CA Paris, 1re ch. A, 28 juin 2004, n° 2003-07618
PARIS
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Sceller (Epoux), Penet-Weiller (ès qual.), Esmar (Sté)
Défendeur :
Robin-Délaine, Compagnie Commercial Union (Sté), Mutuelle du Mans (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Albertini
Conseillers :
MM. Le Dauphin, Savatier
Avoués :
Me Buret, SCP Jobin, SCP Varin-Petit, SCP Bernabe-Chardin-Cheviller
Avocats :
Mes de Moucheron, Pardo, Guedin, Calloud
Par lettre du 13 octobre 1998, la société Galeries Lafayette a fait savoir à la société anonyme dénommée Fouks SA Esmar (ci-après la société Esmar), ayant pour objet la fabrication et la distribution d'articles de prêt-à-porter pour femmes, que la présentation des produits qu'elle lui avait référencés cesserait à compter du 15 février 1999.
Les produits portant la marque Fouks étaient distribués dans le magasin Haussmann des Galeries Lafayette depuis 1954. En vertu d'une convention à durée indéterminée conclue le 10 décembre 1996, la société Esmar disposait dans ce magasin d'un espace qui lui était réservé pour la présentation de ses collections d'été et d'hiver.
Faisant valoir, notamment, que la société Galeries Lafayette avait engagé sa responsabilité en rompant brutalement des relations commerciales anciennes, la société Esmar, ayant pour avocat Mme Catherine Robin-Délaine, l'a assignée en paiement de la somme de 12 190 419 F à titre de dommages-intérêts devant le Tribunal de commerce de Paris, le ministre de l'Economie intervenant à l'instance au soutien de ses prétentions.
Par jugement du 2 avril 1999, le Tribunal de commerce de Paris a dit que la société Galeries Lafayette avait méconnu les dispositions de l'article 36 § 5 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et l'a condamnée à payer à la société Esmar la somme de 1 150 000 F à titre de dommages-intérêts, autorisant en outre la publication du dispositif du jugement dans les journaux Les Echos, Le journal du Textile, et Le Figaro dans la limite d'un coût de 30 000 F à la charge des Galeries Lafayette.
La société Galeries Lafayette ayant fait appel de ce jugement par déclaration du 4 mai 1999, un avoué s'est constitué le 18 juin 1999 pour la société Esmar.
Par ordonnance du 8 octobre 1999, le magistrat chargé de la mise en état a constaté l'extinction de l'instance et le dessaisissement de la cour après avoir relevé que l'appelante s'était désistée de son recours le 16 juillet 1999 et que l'intimée n'avait formé au préalable ni appel incident ni demande incidente.
M. Erick Sceller, président du conseil d'administration de la société Esmar ayant déclaré le 14 octobre 1999 la cessation des paiements, cette société a été mise en liquidation judiciaire par jugement du Tribunal de commerce de Paris en date du 28 octobre 1999, Me Brigitte Penet-Weiller, ès qualités étant désignée en qualité de liquidateur.
Faisant valoir que Mme Robin-Délaine avait manqué à ses obligations professionnelles en négligeant de former en temps utile appel, principal ou incident, du jugement du 2 avril 1999, M. Sceller, Mme Sceller, son épouse, qui exerçait les fonctions d'administrateur de la société Esmar, ainsi que Me Penet-Weiller, ès qualités, l'ont assignée en paiement de dommages-intérêts.
La compagnie d'assurance Commercial Union est volontairement intervenue à l'instance.
Par jugement du 9 janvier 2003, le Tribunal de grande instance de Paris a:
- condamné Mme Robin-Délaine à payer à Me Penet-Weiller, ès qualités, la somme de 12 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- condamné la Compagnie Commercial Union à garantir Mme Robin-Délaine de cette condamnation,
- débouté Me Penet-Weiller, ès qualités du surplus de ses demandes,
- débouté les époux Sceller de l'ensemble de leurs prétentions,
- débouté Mme Robin-Délaine de sa demande de fixation de sa créance au titre d'honoraires impayés et de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamné Mme Robin-Délaine à payer à Me Penet-Weiller, ès qualités, la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile.
