrastructures de réseau [...]*.

- Accord de transport sur réseaux [...]*.

- Accord d'accès local [...]*.

3) PERSONNEL

(328) D'après les parties, Sprint Internet disposera de [...]* à [...]* salariés spécialisés, y compris plus de [...]* professionnels de l'exploitation et de l'ingénierie et plus de [...]* personnes spécialisées dans la vente et l'après-vente, aux États-Unis et en Europe. Les parties expliquent que ces personnes possèdent l'expérience en matière de développement, de conception, de commercialisation, de vente, de fourniture, d'intégration, de gestion et d'entretien des infrastructures de réseaux et des services internet, qui est nécessaire pour exploiter Sprint Internet.

(329) En ce qui concerne le personnel de vente, les parties font valoir que Sprint Internet utilise actuellement de multiples canaux de vente et d'après-vente pour répondre à la demande. Ces canaux comprennent [...]*.

(330) En décembre 1999, Sprint a créé une [...]*. D'après les parties, ces services sont souvent achetés par des cadres et sont très importants pour permettre à une société de se différencier de ses concurrents. [...]*

(331) Enfin, les parties ont également expliqué que, en 1999, [...]*.

(332) Les parties se sont engagées à ne pas employer les salariés transférés par Sprint chez l'acquéreur sans l'autorisation préalable de celui-ci, et ce pendant une période dont les parties en cause conviendront après la vente de Sprint Internet. En outre, pendant une période dont les parties conviendront après la vente de Sprint Internet, ni WorldCom/Sprint ni l'acquéreur ne pourront solliciter un salarié de l'autre partie travaillant dans certaines activités internet sans l'autorisation de la partie en cause.

4) CLIENTS

(333) Les parties envisagent de céder l'intégralité de la clientèle de Sprint, y compris les FSI, les petites entreprises clientes pour l'accès à l'internet, les gros clients commerciaux, les clients du service public ainsi que les fournisseurs d'hébergement internet.

(334) Les informations sur la clientèle, telles que les fichiers clients et les données historiques relatives à la fourniture de services internet à cette clientèle, ainsi que tous les contrats en cours conclus avec des clients Sprint Internet du marché de gros et de détail, seront transférées à l'acquéreur.

(335) Il est possible que le transfert de certains contrats ne puisse se faire qu'avec le consentement du client. Pour ces contrats, Sprint mettra tous ses efforts en œuvre afin d'obtenir l'autorisation nécessaire, en proposant tous les avantages financiers supplémentaires éventuellement jugés nécessaires. En ce qui concerne les contrats pour lesquels l'autorisation nécessaire ne pourrait être obtenue, MCI WorldCom/Sprint s'engage à conserver le trafic et à céder les revenus y afférents à l'acquéreur.

(336) Les parties notifiantes s'engagent à ne pas démarcher de clients de Sprint Internet qui ne soient pas également clients de MCI WorldCom pour les services internet à la date de clôture, dans le but de leur proposer le service d'accès à l'internet qu'ils achètent à Sprint Internet. [...]*. Il n'existe aucune clause particulière de non-démarchage pour les services internet autres que la disposition relative à l'accès par ligne spécialisée.

(337) En outre, les parties s'engagent à ne prendre avant la clôture aucune mesure de nature à provoquer le transfert d'activités internet de Sprint à MCI WorldCom, ou de garder ces activités en multihébergement sur les réseaux MCI WorldCom, au-delà de ce qui est nécessaire à la poursuite ordinaire des affaires.

5) CRÉATION D'UNE UNITÉ AUTONOME

(338) [...]*

B. APPRÉCIATION

(339) Compte tenu de la forte croissance de l'internet et de l'importance que le client attache à la qualité du service, toutes les activités devant faire l'objet d'une cession devront pouvoir concourir pleinement et effectivement à compter de la date du transfert de propriété. Toutes les difficultés que rencontrerait l'entité cédée limiteraient sa croissance et entraîneraient rapidement une diminution relative de sa part de marché. Il est très improbable, en raison de la combinaison des incertitudes exposées ci-dessous, que l'entité cédée puisse exercer des pressions concurrentielles sur les parties à court ou à moyen terme. En outre, le texte des engagements pose de nombreuses questions qui ne font qu'augmenter les incertitudes quant à l'efficacité de la mesure corrective proposée.

(340) Les engagements proposés suscitent des doutes fondamentaux pour au moins six raisons: i) l'étendue des services cédés est trop faible; ii) l'entité cédée n'aurait guère la possibilité de retenir sa clientèle; iii) il existe de nombreuses incertitudes quant à l'expérience et au savoir-faire du personnel qui sera transféré; iv) l'entité cédée restera dépendante de MCI WorldCom/Sprint pour la poursuite de son exploitation et toute tentative pour la rendre indépendante coûtera du temps et de l'argent; v) tout contrôle sera difficile à exercer, et vi) il existe des incertitudes quant à certains des actifs qui seront transférés.

1) L'ÉTENDUE DES SERVICES À CÉDER EST TROP FAIBLE

(341) Les engagements proposés portant sur la cession des activités relatives à la vente de services d'accès à l'internet par ligne spécialisée, la vente de services d'accès à l'internet par ligne commutée, la vente de services d'hébergement sur l'internet, la vente de services de pare-feu ainsi que la vente de services de réseau internet privé virtuel. L'ensemble des services que les parties proposent de céder se trouvent sur l'internet public. Or, il existe d'autres services utilisant le protocole internet (appelés services IP) que les parties ne proposent pas d'inclure dans la cession. Elles font valoir que seuls les services IP offerts sur l'internet public devraient être cédés.

(342) Toutefois, le protocole internet (IP) utilisé pour acheminer les données créées est également utilisé pour acheminer des données pour des services du type "réseau virtuel privé" (intranets, extranets, téléphonie sur internet, etc.) ainsi que d'autres services améliorés. En général, de tels services ne font pas appel à l'internet public, mais ils sont parfois en partie acheminés par ce canal.

