Cass. crim., 2 avril 2003, n° 00-30.146
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
Mmes de La Lance
Avocats :
SCP Piwnica, Molinie, Mes Boullez, Ricard.
LA COUR : - Statuant sur les pourvois formés par : - La société X, - La société Y, - La société Z, contre l'ordonnance du Président du Tribunal de grande instance de Paris, en date du 30 mars 2000, qui a autorisé l'administration de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes à effectuer des opérations de visites et saisies de documents en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ; I - Sur les pourvois des sociétés X et Y : Vu les mémoires produits identiques à ces deux demanderesses ; Sur les premiers moyens de cassation, identiques à ces deux demanderesses, reprochant à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les perquisitions et saisies sollicitées, dans les locaux de plusieurs entreprises et notamment de la société et de la société Y ;
"aux motifs que cette requête nous est présentée à l'occasion d'une enquête relative au secteur des installations fixes pour chemins de fer, demandée par le ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie ; que par cette demande, en date du 24 mars 2000, ce dernier prescrit au Directeur Général de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, des investigations de nature à apporter la preuve des pratiques prohibées par les points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ;
"alors que l'exercice d'un droit de visite ne peut être autorisé que dans le cadre d'enquêtes demandées par le ministre chargé de l'Economie ou le Conseil de la concurrence ; que l'ordonnance attaquée se réfère à une demande du ministre de l'Economie, signée par le Directeur Général de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes, qui prescrit une enquête "en application du titre VI de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986", pour apporter la preuve de "pratiques prohibées" par l'article 7 de la même ordonnance, relatives au "fonctionnement de la concurrence dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer" ; qu'en autorisant l'exercice d'un droit de visite sur la base d'une demande d'enquête dont l'objet était ainsi indéterminé quant aux faits ou pratiques faisant l'objet de cette enquête, et qui abandonnait à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes le soin de déterminer les pratiques qui feraient l'objet de l'enquête, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986" ;
Les moyens étant réunis ; Attendu que l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 450-4 du Code de commerce, exigeant seulement que la demande de visite domiciliaire s'inscrive dans le cadre d'une enquête demandée par le ministre chargé de l'Economie, l'ordonnance attaquée, qui vise une telle demande d'enquête et autorise les investigations nécessaires à apporter la preuve de pratiques anticoncurrentielles dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer, notamment à l'occasion des marchés privés et soumis à appel d'offres, répond aux exigences du texte précité ; Que les moyens sont donc inopérants ;
Sur les deuxièmes moyens de cassation, identiques à ces deux demanderesses, reprochant à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les perquisitions et saisies sollicitées, dans les locaux de plusieurs entreprises et notamment de la société X et de la société Y ;
"aux motifs que sont annexés à la requête les documents suivants : (...) procès-verbal de déclaration et de communication de documents, dressé par Dominique X..., commissaire à la brigade interrégionale d'enquêtes Ile-de-France, Basse et Haute-Normandie à Paris, en application des articles 46 et 47 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986, de Georges Y..., ancien conducteur de travaux de la société Seco/DGC, en date du 28 juillet 1999 (4 pages), auquel sont joints les documents suivants : (...) liste des offres de prix surévaluées en 1997 (2 pages) ; liste des offres de prix surévalués par Z... en 97 et 98 (2 pages) ; (...) que les documents précités ont été obtenus de la manière suivante :
Le procès-verbal de Georges Y... a été établi dans les conditions prévues aux articles 46 et 47 de l'ordonnance précitée et à l'article 31 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986 ; que nous constatons que ce procès-verbal est bien signé par la personne ayant communiqué les documents et précise qu'un double lui a été remis ; qu'il mentionne la communication par l'intéressé des documents qui y sont annexés ;
1 ) "alors que le président du tribunal de grande instance, saisi d'une demande d'autorisation d'exercice d'un droit de visite, doit s'assurer que les éléments d'information qui lui sont soumis ont été obtenus et sont détenus de manière apparemment licite ; que ne peuvent être regardés comme obtenues de manière licite les déclarations recueillies dans le cadre d'une enquête diligentée en application des articles 45 et 47 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, lorsque le procès-verbal constatant ces déclarations ne mentionne pas que les enquêteurs ont fait loyalement connaître à la personne interrogée l'objet de leur enquête ; qu'en l'espèce, le Président du Tribunal de grande instance de Paris s'est notamment fondé sur les déclarations de Georges Y..., ancien conducteur de travaux de la société Seco/DGC, rapportées dans un procès-verbal mentionnant que l'enquête aurait eu pour objet, de manière générale, "la situation de la concurrence dans le secteur du matériel ferroviaire au regard des dispositions des titres III et IV de l'ordonnance du 1er décembre 1986" sans fournir aucune indication quant aux marchés, aux personnes et aux pratiques faisant en réalité l'objet de l'enquête ; qu'en affirmant que ce procès-verbal a été établi dans des conditions conformes à l'article 46 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 et à l'article 31 du décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a violé les dispositions susvisées, ensemble l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