LA COUR;
Vu l'appel formé par M. et Mme Sceller à l'encontre de cette décision;
Vu les conclusions en date du 3 juillet 2003 par lesquelles les appelants, poursuivant la réformation du jugement, demandent à la cour:
- de condamner Mme Robin-Délaine à payer à titre de dommages-intérêts, et réparation de leur préjudice matériel et moral:
- à M. Sceller la somme de 353,031 euros,
- à Mme Sceller la somme de 181 870 euros,
- de condamner la compagnie Commercial Union à garantir Mme Robin-Délaine de ces condamnations,
- de condamner Mme Robin-Délaine à payer à chacun d'eux la somme de 3 000 euros et application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Vu les conclusions en date du 6 octobre 2003 par lesquelles Me Permet Penet, ès qualités, intimée et appelante incidemment, demande à la cour:
- de condamner Mme Robin-Délaine à lui payer, à titre de dommages-intérêts, la somme de 1 010 584,54 euros,
- de condamner la Compagnie Commercial Union à garantir Mme Robin-Délaine de cette condamnation,
- de condamner Mme Robin-Délaine à lui payer la somme de 6 098 euros en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile;
Sur ce:
Sur la procédure:
Considérant que la société Commercial Union, assignée le 24 octobre 2003, puis réassignée par acte du 30 octobre 2003, n'a pas constitué avoué;
Considérant que les appelants et Me Penet-Weiller, ès qualités, sont fondés en leur demande tendant à ce que soient rejetées des débats, sur le fondement des dispositions des articles 15 et 16 du nouveau Code de procédure civile, les conclusions déposées et signifiées le 17 mai 2003 pour Mme Robin-Délaine, intimée;
Considérant, et effet, que l'avoué constitué pour Mme Robin-Délaine, ayant reçu le 3 juillet 2003 injonction de conclure avant le 7 octobre 2003 et ayant été avisé à cette date que l'ordonnance de clôture serait rendue le 18 mai 2004, les plaidoiries étant fixées au 2 juin 2004, a conclu pour la première fois le 17 mai 2004; que ces conclusions d'appel incident justifiaient de la part des époux Sceller et de Me Penet-Weiller, ès qualités, une réponse que ces parties ont été mises dans l'impossibilité de lui apporter avant la clôture de l'instruction, prononcée à la date annoncée ; qu'il y a donc lieu de les écarter des débats;
Considérant que les conclusions susvisées du 17 mai 2003 sont en revanche recevables en tant qu'elles contiennent intervention volontaire de la compagnie Mutuelles du Mans Assurances laquelle fait valoir que la société Commercial Union n'est plus agréée en qualité de compagnie d'assurances, qu'elle est l'assureur de Mme Robin-Délaine et qu'elle intervient aux débats pour le cas où une condamnation serait mise à la charge de cette dernière;
Sur le fond:
Considérant qu'aux termes de l'article 469 du nouveau Code de procédure civile, si après avoir comparu, l'une des parties s'abstient d'accomplir les actes de la procédure dans les délais requis, le juge statue par jugement contradictoire au vu des éléments dont il dispose; qu'il y a donc lieu d'apprécier, au vu des ces éléments, le bien-fondé des prétentions des appelants et de Me Penet-Weiller, ès qualités;
Sur la faute
Considérant qu'ayant eu connaissance de la teneur du jugement du 2 avril 1999, M. Sceller a adressé à Mme Robin-Délaine une lettre par laquelle il lui demandait de faire la proposition transactionnelle suivante à l'avocat de la partie adverse" ; que selon cette lettre les termes de cette proposition devaient être les suivants:
"1 Fouks renonce à faire appel.
"2 Fouks renonce à l'ensemble des parutions (Les Echos, Le Figaro, Le journal du textile).
" 3 Contre une indemnité transactionnelle de trois million cinq cent mille francs ".