(343) En outre, les services sur l'internet public, ainsi que d'autres services acheminés par IP, sont fournis en utilisant une partie ou l'ensemble des infrastructures de réseaux (installations de transmission, routeurs, commutateurs et modems reliés aux installations de transmission). Ces infrastructures internet sont également utilisées pour les besoins de Sprint dans le domaine des télécommunications (voix et données).

(344) Des tiers ont expliqué à la Commission, lors de son enquête, que l'inclusion des intranets, extranets et autres services améliorés acheminés par IP dans l'ensemble des activités à céder est nécessaire afin de garantir que l'entité cédée soit pleinement concurrentielle. Premièrement, d'après les tiers en question, ce sont ces services qui ont le potentiel de croissance le plus élevé de tous les services liés à l'internet (jusqu'à plus de 200 % de taux de croissance entre 1999 et 2000). Deuxièmement, les clients achètent généralement ce type de services auprès du même fournisseur que celui qui leur fournit l'accès à l'internet. Enfin, ils achètent également des ensembles de services qui comprennent à la fois des services internet et non-internet, tels que l'ATM et les services de ligne privée. Comme la puissance de marché du fournisseur de connectivité internet de niveau un est due à la fois à son réseau et à sa clientèle, toute cession devrait comprendre l'ensemble de ces composantes.

(345) C'est d'ailleurs la position qu'avait défendue Sprint dans ses déclarations à la Commission dans le cadre de la procédure WorldCom/MCI en 1998 [...]*(72).

(346) Dans l'affaire WorldCom/MCI, la Commission avait estimé qu'il n'était pas nécessaire d'inclure les services IP améliorés, pour trois raisons. Premièrement, elle faisait valoir que certains réseaux privés virtuels basés sur IP pourraient aussi être basés sur d'autres protocoles, tels que X25, Frame Relay ou ATM, et que la composante internet du réseau privé virtuel pourrait être faible. Deuxièmement, elle expliquait que les intranets ou les extranets étaient en général moins complexes à fournir qu'un internet public et en principe plus faciles à exploiter, et qu'ils ne nécessitaient donc pas les compétences spécialisées requises pour l'internet dans son ensemble. Troisièmement, elle doutait que l'offre de services tels qu'un intranet ou un extranet puisse constituer une passerelle vers l'offre de services internet.

(347) L'étude du marché réalisée par la Commission dans la présente affaire a montré que ces conclusions n'étaient désormais plus valables. La tendance actuelle du secteur est d'optimiser l'utilisation du protocole internet en limitant au maximum la superposition de couches de protocole dans les infrastructures, ainsi que le montrent les choix technologiques de Sprint et de tierces parties. Quel que soit le protocole de transport utilisé (IP, relais à trames ou ATM), les applications et les services sont basés sur IP [...]*(73). Pour ce qui est du niveau de complexité de la fourniture de services IP améliorés, il ressort des déclarations des parties elles-mêmes ainsi que de celles communiquées par des tiers que ces services sont généralement taillés sur mesure en fonction des besoins des clients et qu'ils sont par définition complexes. Enfin, en ce qui concerne le lien entre l'offre de services sur l'internet public et l'offre de services IP améliorés, il convient de noter que tous les grands fournisseurs d'accès à l'internet fournissent les deux catégories de services. Tant les tiers qui se sont exprimés que Sprint estiment que les clients achètent de plus en plus un ensemble de services et de produits, ainsi que des solutions globales.

2) L'ENTITÉ CÉDÉE N'AURAIT GUÈRE LA POSSIBILITÉ DE RETENIR SA CLIENTÈLE

(348) [...]*

La clientèle pour les services internet et les services de télécommunications

(349) [...]*. Certains tiers ont expliqué que si l'on combine les connexions vers les locaux d'un client, le regroupement des services internet et des services de télécommunications permet de réaliser des économies d'échelle.

(350) Conformément aux calculs effectués par la Commission à partir de données fournies par Sprint, environ [...]* % des recettes internet de Sprint pour l'année 1999 proviennent de clients qui ne lui ont acheté que des services internet. L'entité fusionnée continuera donc à être en contact avec [...]* % (en termes de recettes) des clients. Lorsque ces contrats viendront à échéance [...]*, il est possible que ces clients reviennent vers l'entité fusionnée. Les parties ont tenté de résoudre ce problème en proposant dans leurs engagements une clause de non-démarchage, qui est appréciée aux considérants 358 et suivants.

(351) De même, à l'exclusion du contrat conclu par Sprint avec [...]*, [...]* % du chiffre d'affaires de Sprint Internet a été généré par des clients ([...]* % en nombre des clients) qui dépensent au moins autant pour les services internet que pour les autres services de télécommunications qu'ils achètent à Sprint.

(352) Cela signifie que, après la cession proposée, MCI WorldCom/Sprint conservera les informations sur les besoins des clients, les spécificités techniques, etc. Cette rétention d'informations sur la clientèle sera aggravée par deux autres facteurs.

(353) Premièrement, [...]*.

(354) Deuxièmement, MCI WorldCom/Sprint aura de toute façon besoin de personnes qui pourront répondre aux autres besoins en matière de télécommunications de la plupart des clients internet [...]*. D'après la façon dont la cession proposée est structurée, il semble qu'un nombre important de gestionnaires clients ou d'autres personnes ayant des connaissances sur les comptes clients ne seront pas transférés. Cela est certainement vrai en ce qui concerne les clients qui dépensent plus en services de télécommunications qu'en services internet ([...]*). Sprint conservera ainsi des informations sur les besoins des clients dans le domaine de l'internet et conservera des relations avec la plupart des clients de l'entité cédée.