2 ) "alors que le président du tribunal de grande instance, saisi d'une demande d'autorisation d'exercice d'un droit de visite, doit s'assurer que les éléments d'information qui lui sont soumis ont été obtenus et sont détenus de manière apparemment licite ; que ne peuvent être regardés comme obtenus de manière apparemment licite les documents remis à l'Administration par une personne qui ne les détient pas elle-même de manière apparemment régulière ; qu'en se fondant notamment, pour accorder l'autorisation sollicitée, sur des "listes d'offres de prix surévalués" par la société Seco/DGC, qui ne comportaient aucune indication de date ni de provenance, remis à l'administration de la concurrence par Georges Y..., ancien conducteur de travaux de la société Seco/DGC, sans rechercher si Georges Y... détenait ces documents relatifs à son ancien employeur de manière apparemment régulière, et si leur obtention par l'Administration pouvait être regardée comme licite, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986" ;
Les moyens étant réunis ; Attendu que les énonciations de l'ordonnance attaquée, reprises aux moyens, établissent que le président du tribunal a souverainement apprécié l'origine apparemment licite des pièces produites à l'appui de la requête, toute contestation, quant à la licéité de ces pièces, relevant du contentieux dont peuvent être saisies les juridictions éventuellement appelées à statuer sur les résultats de la mesure autorisée ; D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur les troisièmes moyens de cassation, identiques à ces deux demanderesses, reprochant à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les perquisitions et saisies sollicitées, dans les locaux de plusieurs entreprises et notamment de la société X et de la société Y ;
"aux motifs que les faits qui viennent d'être relevés concernant le secteur des installations fixes pour chemins de fer à la suite de l'examen de la requête et de ses annexes susvisés nous permettent de présumer des pratiques prohibées en application de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ; que la portée de ces présomptions doit être précisées au regard des qualifications prévues à l'article 7 de ladite ordonnance ; qu'il ressort du courrier adressé par Georges Y... à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes des Hauts-de-Seine du 30 mars 1999 que : "pour les appels d'offre sur les marchés publics et privés, je sais que les concurrents se retrouvent parfois dans les bureaux de l'entreprise pour se répartir les travaux et les montants à appliquer" ; que dans son courrier du 12 mai 1999 adressé à la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes des Hauts-et-Seine, Georges Y... affirme que : "pour le Port de Dunkerque. M. B... m'a donné l'ordre de ne pas démarcher, ce secteur appartenant à l'entreprise Lamblin, et ce en accord avec les sociétés Spie Drouard et Cogifer (...) Pour la plupart des appels d'offre publics ou privés, j'ai vu ces concurrents se réunir à Lens, bureau Seco/DGC, pour se répartir les clients et définir les prix pratiqués" ; que dans son procès-verbal du 28 juillet 1999, Georges Y... a déclaré à propos du marché concernant le port Autonome de Paris. "En ce qui concerne ce marché, les rencontres se sont faites à Lens, dans le bureau de M. B... , comme d'habitude. Ces rencontres se tiennent entre responsables de haut niveau, avec un ou deux responsables de chaque société (sociétés Cogifer, Drouard, Seco/DGC" ; que, dans son courrier du 18 novembre 1998, le contrôleur général des marchés de la SNCF relève : "cette note comporte des indications qui, comparées aux offres formulées par les autres soumissionnaires, établissent expressément l'existence d'une entente antérieure au dépôt des offres" ; qu en conclusion de sa note de synthèse du 4 décembre 1998, la SNCF, par l'intermédiaire du chef des installations ferroviaires pour le TGV Méditerranée, écrit :
"l'analyse croisée des propositions émises pour les trois chantiers nous laisse à penser à une entente généralisée entre les entreprises françaises" ; que dans sa note pour Réseau Ferré de France, le directeur de la ligne nouvelle TGV Méditerranée écrit : "Les négociations ont montré leur limite dans la mesure où LN5 ne disposait plus que d'une seule offre compétitive, les deux autres entreprises françaises s'étant retirées. Toutefois comme précédemment pour les lots de Cheval Blanc, je pense que les réponses à cet appel d'offres pourraient cacher une entente généralisée entre les entreprises. Le fait qu'il ait été si difficile de baisser le niveau des prix ne fait que corroborer cette impression" ; que les éléments ci-dessus laissent présumer l'existence d'une pratique concertée ; que la portée de ces présomptions doit être précisée au regard des qualifications prévues par l'article 7 points 2 et 4 de l'ordonnance précitée ; s'agissant du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance, les courriers et déclaration de Georges Y... font état d'un système de couverture d'offres publiques et privés mis en place par les intervenants