Considérant qu'il appartenait à Mme Robin-Délaine, à la réception de ladite lettre, de laquelle il résultait que la société Esmar souhaitait engager des discussions avec la partie adverse en vue de parvenir à une transaction, de relever appel du jugement du 2 avril 1999, ou à tout le moins d'attirer l'attention de sa cliente sur cet impératif; sauf à rendre vaine toute tentative de transaction dès lors que l'offre d'un désistement d'appel représentait la principale concession susceptible d'être offerte à la société Galeries Lafayette;
Et considérant que cette dernière ayant seule fait appel, le 4 mai 1999, du jugement du tribunal de commerce, il appartenait alors à Mme Robin-Délaine de donner instruction à l'avoué constitué le 18 juin 1999 de déposer sans délai des conclusions d'appel incident afin de parer au risque, qui s'est réalisé le 16 juillet 1999, d'un désistement de l'appel emportant extinction de l'instance en l'absence d'appel incident ou de demande incidente;
Considérant, dès lors, que les appelants sont fondés à soutenir que Mme Robin-Délaine a manqué à ses obligations professionnelles;
Sur le préjudice:
Considérant que pour allouer une indemnité de 1 150 000 F à la société Esmar et ordonner les mesures de publication ci-dessus mentionnées, le Tribunal de commerce de Paris a estimé que la cessation annoncée par la société Galeries Lafayette par lettre du 13 octobre 1998, pour une rupture effective le 13 février 1999, de ses relations commerciales avec la société Esmar entrait dans les prévisions de l'article 36 § 5 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, dans sa rédaction applicable en la cause selon laquelle engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait par tout producteur, commerçant, industriel ou artisan de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte des relations commerciales antérieures ou des usages reconnus par des accords interprofessionnels;
Considérant que pour se déterminer comme il a fait, le tribunal de commerce relève, pour caractériser la faute imputée aux Galeries Lafayette, que la lettre du 13 octobre 1998 n'était pas motivée, qu'il n'était pas démontré que le déséquilibre invoqué par les Galeries Lafayette entre le chiffre d'affaires réalisé avec la collection hiver et celui, nettement plus faible, réalisé avec la collection d'été était nouveau et imprévisible, qu'il était loisible aux Galeries Lafayette de réduire la surface du stand réservé à la société Esmar dans le rayon prêt-à-porter du magasin Haussmann pour l'adapter au volume des ventes d'été sans remettre totalement en cause l'attribution de ce stand, que surtout l'accord du 10 décembre 1996 avait pour objectif "la promotion de la marque Fouks à Haussmann", après plus de trente années de relations commerciales avec la société Esmar, que cet accord ne pouvait que traduire la satisfaction des Galeries Lafayette à l'égard de son fournisseur, dont les produits se voyaient promus par l'affectation d'un emplacement particulier, ce dont la société Esmar ne bénéficiait pas antérieurement ; que le tribunal ajoute que si la lettre du 13 octobre 1998 vise précisément le retrait de cet emplacement, cette lettre n'entraînait pas pour autant une rupture complète de toute relation commerciale avec la société Esmar ce qui a pourtant été le cas puisque les Galeries Lafayette se sont abstenues de passer des commandes pour la collection été 1999, ayant ainsi décidé unilatéralement de mettre fin à une expérience de promotion des produits Fouks pendant deux ans; que le tribunal retient encore que l'ancienneté des relations entre la société Esmar et les Galeries Lafayette aurait dû conduire celles-ci à rechercher une solution adaptée à l'intérêt des deux parties et non à recourir à une rupture complète, que la décision du 13 octobre 1998 était tardive dès lors que le cycle de production de la collection d'été de la société Esmar était engagé à cette date, que si les Galeries Lafayette étaient en droit de modifier leurs relations commerciales avec la société Esmar puisque l'accord du 10 décembre 1996 était à durée indéterminée, encore fallait-il que ces dernières prennent en considération l'ancienneté des relations existant avec la société Esmar, la notoriété des produits positionnés, à l'initiative des Galeries Lafayette, dans un stand personnalisé situé au magasin Haussmann, dans un environnement de marques de qualité, et qu'en y mettant un terme définitif avec un préavis de quatre mois alors que le cycle de la collection été avait débuté dès le mois précédent, les Galeries Lafayette avaient eu un "comportement excessivement brutal";