Clients multihébergés de MCI WorldCom et Sprint

(355) [...]*. Sur la base des informations fournies par les parties, que celles-ci décrivent comme incomplètes, il semble que [...]* % des recettes Sprint Internet liées à [...]* pour 1999 aient été générés par des clients qui achètent également des services internet à MCI WorldCom. [...]*

(356) La conséquence [...]* du multihébergement chez Sprint Internet et MCI WorldCom est que, outre les informations générales que Sprint détiendra sur les clients pour les autres services de télécommunications, l'entité fusionnée continuera à fournir des services internet à de nombreux clients de l'entité cédée. Les parties ont fait valoir qu'il est très facile pour un client de déplacer sa demande chez l'un ou l'autre des fournisseurs de services internet existants. Si l'entité cédée devait être perçue comme étant incapable de fournir des services de toute première qualité, elle risquerait de se voir sanctionnée par les clients, qui apporteraient alors leur clientèle à MCI WorldCom/Sprint. Or, comme l'entité fusionnée aura connaissance des nouveaux besoins des clients multihébergés grâce à ses relations commerciales avec ceux-ci, il pourrait lui être plus facile de prendre l'avantage sur l'entité cédée sur le plan de la concurrence.

Earthlink

(357) Earthlink est, après AOL, l'un des plus importants fournisseurs au détail d'accès à l'internet par ligne commutée aux États-Unis. Sprint entretient des relations de longue date avec Earthlink sous forme de droits sur [...]* % du capital d'Earthlink et de nombreux contrats de fourniture dans le domaine de l'internet. Earthlink a représenté [...]* % des recettes internet totales de Sprint en 1999. L'engagement proposé entraînerait le transfert des contrats internet, mais ne concernerait pas la participation de Sprint au capital d'Earthlink. En tant que principal actionnaire d'Earthlink, Sprint aura une influence sensible sur le renouvellement des contrats transférés, ce qui risquerait de mettre en péril la perennité des relations entre Earthlink et l'entité cédée.

Absence de protection de l'entité cédée

(358) On pourrait faire valoir que les parties pourraient proposer une clause de non- concurrence afin de protéger l'entité cédée contre un retour de ses clients chez MCI WorldCom/Sprint. Or, les parties n'ont pas inclus une telle clause complète de non- concurrence dans l'engagement qu'elles ont proposé, mais seulement un engagement limité de ne pas démarcher les clients de Sprint Internet.

(359) [...]*

(360) Il convient de noter que Sprint a attiré l'attention de la Commission sur ce problème potentiel dans le cadre de la procédure WorldCom/MCI [...]*(74). [...]*(75)

(361) Une autre difficulté pourrait se poser avec les clients qui ont signé des contrats dont ils devront approuver le transfert à une autre personne morale que Sprint. D'après les parties et sur la base d'un échantillonnage limité de contrats, cela représente une [...]* partie des recettes de Sprint Internet. [...]*

(362) Il semble donc que la clientèle internet de l'entité cédée serait susceptible de diminuer sensiblement si la cession proposée était acceptée, et la force concurrentielle qui serait ainsi mise sur le marché serait beaucoup plus faible.

3) IL EXISTE DE NOMBREUSES INCERTITUDES QUANT AU NOMBRE, À L'EXPÉRIENCE ET AU SAVOIR-FAIRE DES MEMBRES DU PERSONNEL QUI SERONT TRANSFÉRÉS

(363) D'après Sprint, [...]* les membres qui seront affectés à sa future unité internet se consacrent déjà à des activités internet. Les autres [...]* ne sont que partiellement spécialisés.

(364) Il existe des doutes quant à l'expérience de la plupart des personnes identifiées (pour l'instant, seules les personnes prétendument spécialisées ont été identifiées). Par exemple, un grand nombre des personnes sélectionnées ont [...]* expérience dans le domaine d'internet. Cela est sans doute dû aux [...]* équipes spécialisées dans la vente de produits internet.

(365) Les doutes sont encore plus grands en ce qui concerne le personnel qui ne passe qu'une partie de son temps dans des activités internet. Les personnes en question n'ont pas encore été identifiées. Le tableau ci-dessous indique dans quelle mesure chacune des unités constituant Sprint Internet comprendra des personnes déjà spécialisées dans l'internet ou des personnes qui n'ont travaillé que partiellement dans les activités internet. Il montre la proportion des personnes de chacune de ces unités qui remplaceront des personnes qui ne se consacrent à des activités internet qu'à temps partiel. En dehors de l'unité "exploitation et ingénierie", [...]* du personnel de l'ensemble des autres unités sera constitué par des personnes qui ne se consacrent pas uniquement à des activités internet.

>EMPLACEMENT TABLE>

Note:

ETP signifie équivalent-temps plein, un chiffre virtuel qui représente le nombre des personnes qui devraient travailler à temps plein pour remplacer les personnes qui ne travaillaient qu'à temps partiel sur des activités internet.

(366) Nul n'ignore que toute cession pose un problème d'adaptation culturelle. Compte tenu de la structure très intégrée de Sprint Internet, ce problème se posera sans doute deux fois: une première fois lors de la sélection du personnel qui devra être affecté à Sprint Internet et à nouveau au moment de l'intégration de l'entité cédée à l'organisation de l'acquéreur. Chacune de ces unités étant essentielle au bon fonctionnement de l'entité à céder, les incertitudes sont renforcées par le fait que chacune d'entre elles devra faire appel à du personnel "ETP".

(367) Si l'on compare le nombre des membres du personnel de l'entité à céder à celui de ses concurrents, le chiffre [...]* fourni par les parties semble être sensiblement plus faible. En effet, AT & T, GTE-Genuity, Cable & Wireless et manifestement aussi UUNet avancent toutes des chiffres de l'ordre de 2000 personnes, voire plus. Cela permet de s'interroger sur le nombre des personnes qui doivent être transférées. Cet écart s'expliquerait par des omissions. Ce chiffre semble par exemple ne pas comprendre le personnel [...]*. Cet écart pourrait également s'expliquer par le fait que, comme l'entité cédée ne disposera notamment pas de ses propres infrastructures, elle sera fortement dépendante de MCI WorldCom/Sprint pour la poursuite de son activité.. [...]*(76). Cet aspect sera évoqué ci-dessous.

