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Décisions

CA Reims, ch. civ. sect. 1, 5 janvier 2000, n° 99-01733

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Fai Komatsu Industries Spa (Sté)

Défendeur :

France Champagne Equipement (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Ciabrini

Conseillers :

Mme Belaval, M. Perrot

Avocats :

Me Lecasble, SCP Threard Leger Bourgeon.

T. com. Chalons-en-Champagne, du 6 mai 1…

6 mai 1999

Vu le jugement rendu le 6 mai 1999 par le Tribunal de commerce de Chalons en Champagne, ayant:

* Vu l'article 5-1° de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968,

- débouté la société Fai Komatsu Industries de son exception d'incompétence,

- retenu sa compétence,

* Avant-dire droit, vu l'article 76 du nouveau Code de procédure civile,

- renvoyé la cause et les parties devant le tribunal pour être conclu au fond,

- fixé au 20 mai 1999 la date où l'affaire serait réinscrite,

- réservé les dépens,

Vu le contredit régularisé le 21 juin 1999 par la société Fai Komatsu Industries SPA "FKI", ainsi que les conclusions de la société France Champagne Equipement;

Vu l'ordonnance rendue le 5 juillet 1999, fixant l'affaire à l'audience du 3 novembre 1999;

Attendu qu'il est constant qu'en vertu d'une convention verbale, la société France Champagne Equipement (la société FCE) est, depuis 1988, concessionnaire exclusif, dans les départements de la Marne et des Ardennes, de la société Fai Komatsu Industries (La société FKI), ayant son siège social à Noventa Vicentina (Italie), pour la distribution d'une gamme complète de matériels de travaux publics;

Or attendu que la société FCE a attrait la société FKI devant le Tribunal de commerce de Chalons en Champagne aux fins d'obtenir principalement l'allocation d'une somme de 500 000 F à titre de dommages et intérêts, en réparation de son préjudice inhérent à la rupture prétendument abusive du contrat de concession, dénoncé par la société FKI le 28 septembre 1997 moyennant un préavis de six mois, insuffisant, selon la société concessionnaire, au regard des relations exclusives entretenues entre les parties depuis dix ans, et alors de surcroît que ce délai de préavis serait encore lui-même méconnu par la société FCE;

Attendu, selon l'article 2 §1 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, que "sous réserve des dispositions de la présente convention, les personnes domiciliées sur le territoire d'un Etat contractant sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat", ce qui commanderait a priori la compétence de la juridiction italienne, en application au demeurant en pareil cas du principe de droit commun contenu, en droit interne français, dans l'article 42 du nouveau Code de procédure civile, édictant, sur le plan national, la compétence territoriale du tribunal du lieu où demeure le défendeur;

Mais attendu qu'à l'instar de l'article 46 du même Code, offrant en outre au demandeur, en matière contractuelle, la faculté de porter également son action devant la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service, la Convention de Bruxelles précitée, telle que modifiée le 26 mai 1989, énonce, en son article 5, que "Le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat contractant peut être attrait, dans un autre Etat contractant:

1° - " en matière contractuelle, devant le tribunal du lieu où l'obligation qui sert de base à la demande a été ou doit être exécutée...",

Et attendu qu'en l'état de la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la société FCE, concessionnaire, contre sa co-contractante, à raison de la rupture prétendument abusive par celle-ci de ses obligations nées du contrat de concession devant globalement recevoir exécution en France, soit au siège de la défenderesse au contredit, cette dernière a pu valablement porter son action devant le Tribunal de commerce de Chalons en Champagne, dans le ressort duquel le contrat de concession doit assurément s'exécuter;

Attendu en effet que "l'obligation", telle que visée par l'article 5-1 de la Convention dont s'agit, doit indéniablement s'entendre du droit contractuel sur lequel l'action est fondée, cependant que, cette action tendant précisément au règlement de dommages-intérêts pour sanctionner la résiliation censément abusive du contrat de concession par le concédant, procède encore directement dudit contrat, dont l'inexécution se trouve exclusivement invoquée en tant que cause de la demande indemnitaire;

Attendu dans ces conditions que les premiers juges ont à bon droit retenu leur compétence sur ce fondement de l'article 5-1° de la Convention de Bruxelles, de même qu'ils ont encore pertinemment écarté toute application en la cause des clauses attributives de compétence insérées au profit du Tribunal Italien de Vicence dans les seules factures émises par la société FKI au titre des contrats de vente successivement intervenus entre les parties, fût-ce en exécution du contrat de concession originaire;

Qu'en effet, même si ces contrats de vente se rattachent nécessairement au contrat de concession initial, il n'en demeure pas moins que les clauses attributives de compétence, telles que stipulées au verso des seules factures libellées par la société FKI ensuite des contrats de vente, - et dont la validité ne serait pas autrement contestable quant à ceux-ci, en raison des relations d'affaires suivies pendant dix ans entre les parties, nonobstant leur rédaction en langue italienne, puis anglaise, et non française -, sont intransposables aux obligations nées du contrat de concession proprement dit, en l'espèce exclusivement litigieux;

Qu'il suit de là qu'aucune prorogation conventionnelle de compétence au profit de la juridiction nationale du lieu de son siège social, et au sens de l'article 17 de la Convention de Bruxelles, ne peut être en l'occurrence utilement opposée par la demanderesse au contredit au soutien de cette voie de recours ;

Attendu qu'il y a dès lors lieu à confirmation du jugement du Tribunal de commerce de Chalons en Champagne en ce qu'il a retenu sa compétence, et à renvoyer en conséquence la cause et les parties devant cette juridiction:

Attendu que la société FKI se verra en outre condamner à payer à la société FCE une équitable indemnité de 10 000 F en déduction de ses frais irrépétibles non compris dans les dépens afférents à la présente instance ouverte sur contredit, dont la demanderesse à cette voie de recours, qui y succombe, sera enfin intégralement tenue;

Par ces motifs, LA COUR, Statuant publiquement et contradictoirement, En la forme, Reçoit la société Fai Komatsu Industries Spa " FKI " en son contredit, Au Fond, l'en déboutant, Confirme le jugement du Tribunal de commerce de Chalons en Champagne déféré en ce qu'il a retenu sa compétence; Renvoie en conséquence la cause et les parties devant cette juridiction; Condamne par ailleurs la société Fai Komatsu Industries SPA " FKI " à payer à la société France Champagne Equipement La somme de dix mille francs (10 000) par application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile en déduction de ses frais irrépétibles non compris dans les dépens afférents à la présente instance ouverte sur contredit, dont la demanderesse à cette voie de recours, qui y succombe, sera enfin intégralement tenue.