Considérant qu'après avoir écarté, au terme d'une analyse circonstanciée, les autres fautes alléguées par la demanderesse, laquelle soutenait que les Galeries Lafayette avaient en outre engagé leur responsabilité sur le fondement de l'article 36 § 4 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 le tribunal de commerce a, ensuite, évalué le préjudice subi en raison de la rupture brutale des relations commerciales;
Considérant que le tribunal relève, à cet égard, qu'en 1998 les ventes réalisées par la société Esmar aux Galeries Lafayette Haussmann ont atteint plus de 16 % du chiffre d'affaires total de l'année, que ce pourcentage représente plus du double de celui des années précédentes et qu'il résulte de la forte chute du chiffre traité avec d'autres distributeurs, beaucoup plus que d'une hausse notable de celui réalisé avec les Galeries Lafayette Haussmann, que si l'on s'en tient à la moyenne des années antérieures à 1998 (de l'ordre de 7,6 %), la dépendance de la société Esmar, par suite des ventes réalisées dans ce magasin, sans être un facteur négligeable de son préjudice, n'est pas aussi significatif que la société Esmar l'affirme; que le tribunal souligne ensuite qu'en rompant brutalement toutes relations commerciales avec la société Esmar à compter du 15 février 1999, sans les poursuivre au moins pour la collection été 1999, les Galeries Lafayette ont porté atteinte à l'image de la société Esmar et lui ont causé un réel préjudice qu'après avoir porté une appréciation critique sur les méthodes de calcul de ce préjudice avancées par la société Esmar, mais tenant compte de la "relative dépendance des ventes de la société Esmar réalisées dans un environnement de qualité au magasin Haussmann des Galeries Lafayette et de la notoriété accrue de la marque Fouks durant les deux années ayant précédé la rupture", la juridiction consulaire évalue à un million de francs le " préjudice de perte d'image " subi par la demanderesse; que le tribunal retient ensuite que si la société Esmar sollicite une indemnité pour perte de marge sur trois ans, les Galeries Lafayette pouvaient mettre un terme à l'accord du 10 décembre 1996 en ménageant un délai suffisant qui aurait sauvegardé la collection de l'été 1999 et que celle-ci aurait généré un volume de commandes de 250 000 F et une marge brute de 125 000 F "qui constitue l'espérance réelle perdue par la société Esmar" ; que le tribunal examine en outre les autres chefs de dommage invoqués par la société Esmar (coût du licenciement de six personnes, abandon avant échéance de baux commerciaux, coûts d'investissement aux Galeries Lafayette et d'ouverture d'un fonds de commerce de remplacement, divers autres coûts) pour conclure qu'au vu des éléments d'appréciation qui lui ont été fournis par les parties, il convient de fixer à 1 150 000 F l'indemnité allouée à la société Esmar, ajoutant que la mesure de publication de sa décision est de nature à réparer l'atteinte à l'image et à la réputation de cette dernière causée par le comportement fautif des Galeries Lafayette;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Me Penet-Weiller, ès qualités, fait à tort grief au tribunal de commerce de ne pas avoir répondu à l'ensemble des demandes de la société Esmar, et notamment à celles fondées sur la prétendue méconnaissance par les Galeries Lafayette des dispositions de l'article 36 § 4 de l'ordonnance du 1er décembre 1986;
Considérant qu'il y a lieu, par ailleurs, d'observer que l'article 36 § 5 de ladite ordonnance devenu l'article L. 442-6, 1, 5°, vise la rupture d'une relation commerciale établie et que s'il est exact que les produits commercialisés sous la marque Fouks étaient distribués depuis de nombreuses armées au magasin Haussmann de la société Galeries Lafayette, cette dernière n'entretenait de relations contractuelles avec la société Esmar que depuis le 10 décembre 1996, étant ici précisé que ladite société n'a été constituée qu'en février 1994, ainsi que le rappellent M. et Mme Sceller, et qu'elle est devenue titulaire de la marque Fouks à la suite de l'acquisition, le 18 avril 1996, dans le cadre d'un plan de cession, des éléments corporels et incorporels dépendant de l'actif du redressement judiciaire de la société anonyme Fouks(cf pièce n° 22 des appelants);