(368) Dans sa décision WorldCom/MCI, la Commission avait estimé que les effectifs dépendraient dans une large mesure de l'idendité de l'acquéreur et de son degré d'implication dans les mêmes activités internet que MCI. Pour cette raison, les engagements n'avaient pas déterminé le nombre de personnes à transférer, qui devait être négocié entre le vendeur et l'acquéreur.

(369) Ainsi qu'il ressort des déclarations de Cable & Wireless à la FCC (Commission fédérale des communications), son rachat d'Internet MCI a posé un certain nombre de difficultés, ce qui montre qu'il n'est pas facile pour un acquéreur potentiel, en cas de cession forcée, d'évaluer les effectifs et d'identifier les personnes nécessaires pour gérer l'entité cédée en tant que concurrent effectif et immédiat. Le problème se pose tout particulièrement dans le cas de la cession d'une entité intégrée, où l'information n'est pas facilement accessible. Cela est d'ailleurs corroboré par l'étude de la Federal Trade Commission sur les mesures correctrices(77). La Commission ne peut donc pas se fier à des négociations entre les parties notifiantes et un tiers éventuel pour identifier le nombre approprié de personnes à transférer.

4) L'ENTITÉ CÉDÉE RESTERA DÉPENDANTE DE MCI WORLDCOM/SPRINT POUR LA POURSUITE DE SON EXPLOITATION ET TOUTE TENTATIVE POUR LA RENDRE INDÉPENDANTE COÛTERA DU TEMPS ET DE L'ARGENT

(370) Les activités internet de Sprint [...]* au sein de Sprint, un grand nombre de ses services d'assistance [...]* fournis par Sprint. [...]*

(371) Les clients de Sprint Internet pour l'accès par ligne spécialisée sont reliés au réseau Sprint par une ligne privée vers l'opérateur local, qui est à son tour connecté à l'un des quelque 320 points de présence Sprint. Ces points de présence sont [...]*. Depuis le point de présence, le client est connecté à un noeud de dorsale (qui comprend notamment des routeurs et des commutateurs) par une ligne de raccordement. La ligne de raccordement n'appartient pas à la dorsale. L'architecture est la même pour les services d'accès par ligne commutée.

(372) Il convient de noter que tous les actifs mentionnés ci-dessus (points de présence, lignes relais et dorsales) sont polyvalents. Cela a deux conséquences. Premièrement, Sprint Internet ne supporte que les prix de transfert internes pour l'utilisation de ces infrastructures, au lieu d'avoir à payer les prix du marché, qui sont normalement sensiblement plus élevés. En outre, ainsi qu'il a été écrit au considérant 140, le vice-président de MCI WorldCom, John Sidgmore, a expliqué récemment qu'il y avait une pénurie de capacité disponible sur le marché. Cela est confirmé par des témoignages de tiers. Deuxièmement, la dorsale a été structurée de façon à maximiser les économies de champ d'activité pour les infrastructures de télécommunications existantes de Sprint.

(373) Les mêmes choix commerciaux ont été faits pour les services d'assistance opérationnelle [...]*.

(374) Les parties ont proposé de signer des accords de service d'assistance avec l'acquéreur, afin de permettre la poursuite de ces services partagés pendant la période de transition nécessaire à la mise en place ou à la migration des systèmes et procédés chez l'acquéreur.

(375) Les engagements proposés prévoient des accords d'assistance pour les services suivants: colocalisation des équipements internet dans les locaux de Sprint ([...]*), capacité de transport sur les réseaux ([...]*), accords d'accès local (aucune indication sur les délais et une tarification à des conditions commerciales), autres services liés à l'exploitation (rapport sur le service à la clientèle, enregistrement des commandes, services de facturation, gestion des réseaux, fourniture de réseaux et autres services raisonnablement exigibles). [...]*.

(376) Toutefois, l'enquête de la Commission et le rachat d'Internet MCI par Cable & Wireless montrent que de tels accords peuvent être extrêmement complexes à rédiger et difficiles à mettre en œuvre et à contrôler. En outre, l'acquéreur dépendrait fortement de l'entité fusionnée pour la poursuite des anciennes activités internet de Sprint, ce qui aura des répercussions négatives sur les coûts et la qualité du service fourni par l'entité cédée.

(377) Il convient par exemple de noter que la partie internet de GTE, désormais dénommée Genuity, vient juste d'être séparée de sa société mère pour être lancée sur le marché. Afin que Genuity demeure un concurrent effectif, elle possèdera également son propre réseau et ne dépendra pas d'un tiers pour son infrastructure.

Colocalisation

(378) Des tiers ont expliqué que pour être totalement effectif, un accord de colocalisation doit permettre à l'acquéreur de protéger la confidentialité de ses activités (changements d'équipement, accès libre, etc.), de disposer de suffisamment d'espace pour étendre ses équipements afin de pouvoir répondre à la croissance future et d'éviter les interférences électromagnétiques provenant des câbles de commutateurs.

(379) Pour permettre à l'entité cédée de continuer à exploiter les équipements cédés de façon efficace et indépendante de l'entité fusionnée, les tiers consultés ont indiqué qu'un accord de colocalisation éventuel devrait comprendre des dispositions détaillées sur l'espace mis à la disposition de l'acquéreur pour placer les actifs transférés. Le personnel de l'entité cédée devrait, par exemple, pouvoir accéder aux équipements colocalisés et les utiliser et/ou les réparer, en toute indépendance par rapport à l'entité. Or, il n'est pas certain qu'un tel espace soit facilement disponible dans tous les points de présence de Sprint.

(380) En outre, les tiers ont expliqué que l'acquéreur devrait être en mesure d'étendre des installations colocalisées dans les points de présence de Sprint (en ayant également le droit d'interconnecter les installations existantes dans les locaux de Sprint avec de nouvelles installations situées dans d'autres locaux, ainsi que le droit d'interconnecter des installations). Or, il n'est pas certain que l'espace et le personnel disponibles soient suffisants pour permettre une telle extension.