du secteur et qui consistent en propositions particulièrement élevées d'entreprises concurrentes ou en présentation de dossier incomplètes ; que, responsable des embranchements privés chez Seco/DGC, Georges Y... a énuméré les marchés qui illustrent ce système ; que pour un appel d'offres Peugeot en 1993 à Hordain (59) d'environ 7 MF, les sociétés Seco/DGC et Cogifer ont décidé de couvrir la société Spie Drouard qui était le titulaire habituel des marchés Peugeot en général ; que le chef de centre de Lens avait annoncé "c'est un client Drouard, j'ai accepté de le couvrir, comme Cogifer " ; que, pour un appel d'offres Sollac Indre en 1994, un responsable de la société Cogifer a téléphoné au centre de Lens pour demander une offre de couverture qui a été acceptée ; que pour un appel d'offres du Port Autonome de Paris en 1994 de 3 MF pendant trois ans, le directeur du centre à Lens a décidé de couvrir la société Cogifer au motif que "c'est un Cogifer, je ne veux pas d'ennui" ; qu'une des contreparties de ces offres de couverture était que la Cokerie de Drocourt (62) reste un client privilégié de Seco/DGC, ce qui s'est vérifié ; que, pour un appel d'offres GEC Alsthom à La Rochelle en 1996, le centre de Lyon, de Seco/DGC remet un devis sans rapport avec l'estimation qui profite aux sociétés Cogifer et Spie Drouard ; que, pour l'appel d'offres Rhône-Poulenc à Saint-Fons (69) en 1997, Georges Y... (Seco/DGC) obtient le marché habituellement dévolu à la société Spie Drouard grâce à une résolution technique et maigre le prix arrêté par son chef de centre à Lyon ; que ce dernier, d'après Georges Y..., n'a pas permis la réalisation satisfaisante du chantier afin de faciliter le retour du titulaire habituel ; que, pour un appel d'offres du Port de Saint-Nazaire en 1997, seules trois entreprises ont répondu ; que les sociétés Spie Drouard et Cogifer ont pratiqué des prix à plus du double des moyens du marché ; que Seco/DGC a donc obtenu ce marché et réalisé une opération positive ; que pour un appel d'offres ABRF à Chateaubriand en 1998, Seco/DGC Lens titulaire en place ne répond pas afin de rendre ce client à la société Cogifer sans prendre le risque de la couverture habituelle ; que, pour un appel d'offres Sicapau à Lescar en 1998, le responsable de cette coopérative déclaré à Georges Y... traiter avec la société Cogifer pourtant plus cher de 8 % par rapport à Seco/DGC pour des motifs non révélés ; que, pour un appel d'offres à Tence Saint-Agrève (07), Georges Y... déclare que le responsable de centre de Lyon a supprimé deux pages de l'offre pour laisser la société Spie Drouard obtenir le marché ; que, pour un appel d'offres Maisadour Haut-Mauco en 1998, après avoir évalué le projet à 558 000 francs, Georges Y... apprend que le devis a en fait été proposé à plus de 800 000 francs pour quelques modifications supplémentaires apportées par le centre de Lyon ; que, pour un appel d'offres Etamat à Clermont-Ferrand en 1998, Georges Y... effectue ses relevés, estime le marché à 399 500 francs et transmet sa proposition à Lyon ; il apprend auprès du maître d'œuvre que la société Seco a soumissionné à 551 000 francs et est donc hors course ; qu'il apparaît ainsi que les offres de couverture et les majorations de devis sont constatées systématiquement entre les sociétés Seco/DGC, Cogifer, Spie Drouard et Lamblin ; que la liste des offres de prix surévalués en 1997 et 1998 semble illustrer cette systématisation ; que Georges Y... a informé sans résultat par courrier le directeur général de la société Seco/DGC des agissements des responsables de centre à Lens et Lyon ; que ceci semble accréditer une politique générale d'offre de couverture menée par l'entreprise ; que, dans le cadre de marchés publics, concernant le marché de travaux de voie d'un tunnel sur la ligne Brive-Toulouse, la note manuscrite de l'entreprise Seco/DGC fait apparaître que les sociétés Z et Cogifer lui ont fourni chacune une offre de couverture, les majorations portées sur ce document correspondant aux offres officielles postérieures ; que les marchés de pose de voie sur la ligne nouvelle du TGV Méditerranée font apparaître un niveau élevé de l'offre du second moins disant, qui laisse le moins disant à l'abri malgré une offre très élevée par rapport au prix de référence ; que les négociations ont montré leur limite dans la mesure où l'offre d'une seule entreprise restait en lice, les deux autres entreprises françaises s'étant retirées ; qu'aucune justification claire et argumentée des prix proposés par les entreprises, correspondants à des augmentations de 10 % par rapport à des chantiers précédents, n'a été produite malgré les demandes de la SNCF et de RFF ; que les soupçons de la SNCF, portant sur la volonté d'opacité des entreprises sur le niveau de leur prix, sans raison justifiant de telles augmentations, sont issus du fait que chacune de ces entreprises refusait de rentrer dans l'analyse des prix unitaires sujets à caution pour en rester à un coût global qui ne pouvait être modifié ; qu'il a été relevé des incohérences et des surévaluations pour le marché du Cheval Blanc pour les postes pose de voie, pose d'appareils et libération des contraintes ; que pour le marché Tunnel à Marseille la SNCF s'est heurtée à "une démarche orchestrée, pour rendre encore plus opaque la recherche de prix réel pour les travaux de voie" que de l'avis du contrôle général des marchés, les éléments fournis par les entreprises X Z, Seco/DGC, Spie Drouard et Cogifer, n'ont fait que confirmer le niveau anormalement élevé des offres, bien que le prix