Et considérant que si Me Penet-Weiller, ès qualités, soutient, avec raison, au vu de l'analyse de l'ensemble des circonstances de la cause et des pièces régulièrement mises aux débats, que la société Esmar a perdu, par la faute de Mme Robin-Délaine, une chance sérieuse d'obtenir, en appel une décision plus favorable à ses intérêts, il y a lieu, eu égard au degré de probabilité de réalisation de la chance ainsi perdue, en l'état des éléments ci-dessus mentionnés, de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé à la somme de 12 000 euros l'indemnité destinée à réparer le préjudice né de cette perte de chance;
Considérant que les autres chefs de dommage allégués ne sont pas justifiés;
Considérant, d'abord, que rien ne vient étayer l'allégation des appelants selon laquelle la société Galeries Lafayette aurait pu décider de renouer des relations contractuelles avec la société Esmar, devenue leur adversaire;
Considérant, ensuite, que si le dirigeant de la société Esmar a émis le souhait, en avril 1999, de conclure avec la société Galeries Lafayette une transaction dont l'un des éléments aurait été constitué par une forte majoration du montant de l'indemnité mise à la charge de cette dernière, il n'est versé aux débats aucun élément de nature à établir que les Galeries Lafayette, qui n'auraient pas été exposées en cas d'appel du jugement du 2 avril 1999 à de "considérables risques d'aggravation des dommages-intérêts", et qui se sont désistées de leur appel en dépit des mesures de publication ordonnées en première instance, auraient accepté de conclure une telle convention;
Considérant, encore, que Me Penet-Weiller, ès qualités, ne rapporte aucune preuve de ses allégations selon lesquelles à la suite du désistement d'appel par les Galeries Lafayette, la société Fouks n'a eu d'autre choix que de renoncer définitivement à son projet d'introduction en bourse sur le marché libre, la réalisation d'un tel projet apparaissant au demeurant illusoire, eu égard aux caractéristiques de la société en cause, dont l'activité avait décliné en 1998;
Considérant, enfin, que l'existence d'un lien de causalité entre la faute commise par Mme Robin-Délaine et l'ouverture d'une procédure collective à l'égard de la société Esmar n'est pas davantage démontrée;
Considérant, sur ce point, que la société Esmar se trouvait dès le 14 octobre 1999 en état de cessation des paiements, alors même qu'elle disposait à cette date de l'indemnité allouée par le jugement du tribunal de commerce; qu'elle a été mise en liquidation judiciaire le 28 octobre 1999; qu'il en aurait été de même si la faute imputée à Mme Robin-Délaine n'avait pas été commise dès lors que la poursuite de l'instance d'appel, loin d'améliorer, en 1999, la situation de la société Esmar l'aurait privée de la perception de cette indemnité, le jugement du tribunal de commerce n'ayant pas été assorti de l'exécution provisoire, et qu'il n'existait, en ce cas, aucune chance sérieuse d'obtenir de la société Galeries Lafayette qu'elle verse, à titre transactionnel, une somme sensiblement supérieure à celle mise à sa charge par le jugement du 2 avril 1999 ou reprenne ses relations commerciales avec la société Esmar;
Considérant que M. et Mme Sceller n'étaient pas parties à l'instance ayant donné lieu au jugement du 2 avril 1999 ; que les différents éléments de préjudice dont ils font état sont, ainsi qu'ils le font eux-mêmes observer (concl. p. 16) liés à la mise en liquidation judiciaire de la société Esmar laquelle ne résulte pas, comme il vient d'être dit, de la faute retenue à la charge de Mme Robin-Délaine;
Considérant qu'il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré, sauf à préciser que la compagnie Mutuelles du Mans Assurances sera tenue de garantir Mme Robin-Délaine des condamnations mises à sa charge;
Considérant que les demandes formées, au titre de l'instance d'appel, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile sont rejetées;
Par ces motifs, Rejette des débats les conclusions signifiées et déposées le 17 mai 2004 au nom de Mme Catherine Robin-Délaine sauf en ce qu'elles contiennent l'intervention volontaire de la compagnie Mutuelles du Mans Assurances; Confirme le jugement rendu entre les parties, le 9 janvier 2003, par le Tribunal de grande instance de Paris, sauf à préciser que la compagnie Mutuelles du Mans Assurances sera tenue de garantir, dans les limites de la police d'assurance, Mme Robin-Délaine des condamnations mises à la charge de cette dernière; Condamne Mme Robin-Délaine aux dépens d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.