(381) En outre, les tiers ont attiré l'attention de la Commission sur le fait qu'il n'existe aucune norme pour la rémunération de ce type de services de colocalisation et qu'ils évitent généralement de passer des accords de colocalisation avec un concurrent.

(382) Tout acquéreur de Sprint Internet devrait accepter une colocalisation dans les locaux de Sprint pour une période transitoire qui commencerait à la date de clôture et durerait jusqu'à ce que les clients, les équipements et les réseaux aient entièrement migré chez l'acquéreur. Une majorité de tiers [...]* estime que ce processus sera très long et durera de deux à quatre ans (voir ci-dessous). Cela signifie que l'acquéreur sera dépendant de l'entité fusionnée pendant une très longue période en ce qui concerne la colocalisation. Au cours de cette période, l'entité fusionnée pourra profiter d'informations commerciales sur les activités de l'entité cédée, limiter la croissance de l'entité cédée par simple manque d'espace ou utiliser l'espace disponible en premier lieu pour sa propre croissance, et elle pourra aussi imposer à l'acquéreur des coûts difficiles à contrôler.

(383) En outre, compte tenu des circonstances d'une cession forcée, aucun acquéreur ne disposerait des informations et du temps nécessaires pour négocier de façon optimale des accords de colocalisation et tout acquéreur devrait accepter le projet d'accord proposé par Sprint.

Accords de transport sur les réseaux et accords d'accès local

(384) Ce type d'accords porte sur la connexion par câbles des locaux du client avec un point de présence, sur la connexion du point de présence à la dorsale (ligne relais) ainsi que sur la fourniture des câbles utilisés par la dorsale.

(385) Ces accords posent les mêmes problèmes que les accords de colocalisation. Les tiers ont expliqué que la fourniture de ce type de services était difficile à tarifer. Premièrement, ils sont actuellement fournis en interne au sein de Sprint. Le coût de fourniture de ces services bénéficie des économies de champ d'activité retirées des différentes utilisations des infrastructures de réseau. C'est pourquoi le coût d'utilisation actuel est sensiblement inférieur à n'importe quel prix du marché. Deuxièmement, on prétend que certains de ces services ne sont pas disponibles à des tarifs commerciaux. C'est notamment le cas pour les câbles de très grande capacité (OC-48, par exemple) qui sont actuellement mis en place pour répondre à l'augmentation du trafic.

(386) En outre, l'entité cédée dépendra de MCI WorldCom/Sprint pour répondre à une éventuelle augmentation de la demande de trafic (pour les accroissements de capacité, les connexions, etc.). L'entité fusionnée profiterait d'informations commerciales confidentielles sur l'entité cédée, qui lui permettraient de contrôler la croissance et les coûts de réseau de cette dernière.

(387) Enfin, il a été expliqué que ces accords étaient d'une nature très complexe. Aucun acquéreur ne disposerait des informations et du temps nécessaires pour négocier de tels accords de façon optimale et tout acquéreur dépendrait du projet d'accord proposé par Sprint.

Migration

(388) On pourrait faire valoir que les inconvénients exposés ci-dessus, qui sont liés à la conclusion d'accords de colocalisation, d'accords de transport sur réseaux et d'accords locaux avec le principal concurrent du marché, pourraient être évités par une migration rapide vers les installations de l'acquéreur.

(389) Dans sa décision WorldCom/MCI, la Commission avait noté l'opinion exprimée par des tiers selon laquelle l'acquéreur d'Internet MCI serait dépendant du vendeur et que cela ne constituait pas une solution à long terme. Il avait également été indiqué que pour devenir un fournisseur de connectivité internet de niveau un, il fallait posséder ses propres infrastructures. En effet, un acquéreur qui devrait louer en permanence des infrastructures à un concurrent serait dépendant de ce concurrent. La Commission en a conclu qu'un acquéreur acceptable devrait être en mesure soit de transférer son trafic plus ou moins immédiatement sur un autre réseau, soit de construire son propre réseau dans des délais raisonnables et de faire ensuite migrer son trafic sur ce réseau. La Commission avait donc tenté d'apprécier si les accords de colocalisation et les accords relatifs aux autres services de réseau prévoyaient des délais appropriés pour la migration du trafic vers un nouveau réseau. Sur la base de déclarations de tiers, elle était parvenue à la conclusion qu'un délai de deux ans, au cours duquel des conditions préférentielles seraient accordées, suffirait pour permettre le transfert de toutes les activités concernées vers un autre réseau et permettre à ce réseau de fonctionner d'une façon totalement indépendante de MCI.

(390) Toutefois, tant les tiers que les précédentes migrations réalisées par ces tiers ainsi que par les parties elles-mêmes montrent que la migration d'une activité internet constitue une tâche très complexe, qui peut prendre de deux à quatre ans.

(391) La construction d'une dorsale internet comprend une série d'étapes successives. Premièrement, l'opérateur de la dorsale doit définir l'architecture de son réseau. Deuxièmement, il doit construire de nouveaux points de présence. Troisièmement, il doit mettre en place le réseau de transition pour la connexion aux points de présence. Quatrièmement, il doit développer ou migrer des systèmes d'assistance opérationnelle. Ce n'est qu'ensuite que le processus de migration des clients peut commencer.

(392) La partie de ce processus qui prend le plus de temps est la migration des clients. La principale contrainte à laquelle un fournisseur de connectivité internet qui souhaite migrer d'un réseau vers un autre est confronté est de faire en sorte que ses clients restent satisfaits tout au long du processus de migration. C'est pour cette raison que les entreprises qui ont dû réaliser des migrations jusqu'à présent ont évité tout remplacement soudain des connexions et opté plutôt pour une approche progressive, avec duplication des connexions de chaque client au cours d'une période de transition. Pour changer la connexion avec le client, le fournisseur devra mettre en place de nouveaux circuits de commutation locaux et demander l'aide du client pour installer les nouveaux équipements ou changer les connexions des lignes.