de référence ait été réajusté ; que l'ensemble de ces éléments laisse présumer l'existence de pratiques visant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence et qui nous semblent prohibées au sens du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée ; que, s'agissant du point 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ; que les offres de couvertures énumérées par Georges Y... dans ses courriers et déclarations ont pu "également contribuer à la répartition des marchés entre concurrents que cette répartition a pu consister en une répartition géographique ; qu'ainsi, pour un appel d'offres du Port de Dunkerque et pour tout le département du Nord, interdiction a été faite à Georges Y... de démarcher ce secteur, secteur appartenant à l'entreprise Lamblin, ceci en accord avec les sociétés Spie Drouard et Cogifer ; que l'une des contreparties de ces offres de couverture était que la cokerie de Drocourt (62) reste un client privilégié de la société Seco/DGC ce qui s'est vérifié ; que la répartition des marchés s'est aussi traduite par une répartition de clientèle ; que la société Cogifer semble avoir bénéficié d'offres de couverture pour les marchés port autonome de Paris et Sollac Indre ; que la société Spie Drouard semble avoir bénéficié d'offres de couverture de la part de ses concurrents pour les marchés Peugeot à Hordain et de Tence Saint-Agrève ; que la société Seco/DGC semble avoir bénéficié d'offres de couverture pour les marchés Cookerie de Drocourt, port autonome de Saint-Nazaire et tunnel sur la ligne Brive-Toulouse que Georges Y... précise dans son procès-verbal que pour le marché Peugeot à Hordain les sociétés Seco/DGC et Cogifer ont décidé de couvrir la société Spie Drouard qui était le titulaire habituel des marchés Peugeot il a su au cours d'une réunion informelle dans le bureau de M. B... que la contrepartie était de 1 700 000 francs sur un marché SNCF ; que dans sa chronologie chez Seco/DGC, Georges Y... mentionne que lors d'une réunion informelle entre M. A... , le chef de centre et lui-même, il a appris que la société Spie Drouard avait échangé l'affaire Peugeot Hordain contre 1,7 MF de travaux SNCF pour la société Seco/DGC, et que la société Cogifer avait promis un arrangement en remerciement du PAP (Port Autonome de Paris ; qu'en conclusion de sa note de synthèse du 4 décembre 1998, la SNCF, par l'intermédiaire du chef des installations ferroviaires pour le TGV Méditerranée, écrit : "L'analyse croisée des propositions émises pour les trois chantiers nous laisse à penser à une entente généralisée entre les entreprises françaises. Le "partage" des lots n'a pas évolué au cours des négociations ( X sur Cheval Blanc, Z sur le tunnel et in fine Seco/DGC sur Eurré, X ayant clairement fait savoir ne pas pouvoir réaliser les deux lots simultanément), avec des prix qui varient par entreprise d'une proposition à l'autre par nature d'ouvrage, et dont le niveau élevé de l'offre du second mieux disant laisse le mieux disant à l'abri avec un niveau très élevé" ; qu'X est une filiale commune aux sociétés Spie Drouard et Cogifer, ce qui implique ces deux sociétés ; que les documents précédemment décrits laissent supposer qu'il existe une entente visant à se répartir les marchés, au sens du point 4 de l'article 7 ; qu'ainsi la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues aux points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ; que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ;
1 ) "alors que le président du tribunal de grande instance ne peut autoriser l'Administration requérante à effectuer des perquisitions et saisies que dans la mesure où les infractions qu'elles sont destinées à établir peuvent être présumées que, s'agissant d'une atteinte au principe d'inviolabilité du domicile, qui figure parmi les libertés fondamentales protégées par la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales, les faits relevés doivent permettre de présumer, concrètement, les infractions aux dispositions de l'ordonnance du 1er décembre 1986 qu'en se fondant, pour présumer les infractions alléguées sur la circonstance selon laquelle les offres de prix étaient élevées par rapport au "prix objectif", le Président du Tribunal de grande instance de Paris s'est prononcé par des motifs dont il ne ressortait pas, concrètement, qu'une entente pourrait être présumée entre les entreprises soumissionnaires, et a ainsi violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2 ) "alors que le président du tribunal de grande instance doit vérifier concrètement que les éléments d'information qui lui sont présentés font effectivement présumer les infractions alléguées ; qu'en se fondant, pour affirmer que des infractions aux points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 pouvaient être présumées, sur les déclarations d'un ancien salarié licencié par l'une des entreprises participant aux marchés concernés, sans rechercher si le désir de vengeance dont ce salarié avouait être animé ne rendait pas suspectes ses déclarations, le Président du Tribunal de grande instance de Paris n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de vérifier que le contrôle judiciaire prévu par l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 a été exercé, privant ainsi sa décision de base légale au regard de ce texte et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les moyens, qui ne tendent qu'à remettre en question la valeur des éléments retenus par le juge comme présomptions d'agissements frauduleux justifiant la recherche de leur preuve par la mesure autorisée, doivent être écartés ;
II - Sur le pourvoi de la société Z : Vu le mémoire produit ; Sur le premier moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de six entreprises, parmi lesquelles la société Z, en vue de rechercher si les pratiques relevées, dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer, notamment à l'occasion des marchés privés et soumis à appel d'offres, entraient dans le champ de celles prohibées par les points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
"aux motifs que "la portée de ces présomptions doit être précisée au regard des qualifications prévues par l'article 7 points 2 et 4 de l'ordonnance précitée ; s'agissant du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance ; que les courriers et déclaration de Georges Y... font état d'un système de couverture des appels d'offres publics et privés mis en place par les intervenants du secteur et qui consiste en propositions particulièrement élevées d'entreprises concurrentes ou en présentation de dossier incomplet ; que, responsable des embranchements privés chez Seco/DGC, Georges Y... a énuméré les marchés qui illustrent ce système ; que pour un appel d'offres Peugeot en 1993 à Hordain (59) d'environ 7 MF, les sociétés Seco/DGC et Cogifer ont décidé de couvrir la société Spie Drouard qui était le titulaire habituel des marchés Peugeot en général ; que le chef de centre de Lens avait annoncé "c'est un client Drouard, j'ai accepté de le couvrir, comme Cogifer" ; que pour un appel d'offres Sollac Indre en 1994, un responsable de la société Cogifer a téléphoné au centre de Lens pour demander une offre de couverture qui a été acceptée ; que pour un appel d'offres du Port Autonome de Paris en 1994 de 3 MF pendant trois ans, le directeur du centre à Lens a décidé de couvrir la société Cogifer au motif que "c'est un client Cogifer, je ne veux pas d'ennui" ; qu'une des contreparties de ces offres de couverture était que la Cookerie de Drocourt (62) reste un client privilégié de la société Seco/DGC, ce qui s'est vérifié ; que, pour un appel d'offres GEC Alsthom à La Rochelle en 1996, le centre de Lyon de la société Seco/DGC remet un devis sans rapport avec l'estimation qui profite aux sociétés Cogifer et Spie Drouard ; que pour l'appel d'offres Rhône-Poulenc à Saint-Fons (69) en 1997, Georges Y... (Seco/DGC) obtient le marché habituellement dévolu à la société Spie Drouard grâce à une solution technique et malgré le prix arrêté par son chef de centre à Lyon ; que ce dernier, d'après Georges Y..., n'a pas permis la réalisation satisfaisante du chantier afin de faciliter le retour du titulaire habituel ; que, pour un appel d'offres du Port de Saint-Nazaire en 1997, seules trois entreprises ont répondu ; que les sociétés Spie Drouard et Cogifer ont pratiqué des prix à plus du double des prix moyens du marché ; que la société Seco/DGC a donc obtenu ce marché et réalisé une opération positive ; que pour un appel d'offres ABRF à Châteaubriand en 1998, la société Seco/DGC Lens titulaire en place ne répond pas afin de rendre ce client à la société Cogifer sans prendre le risque de la couverture habituelle ; que, pour un appel d'offres Sicapau à Lescar en 1998, le responsable de cette coopérative a déclaré à Georges Y... traiter avec la société Cogifer pourtant plus cher de 8 % par rapport à l'offre Seco/DGC pour des motifs non révélés ; que pour un appel d'offres à Tence Saint-Agrève (07) Georges Y... déclare que le responsable de centre de Lyon a supprimé deux pages de l'offre pour laisser la société Spie Drouard obtenir le marché ; que, pour un appel d'offres Maisadour Haut Mauco en 1998, après avoir évalué le projet à 558 000 francs. Georges Y... apprend que le devis a, en fait, été proposé à plus de 800 000 francs pour quelques modifications supplémentaires apportées par le centre de Lyon ; que, pour un appel d'offres Etamat à Clermont-Ferrand en 1998, Georges Y... effectue ses relevés, estimé le marché à 399 500 francs, et transmet sa proposition à Lyon ; il apprend auprès du maître d'œuvre que la société Seco a soumissionné à 551 000 francs, et est donc hors course ; qu'il apparaît ainsi que les offres de couverture et les majorations de devis sont constatées systématiquement entre les sociétés Seco/DGC, Cogifer, Spie Drouard et Lamblin ; que la liste des offres de prix surévalués en 1997 et 1998 semble illustrer cette systématisation ; que Georges Y... a informé sans résultat par courrier le directeur général de la société Seco/DGC des agissements des responsables de centre à Lens et Lyon ; que ceci semble accréditer une politique générale d'offre de couverture menée par l'entreprise ; que, dans le cadre de marchés publics, concernant le marché de travaux de voie d'un tunnel sur la ligne Brive-Toulouse, la note manuscrite de l'entreprise Seco/DGC fait apparaître que les sociétés Z et Cogifer lui ont fourni chacune une offre de couverture, les majorations portées sur ce document correspondant aux offres officielles postérieures ; que les marchés de pose de voie sur la ligne nouvelle du TGV Méditerranée font apparaître un niveau élevé de l'offre du second moins disant, qui laisse le moins disant à l'abri malgré une offre très élevée par rapport au prix de référence ; que les négociations ont montré leur limite dans la mesure où l'offre d'une seule entreprise restait en lice, les deux autres entreprises françaises s'étant retirées ; qu'aucune justification claire et argumentée des prix proposés par les entreprises, correspondants à des augmentations de 10 % par rapport à des chantiers précédents, n'a