(393) Ce processus réclame une main-d'œuvre importante. Comme nous l'avons écrit ci-dessus, il n'est pas certain que l'entité cédée dispose des effectifs nécessaires pour faire le travail quotidien. Même si l'acquéreur engageait (à ses frais) un grand nombre de personnes supplémentaires pour la migration des clients, ce processus demeurerait néanmoins très long. En tout état de cause, le temps, la gestion et le coût de la migration devraient être supportés par l'acquéreur.

(394) Cela signifie que les coûts de réseau de l'entité cédée seront déterminés lors de négociations avec MCI WorldCom/Sprint jusqu'à ce que l'acquéreur ait été en mesure de migrer ses réseaux vers d'autres infrastructures, après un délai d'au moins deux ans.

Services d'assistance opérationnelle

(395) La plupart des services d'assistance opérationnelle de Sprint Internet [...]*. Les parties expliquent qu'il sera facile d'isoler les tâches propres à l'internet au sein de leurs systèmes. Toutefois, elles s'engagent à fournir ces services à l'entité cédée, mais pas à transférer les systèmes à l'acquéreur.

(396) John Sidgmore, vice-président de MCI WorldCom, a récemment souligné l'importance de ces services: "les véritables clés du succès ne seront pas les vitesses de transmission, mais l'efficience, le marketing internet et la facturation"(78).

(397) Le fait que l'entité cédée dépende de l'entité fusionnée présente un certain nombre de risques. Premièrement, l'entité fusionnée pourrait bénéficier d'informations commerciales confidentielles du fait de l'existence de systèmes intégrés. Deuxièmement, la capacité de l'entité cédée à innover en matière de services d'assistance opérationnelle sera limitée, parce qu'elle aura besoin de l'accord de son principal concurrent, MCI WorldCom/Sprint.

(398) La mise en place de nouveaux systèmes est un processus long et coûteux, qui devrait prendre plus d'un an. Les parties elles-mêmes estiment que la migration des systèmes ne serait pas achevée avant un an(79).

Conclusion

(399) Il ressort des éléments ci-dessus que l'absence d'infrastructures et de systèmes chez l'entité que les parties se proposent de céder entraîne des risques importants quant à l'efficacité et la compétitivité de cette entité, qui resterait dépendante de son principal concurrent pendant une période prolongée.

(400) John Sidgmore, vice-président du MCI WorldCom, a déclaré récemment que "si vous possédez le réseau, vous avez un meilleur contrôle des coûts et de la qualité, et c'est nous qui décidons alors quand mettre en œuvre les nouveaux produits et services"(80).

(401) Sprint a expliqué en 1998 que l'entreprise Internet MCI était intégrée avec MCI de la même façon que Sprint Internet. [...]*

5) TOUT CONTROLE SERA EXTRÊMEMENT DIFFICILE, VOIRE IMPOSSIBLE

(402) On pourrait faire valoir qu'il serait possible de nommer un mandataire pour contrôler le bon déroulement des accords de colocalisation, de transport sur les réseaux, d'accès local et des autres accords sur les systèmes d'assistance opérationnelle, et garantir que l'entité fusionnée n'entrave en aucune façon le développement et l'indépendance de l'entité cédée.

(403) Toutefois, une telle tâche sera extrêmement complexe et la mise en œuvre des engagements serait difficile à contrôler. Cela nécessiterait des compétences et du personnel importants et le mandataire devrait se voir confier des pouvoirs étendus. Même en supposant que l'on puisse trouver un mandataire ayant de tels talents, le degré de complexité de la tâche accroît sensiblement les incertitudes liées à l'efficacité de la réalisation des mesures correctrices.

6) DIVERS

(404) [...]* En outre, l'engagement de poursuivre le peering ne signifie pas obligatoirement que l'on procèdera aux augmentations de capacité nécessaires aux points de peering concernés, ce qui augmente les incertitudes liées à la viabilité commerciale de la cession proposée.

(405) L'engagement proposé prévoit un droit d'utilisation des droits de propriété intellectuelle et autres autorisations transférables détenues par Sprint. Des tiers ont expliqué que la détention de droits de propriété intellectuelle était d'une importance capitale sur un marché dont l'innovation constitue le moteur. En effet, la détention de droits de propriété intellectuelle permet d'innover en étendant par exemple la portée de la propriété intellectuelle déjà détenue. Cela renforce l'interrogation sur la capacité de l'entité cédée à devenir immédiatement un concurrent effectif.

7) CONCLUSION

(406) En résumé, l'engagement proposé aurait sensiblement modifié l'économie de l'entité cédée, en la séparant de l'ensemble des activités Sprint plus générales telles que les infrastructures et les services d'assistance. À cela vient s'ajouter la sélection, nécessairement arbitraire, du personnel à transférer.

(407) Ainsi qu'il est établi au point 180 du rapport sur la politique de concurrence 1999 de la Commission, quand la nature des problèmes de concurrence devient telle que ceux-ci nécessitent des engagements et des mécanismes élaborés pour ne plus susciter de préoccupations, la Commission doit examiner soigneusement si le fait d'accepter des engagements complexes aboutira à un résultat réellement satisfaisant du point de vue de la concurrence ou si ces opérations devraient au contraire être interdites.

(408) En outre, la croissance future de l'entreprise sera entravée par la nécessité d'avoir recours à l'entité fusionnée pour obtenir des ressources supplémentaires au cours d'une période de transition qui durera de deux à quatre ans, jusqu'à ce que l'acquéreur soit en mesure de migrer l'entité cédée vers ses propres infrastructures. Cette migration, qui est nécessaire pour garantir la compétitivité de l'entité cédée, entraînera en outre des coûts substantiels, qui devront être supportés par l'acquéreur.

(409) Pour toutes ces raisons, la Commission est parvenue à la conclusion que les engagements proposés n'auraient pas été de nature à rétablir, avec une certitude suffisante quant à leurs effets, une concurrence immédiate et effective sur le marché en cause de la fourniture de connectivité internet de niveau 1.

VII. CONCLUSION

(410) On peut conclure de ce qui précède que la concentration entre MCI WorldCom et Sprint entraînerait soit la création d'une position dominante [...]*, soit le renforcement d'une position dominante [...]* sur le marché de la fourniture de connectivité de niveau 1 ou universelle, qui aurait comme conséquence que la concurrence serait entravée de façon significative dans le Marché commun au sens de l'article 2, paragraphe 3, du règlement sur les concentrations. L'engagement proposé par les parties le 8 juin 2000 n'aurait pas permis d'écarter [les problèmes de concurrence soulevés par la Commission]*. La Commission estime donc que l'opération de concentration notifiée est incompatible avec le Marché commun et avec le fonctionnement de l'accord EEE,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

L'opération de concentration notifiée qui porte sur la fusion entre MCI WorldCom et Sprint est déclarée incompatible avec le Marché commun et le fonctionnement de l'accord EEE.

Article 2

Les sociétés

MCI WorldCom Inc. 1801 Pennsylvania Avenue

NW, Parkway

Washington, DC 20006 United States of America,

Sprint Corporation 2330 Shawnee Mission

Westward

Kansas 66205 United States of America,

sont destinataires de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 28 juin 2000.

Par la Commission

Mario Monti

Membre de la Commission

(1) JO L 395 du 30.12.1989, p. 1. Rectificatif (JO L 257 du 21.9.1990, p. 13).

(2) JO L 180 du 9.7.1997, p. 1. Rectificatif (JO L 40 du 13.2.1998, p. 17).

(3) JO C 277 du 18.11.2003.

(4) Le chiffre d'affaires est calculé conformément à l'article 5, paragraphe 1, du règlement sur les concentrations et à la communication de la Commission sur le calcul du chiffre d'affaires (JO C 66 du 2.3.1998, p. 25). Dans la mesure où les données portent sur les chiffres d'affaires réalisés pendant la période antérieure au 1er janvier 1999, elles sont calculées sur la base des taux de change moyens de l'écu et converties en euros à raison d'un euro pour un écu.

(5) Des parties de ce texte ont été omises afin de garantir qu'aucune information confidentielle ne soit communiquée. Ces parties sont indiquées par des points de suspension entre crochets, suivis d'un astérisque.

(6) Le chiffre d'affaires de Sprint englobe un tiers du chiffre d'affaires de Global One comme si elle était l'un des trois actionnaires majoritaires de cette entreprise commune.

(7) Communication de la Commission sur le calcul du chiffre d'affaires (JO C 66 du 2.3.1998, p. 25, point 27).

(8) Règlement (CE) n° 447-98 de la Commission du 1er mars 1998 relatif aux notifications, aux délais et aux auditions (JO L 61 du 2.3.1998, p. 1).

(9) TeleGeography 2000, p. 106.

(10) [...]*

(11) La connexion s'établit via un port modem, et la facture adressée aux FSI est fonction du trafic. Les FSI de premier plan tels qu'AOL, Earthlink, Mindspring, MNS et Prodigy achètent des accès par ligne commutée en gros.

(12) [...]*

(13) [...]*

(14) Voir notes 11 et 12 de bas de page ci-dessus.

(15) [...]*

(16) D'après UUNet, les éléments les plus importants dans le choix d'un hébergeur sont les suivants: a) rapidité d'accès du serveur; b) connexions internet redondantes (plus d'une connexion à haut débit); c) contrôle du site internet par les propriétaires de ce dernier; d) sécurité du serveur; e) capacité de la bande passante et des connexions d'absorber une croissance de la demande; f) sauvegarde; g) disponibilité du serveur 24 heures sur 24; h) performances des serveurs utilisés; i) choix d'un protocole de cryptage; j) expérience de l'hébergeur dans le domaine de l'internet; k) personnel de vente et d'assistance compétent; l) statistiques mensuelles sur le trafic afin d'assurer un retour de l'information sur le nombre de visiteurs du site internet, et m) capacité financière - l'hébergement du serveur dans un centre de traitement informatique est d'un bon rapport qualité/prix (selon UUNet, jusqu'à un quart du coût supporté lorsque cette fonction est assurée en interne. Les tarifs mensuels de base d'UUNet en matière d'hébergement sont de 750 dollars des États-Unis (USD). (Voir le site http://www.us.uu.net/products/hosting/keystrengths/selecting.html).

(17) "WorldCom plans European data center roll-out", Emily Bourne, Total Telecom, 31 mai 2000.

(18) Affaire M.1069 (JO L 116 du 4.5.1999, p. 1).

(19) Requête introduite le 20 mars 2000 par Sprint Corporation et MCI WorldCom Inc. auprès de la Federal Communications Commission américaine, p. 90, note 142 de bas de page.

(20) [...]*

(21) Observations présentées le 18 février 2000 par Cable & Wireless à la Federal Communication Commission américaine ("FCC").

(22) [...]*

(23) Réponse commune à la communication des griefs, point 264 et note 235.

(24) Les parties reconnaissent qu'il existe des milliers de FSI dans le monde. Voir, par exemple, la page 119 de leur réponse à la communication des griefs.

(25) Page 20 du "Memorandum on the GCTS market" présenté le 17 mars 2000.

(26) Résumé analytique du rapport du Yankee Group intitulé "The Bell(e)s of the Ball Give Their Hands: Qwest/US WEST and Global Crossing/Frontier", extrait du site www.yankeegroup.com.

(27) Affaire IV/JV.15 - BT/AT & T, décision du 30 mars 1999.

(28) Affaire IV/M.1396 - AT & T/IBM Global Network.