été produite malgré les demandes de la SNCF et de RFF ; que les soupçons de la SNCF, portant sur la volonté d'opacité des entreprises sur le niveau de leur prix, sans raison justifiant de telles augmentations, sont issus du fait que chacune de ces entreprises refusait de rentrer dans l'analyse des prix unitaires sujets à caution pour en rester à un coût global qui ne pouvait être modifié ; qu'il a été relevé des incohérences et des surélévations pour le marché du Cheval Blanc pour les postes pose de voie, pose d'appareils et libération des contraintes ; que pour le marché Tunnel à Marseille, la SNCF s est heurtée à "une démarche orchestrée pour rendre encore plus opaque la recherche de prix réel pour les travaux de voie" ; que de l'avis du contrôle général des marchés, les éléments fournis par les entreprises X , Z, SecoIDGC, Spie Drouard et Cogifer, n'ont fait que confirmer le niveau anormalement élevé des offres, bien que le prix de référence ait été réajusté ; que l' ensemble de ces éléments laisse présumer l'existence de pratiques visant à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu de la concurrence et qui nous semblent prohibées au sens du point 2 de l'article 7 de l'ordonnance précitée ; que s'agissant du point 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée, les offres de couvertures énumérées par Georges Y... dans ses courriers et déclarations ont pu également contribuer à la répartition des marchés entre concurrents ; que cette répartition a pu consister en une répartition géographique ; qu'ainsi, pour un appel d'offres du Port de Dunkerque et pour tout le département du Nord, interdiction a été faite à Georges Y... de démarcher ce secteur, secteur appartenant à l'entreprise Lamblin, ceci en accord avec les sociétés Spie Drouard et Cogifer ; qu'une des contreparties de ces offres de couverture était que la Cookerie de Drocourt (62) reste un client privilégié de la société Seco/DGC, ce qui s'est vérifié ; que la répartition des marchés s'est ainsi traduite par une répartition de clientèle ; que la société Cogifer semble avoir bénéficié d'offres de couverture de la part de ses concurrents pour les marchés Port Autonome de Paris et Sollac Indre ; que la société Spie Drouard semble avoir bénéficié d'offres de couverture de la part de ses concurrents pour les marchés Peugeot à Hordain et de Tence Saint-Agrève ; que la société SecoIDGC semble avoir bénéficié d'offres de couverture de la part de ses concurrents pour les marchés Cookerie de Drocourt, Port Autonome de Saint-Nazaire et tunnel sur la ligne Brive-Toulouse ; que, Georges Y... précise dans son procès-verbal que pour le marché Peugeot à Hordain les sociétés Seco/DGC et Cogifer ont décidé de couvrir la société Spie Drouard qui était le titulaire habituel des marchés Peugeot ; qu'il a su, au cours d'une réunion informelle par M. B... que la contrepartie était de 1 700 000 francs sur un marché SNCF ; que dans sa chronologie chez Seco/DGC, Georges Y... mentionne que, lors d'une réunion informelle entre M. A... , le chef de centre et lui-même, il a appris que la société Spie Drouard avait échangé l'affaire Peugeot-Hordain contre 1,7 MF de travaux SNCF pour la société Seco/DGC, et que la société Cogifer avait promis un arrangement en remerciement du PAP (Port Autonome de Paris) ; qu'en conclusion de sa note de synthèse du 4 décembre 1998, la SNCF par l'intermédiaire du chef des installations ferroviaires pour le TGV Méditerranée, écrit : "l'analyse croisée des propositions émises pour les trois chantiers nous laisse à penser à une entente généralisée entre les entreprises françaises ; le "partage" des lots n'a pas évolué au cours des négociations ( X sur Cheval Blanc, Z sur le tunnel et in fine Seco/DGC sur Eurré, X ayant clairement fait savoir ne pas pouvoir réaliser les deux lots simultanément), avec des prix qui varient par entreprise d'une proposition à l'autre par nature d'ouvrage, et dont le niveau élevé de l'offre du second mieux disant laisse le mieux disant à l'abri avec un niveau très élevé" ; qu'X est une filiale commune aux sociétés Spie Drouard et Cogifer, ce qui implique ces deux sociétés ; que les documents précédemment décrits laissent supposer qu'il existe une entente visant à se répartir les marchés, au sens du point 4 de l'article 7 ; qu'ainsi, la portée de nos présomptions est suffisante au regard des qualifications prévues aux points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance susvisée ; "que la recherche de la preuve de ces pratiques nous apparaît justifiée ; qu'il convient en conséquence, de déterminer les lieux où s'effectueront les visites ; que les sociétés Seco/DGC, Cogifer, Spie Drouard, Lamblin, X et Z nous semblent impliquées dans les pratiques présumées ; que les agences Seco/DGC à Nanterre, Lens et Lyon, les agences Cogifer à Vitrolles et Saint-André ainsi que l'agence Lamblin à Lambersart semblent avoir pris une part déterminante dans la mise en œuvre de ces pratiques ; que les adresses de ces entreprises sont indiquées dans les documents ci-dessus décrits ; qu'il convient par conséquent, d'y autoriser la visite afin de saisir des documents nécessaires à la preuve des pratiques ; que les faits ci-dessus relevés nous permettent de présumer des pratiques prohibées ; que ces pratiques nous conduisent à autoriser la visite dans les locaux de plusieurs entreprises ; qu'il est en conséquence nécessaire de permettre aux enquêteurs d'intervenir simultanément dans ces locaux afin d'éviter la disparition ou la dissimulation d'éléments matériels ; que la pluralité des locaux à visiter nécessite la collaboration des brigades interrégionales d'enquêtes à Marseille, Lille, Paris et Lyon, dont les circonscriptions administratives sont incluses dans celle de la direction nationale des enquêtes de concurrence ; que MM. C..., D..., E... et F... sont tous titulaires de l'un des grades prévus à l'article 1er du décret du 2 août 1995 ; qu'ils sont en conséquence, fonctionnaires de catégorie A, et qu'ils sont habilités pour procéder aux opérations prévues à l'article 48 susvisé, en application de l'article 2 de l'arrêté du 22 janvier 1993 ;