(29) [...]*

(30) TeleGeography 1999, "The World's Top ISPs (winter 1998-1999)", p. 122; International Data Corporation, "Internet Service Provider Market Review and Forecast", p. 17; Cahners In-Stat Group, "Show Some Backbone: ISPs Report Increasing Demand and Shifting Vendor Preference", p. 7; Boardwatch, numéro de décembre 1999; Datamonitor, "The Future of the Internet; Hearing on the MCI WorldCom-Sprint Merger Before the [US] Senate Committee on the Judiciary", pièce n° 3 (4 novembre 1999) (Témoignage de Tod A. Jacobs, Senior Telecommunications Analyst, Sanfor C. Bernstein & Co., Inc.), Bernstein Research, "MCI WorldCom", mars 1999, p. 51; Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), "Internet Traffic Exchange: Developments and Policy", DSTI/ICCP/TISP(98) 1/FINAL, p. 22 et 58 et 59.

(31) Credit Suisse First Boston, Morgan Stanley Dean Witter et Bear Stearns.

(32) Bell Atlantic estime la part de marché de la nouvelle entité entre 50 et 70 %; Cable & Wireless estime la part détenue par MCI WorldCom dans le trafic internet mondial à 50 % et celle de Sprint à 18 % (en 1998).

(33) "WorldCom: Still a Cool Company", Salomon Smith Barney, 7 février 2000, p. 2.

(34) Ces ratios sont indiqués sous forme d'intervalles afin de préserver la confidentialité des informations fournies par des tiers.

(35) La plupart des informations utilisées pour calculer les parts de marché à partir des recettes et du trafic ont été communiquées par les parties notifiantes, ainsi que par des tiers, au ministère américain de la Justice, en réponse à des questions posées dans le cadre d'une enquête, avec renonciation à la confidentialité vis-à-vis des deux autorités de la concurrence.

(36) Cette part de marché s'élèverait à environ [30-40]* % sur la base d'hypothèses extrêmement favorables aux parties.

(37) En 1998, la part de marché cumulée de la nouvelle entité était estimée à [45-55]* % ([35- 45]* % pour WorldCom et [5-15]* % pour MCI); les activités internet de MCI ont été ensuite cédées à Cable & Wireless.

(38) [...]*

(39) [...]*

(40) [...]*

(41) [...]*

(42) [...]*

(43) John Sidgmore, Spring Internet World 2000, "UUNet chair says industry concerned over capacity", Reuters, 4 avril 2000.

(44) [...]*

(45) [...]*

(46) Voir le considérant 23.

(47) [...]*

(48) John Sidgmore, lors de Spring Internet World 2000, "UUNet chair says industry concerned over capacity", Reuters, 4 avril 2000.

(49) Le signal audio analogique doit d'abord être converti en un signal numérique afin de pouvoir être transmis sur internet. Après avoir été numérisé, il est comprimé et transmis. La qualité du signal dépendra du nombre d'octets utilisés pour l'encoder.

(50) La commutation par paquets est la méthode utilisée pour faire circuler des données sur internet. Elle consiste à fragmenter les données en petits paquets, chacun d'entre eux comportant l'adresse d'où il vient et celle à laquelle il est destiné. Cela permet à des paquets de données provenant de nombreuses sources différentes de cheminer ensemble sur les mêmes lignes, en étant triés et dirigés sur des routes différentes en chemin. Les fournisseurs de connectivité internet (et leurs utilisateurs) peuvent ainsi utiliser les mêmes lignes au même moment.

(51) [...]*

(52) [...]*

(53) [...]*

(54) Documents remis par Sprint et MCI WorldCom à la FCC, "Reply to Comments and Petitions to Deny Application for Consent to Transfer Control", 20 mars 2000, p. 89 et suivantes.

(55) [...]*

(56) [...]*

(57) [...]*

(58) Depuis la réalisation de l'opération BT/AT & T, l'alliance WorldPartners a effectivement disparu et Unisource a fusionné, avec AUCS, pour constituer la société Infonet.

(59) Formulaire CO, p. 39

(60) Réponse du 23 novembre 1998 à la demande d'informations de la Commission.

(61) C'est-à-dire BT/AT & T/Concert.

(62) [...]*

(63) http://www.yankeegroup.com/webfolder/yg21a.nsf/yankeetoday/A+View+From+ the+Top.+O ur+ President+and+CEO,+Berge+Ayvazian+ discusses+the+proposed+merger+of+ MCI+WorldCom+ and+Sprint.

(64) [...]*

(65) C'est-à-dire Concert elle-même, conjointement avec ses sociétés mères AT & T et BT.

(66) [...]*

(67) [...]*

(68) On entend par "services de réseaux mondiaux" les services de réseaux internationaux [services de transmission de la voix et de données (X.25, relais de trame & ATM, par exemple)], les services annexes (par exemple, services de libre appel international, télécartes à paiement différé, etc.) et les lignes louées internationales de gros. La définition ne comprend ni les services professionnels ni les équipements installés chez le client. Aux fins de la définition ci-dessus, les services autonomes, tels que les appels en service automatique international, les connexions longue distance ou locales ne sont comptabilisés que s'ils font partie d'un ensemble plus large de services de réseaux mondiaux.

(69) Comme l'a déjà montré l'analyse susmentionnée de Global One aux considérants 221 à 226, il importe que les fournisseurs de services mondiaux de télécommunications soient présents aux États-Unis, en raison du nombre de sociétés multinationales dont le siège est situé dans ce pays.

(70) Affaires M.1383, Exxon/Mobil, du 29 septembre 1999 et M.1628, TotalFina/Elf, du 9 février 2000.

(71) [...]*

(72) [...]*

(73) [...]*

(74) [...]*

(75) [...]*

(76) [...]*

(77) Federal Trade Commission, "A Study of the Commission's Divestiture Process", 1999, www.ftc.gov/os/1999-9908-ind ex.htm

6

(78) Intervention lors de la conférence "Supercomm 2000", qui s'est tenue à Atlanta le 7 juin 2000.

(79) [...]*

(80) [...]*