1 ) "alors que le juge qui autorise une visite domiciliaire, doit en limiter l'objet à des appels d'offre ou à des marchés précis et déterminés ; qu'il est constant que la société Z était soupçonnée d'avoir participé à une entente prohibée, à l'occasion de l'attribution par la SNCF, de deux marchés de travaux publics, portant l'un sur les travaux de voies passant sous un tunnel de la ligne Brive-Toulouse, et l'autre sur la construction de la ligne nouvelle du TGV Méditerranée, depuis les bases d'"Eurré" et du "Cheval Blanc" ; qu'en permettant à l'Administration de procéder à toutes les investigations nécessaires à rapporter la preuve de pratiques anticoncurrentielles, "notamment à l'occasion des marchés privés, et soumis à appels d'offres", tout en retenant à l'encontre de la société Z, des présomptions circonscrites à l'attribution par la SNCF, de deux marchés de travaux publics, le président du tribunal a autorisé une visite ayant un objet général, en ce qui concerne les appels d'offre sur lesquels pouvaient porter les recherches ; qu'ainsi, il a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
2 ) "alors qu'en autorisant l'Administration à porter ses recherches sur les marchés privés et soumis à appels d'offre, "notamment", le Président du Tribunal de grande instance de Paris n'a pas exclu toute interprétation de son ordonnance qui permette aux agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes d'étendre leurs investigations à d'autres marchés que "les marchés privés et soumis à appels d'offre" qu'il a cités "notamment", c'est-à-dire, à titre particulier, en tant qu'ils font partie d'un ensemble sous-entendu ; qu'en laissant ainsi subsister une telle incertitude sur l'étendue de la visite qu'il autorise, le président du tribunal qui a mis la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle, a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
3 ) "alors que le juge doit caractériser les pratiques anticoncurrentielles présumées qu'il est constant que la société Z était soupçonnée d'avoir participé à une entente, à l'occasion de la passation de deux marchés de travaux publics qu'en autorisant l'Administration à pratiquer à des visites et saisies, dans les locaux de la société Z, afin de rapporter la preuve de pratiques prohibées, à l'occasion de marchés privés et soumis à appels d'offres, sans caractériser à l'encontre de la société Z, aucune présomption, à l'occasion de la passation de tels marchés privés, le président du tribunal a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
4 ) "alors que le juge peut autoriser l'Administration à procéder à une visite simultanée dans des lieux situés en dehors de son ressort, à la condition qu'elle soit motivée par des présomptions d'agissements communs ; qu'il est constant que les présomptions pesant sur la société Z concernaient la passation de deux marchés de travaux publics, tandis que les autres entreprises visées étaient également soupçonnées d'avoir participé à une entente, à l'occasion de l'attribution de marchés privés ; qu'en s'abstenant de justifier l'exercice d'une action simultanée par d'autres considérations que la nécessité d'éviter la disparition des éléments de preuve, quand il appartient au juge qui autorise une visite simultanée, de constater existence d'agissements communs à toutes les entreprises visées, a l'occasion de la passation des mêmes marchés, le président du tribunal a violé l'article 48, alinéa 1er, de l'ordonnance du 1er décembre 1986" ;
Attendu, d'une part, qu'en autorisant la visite des locaux de six sociétés sur lesquelles pèsent des présomptions d'entente pour se répartir les marchés dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer, le président du tribunal n'a pas délivré une autorisation indéterminée, son ordonnance ne permettant pas aux agents de l'Administration d'étendre leur recherche à des faits sans rapport avec ceux qu'il a retenus ;
Attendu, d'autre part, que le moyen, dans sa troisième et quatrième branches, ne tend qu'à remettre en question la valeur des éléments retenus par le juge comme présomptions d'agissements frauduleux justifiant la recherche de leur preuve par la mesure autorisée ; Que le moyen n'est ainsi pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de six entreprises, parmi lesquelles la société Z, en vue de rechercher si les pratiques relevées, dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer, notamment à l'occasion des marchés privés et soumis à appel d'offres, entraient dans le champ de celles prohibées par les points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, et d'avoir donné commission rogatoire aux présidents des tribunaux de grande instance d'Aix-en-Provence, Béthune, Lille, Lyon, Meaux, Nanterre, Pontoise et Versailles, pour qu'ils contrôlent les opérations devant se dérouler dans le ressort de leur juridiction respective, et qu'ils désignent les officiers de police judiciaire territorialement compétents ;
"alors que le juge qui autorise la visite domiciliaire, est tenu de désigner lui-même les officiers de police judiciaire, qui doivent y assister, même lorsqu'elle se déroule dans le ressort d'une autre juridiction qui tient seulement de l'article 48, alinéa 3, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, le seul pouvoir d'en contrôler l'exécution, après avoir reçu commission rogatoire, à cette fin ; qu'en abandonnant aux présidents des tribunaux de grande instance auxquels il délivrait commission rogatoire, le soin de désigner les officiers de police judiciaire chargés d'assister aux visites se déroulant dans leur ressort, le président du tribunal qui a méconnu l'étendue de sa compétence, a violé la disposition précitée" ;
Attendu qu'en donnant aux présidents des tribunaux de grande instance, auxquels il délivrait commission rogatoire pour exercer le contrôle des opérations autorisées, le soin de désigner les officiers de police judiciaire chargés d'assister aux visites se déroulant dans leur ressort, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a fait l'exacte application de l'article 48, alinéa 3, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 450-4 du Code de commerce ; Qu'en effet, en application de ce texte, lorsque les opérations de visite et de saisie doivent avoir lieu en dehors du ressort du tribunal de grande instance dont le président est l'auteur de l'ordonnance d'autorisation, celui-ci doit délivrer une commission rogatoire pour exercer le contrôle des opérations au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite et qui, en conséquence, devra désigner les officiers de police judiciaire territorialement compétents ; D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, faisant grief à l'ordonnance attaquée d'avoir autorisé les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes à effectuer une visite et des saisies de documents dans les locaux de six entreprises, parmi lesquelles la société Z, en vue de rechercher si les pratiques relevées, dans le secteur des installations fixes pour chemins de fer, notamment à l'occasion des marchés privés et soumis à appel d'offres, entraient dans le champ de celles prohibées par les points 2 et 4 de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, d'avoir donné commission rogatoire aux présidents des tribunaux de grande instance d'Aix-en-Provence, Béthune, Lille, Lyon, Meaux, Nanterre, Pontoise et Versailles, pour qu'ils contrôlent les opérations devant se dérouler dans le ressort de leur juridiction respective, et qu'ils désignent les officiers de police judiciaire territorialement compétents, et d'avoir indiqué que les entreprises concernées peuvent nous saisir jusqu'à la fin des opérations de visite et de saisie ;
1) "alors que la contestation par les entreprises concernées, du déroulement de la visite, relève de la compétence exclusive du juge qui a reçu commission rogatoire, afin d'en contrôler l'exécution ; qu'en décidant que les entreprises visées par l'ordonnance autorisant la visite, pourraient le saisir de toute contestation relative au déroulement de l'opération, après avoir donné commission rogatoire aux présidents des tribunaux de grande instance d'Aix-en-Provence, Béthune, Lille, Lyon, Meaux, Nanterre, Pontoise et Versailles, afin de contrôler le déroulement des opérations qui devaient se dérouler dans leur ressort, le président du tribunal a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;
2) "alors que l'indication par le juge autorisant la visite domiciliaire, d'une voie de recours erronée porte nécessairement atteinte aux intérêts des entreprises concernées ; qu'en les invitant à le saisir de toute contestation relative au déroulement des opérations, bien qu'il soit incompétent, le président du tribunal a violé l'article 48 de l'ordonnance du 1er décembre 1986, ensemble les droits de la défense" ;
Et sur le même moyen relevé d'office pour la société Y ; Les moyens étant réunis ; Vu l'article 48, alinéa 3, de l'ordonnance du 1er décembre 1986, devenu l'article L. 450-4, alinéa 3, du Code de commerce ;Attendu que, selon ce texte, la visite et la saisie s'effectuent sous l'autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées et, que, lorsqu'elles ont lieu en dehors du ressort de son tribunal de grande instance, ce magistrat délivre une commission rogatoire pour exercer ce contrôle au président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel s'effectue la visite ;
Attendu qu'en indiquant que les entreprises pouvaient le "saisir jusqu'à la fin des opérations de visite et de contrôle", alors qu'il venait de donner commission rogatoire à cette fin aux présidents des tribunaux d'Aix-en-Provence, Béthune, Lille, Lyon, Meaux, Nanterre, Pontoise et Versailles pour les opérations devant se dérouler dans leur ressort, le Président du Tribunal de Paris a excédé ses pouvoirs et violé le texte susvisé ;D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, Casse et annule, par voie de retranchement, l'ordonnance susvisée du Président du Tribunal de grande instance de Paris, en date du 30 mars 2000, en ses seules dispositions par lesquelles le président s'est réservé le contrôle des opérations devant se dérouler dans le ressort des tribunaux de grande instance d'Aix-en-Provence, Béthune, Lille, Lyon, Meaux, Nanterre, Pontoise et Versailles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ni de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ; Ordonne l'impression de l'arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du Tribunal de grande instance de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement annulée.